KICÉKIKONÉ, le podcast par un média, pour les médias, sur les médias.… by Havas Edition.
Les tendances de la communication expliquées par Pauline Lenglart et Charlotte Rosati.
Les tendances de la communication expliquées par Pauline Lenglart et Charlotte Rosati.
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00:00Avace édition, en partenariat avec Innovate, présente
00:07Qui sait qui connaît, le podcast par un média, pour les médias, sur les médias.
00:16Bonjour à tous.
00:17Bienvenue dans ce nouvel épisode de Qui sait qui connaît,
00:19consacré aujourd'hui aux macro-tendances de la communication.
00:22Et pour en parler, j'ai le plaisir aujourd'hui d'avoir deux invités,
00:26Pauline et Charlotte.
00:27Bonjour à toutes les deux.
00:28Bonjour. Bonjour.
00:30Est-ce que vous pourriez nous dire en quelques mots,
00:32avant que l'on explore avec vous toutes ces tendances,
00:35quel est votre rôle au sein du groupe Avace ?
00:37Alors, je suis Charlotte Rosazzi.
00:38Je suis consultante senior en stratégie de marque.
00:41Et moi, je suis Pauline Langlard.
00:43Et du coup, je suis consultante en stratégie de marque
00:46avec Charlotte au sein du pôle consulting du Cortex.
00:49Et alors, comment en êtes-vous arrivée à ces postes ?
00:51Quel a été votre parcours professionnel ?
00:53En quelques mots.
00:54Moi, ma carrière, du coup, ça a été assez rapide
00:56puisqu'en vrai, tout se passe un peu chez Avace.
00:58J'ai commencé par étudier le droit public et la science politique à la fac.
01:02Ensuite, j'ai intégré un master en école de commerce à l'EDEC.
01:06Et pendant mon master, du coup, j'ai fait un stage en agence de communication.
01:10C'était une toute petite agence, donc rien à voir avec ici,
01:12qui était spécialisée dans le CRM et le digital.
01:14Donc, pas du tout stratégie à l'époque, plutôt la gestion de projets
01:19et un peu de conception rédaction aussi.
01:20Je faisais des petites blagues dans des newsletters.
01:23Et enfin, rien à voir avec maintenant,
01:24mais c'est là que j'ai découvert le monde de l'agence
01:26et que j'ai compris que j'avais envie de travailler et d'évoluer dans ce milieu-là.
01:30Donc, j'ai rejoint ensuite Avace pour mon stage de fin d'études.
01:34Et vous, Charlotte ?
01:35Moi, de mon côté, j'ai une licence en histoire de l'art.
01:38Je suis un master en lettres modernes et enfin un M2 du CELSA,
01:42qui est une grande école de communication qui est rattachée à la sermone.
01:47Et c'est là-bas que j'ai découvert le métier de planeur stratégique,
01:50que j'ai exercé une fois diplômée.
01:52D'abord dans une première agence créative,
01:55puis ensuite dans une agence slash cabinet de conseil un peu plus hybride,
01:59où j'ai pu travailler sur des problématiques un peu plus variées,
02:02comme notamment des problématiques de naming, de prospective, de semiotique.
02:07Et donc, j'ai rejoint le Cortex Avace au même moment que Pauline,
02:10il y a deux ans et demi maintenant,
02:12pour constituer ce fameux pôle consulting et pour y importer toutes ces expertises
02:17complémentaires finalement au métier de planeur stratégique.
02:20Et donc, vous faites partie du Cortex.
02:22Est-ce que vous pouvez nous expliquer
02:23quelles sont les expertises justement et les spécificités du Cortex
02:27au sein du groupe Avace ?
02:28Le Cortex, c'est un modèle un peu unique.
02:30Je ne suis pas sûre qu'il y en ait d'autres dans les autres agences de com,
02:32en tout cas, pas qu'on sache vraiment.
02:34Mais du coup, c'est un peu le modèle village d'Avace
02:36qui est appliqué aux différents plannings stratégiques d'Avace.
02:39Donc, c'est une entité qui va réunir tous les experts,
02:42à la fois de la marque, des cibles, des études et de stratégies
02:46au sens un peu plus large du groupe Avace et de toutes ces différentes entités,
02:49aussi bien pour la France que pour l'international.
02:52Je crois que c'est à peu près 70 personnes avec qui on échange.
02:56On peut récupérer les expertises de chacun,
02:58les matières qu'ils produisent, ce qu'ils créent, etc. au quotidien.
03:01Donc, c'est un partage de savoirs un peu.
03:04Donc, vous centralisez tous ces savoirs justement et ces expertises
03:06qui vous donnent encore plus de force pour accompagner les marques de l'agence.
03:10C'est ça. On a des expertises à peu près sur tout.
03:12Quelle que soit la problématique,
03:13on sait qu'il y a quelqu'un à qui on peut poser la question.
03:16Alors justement, vous menez de nombreuses études au sein du Cortex,
03:19notamment pour analyser et décrypter les tendances.
03:22Est-ce que vous pourriez nous dire en fait, une tendance, c'est quoi ?
03:25Grande question.
03:27Alors déjà, une tendance n'est pas comme certaines personnes pourraient le penser
03:30en termes qui est exclusif à l'univers de la mode, des défilés.
03:33Et je pense aussi à toutes les tendances TikTok avec les esthétiques, les corps, etc.
03:38Alors évidemment, une tendance, elle peut être esthétique, mais pas que.
03:41Elle peut être émotionnelle, elle peut être intellectuelle,
03:44elle peut même être spirituelle.
03:45Et je pense qu'une définition assez basique, ce serait de dire que c'est
03:48comme la direction dans laquelle quelque chose tend à se déplacer.
03:51C'est une inclinaison qui, en fait, derrière, va avoir des conséquences
03:55et un impact sur la culture, la société, nos comportements, à tous.
