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L'ancienne Première ministre rappelle qu'un "pacte au niveau européen de dix textes" a déjà été adopté "pour mieux protéger les frontières de l'Europe" et qu'une "loi a été promulguée en janvier" en France. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mercredi-23-octobre-2024-2875654

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00:00Et avec Léa Salamé, nous recevons ce matin la députée du Calvados, ancienne première
00:05ministre d'Emmanuel Macron, elle publie « Vingt mois à Matignon » aux éditions
00:10Flammarion, livre en librairie aujourd'hui.
00:13Vos questions et réactions au 01 45 24 7000 et sur l'application de Radio France.
00:20Elisabeth Borne, bonjour.
00:22Bonjour.
00:23Et bienvenue sur Inter, pour parler tout à l'heure de l'actualité, budget, immigration,
00:28leadership pour le parti Renaissance, mais on va surtout évoquer votre livre.
00:32Il est rare, sous la plume d'un politique, tant il explore, certes avec la pudeur qui
00:39vous caractérise, tout ce qui a pu vous être reproché pendant vos vingt mois à Matignon.
00:46Vingt mois, on a tout de suite dit que c'était mieux qu'Edith Cresson, mais vous tenez
00:51à rappeler que c'est aussi mieux et plus long que Pierre Bérégovoy, Laurent Fabius,
00:57Bernard Cazeneuve ou encore Gabriel Attal.
01:00Première question, Elisabeth Borne, le temps ne passe donc pas à la même vitesse quand
01:05on est un homme et une femme politique ?
01:07Écoutez, ça veut dire qu'il y a une forme de sexisme, moi j'ai été frappé effectivement
01:12quand j'ai quitté mes fonctions, que les commentaires soient sur le fait que j'avais
01:19tenu plus longtemps qu'Edith Cresson, donc on a l'impression que c'est une forme de
01:22rodéo, ce que je raconte dans le livre, et effectivement, on a l'impression qu'il
01:28y a deux catégories de premiers ministres, les vrais, les hommes, et puis il y a une
01:32catégorie, les femmes, avec Edith Cresson et moi, donc voilà, ça traduit bien une
01:37forme de sexisme qui reste bien présente en politique.
01:40Oui, les pages que vous consacrez au sexisme sont à la fois édifiantes et je dois dire
01:44assez tristes.
01:45Tristes qu'on en soit encore là, vous parlez des anecdotes lues dans la presse pendant
01:49que vous êtes à Matignon, Emmanuel Macron préférait Jean Castex parce qu'il préférait
01:53déjeuner avec lui qu'avec vous, car avec lui au moins il pouvait partager une copieuse
01:57côte de bœuf.
01:58Y a-t-il un sujet de sexisme particulier à la Macronie, où c'est général, c'est
02:07partout, dans tous les partis politiques ? On a souvent lu qu'il y avait un boys club
02:11à l'Elysée, que c'était souvent des hommes, qu'Emmanuel Macron était plus à l'aise
02:14avec les hommes.
02:15Est-ce aussi le cas ?
02:16Vous savez, je crois que c'est un phénomène général, il y a eu des tas de lois qui ont
02:20été votées sur la parité en politique, donc on a maintenant autant de conseillers
02:25municipaux femmes que d'hommes, mais il y a uniquement 20% de femmes parmi les mères.
02:32Donc on voit bien qu'avoir des femmes en politique ça va bien, mais il ne faudrait
02:37quand même pas qu'elles prétendent exercer les plus hautes responsabilités.
02:40C'est ça que vous écrivez au fond, c'est qu'on les tolère les femmes, on veut bien
02:43même qu'elles soient là, qu'elles soient élues, mais pas en première place.
02:47Absolument, c'est ce que j'ai vécu effectivement.
02:49Et puis, vous êtes aussi regardés différemment, c'est-à-dire que vous êtes critiqués sur
02:54votre tenue, sur votre look, sur votre façon de manger.
02:58On vous dit que Jacques Chirac, lui, mangeait de la tête de veau quand il allait au salon
03:02de l'agriculture et que vous, vous avez peut-être moins mangé que lui.
03:06Donc voilà, vous êtes renvoyés en permanence à des codes masculins et effectivement, je
03:11pense que pour les femmes qui veulent s'engager en politique, elles sont confrontées à ce
03:15sexisme qui perdure.
