• il y a 2 mois
Le 29 juin 2023, Virgil, ancien militaire, est touché par un tir de LBD en plein visage après avoir croisé des policiers. Plus d'un an après, il raconte cette soirée qui a changé sa vie et lui a fait perdre la vue d'un oeil.

Vous pouvez retrouver le témoignage de Virgil dans notre documentaire "Nahel, un an après : la révolte étouffée", un documentaire d'une heure qui décrypte les révoltes de 2023.

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Transcription
00:00Quand je suis arrivé à leur niveau, il y a un policier qui m'a dit
00:03« Hé toi, qu'est-ce que tu fais là, casse-toi ! »
00:05Il a élevé son arme et il m'a tiré en plein visage.
00:08J'avais l'impression qu'on m'avait arraché la partie gauche du visage
00:12donc je me suis senti tombé à la renverse.
00:15En fait, tu te rends compte quand je cours que je perds énormément de sang
00:18parce que j'entends le bruit de mon sang qui tape le sol.
00:22Je m'appelle Virgile, j'ai 25 ans.
00:25J'étais anciennement militaire et aujourd'hui je travaille dans l'écologie.
00:30Alors le 29 juin, je me suis rendu à Nanterre
00:33pour participer à la marche de Naël.
00:37Ils étaient plus de 6000 rassemblés pour exprimer leur colère
00:41autour de la mère de Naël, l'adolescente de 17 ans.
00:45Pour moi, ça me semblait important d'aller à cette marche
00:47parce que c'est quelque chose qui nous concerne tous.
00:50Pendant la marche, c'était une ambiance plutôt...
00:54C'était quelque chose d'assez triste.
00:57Il y avait la mère de Naël notamment, etc.
01:02On marchait, c'était pas très agité.
01:06J'étais pas dans un endroit où il y avait beaucoup de gens.
01:10En fin de journée, j'ai été rejoindre de la famille et des amis.
01:17Alors je croise la police dans la nuit,
01:20donc je ne sais pas exactement quelle heure il était.
01:22Il était tard, après minuit.
01:24Je suis sorti un peu pour voir s'il y avait encore une épicerie d'ouvertes
01:28ou quelque chose comme ça.
01:30Je me suis dit qu'il y avait une épicerie d'ouvertes.
01:32Je me suis dit qu'il y avait une épicerie d'ouvertes.
01:34Je me suis dit qu'il y avait une épicerie d'ouvertes.
01:36Je me suis dit qu'il y avait une épicerie d'ouvertes.
01:38Pour voir s'il y avait encore une épicerie d'ouvertes
01:40ou quelque chose comme ça.
01:42Pour acheter à manger, à boire, etc.
01:44Puis j'ai croisé une patrouille de plusieurs policiers.
01:48Je marchais dans leur direction.
01:50Je ne me doutais pas de ce qui allait se passer.
01:56Quand je suis arrivé à leur niveau,
01:58il y a un policier qui m'a dit « Hey toi, qu'est-ce que tu fais là ? Casse-toi ! »
02:01Il a élevé son arme et il m'a tiré en plein visage.
02:04Donc je n'ai pas eu trop le temps de réfléchir.
02:08J'avais l'impression qu'on m'avait arraché la partie gauche du visage.
02:14Donc je me suis senti tombé à la renverse.
02:16J'ai eu une sorte d'instinct de survie
02:19où je ne me suis pas laissé tomber contre le sol
02:23parce que je sentais que j'étais en danger.
02:25Du coup, les policiers m'ont dit de me casser.
02:29Donc je suis parti.
02:32J'ai des souvenirs assez flous de ce qui se passe après.
02:36Après le tir, je suis quand même bien sonné.
02:39Mais avec l'adrénaline, je pense qu'à ce moment-là,
02:42je ne sens pas encore la douleur, etc.
02:44Je vois juste que je perds énormément de sang.
02:47En fait, je me rends compte quand je cours
02:49que je perds énormément de sang
02:50parce que j'entends le bruit de mon sang qui tape le sol.
02:53Donc à ce moment-là, c'est là que je me regarde
02:56et je vois à mes mains mon t-shirt, etc.
02:59qui sont remplis de sang.
03:01Ils n'ont pas tenté de me suivre ou autre.
03:03Ce n'était pas une interpellation,
03:04une tentative de contrôle ou autre.
03:07C'était vraiment casse-toi.
03:10À force, je pense que j'ai perdu conscience
03:13à force de perdre trop de sang.
03:16Et c'est des petits jeunes qui habitaient sûrement dans le coin
03:19qui m'ont trouvé par terre dans un coin
03:21et qui ont eu l'intelligence de me mettre sur un scooter
03:25pour essayer de m'emmener le plus vite possible à l'hôpital
03:28puisqu'ils ont tenté de joindre les urgences