04:00Donc finalement, c'est un changement de feuille de route.
04:03C'est ça, un changement de feuille de route qui s'applique à n'importe quel domaine,
04:06comme vous le disiez, pas que la mode.
04:07Absolument, ce quelque chose qui se déplace, ça peut être absolument tout.
04:10Et alors, comment vous réussissez à l'identifier ?
04:12Est-ce que vous avez des outils ou des méthodologies spécifiques
04:14pour réussir à identifier les tendances émergentes ?
04:17Alors oui, on a toute une boîte à outils pour se faire.
04:19Déjà, je dirais qu'après, c'est notre métier aussi,
04:21mais c'est de se documenter en permanence,
04:24déjà pour comprendre tout ce qui est en train de se passer autour de nous,
04:26dans la société, les cultures, les contre-cultures,
04:29tous les mouvements qu'on va pouvoir repérer.
04:32Et puis surtout, identifier ce qu'on appelle dans notre jargon des signaux faibles.
04:36Un signal faible, en fait, c'est une information précoce de faible intensité,
04:40un peu niche, on peut dire, qui va venir annoncer une tendance,
04:44une menace ou une opportunité.
04:46Donc, on essaie de justement glaner ces signaux faibles,
04:48des anomalies, des petites perturbations,
04:51vraiment à leur stade le plus embryonnaire possible
04:53pour essayer d'aller trouver ce qui se trame pour demain.
04:57Après, on observe aussi beaucoup les comportements de consommateurs.
05:00On regarde du coup surtout les profils d'innovateurs,
05:03ce qu'on peut appeler les early adopters,
05:05qui souvent vont être à l'origine de la tendance, c'est eux qui la façonnent.
05:10Et puis, ça peut être des choses aussi simples que d'aller voir
05:13les expositions du moment,
05:15essayer de repérer tous ces thèmes qui sont assez en vogue
05:18ou au contraire, justement, ceux qui sont un peu en sous-texte
05:21et qui pourront émerger demain,
05:22aller voir des films dans des festivals de création émergente,
05:26essayer d'anticiper en allant voir ce qui se fait un peu à la marge, souvent.
05:31Et puis, on a aussi, nous, on puise dans beaucoup de rapports préexistants
05:35et qui sont souvent créés et pensés par des agences,
05:37donc c'est aussi le cœur de métier.
05:39Je pense à de futures laboratories,
05:41le rapport annuel Futur 100 de VML, qui est une ligne d'or,
05:45Contagious, le collectif de futuristes Radar,
05:49mais aussi des newsletters qu'on aime bien aller regarder,
05:52dans lesquels il y a toujours des choses intéressantes à aller piocher.
05:55Je citerai ici, par exemple, le burn after reading de Morning,
05:59mais aussi notre propre newsletter du Cortex.
06:03Et puis, voilà, des TED Talks, être à l'affût, être ouvert, être curieux.
06:07C'est ça, donc, avoir toujours ces sens en éveil
06:09et essayer de capter l'air du temps en permanence.
06:11Donc, ça, c'est votre métier.
06:12Donc, une fois que vous les avez identifiés, ces tendances,
06:14vous devez les analyser, j'imagine, les décrypter.
06:17Comment vous vous y prenez pour bien les décrypter, justement ?
06:20Alors, nous, on a notre petite méthode à nous, en général,
06:23pour vraiment voir si c'est une tendance qui est viable.
06:26Déjà, il y a toute une somme de critères qu'on essaie de mettre en place.
06:29Donc, il y a la pertinence en termes de cross-pollinisation.
06:32C'est un mot compliqué pour juste dire qu'on évalue si la tendance,
06:36elle existe, en fait, au sein de plusieurs secteurs,
06:38si elle transverse, en fait, à plusieurs catégories,
06:40que ce n'est pas juste quelque chose qui existe dans un univers.
06:43On essaie de regarder, en effet, aussi le scope global.
06:46Est-ce que c'est quelque chose qui se passe sur un petit marché régional,
06:49hyper local ou est-ce que c'est quelque chose qui a une valeur plus mondiale ?
06:54On regarde aussi la vitesse d'élan, voire, en gros, la distance d'adoption.
06:57Est-ce que c'est quelque chose qui va être tendance
07:00et qui va émerger assez rapidement dans l'année à venir
07:02ou bien dans 10, 20, 30 ans ?
07:05Ça, après, c'est aussi nous qui évaluons à la demande du client.
07:08Est-ce qu'on est sûrs ?
07:09C'est quoi notre vision du travail à horizon 2050 ?
07:12Ce n'est pas le même travail qu'on a pu faire ici.
07:15On n'est plus sur des tendances immédiates.
07:17Et puis, voilà, regarder s'il y a des obstacles,
07:19quels sont un peu les chemins, justement,
07:21qui vont permettre d'adopter, en fait, ces tendances-là.
07:24Et alors, pour quelles raisons pensez-vous que ces tendances nous intéressent-elles autant ?
07:28Tout le monde est à l'affût de ces tendances,
07:29que ce soit les marques, les annonceurs, mais même les citoyens au quotidien.
07:33On sent quand même que les gens sont extrêmement intéressés
07:35par ces tendances. Pour quelles raisons ?
07:37Alors, c'est marrant, je lisais justement la dernière newsletter de Noemi Obon,
07:41qui est prospectiviste,
07:42et elle disait justement qu'elle avait le sentiment
07:45qu'on vivait actuellement dans le grand moment de la prospective
07:49et que ça fait un peu de tilt dans l'esprit des gens,
07:51tout simplement parce qu'en fait, on vit dans un climat
07:53où l'incertitude domine, clairement.
07:56Et elle citait notamment le dernier choc majeur,
07:58qui est la dissolution parlementaire en France, en juin dernier,
08:01où ça a fait vraiment voler en éclats les dernières illusions de linéarité.