03:17Qui perdure et qui est aujourd'hui plus encadré, écrivez-vous, dans l'entreprise que dans
03:22la politique.
03:23C'est-à-dire que c'est plus facile aujourd'hui d'être une femme de pouvoir, une femme au
03:26premier poste, dans l'entreprise qu'en politique.
03:30Disons que dans l'entreprise, quand vous avez des bons résultats, que vous avez tenu
03:34votre chiffre d'affaires, que vous avez un compte d'exploitation qui va bien, vous
03:39imposez.
03:40En politique, les règles sont moins claires et donc on peut toujours vous critiquer,
03:44je vous dis, sur votre look ou sur votre façon de manger.
03:47De manière générale, Elisabeth Borne, on a le sentiment, en vous lisant, que l'expression
03:52« l'enfer de Matignon » est particulièrement appropriée face aux épreuves politiques,
03:58mais aussi personnelles, que vous avez vécues pendant ces 20 mois.
04:01Vous écrivez qu'avoir été Première Ministre a été une aventure extraordinaire, mais
04:06tout de même, les relations distantes avec le Président, les attaques de votre camp,
04:12celles de l'opposition à l'Assemblée Nationale, les 49.3, les rumeurs autour de
04:17vous, ça n'a pas été facile, hein ?
04:19Non, ça n'a pas été facile, en même temps, voyez, l'enfer de Matignon, je trouve que
04:24c'est toujours assez déplacé de dire ça, d'abord parce que si je me réfère à mon
04:28histoire personnelle, il se trouve que mon père, il a sans doute connu l'enfer, c'est
04:34un sujet dont je ne parle pas facilement, mais dont, voilà, j'ai voulu…
04:37C'est un sujet que vous avez, j'ai envie de dire, enfin écrit, dans ce livre, « Les
04:42pages sur votre père », vous racontez l'histoire de votre père et votre histoire familiale
04:46à Emmanuel Macron, juste avant qu'il vous nomme Premier Ministre, et là il vous dit
04:50« mais votre histoire est très forte, vous devriez la raconter, ça vous humaniserait
04:56ou, parce qu'on va revenir aux critiques qu'on vous a opposées d'être trop froide
05:00ou trop techno, et vous ne l'avez pas fait, vous ne l'avez pas raconté, il a fallu
05:05ce livre-là pour que vraiment, vous l'avez fait par des allusions, que vous racontiez
05:10cette histoire très forte de votre père, dont la famille a été déportée à Auschwitz,
05:15qui a perdu toute sa famille et qui ne va pas s'en remettre et qui, en 1972, va se
05:19suicider laissant votre mère seule avec deux petites filles, vous et votre sœur.
05:23En fait, c'est un sujet qui reste assez douloureux et dont je n'aime pas parler,
05:28et c'est plus facile, finalement, de le raconter comme je le fais dans le livre, en fait.
05:33Mais, quelque part, c'est aussi, je pense, une histoire qui me donne beaucoup de force,
05:39parce que quand vous avez des petites attaques, vous relativisez, comme je vous disais, c'est
05:45pas l'enfer, en fait, il y a des gens qui vivent vraiment des difficultés, mon père
05:49a vécu des difficultés, puis je vous dis, tous les jours, il y a des Français qui vivent
05:52des situations difficiles, donc les coups bas, finalement, ça peut glisser.
05:57Et puis, aussi, peut-être, c'est vraiment ce qui est à la base de mon engagement politique,
06:03de se dire qu'on peut venir d'une famille dont mon père était un Français de préférence,
06:08comme on dit, il était venu, il était apatride, ma mère n'avait pas forcément les bons
06:13codes, et néanmoins, grâce à La République, moi, j'ai pu intégrer Polytechnique, devenir
06:21préfète de région, PDG d'une grande entreprise publique, ministre et première ministre,
06:26et c'est vraiment la promesse républicaine qui est au cœur de notre République, voilà,
06:32de notre pacte social, et c'est quelque chose qui m'a vraiment construit, et je
06:36souhaite que chacun puisse se dire que, par son travail, par son mérite, quelle que soit
06:42la famille dont il vient, quelle que soit son adresse, quelle que soit son origine,
06:47il peut réussir dans notre pays.
