Xerfi Canal a reçu Anna Souakri, professeure affiliée à ESCP Business School, chercheur au Square Management Research Center, pour parler de la fin de la voiture thermique en Europe.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Bonjour Anna Souakry. Bonjour Jean-Philippe. Vous êtes professeure affiliée au SCP Business School
00:14et vous êtes chercheuse à Square Management Research Center. C'est ça. Papier très intéressant
00:20dans The Conversation France, publié avec Jean-Marc Daniel sur la fin de la voiture thermique. Et je
00:27vais droit au but et on va développer ensemble. Vous nous dites, un, il faut absolument maintenir
00:33l'objectif 2035. Parce qu'on sait qu'il y a beaucoup de débats aujourd'hui et des constructeurs
00:38qui disent etc. Et puis deux, ce qui est très original, vous dites c'est bien que les Chinois
00:43nous fassent mal. En gros, je résume, je résume. Alors on rentre dans le fond du sujet. Pourquoi
00:51maintenir 2035 ? Maintenir 2035 pour améliorer notre compétitivité et justement se positionner
01:00sur un sujet sur lequel aujourd'hui personne n'a véritablement d'avantages comparatifs et qui
01:08nous permettra de nous remettre dans la course, si je puis dire, de ce qu'on appelle la frontière
01:13technologique. C'est-à-dire le niveau le plus avancé de la technologie et répondant aux enjeux
01:19et besoins de demain en ne misant pas sur une technologie ou un secteur sur lequel le décrochage
01:28est beaucoup trop grand déjà. On ne rattrapera pas la Chine sur les batteries existantes. Donc
01:34réfléchir à s'en servir, les faire rentrer, accepter justement leur véhicule et leur batterie
01:43pour apprendre de leur technologie, décarboner la mobilité qui est un enjeu essentiel et qui
01:49pourra atteindre l'objectif notamment du pacte vert européen et réfléchir à des solutions qui vont
01:57plus loin que les batteries et même les véhicules électriques existants, mais réfléchir à quels
02:03sera les véhicules de demain qui permettra de répondre à notre besoin qui est d'avoir une
02:09mobilité décarbonée, flexible, accessible à tous citoyens. Ça c'est la grande thèse. Alors
02:16j'évoquais, parce que 2035 est en débat aujourd'hui, il y a beaucoup de pression et c'est un des points
02:23que vous soulevez dans le papier, c'est qu'il n'y a quand même pas forcément d'unité en Europe sur
02:27cette question. Il y a quand même des avis qui restent divergents et là vous nous dites attention
02:32à la tragédie des horizons aussi. Oui, effectivement il y a beaucoup de constructeurs qui se sont déjà
02:40engagés, qui ont changé tout leur business model et leurs infrastructures pour s'adapter justement à
02:46cette nouvelle réglementation. Donc un changement, ça désinciterait l'ensemble des acteurs à innover
02:53davantage d'une part, donc à continuer à s'améliorer et à être beaucoup plus différenciant par rapport
03:01à ce qui existe sur le marché, et d'autre part ce serait un peu, oui, ce serait une trahison si
03:09je puis dire, de l'ancrage des anticipations. Donc évidemment ça désinciterait beaucoup d'acteurs
03:15à investir, notamment en Europe, parce que ce manque de stabilité, et on rentrerait dans le piège
03:24de la tragédie des horizons, c'est-à-dire à réfléchir à court terme. Effectivement ça me coûtera
03:30moins sur le court terme, bon le thermique on continue, mais au détriment de beaucoup de
03:36pollution, évidemment, et encore plus une perte davantage compétitive sur le long terme. Donc ce
03:45serait complètement contre-productif, mais c'est surtout effectivement du point de vue stratégique
03:52sur quoi veut se positionner l'Europe de manière compétitive et distinctive dans les années à
03:58venir. Ce sera pas sur le véhicule électrique, donc laisser rentrer les batteries chinoises et les
04:04véhicules chinois permet en fait de susciter la contestabilité du marché, ce qu'on appelle la
04:10contestabilité, c'est-à-dire l'encourager à innover, à réfléchir davantage, à une solution
04:18qui soit différente de l'existant, tout en répondant à un besoin bien sûr, mais de manière
04:25différente et qui soit unique en Europe, et donc qui ne peut pas être celle des batteries LFP ou NMC
04:33qui sont faites aujourd'hui. Réfléchir au véhicule de demain, à la mobilité de demain décarbonée.
04:40Alors là c'est vrai que c'est la proposition choque que vous faites dans le papier, c'est de
04:44dire arrêtons de vouloir fermer les frontières, arrêtons de dire au contraire, il faut ouvrir un
04:49maximum et puis transformons-nous en imitateurs, etc. Mais innovons, innovons, innovons et pour
04:57ça il faut être ouvert. Exactement, c'est l'idée. C'est extrêmement intéressant, évidemment un peu
05:04polémique, mais je crois que vous en avez parfaitement conscience. Merci à vous. Merci Jean-Philippe.