08:06Donc finalement, on est un peu obsessionnel pour essayer d'anticiper,
08:09c'est une volonté de contrôle, quelque part,
08:11d'aller chercher ce qui se trame pour demain.
08:13Et puis après, c'est intéressant parce qu'elle traduise
08:16de façon explicite ou implicite
08:18les mutations profondes dans le monde, les aspirations des gens.
08:21Et donc, quand on accompagne des marques, après,
08:23c'est forcément important de s'intéresser
08:25juste pour qu'elles puissent trouver un écho et une résonance culturelle.
08:29Alors, vous parliez des marques.
08:31Quelle est la mission de la publicité des communicants
08:33au sens large vis-à-vis de ces tendances ?
08:35Justement, comme notre devoir de communicant,
08:38c'est celui d'être à l'écoute, de comprendre
08:40et de créer des ponts d'empathie
08:42entre le désir de changement de consommateurs
08:45et les transformations sociétales.
08:47Nous, je dirais que notre rôle, c'est de venir équiper les marques
08:50avec une lecture éclairée et éclairante
08:53de ces changements, ces aspirations profondes.
08:55Déjà, pour qu'elles ne soient pas complètement à rebours de ce qui se passe,
08:59à rebours de son temps, des codes,
09:00mais aussi pour pouvoir établir des projets
09:03qui feront sens non seulement au présent,
09:05mais dans un futur immédiat, voire lointain.
09:08Alors, vous avez mené récemment, en en parlant justement,
09:11une étude pour l'un de vos clients.
09:13Est-ce que vous pourriez nous expliquer comment vous avez procédé ?
09:16Quelle a été la méthodologie mise en place ?
09:18Quels en étaient les objectifs ?
09:19Et puis ensuite, les résultats ?
09:21La méthodologie qu'on a mise en place,
09:24c'est ce qu'on appelle, de manière un peu pompeuse devant les clients,
09:26une analyse exploratoire des discours de marques.
09:30Donc, en fait, on retourne un peu l'Internet.
09:32On regarde toutes les sources que Charlotte évoquait,
09:34des médias de veille de la publicité.
09:37On regarde les réseaux sociaux.
09:38On va aller regarder aussi les sites de marques.
09:40On a des outils propriétaires aussi qui nous permettent de faire de la veille
09:43et qui répertorie toutes les dernières campagnes.
09:46Donc, on va regarder tout ça.
09:47Et puis, un peu de déformation professionnelle aussi.
09:49Tu te balades dans le métro, tu vois plein de pubs
09:51et du coup, ça t'évoque des choses.
09:53Tu regardes la télévision, tu notes des trucs aussi.
09:55Et puis, voilà, ça fait des échos.
09:57Ça commence à se ranger un peu dans ta tête.
09:59On a aussi mené des entretiens pour ce dossier-là avec des experts.
10:03Du coup, on l'évoquait avec le Cortex.
10:04On a accès à plein de savoirs différents.
10:06Et donc, nous, comme on est côté médias,
10:09on est allés parler avec des planeurs stratégiques créatifs
10:11pour avoir leur point de vue.
10:13Donc, c'était assez intéressant.
10:14Et donc, ce qu'on a regardé pour cette analyse exploratoire,
10:17on a regardé très, très large, en fait,
10:19aussi bien les leviers créatifs
10:22que le ton qui était employé dans les différentes communications,
10:25les messages qui étaient mis en avant, les thématiques,
10:27quel format aussi utilisé, quel nouveau format.
10:30Et puis, le online, le offline.
10:32Enfin bref, on a un peu tout regardé,
10:34ce qui nous a mené à un corpus un peu light d'environ, je ne sais pas,
10:37120, 130, 140 marques.
10:39Ce n'est pas très, très light.
10:40Je ne sais pas.
10:42120 marques, ça commence à devenir signifié.
10:45On est vraiment allé hyper large, tout secteur confondu.
10:48Donc, je ne sais pas, une quinzaine de secteurs qu'on a regardés.
10:50On a regardé aussi en France, à l'international.
10:53Quand on fait ce genre de choses, on regarde toujours un peu à l'international
10:55parce que c'est vrai qu'il y a certains marchés
10:57qui sont peut-être parfois plus avant-gardistes que le marché français.
11:00Donc, ça permet de regarder ce qui est dominant chez eux,
11:03qui pourrait être très émergent, voire inexistant chez nous,
11:06et de voir ce qu'il va prendre ensuite.
11:08Donc, on regarde pas mal à l'international.
11:10Et puis, une fois qu'on a ratissé bien large,
11:12donc avec tout ce que je vous racontais,
11:13on a rangé tout ça en différentes tendances.
11:16Donc, cette fois-ci, on l'a fait pour un de nos clients
11:17qui est dans le secteur banque-finance.
11:19Donc, certaines des tendances qu'on a sorties
11:21sont des focus sur ce secteur,
11:23même si ça ne veut pas forcément dire
11:24que c'est des tendances qu'on ne retrouve pas ailleurs
11:26et qui ne sont que propres au secteur banque-finance.
11:28Là, on a décidé de les définir et de les illustrer
11:30au prisme de la banque et de la finance.
11:33Justement, en parlant de l'international,
11:35est-ce que les spécificités culturelles
11:37créent des différences d'importance sur une tendance donnée ?
11:40Et vu cette internationalisation de l'analyse
11:42pour des marques qui souhaiteraient justement se développer
11:45à l'étranger pour augmenter leur business,
11:47vous notez des spécificités culturelles
11:49qui font que les tendances ne sont pas au même moment,
11:51au même niveau de maturité en fonction des pays ?
11:54Oui, absolument.
11:55C'est tout à fait pertinent et c'est pour ça qu'on précise à chaque fois
11:58quelle marque, quel pays,
12:00parce qu'en effet, les pays anglophones,
12:02souvent, vont être beaucoup plus matures sur une tendance.