06:49Mais c'est vrai que c'est étonnant que vous n'en ayez pas parlé davantage, vous
06:53racontez même qu'aux Etats-Unis, ce serait votre premier argument électoral, ce qui
06:57n'est pas faux, mais c'est vrai que dans l'époque du narcissisme, où vous, d'ailleurs,
07:00vous parlez des autres hommes politiques qui s'écoutent beaucoup, se photographient beaucoup
07:05sur TikTok, comprennent qui vous visez, vous n'écrivez pas les noms, enfin, on devine,
07:12vous auriez pu en parler, vous n'en parlez pas, et du coup, vous vous défendez aussi
07:16dans ce livre des accusations d'autoritarisme, de froideur, de l'étiquette de techno qu'on
07:20vous a collée.
07:21Mais pardon, Elisabeth Borne, vous reconnaissez vous-même que vous n'avez pas un talent
07:24d'oratrice immense lors de votre discours de politique générale, et on ne peut pas
07:29dire que vous ayez fait, pendant ces 20 mois à Matignon, dans l'emphase, dans le lyrisme,
07:33dans la rondeur, dans la chair, vous-même, enfin, ce que je veux dire, c'est que l'étiquette
07:38de techno, elle n'était pas à voler, non ?
07:40Je pense qu'il ne faut peut-être pas confondre techno et une forme de pudeur qui renvoie
07:47à une histoire qui est difficile, et c'est vrai que ma conception, c'est qu'on s'engage
07:52en politique pour porter des idées, pour porter des projets, des réformes qu'on pense
07:58importantes pour son pays, et pas pour étaler sa vie.
08:01C'est encore possible, aujourd'hui, la pudeur en politique ?
08:05J'espère, vous voyez, parce que je pense que, moi, je ressens beaucoup une forme de
08:11défiance des Français qui ne se reconnaissent pas dans leur classe politique et qui, peut-être,
08:18n'apprécient pas qu'on soit toujours dans le show-off, comme on peut l'être, et du
08:22coup, j'espère qu'il y a un chemin pour faire de la politique en portant des idées
08:26et puis en s'engageant pour son pays, comme j'ai voulu le faire.
08:29Mais il faut être peut-être un peu show-off, encore, de nos jours, en 2024, alors des
08:33réseaux sociaux pour se faire entendre, non ? Est-ce forcément grave d'être show-off ?
08:38Je pense que ça peut ne pas être grave s'il y a du fond, aussi.
08:42Voilà, et je pense que, vraiment, pour moi, au commencement, il y a le fond.
08:47Oui.
08:48Oui.
08:49Vous parlez aussi des rumeurs, Elisabeth Borne, et notamment de la rumeur de votre homosexualité.
08:55Elle vous a blessée ?
08:56En fait, j'ai trouvé ça incroyable qu'on puisse imaginer qu'à l'heure où on est,
09:03j'aurais pu être homosexuel et pas le dire.
09:06Ça m'a paru complètement incompréhensible.
09:08Donc, ces rumeurs permanentes, je n'ai vraiment pas compris.
09:12Enfin, je veux dire, il y a des tas de femmes et d'hommes politiques qui n'ont aucun problème
09:17pour dire qu'ils sont homosexuels.
09:19Donc, si je l'avais été, j'ai essayé d'expliquer que si je l'avais été, je n'aurais pas eu
09:22de problème pour le dire.
09:24Mais vous voyez, il y a des petites rumeurs comme ça qui continuent.
09:27Et puis, quand vous les démentez, on dit que ça veut bien dire qu'il y a quelque chose
09:30qui est en guiche sur roche, puisqu'elle le dément.
09:32Et puis, si vous ne le démentez pas, on dit, vous voyez, elle ne le dément même pas.
09:35Donc, ça doit être vrai.
09:36Donc, voilà, c'est les aléas de la vie politique.
09:41On a voulu passer du temps, en commençant cette interview, sur les pages personnelles
09:45de votre livre, parce qu'elles sont honnêtes, d'une certaine manière, c'est rare de lire
09:50ça sur la plume d'un homme ou d'une femme politique, encore plus quand elle n'a pas
09:54beaucoup montré, comme vous.
09:56Venons-en à présent à la politique, parce qu'il est aussi question de politique, et
09:59à votre bilan.
10:00Vous regrettez que le macronisme se soit déporté vers la droite, mais là, on est obligé de
10:05vous opposer.
10:06Vous avez été une cheville de ce basculement, en portant et en assumant, souvent à coup
10:10de 49.3, les textes parmi les plus à droite des deux mandats d'Emmanuel Macron.