03:31mais qu'ils ne répondaient pas
03:33ou qu'ils ne pouvaient pas intervenir en tout cas.
03:38Alors au moment où j'arrive à l'hôpital,
03:41je me rends compte effectivement
03:43de la gravité de mes blessures à ce moment-là
03:45mais ce n'est pas parce qu'on me l'explique.
03:47C'est plus déjà le regard des gens
03:50quand ils se posent sur moi.
03:52Donc déjà, il y a toutes les personnes de la salle d'attente
03:55qui me regardent avec un visage vraiment...
03:57Je vois de l'effroi dans leurs yeux
03:59et c'est surtout quand j'arrive au niveau
04:01de la petite cabine de l'accueil
04:03où il y avait 4-5 personnes aides
04:05et en fait, je n'ai même pas eu besoin de parler.
04:07J'ai juste enlevé ma main de mon visage
04:10et là, j'ai vu qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas
04:14puisque sans même parler, ils se sont tous mis à courir
04:17pour me mettre le plus rapidement possible sur un brancard
04:20et à me rassurer alors que je n'avais même pas encore dit un mot.
04:24Donc c'est là que je me suis dit
04:27au niveau de mon visage.
04:29Pour faire simple, de ma bouche jusqu'à mon front,
04:35tout était cassé, fracturé, endommagé.
04:38J'ai même perdu de l'audition au niveau de l'oreille gauche, etc.
04:42Et puis forcément, mon oeil avait subi trop de dégâts
04:48pour pouvoir le récupérer.
04:50Mais sinon, mâchoire déplacée, gonflée,
04:54tout était cassé, fracturé au niveau de la partie gauche de mon visage.
05:00Je ne pouvais pas manger, je ne pouvais pas...
05:02forcément, je ne peux plus voir.
05:05Je ne pouvais pas non plus écouter de musique du côté gauche
05:08parce que mon oreille était endommagée.
05:10Le tir était tellement proche
05:12que ça a tout détruit sur la partie gauche de mon visage au début.
05:19On pense que ça n'arrive qu'aux autres jusqu'à ce que ça nous arrive.
05:23En plus, comme j'étais militaire,
05:25c'est pour ça que je ne me suis vraiment pas méfié
05:28quand je me suis rapproché d'eux.
05:30Je suis quelqu'un de très humain qui croit beaucoup en l'être humain.
05:34Quand je croise des êtres humains, même s'ils sont policiers, etc.,
05:38je ne pense pas du tout à la violence gratuite.
05:42Donc à ce moment-là, je ne m'imagine pas un seul instant
05:45que la minute d'après, j'allais perdre mon oeil.
05:49Ma passion, c'est le MMA, la musique également.
05:53Ça a mis en péril ma pratique des arts martiaux forcément
05:57puisque j'étais en convalescence pendant une longue période.
06:01J'ai dû me réadapter, etc.
06:04Mais aujourd'hui, grâce aux médecins qui ont réussi à faire un travail formidable,
06:09à récupérer quand même quelques capacités physiques
06:13qui me permettent de pouvoir m'entraîner aujourd'hui
06:16et de pouvoir exercer ma passion.
06:19Je suis quelqu'un de nature qui va toujours voir les choses du côté positif.
06:23Par exemple, je ne vais pas me dire que j'ai perdu mon oeil,
06:26je vais me dire que je vois encore.
06:28Si je souffre en plus, je sais que je vais faire souffrir ma famille aussi.
06:32Donc moi, je dois être fort et dans tous les cas, ça me rend service.
06:36Plus je serai fort, plus je serai solide
06:38et plus je m'adapterai rapidement à mon handicap,
06:40moins je vais en souffrir.
06:44Ça change des vies à tout jamais.
06:46C'est pour ça que même la police devrait être punie plus sévèrement
06:50lors des violences policières.
06:52Ce serait également, déjà pour protéger la population,
06:55mais également pour les protéger d'eux-mêmes des fois
06:58qu'ils peuvent être débordés par leurs émotions.
07:01Dans tous les cas, quand le policier presse la détente,
07:04ça va changer la vie des deux côtés.
07:07Soit il peut tuer d'un côté et briser la vie.
07:10Comme moi, ça a changé ma vie à tout jamais.
07:13Et lui, d'un côté, après, il y a les répercussions de son acte.
07:17Voilà, s'il tue, si jamais il mutile.
07:20Comme je suis quelqu'un d'humain,
07:23je crois en tout cas ou j'espère que ça a l'impact
07:26et que ça l'a triste de voir qu'il a brisé des vies
07:31ou brisé des familles comme on a pu le voir avec, malheureusement, Naël.

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