12:04Après, on essaie de l'attraper
12:06au moment où elle n'est pas encore tout à fait mature, justement.
12:08Oui, c'est ça qui est intéressant.
12:10Alors, par rapport à l'étude que vous avez menée,
12:12quels en sont les principaux enseignements
12:14qui pourraient nous intéresser là, aujourd'hui ?
12:18Les résultats de cette étude,
12:19on a sorti 14 tendances,
12:21plus ou moins résiduelles, dominantes ou émergentes,
12:24et on les a classées selon deux axes d'analyse
12:28qu'on a déterminés, en fait, après avoir posé
12:30un espèce de contexte un peu stratégique en introduction,
12:33parce qu'en fait, pour comprendre dans quoi ces tendances vont s'inscrire,
12:36comme on le fait souvent quand on commence un dossier,
12:38on est allé regarder un peu l'état d'esprit des Français,
12:40ce qui se passe dans leur vie, dans la société
12:43dans laquelle ils évoluent et dans laquelle ces tendances s'inscrivent,
12:46ce qu'ils ressentent et ce qu'ils veulent aussi,
12:48parce que ça nous permet d'avoir une clé de lecture
12:50qui est peut-être un peu plus concrète et ancrée, du coup, dans leur quotidien.
12:53Et donc, ce contexte, ce qu'il nous dit,
12:55c'est qu'en gros, pour 2025,
12:57on arrive dans ce qu'on a appelé le temps 3 de la permacrise.
13:00La permacrise ?
13:01La permacrise, nous, c'est un mot qu'on commence à connaître pas mal
13:04parce que ça fait un moment qu'on en parle.
13:06C'est un mot qu'on a entendu pour la première fois début 2022, je dirais.
13:10Et c'est un néologisme qui cherche à définir la période
13:12dans laquelle on vit aujourd'hui,
13:13qui voit s'empiler, en fait, les crises sans interruption.
13:16Donc, on a eu la première, la plus marquante, c'était la pandémie,
13:19sur laquelle s'est empilée la crise climatique,
13:22qui est revenu vraiment sur le devant de la scène.
13:24Ensuite, il y a eu le retour des gares en Europe, au Moyen-Orient,
13:26l'inflation, toutes ces choses hyper fun dont on parle comme ça,
13:30qui, au lieu d'une crise en chasse une autre, ça s'empile.
13:32Et en fait, on doit apprendre à vivre avec et à composer avec.
13:36Donc, c'est ça, la permacrise, c'est qu'on est en crise permanente.
13:38C'est un état de crise permanente.
13:40Et en fait, depuis 2022, nous, on a beaucoup regardé ce phénomène
13:43et on a beaucoup réfléchi autour.
13:44Et pour nous, il y a eu plusieurs étapes,
13:46plusieurs manières pour les Français, en fait, de recevoir et de vivre cette situation.
13:51Donc, il y a eu les débuts 2022-2023, donc c'était la phase de découverte un peu.
13:55Donc là, c'était un peu la panique.
13:57Les gens ne savaient pas trop ce que c'était, pas trop ce qui se passait.
14:00Ensuite, il y a eu 2024.
14:02Donc là, c'était bien ancré, c'était la phase d'adaptation.
14:04La permacrise, ce n'était plus quelque chose de nouveau.
14:06On était en pleine inflation et c'est ancré dans le quotidien.
14:09On ne veut plus la subir.
14:10Et donc, les gens ont commencé à faire preuve d'un peu plus de résilience.
14:13Ils ont commencé à chercher des solutions,
14:15donc des astuces pour mieux vivre dans cette étape de crise permanente.
14:19Et du coup, la question qu'on s'est posée en commençant ce deck de tendances,
14:23alors qu'on arrive fin 2024, finalement,
14:25qu'est-ce que ça dit pour 2025, en fait ?
14:26Il se passe quoi ?
14:27Et quelle est la posture des Français face à ce contexte qui ne bouge pas trop ?
14:32Et ce qui est ressorti, selon nous, c'est que les Français sont assez tiraillés.
14:35En fait, il y a un phénomène assez amusant qu'on a noté,
14:38un espèce de syndrome post-JO qui a amené une grosse vague d'optimistes.
14:42En fait, si on a regardé les chiffres par rapport à une grosse déprime
14:45après la dissolution de l'Assemblée nationale en juin,
14:48en fait, le pourcentage des gens qui se disaient optimistes en septembre
14:51a pris 22 points par rapport à juin.
14:53C'est énorme.
14:54C'est énorme, oui, surtout pour les Français qui sont quand même des Français.
14:57Donc, ils ne sont pas optimistes.
14:59Par nature, vous voulez dire que les Français ne sont pas optimistes ?
15:01Et donc, le truc, plus 22 points.
15:03Donc, le chiffre, c'est 39 % des Français qui se déclarent optimistes.
15:06Donc, ça fait quand même une énorme augmentation, finalement.
15:09Mais de l'autre côté, ça, c'était vraiment une vision un peu court terme
15:12de leur état d'esprit.
15:13Et si on regardait un peu moins court terme,
15:16ce qu'il y a de ça, c'est qu'ils sont globalement assez inquiets
15:17parce qu'ils sont une grosse majorité
15:20à penser que le pays va dans la mauvaise direction
15:22parce qu'on est en pleine crise politique, budgétaire,
15:24il y a la dette qui inquiète.
15:25Enfin bref, c'est compliqué.
15:26En réponse à tout ça, il y a un espèce de truc un peu particulier
15:30qui se développe chez les Français, c'est de l'hédonisme fataliste.
15:33On est des Français et on est des gens qui avons plutôt la réputation
15:36d'être très prévoyants, d'être plutôt fourmis.
15:39On anticipe l'avenir, on épargne beaucoup quand c'est compliqué
15:42parce qu'on a un peu peur.