10:14Vous avez porté la réforme des retraites, et vous l'avez assumée.
10:17Vous avez porté la loi Immigration, Elisabeth Borne, et vous l'avez assumée.
10:20Alors, je pense qu'il y a eu beaucoup de caricatures sur le 49.3, et j'essaye d'expliquer
10:25dans le livre…
10:26Vous dites que ça vous a blessé d'être Madame 49.3.
10:29J'essaie d'expliquer dans le livre quelque chose qui est assez compliqué.
10:34D'abord, s'il y a bien deux textes qui doivent être votés chaque année, c'est
10:39les deux textes budgétaires, le budget de l'État et le budget de la Sécurité sociale.
10:43Là, le chemin va être compliqué avec la nouvelle Assemblée, mais il faut que chacun
10:49soit conscient que s'il n'y a pas de budget, les fonctionnaires ne sont pas payés, puis
10:53votre carte vitale ne fonctionne plus.
10:54Donc, du coup, c'est essentiel de pouvoir doter le pays d'un budget, et comme pour
11:00faire adopter un budget, il faut dix votes, dès lors que les oppositions ont décidé
11:05de voter systématiquement contre, vous n'avez pas d'autre choix que de recourir au 49.3.
11:1123 fois.
11:12Oui, c'est ça.
11:13En 20 mois.
11:14Donc, 10 fois pour un budget, 20 fois pour deux budgets.
11:17On a aussi une loi de programmation des finances publiques, et comme vous le dites, il y a
11:22eu la réforme des retraites.
11:23Et les retraites.
11:24Et les retraites, par 49.3.
11:25Oui, mais vous voyez, moi j'espère…
11:26C'est pas le budget, la réforme des retraites.
11:27Je reviens aussi dans le livre sur pourquoi cette réforme des retraites.
11:33Je crois qu'aujourd'hui, quand on voit l'état de nos finances publiques, et qu'on
11:38est en train de se dire « mais où peut-on trouver de l'argent ? », peut-être qu'effectivement,
11:43des réformes structurelles de ce type-là, avec l'attention que moi j'ai portée,
11:48en discutant beaucoup avec les organisations patronales et syndicales, pour ne pas demander
11:53à chacun, à tout le monde, quel que soit l'âge où il a commencé à travailler,
11:58quel que soit son métier, de travailler uniformément deux ans de plus.
12:02Donc, toutes les mesures qui ont été négociées sont passées totalement sous le tapis, si
12:07je peux dire.
12:08J'espère qu'on aura l'occasion…
12:09Vous aigratiniez Laurent Berger, d'ailleurs, dans le livre.
12:11Je regrette, oui, je dis que je regrette…
12:13Il y a des petits coups, c'est pas au carter sur différentes personnalités politiques,
12:18mais Laurent Berger prend un petit coup de griffe.
12:20Je dis que je regrette qu'alors qu'on a passé des semaines, avec le ministre en
12:25charge Olivier Dussopt, à prendre en compte la situation de ceux qui ont commencé à
12:30travailler tôt, ce qu'on appelle les carrières longues, qu'on a mis en place un fonds pour
12:35prévenir l'usure professionnelle, qu'on a demandé aux organisations patronales et
12:40syndicales de négocier sur l'emploi des seniors, qu'on permet des retraites progressives,
12:46que tout ça soit passé sous silence et que ces mesures qui avaient été saluées
12:52par Laurent Berger dans un tête-à-tête n'aient pas davantage été mises en valeur et qu'il
12:57est, voilà…
12:58Vous ne regrettez pas la réforme des retraites et la loi immigration que vous avez portée
13:03et assumée ?
13:04Vous savez, la réforme des retraites, je vous dis, quand on regarde l'état actuel
13:08de nos finances publiques, je pense que c'est pas en faisant un coup drabeau, en revenant
13:13sur des protections importantes pour les Français, sur l'hôpital, qu'on peut
13:19faire des économies et je pense que c'est important et c'est aussi ma conception de
13:23la politique de porter des réformes qui vous semblent nécessaires pour votre pays, même
13:28si elles ne sont pas populaires.
13:29Olivier, sur l'application de France Inter, bonjour Madame Borne, vous sentez-vous comptable
13:35du déficit de la Macronie et que celle-ci demande aux Français de rembourser ?