15:43Et bien désormais, en fait, les Français, ce qu'ils disent,
15:44c'est qu'ils veulent profiter des plaisirs immédiats de la vie
15:47parce que l'avenir est trop incertain.
15:49Et donc, finalement, ce qui ressort de ces trois années de permacrise,
15:51c'est que les gens ont fini par s'adapter à cette conjoncture,
15:54que ça y est, ils l'ont accepté et qu'ils saient fatalement ce qui va se passer.
15:58Et ils vont essayer de rechercher un espèce d'équilibre au quotidien
16:01entre la recherche de stabilité, mais quand même l'évasion de l'autre côté.
16:04Donc, avec cette volonté de profiter.
16:06Comment est-ce que, sur la base de ces analyses,
16:09vous pouvez en apporter des enseignements pour les marques,
16:11notamment à travers leur communication ?
16:14Pour les marques, ce qui ressortait, c'est que finalement,
16:16elles avaient un espèce de rôle un peu double, en fait,
16:18pour répondre à ce tiraillement.
16:19Elles doivent, d'une part, trouver une réponse à apporter
16:22pour ramener de la stabilité dans la vie des gens,
16:24parce que c'est quand même quelque chose qu'ils recherchent.
16:26Donc, selon nous, elles doivent faire ça en adoptant une posture rassurante
16:29vis-à-vis des gens.
16:30Et puis, de l'autre, elles doivent accompagner les Français
16:32dans leurs besoins d'évasion, en investissant dans un concept
16:36qu'on a trouvé pendant nos recherches, qui est le concept d'imagination stratégique.
16:40Donc, c'est vraiment réussir à mettre la créativité,
16:42à continuer de mettre plein de créativité dans la vie des gens
16:45pour nourrir leurs besoins d'évasion, mais au service de l'utile.
16:48Donc, sortir de cette idée de la créativité pour la créativité
16:51et l'art pour l'art, mais vraiment essayer d'apporter des solutions
16:54ultra créatives à des vrais sujets du quotidien.
16:56Donc, ça, c'est ce que les marques peuvent mettre en œuvre
16:58à travers leur campagne de communication
16:59pour rentrer en relation avec leurs consommateurs.
17:02C'est ça, et c'est autour de ces deux axes,
17:04donc d'un côté la stabilité et de l'autre l'évasion,
17:07qu'on a structuré notre présentation, notre étude
17:10et qu'on a rangé les tendances qu'on a trouvées.
17:12D'accord.
17:13Et alors, est-ce qu'on pourrait décrypter avec vous
17:16quelques tendances fortes à travers des exemples de campagnes
17:19justement de marques qui ont mis en œuvre ces notions ?
17:22Une première tendance qu'on trouvait intéressante de raconter,
17:26qui est aujourd'hui largement dominante du fait du contexte,
17:29mais on va rentrer dans tout de suite,
17:30on l'a appelé le prix sous tous les angles.
17:33Donc, en fait, c'est le sujet du parler prix.
17:34C'est un sujet qui avait temporairement été mis de côté
17:37avec la crise sanitaire.
17:39En fait, on parlait beaucoup d'éco-responsabilité,
17:41de made in France, de local,
17:43de grands sujets un peu plus collectifs.
17:45C'était vraiment sur toutes les bouches et dans toutes les communications.
17:48Et puis, aujourd'hui, en fait, on en parle beaucoup moins
17:50au profit de ce fameux prix qui revient massivement
17:53dans le discours des marques parce que l'inflation.
17:56Et comme le contexte est difficile pour les gens,
17:59pas facile à vivre au quotidien,
18:01on voit que les ressorts de communication les plus simples
18:03vont revenir largement sur le devant de la scène.
18:05Donc, on va utiliser de la franchise,
18:07on va utiliser de la transparence totale,
18:10de l'humour aussi pour essayer de dédramatiser un peu tout ça,
18:13ou des promesses et des preuves très concrètes
18:15qui seraient liées à une économie d'argent.
18:16Enfin, vraiment, on va essayer de faire en sorte
18:18d'être le plus clair et le plus transparent possible
18:21sur ce sujet du prix.
18:22Et donc, ça, c'est une tendance qui voit le jour
18:25avec vraiment deux motivations.
18:27Déjà, c'est un discours qu'on commence à connaître par cœur.
18:29Je vais le répéter, mais ça fait deux ans maintenant
18:31qu'on vit dans un contexte économique quand même complexe,
18:34qu'on subit l'inflation.
18:36Mais ce qui est intéressant de voir,
18:37ce qu'on a trouvé quand on faisait encore ces recherches,
18:38c'est de voir à quel point ça perdure, en fait.
18:40Si on regarde les chiffres de septembre 2024,
18:43les Français sont encore largement préoccupés
18:45par leur pouvoir d'achat.
18:45Ça reste dans le top 2 des préoccupations,
18:48alors que c'est quand même censé se calmer un peu.
18:50Normalement, on voit un peu le bout du tunnel.
18:53Mais en septembre 2024, il y a 60 % des gens
18:55qui déclarent que leur pouvoir d'achat a baissé,
18:5854 % qui disent qu'ils s'en sortent difficilement avec leur revenu.
19:02Donc, c'est quand même un vrai sujet qui perdure.
19:04Et un autre chiffre qu'on aime bien,
19:06enfin qu'on aime bien, non, ce n'est pas vrai,
19:07je n'aime pas parce que je le trouve terrible,
19:08mais je trouve qu'il est hyper parlant,
19:10c'est que quand on demande aux Français
19:12combien ils estiment manquer mensuellement
19:14pour vivre convenablement,
19:15donc juste convenablement, pas pour vivre la grande vie,
19:17ils répondent 588 euros.
19:20Donc, c'est quand même plus d'un tiers dans ce mic net.
19:22C'est quand même un chiffre qui est délirant.
19:24Donc, ça reste quand même un sujet très, très actuel.
19:27Mais donc voilà, ce sujet prix qui est omniprésent et qui est obsédant,
19:31il va se manifester de manière assez diversifiée dans la communication.
19:35Déjà, on voit que c'est un sujet qui est quand même largement
19:37préempté par la grande distribution, évidemment.
19:40Mais elles adoptent des postures qui sont assez différentes.
19:43Pour en parler, on va avoir des acteurs qui se placent plus
19:46comme des militants, en fait.
19:48Ils se positionnent un peu comme des défenseurs du pouvoir d'achat,
19:51un peu les Robin Dubois qui viennent.
19:54C'est joli comme image, des Robin Dubois, des temps modernes.
19:57Qui viennent un peu défendre le peuple qui souffre, quoi.
20:00Donc, on pense à Leclerc, qui a historiquement toujours été un peu là-dessus
20:04dans ses communications.
20:05Mais aujourd'hui, il y en a beaucoup qui s'y mettent aussi.
20:07Donc, il y a eu récemment Biocop, en fait, qui a essayé d'opérer
20:09une espèce de mutation, une sorte de collectif hyper engagé
20:13et qui a invité ses clients à, je cite,
20:15à prendre part avec eux au combat pour la transition alimentaire.
20:19Et donc, eux, ils ont sorti une campagne qui s'apparente un peu
20:21à une lettre ouverte dans la forme comme dans le fond.
20:23Donc, on retrouve un peu tous les codes.
20:25Ça va être un gros titre très accusateur et hyper accrocheur
20:28qui va vraiment appeler les gens au passage à l'acte.
20:30Donc, le titre, c'est Pendant qu'ils sèment l'illusion, cultivons l'action.
20:34Vraiment, une campagne qui est extrêmement verbeuse.
20:36Ensuite, on n'a que du texte.
20:37On a un grand article, d'ailleurs, avec beaucoup de détails
20:40et puis pas du tout de visuel.
20:41Donc là, cette posture très engagée.
20:44On a aussi vu cet été une campagne d'affichage de Aldi qui avait vocation
20:48à vraiment dénoncer les augmentations saisonnières des prix
20:52qui étaient pratiquées dans les stations balnéaires.
20:54Et donc là encore, ils font usage de visuels hyper minimalistes
20:57où on voit juste une bouteille d'eau qui est posée sur un plongeoir
20:59et une étiquette de prix à côté avec des gros titres et des gros slogans
21:03qui sont assez bien pensés.
21:05Donc, ils disent l'été, on préfère vous voir sur la plage que sur la paille
21:08ou encore l'été, on est là pour éteindre ce qui vous allume sur les prix.
21:12Des choses vraiment très engagées.
21:13Donc ça, c'est pour la première posture plutôt militante.
21:16Après, on a d'autres marques qui vont préférer un peu plus de légèreté
21:19et essayer de faire usage du ressort comique pour essayer de dédramatiser
21:23parce que c'est dramatique ce que les gens vivent.
21:25Donc, on essaye d'adoucir un peu, d'arrondir les angles.
21:28C'est le cas, par exemple, d'une campagne intermarchée
21:30qui a fait différents petits spots télé et qui met en scène
21:34notre rapport parfois absurde aux bonnes affaires, en fait,
21:36parce qu'on a beaucoup vu que les Français sont devenus
21:38un peu des smart shoppers à chercher la bonne affaire partout.
21:41Et bien là, dans cette pub, on voit, par exemple, dans un des films,
21:43un couple qui est dans son salon, sur son canapé et qui tente
21:46désespérément de se convaincre que la bougie parfumée,
21:49qui a une odeur un peu désagréable, qui est en train de brûler devant eux
21:52et qu'ils ont acheté en promotion, valait le coup.
21:55Et c'est quand même une super bougie
21:56parce qu'en fait, on a fait tellement une bonne affaire en l'achetant
21:58qu'on va subir cette odeur désagréable.
22:01C'est ce genre de ressort un peu absurde qu'on voit émerger.
22:06Et puis, une troisième posture pour aborder le prix en période complexe,
22:09c'est là, c'est un peu moins fun, mais ça marche aussi.
22:12C'est de jouer la totale transparence pour justifier ses prix.
22:15C'est le cas, par exemple, d'une campagne Naturalia, assez récente,
22:19qui montre des prints où on a un visuel produit et puis le détail de son prix,
22:23donc des indications de la part qui va aller au producteur,
22:26des coûts fixes, de la TVA, puis de la marge.
22:29Donc, vraiment, cette idée d'être complètement transparent avec le client
22:32pour qu'il voit ce qu'il paye, une sorte de bilan comptable, un peu,
22:35qu'on présente au consommateur, mais vraiment pour dire, voilà, c'est notre prix.
22:39Il est peut-être un peu élevé, peut-être pas élevé, mais il est justifié, en tout cas.
22:41C'est ça, c'est ça.
22:43Donc voilà, trois manières d'aborder le sujet prix,
22:46avec des codes, du coup, qui vont différer selon les trois postures.
22:48Donc, pour la partie militante, on va trouver un ton qui va être très engagé,
22:53des discours un peu à façon pamphlet, qui vont chercher à dénoncer.
22:57On voit qu'il y revienne des symboles assez martiaux, comme le bouclier, par exemple,
23:01champ lexical un peu du combat, de la défense.
23:04Et puis, sur l'humour, c'est cette idée plutôt de répondre à l'absurde de notre situation
23:08par de l'absurde, donc dans des situations qui peuvent provoquer du rire au quotidien.
23:12On fait des analogies parfois inattendues, on crée de la surprise.
23:16Et puis, sur la transparence, ça va être l'usage de la pédagogie,
23:20surtout pour que les gens comprennent et acceptent des procédés vraiment de déconstruction,
23:24de décomposition de l'information et ce genre de codes.
23:27Là, vous avez beaucoup parlé du prix, parce que, effectivement,
23:29c'est un point très important compte tenu du contexte en France.