13:40Alors, là on rentre dans un sujet compliqué et moi je n'ai pas les éléments précis
13:46sur le sujet.
13:47Il y a eu des erreurs dans l'estimation des recettes pour 2023 et pour 2024, alors
13:56même que la croissance en 2023 était celle qui était prévue.
14:00Donc je pense qu'il y a des rapports d'inspection, il y a une commission d'enquête, moi je
14:07ne peux pas vous donner des éléments, je n'en ai pas.
14:08Vous avez été à la tête de l'État pendant 20 mois, comment vous expliquez ce dérapage ?
14:14C'est vraiment la question que tout le monde se pose.
14:15D'ailleurs, vous l'écrivez dans le livre, comment peut-on découvrir début 2024 que
14:18les recettes fiscales de l'année 2023, où vous étiez au pouvoir, ne sont pas celles
14:21escomptées ? Comment est-ce possible alors que la croissance est bien conforme aux prévisions
14:24? Comment est-ce possible Elisabeth Borne ? Et qui est responsable ?
14:30Je ne vais pas, vous l'avez dit vous-même, il y a des commissions d'enquête et des
14:35missions d'information qui pourront se pencher sur le sujet.
14:38Je ne sais pas si quelqu'un est responsable du fait qu'à un moment donné, les services
14:45du ministère de l'économie ne savent pas estimer les recettes qui vont avec une croissance.
14:51Ce n'est évidemment pas des sujets sur lesquels vous êtes amené à prendre des décisions
14:54politiques.
14:55C'est les services de Bercy qui ont failli ?
14:57Vous voyez peut-être que, moi je peux entendre que l'inflation, que la reprise après le
15:03Covid a pu bouleverser les modèles.
15:05Je n'ai pas d'explication à vous donner et ce n'est pas dans mon habitude de commenter
15:08des éléments que je n'ai pas.
15:09Elisabeth Borne, on revient à l'application d'Inter et au 49.3, beaucoup de questions
15:15sur le sujet.
15:16Gratiela, bonjour, homme ou femme, 20 mois à détruire la démocratie, reine du 49.3.
15:23Sébastien, je vous montre la typographie, a écrit 23 fois 49.3 et finit sa phrase par
15:33« rassemblement national ». Jérôme, vous êtes quand même la reine du 49.3, quelqu'un
15:38de gauche qui a fait passer des réformes graves pour les classes populaires, honte
15:43à vous.
15:44Que répondez-vous à cet ensemble d'interpellations ?
15:47Je réponds que j'essaye d'expliquer dans le livre que le pays a besoin d'un budget
15:53et que quand vous êtes en majorité relative, et pas comme ça avait pu être le cas de
15:58Michel Rocard, à quelques voix près, mais avec 40 voix qui manquaient pour adopter,
16:04pour avoir une majorité, vous ne pouvez pas laisser le pays sans budget et que pour faire
16:10adopter un budget, il faut dit 49.3.
16:12Et donc si demain ou dans une semaine ou dans un mois, Michel Barnier a utilisé le 49.3
16:17pour faire passer le budget, ça ne vous scandaliserait pas ?
16:19Mais vous savez, on est dans une situation dans laquelle il n'y a pas de majorité.
16:24Quand les oppositions ne veulent pas voter, quelle est la voie pour faire adopter un budget ?
16:30Et qu'est-ce qui arrive dans le pays s'il n'y a pas de budget ?
16:33Le 49.3.
16:34Michel Barnier veut, vous le savez, augmenter les impôts sur les grandes entreprises qui
16:38font des profits et surtaxer les plus riches.
16:41Cette nuit, à l'Assemblée nationale, la gauche a réussi à rendre cette surtaxe sur
16:45les plus riches pérenne au grand dam de beaucoup dans votre parti et à droite.
16:50Est-ce une mauvaise mesure à adopter cette nuit ?
16:53Vous savez, depuis que vous avez vu les débats en commission des finances qui s'est finalement
16:57achevé par un rejet du budget, je pense que là aussi on a porté une politique qui me
17:03semble importante qui est de rendre notre pays attractif, d'attirer des entreprises.
17:09Alors on peut évidemment vouloir remettre des impôts, c'est une solution qui a longtemps
17:13été utilisée dans notre pays et je pense que si on a des territoires qui sont dévastés
17:19par la désindustrialisation, qu'on a perdu des emplois, qu'on est un des pays qui a
17:25du mal à sortir du chômage même si on l'a beaucoup baissé depuis 2017, c'est aussi
17:30parce qu'à force de taxer les entreprises, elles vont s'installer ailleurs.