23:32Est-ce qu'il y a une autre notion qui émerge un peu plus que les autres aujourd'hui en communication ?
23:37Complètement. Nous, on a identifié une tendance émergente qui est celle de l'égolectif.
23:42On devine peut-être, mais c'est donc un néologisme qui incarne justement cette tension
23:47entre une volonté de faire partie de la société, d'un collectif, d'une communauté,
23:52mais aussi, quelque part, de légitimer une position de leader, de s'en affranchir.
23:57Et pour nous, ça témoigne vraiment d'un moment de bascule en communication,
24:01justement, vers un resserrement, un resserrage vers l'individu et l'individualité.
24:07En fait, dans la banque comme ailleurs, c'est un peu la fin des grands films collectifs.
24:12On a connu, ces dernières années, un grand cycle de campagnes orientées, justement, sur le collectif.
24:18C'est beaucoup venu après la pandémie.
24:20Notamment, on avait besoin, en fait, de se retrouver dans cet ensemble avec nos pères, etc.
24:25Et aujourd'hui, on voit que depuis fin 2023, début d'année 2024,
24:30ça se raréfie, en fait, ces discours d'intérêt général.
24:34Et les marques commencent à davantage recentrer leurs propos sur des promesses de bénéfices individuels.
24:40Et donc, on va voir, justement, des nouveaux tons de paroles, en fait, qui vont parfois nous surprendre.
24:44Et j'ai envie de parler, ici, de la dernière campagne de Nike.
24:47D'accord.
24:48Qui, donc, s'intitule « Winning isn't for everyone ».
24:51Alors, elle a fait couler beaucoup d'encre.
24:52Elle est sortie, en plus, au moment des JO.
24:55Et, en fait, elle montre vraiment aussi une volonté pour la marque d'acter un retour symbolique
25:01d'un positionnement autour du culte de la victoire, de la performance.
25:05Et, en fait, elle met en scène des athlètes qui, en fait, ne se soucient absolument pas de plaire à tout le monde,
25:12d'incarner des valeurs qui sont aujourd'hui peut-être considérées comme plates au sein du sport, car trop consensuelles.
25:18Donc, ici, on prend complètement le contrepied.
25:21On dit qu'on n'a pas peur d'écraser le rêve des autres pour pouvoir donner vie au sien.
25:26Est-ce qu'on a vraiment besoin d'être tout le temps dans la solidarité quand on a envie de gagner ?
25:31Finalement, on méprise un peu la concurrence.
25:34Oui, mais c'est limite philosophique comme question.
25:35Complètement.
25:36Et donc, c'est hyper intéressant, justement, pour une marque aussi comme Nike, qui est dans un univers ultra saturé.
25:42On a toujours plus de marques sur le sport, la performance, l'outdoor.
25:47Et donc, comment aujourd'hui avoir un discours qui soit différenciant, qui soit hyper singulier ?
25:52C'est assez intéressant pour nous de noter qu'en tout cas, il y a cette bascule-là.
25:55En fait, on peut assumer que, oui, c'est des motivations profondes qui sont hyper personnelles, hyper individualistes.
26:01Et qu'on peut arrêter aussi de toujours avoir envie d'être dans quelque chose de plus haut, de plus grand.
26:06Peut-être parce que, justement, on a saturé aussi de ce grand cycle de communication
26:10où toutes les marques ont voulu raconter leur mission, qu'elles faisaient plus que juste vendre des objets.
26:16Donc, voilà, c'est un moment de bascule pour nous.
26:18Donc, c'est quelque chose qui est encore assez émergent.
26:20Donc, on n'a pas toujours autant d'exemples pour des tendances comme celle-ci parce qu'on en est encore au balbutiement.
26:26Pour nous, cette campagne de Nike, elle incarne justement un pivot, en fait, vers peut-être une nouvelle ère.
26:31On va davantage recevoir ce genre de messages.
26:34Mais justement, là, pour Nike, ce type de tendance renoue aussi avec leur ADN.
26:38Rien qu'en pensant au nom Nike, puisque ce nom fait référence directement à la déesse de la victoire.
26:44Pour eux, c'est assez légitime d'y revenir.
26:46C'est un retour aux racines, finalement, et c'est comme ça qu'ils en parlent, en tout cas.
26:50Et donc, sur ce sujet-là, il y a notamment une spécialiste, une experte de la tendance qui s'appelle Alexandra Jubé.
26:56Donc, on suit aussi la newsletter qui a décodé justement toute cette campagne d'un point de vue semiotique.
27:01Et c'est tout à fait intéressant.
27:03Il y a justement cet usage récurrent de la négation, cette posture d'opposition, voire d'agressivité.
27:09On érige le défaut, quelque part, en qualité.
27:12Mais ce qui est intéressant, c'est de voir ensuite quel va être le niveau d'acceptation de cette notion-là.
27:16Parce que c'est éthiquement ou idéologiquement, ça peut être très critiqué de se dire
27:21c'est effectivement nous qui voulons reprendre le pouvoir d'un point de vue individuel.
27:24Et tant pis si, oui, nous, on veut gagner et on laisse tomber des dimensions plus collectives.
27:30Peut-être qu'il y avait une certaine hypocrisie, finalement, jusqu'à présent,
27:32parce que c'est toujours mieux de dire qu'on est dans le collectif,
27:34alors qu'au fond de nous-mêmes, on a peut-être envie de se dire,
27:36bon là, j'aimerais bien la jouer un peu perso.
27:38C'est pour ça qu'on a appelé cette tendance égolectif,
27:39parce que pour le moment, on est encore en tension, on pense, en tout cas,
27:42entre justement ce besoin d'appartenir et de vouloir aussi participer à quelque chose de collectif,
27:48tout en ayant en effet en tête ses propres intérêts.
27:50Et en effet, il va falloir doser, je pense, avec cette pointe d'arrogance
27:54qui est aujourd'hui assez bienvenue avec cette campagne, qui est très coup de poing.
27:58Mais aussi parce que c'est la première.
27:59Et parce que ça dénote, en fait, dans un univers où on est bassiné, on dirait,
28:05par des discours un peu plus mièvres, un peu plus tièdes, poétiques.
28:09Et là, on vient s'affranchir de ça avec une proposition complètement à l'opposé.
28:13À voir après comment chaque marque peut se l'approprier.
28:16Évidemment, on l'a dit Nike, ça leur va bien.
28:18Ça reboucle avec leur nom, ça reboucle avec leur ADN.
28:22À voir pour des marques dans le retail, par exemple,
28:25comment on peut se permettre ce petit pas de côté.
28:28Sur la base de tous ces éléments d'études,
28:29alors moi, j'aurais adoré pouvoir décrypter avec vous l'intégralité des dimensions
28:33que vous aviez identifiées, parce que c'est passionnant.
28:36Néanmoins, pour finir sur des tendances un peu plus prospectives
28:40par rapport à toutes ces analyses que vous venez de faire,
28:42quelles seraient celles que vous entrevoyez déjà pour 2025 ?
28:46Alors, nous, on a repéré ce qu'on appelle un trope.
28:49Encore un mot...
28:50J'aime bien, moi, j'apprends plein de vocabulaire aujourd'hui.
28:54En plus, je ne sais jamais trop comment le définir de façon hyper tangible.
28:58Mais en fait, un trope, c'est finalement une image obsédante et récurrente
29:02qu'on n'arrive pas encore tout à fait à rationaliser.
29:05Je pense que je peux le dire comme ça.
29:06Et donc, ce fameux trope que nous, on a identifié, c'est celui de la danse.
29:10Alors, vous allez me dire, la danse, on en voit quand même depuis toujours.
29:13Il y avait la campagne Air France avec l'envol.
29:15Oui, c'est vrai.
29:15Voilà, ce n'est pas nouveau.
29:17Certes, vous aurez raison.
29:18Mais selon nous, aujourd'hui, on est quand même en train de se concentrer
29:21sur des types de danse assez spécifiques,
29:24comme la danse contemporaine ou le ballet.
29:26Et pour nous, ça traduit quelque chose qui dépasse un petit peu,
29:29peut-être, le premier niveau d'interprétation.
29:31Mais en tout cas, déjà, en termes de manifestation,
29:33c'est vrai qu'on a vu, alors là, je reviens à l'univers de la mode
29:36avec notamment tout le ballet core qu'on a pu voir émerger de TikTok
29:41et gagner pas mal de marques de mode.
29:44Notamment, je pensais à Sandy Liang, à New York, etc.
29:46Donc, on a vu beaucoup de femmes s'habiller avec, justement,
29:50des items qui rappellent, en fait, le vestiaire du cours de ballet.
29:53C'est ça.
29:54Mais en fait, il n'y a pas que ça.
29:55Ce n'est pas que dans la mode.
29:56Mais souvent, on voit que finalement, des phénomènes comme ça dans la mode
29:59peuvent gagner du terrain et s'étendre à d'autres secteurs.
30:02On voit aujourd'hui des marques qui, du coup, utilisent la danse dans leur campagne.
30:06Alors, pourquoi ?
30:08Déjà, parce que la danse, ça reste quand même un langage non-verbal universel
30:12que tout le monde peut comprendre.
30:13Ça traduit un rapport au corps, au plaisir, à l'autre et à soi-même.
30:17Ça dit beaucoup de choses.
30:19Et puis, ça élève un propos aussi souvent vers une dimension plus sensorielle,
30:24plus intuitive, plutôt que quelque chose d'assez explicite, assez direct.
30:28On est sur quelque chose d'assez indirect et donc d'assez poétique.
30:31Et pour nous, ce code, il illustre une vision de la performance qui est assez singulière.
30:37Complètement différente, justement, de celle qu'on a évoquée juste avant
30:40avec la dernière campagne de Nike.
30:42Ici, justement, avec le ballet, on n'est pas tant dans la sueur, dans l'effort pour l'effort.
30:47On est sur quelque chose d'assez délicat, d'assez félin.
30:50On est tout en maîtrise, en légèreté.
30:52Et donc, c'est quelque chose qui convoque aussi à la fois le corps, certes,
30:56mais aussi la culture, parce que c'est quand même un sport souvent qu'on considère,
31:00peut-être à tort, mais réservé à une certaine élite.
31:03Et donc, pour nous, ça illustre en fait une vision de la performance
31:05qui allie l'intellectuel au physique, la domination de l'esprit sur le corps.
31:10Et ça pourrait traduire en fait une forme de résilience pour ce futur, justement, de Permacrise.
31:15Où en fait, pour réussir dans le monde, pour survivre,
31:18il ne suffit plus d'être seulement fort.
31:20En fait, il faut être agile, souple, résilient et naviguer avec grâce,
31:26en fait, se mouvoir dans la grâce.
31:28Et pour nous, ça en dit beaucoup sur comment l'homme peut se comporter,
31:31justement, peut agir face à un monde aussi incertain.
31:35Donc, c'est une image plutôt poétique.
31:36Finalement, on revient à des dimensions plus souples, agiles, légères.
31:42Effectivement, je pense qu'on a tous besoin de légèreté.
31:44Donc, une jolie tendance.
31:46En tout cas, j'espère qu'elle va se confirmer.
31:47Et pas que pour 2025.
31:49Je vous remercie vraiment beaucoup, toutes les deux, Charlotte et Pauline,
31:51pour toutes ces informations, ces analyses, ces décryptages.
31:54C'est passionnant.
31:55Et puis, à très bientôt, j'espère, pour de nouvelles tendances.
31:58Merci, Valérie.
31:59Merci beaucoup, Valérie.