17:33Donc l'idée de Michel Barnier est d'augmenter les taxes sur les grandes entreprises qui
17:38font des profits et sur les plus riches, pour vous c'est une mauvaise idée ? Ça va donner
17:42un coup d'arrêt à la croissance ?
17:43Je pense qu'une surtaxe temporaire, et si on peut s'engager à ce que ce soit temporaire,
17:51les entreprises le comprennent, mais qu'il faut faire très attention et que les entreprises
17:56ont besoin d'avoir de la stabilité fiscale et de savoir quand elles investissent, à
18:02quel régime elles vont être soumises.
18:03Elisabeth Borne, par ailleurs le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, veux-tu
18:08une nouvelle loi sur l'immigration ? Il en faut une ?
18:12J'ai pas de doute que le sujet de l'immigration, quand vous discutez avec les Français, c'est
18:18un sujet de préoccupation.
18:20Notre capacité à intégrer les personnes qu'on accueille, notre capacité à éloigner
18:26ceux qui n'ont pas à rester en France, a fortiori quand il représente un danger pour
18:31notre société.
18:32On a adopté à la fois un pacte au niveau européen, ditexte, pour mieux protéger les
18:40frontières de l'Europe.
18:41On a voté une loi qui a été promulguée en janvier.
18:45Je pense pas que ce soit une très bonne idée, je pense même que c'est une mauvaise idée
18:49de passer son temps à vouloir remettre des lois alors même que les décrets d'application
18:54ne sont même pas pris.
18:55Donc qu'il puisse y avoir des sujets ponctuels à regarder peut-être, dire qu'on reprend
19:00un débat sur l'immigration, ça me paraît une mauvaise idée.
19:03Ce gouvernement est-il selon vous sous surveillance de Marine Le Pen et du Rassemblement National ?
19:09Vous savez, là aussi, je pense qu'il faut que chacun prenne ses responsabilités.
19:14Si le Nouveau Front Populaire dépose systématiquement des motions de censure, et je le dis dans
19:23le livre, des motions de censure rédigées dans des termes acceptables par tous, alors
19:29oui, il expose le gouvernement au vote d'une motion de censure.
19:33Mais je pense que chacun peut prendre ses responsabilités, à commencer par le fait
19:37de ne pas rédiger des motions de censure votables par le Rassemblement National.
19:42Et le message est adressé à qui ?
19:44Eh bien je pense au NFP, qui peut tout à fait, quand il rédige une motion de censure,
19:50ne pas la rendre votable par le Rassemblement National.
19:54Ça veut dire quoi ?
19:55Quand vous faites une motion de censure, vous vous envoyez des critiques à un gouvernement.
20:01Et je ne crois pas que les visions du NFP et du Rassemblement National soient exactement
20:07les mêmes.
20:08Donc on peut s'étonner que le Rassemblement National puisse voter les critiques et la
20:13vision qui est portée par le NFP, comme ça a été le cas pour la NUPES.
20:17On file au standard.
20:19Eric, bonjour.
20:20Oui, bonjour.
20:21Quand M.
20:22Macron aura disparu, le macronisme restera un gros point d'interrogation dans l'Histoire,
20:28puisque d'abord je ne suis pas le seul Français, je pense, à ne pas comprendre ce que c'est.
20:32Ça a démontré ses limites.
20:34Je m'interrogeais sur l'intérêt de prendre la direction d'un parti moribond.
20:38Merci Eric pour cette question cash que l'on transmet à Elisabeth Borne.
20:45Parce que vous êtes candidate pour prendre la tête de Renaissance.
20:48Merci M.
20:49Moi je crois beaucoup, vous savez, à ce qu'apportaient Emmanuel Macron en 2016 et 2017, qui est de
20:57sortir de l'affrontement permanent entre la droite et la gauche, de l'alternance entre
21:03la droite et la gauche, dans laquelle, et je le décris dans le livre, quand la droite
21:09arrive au pouvoir, elle défait ce que la gauche a fait, quand la gauche arrive au pouvoir,
21:13elle défait ce que la droite a fait.
21:14Donc moi je crois beaucoup à l'importance dans notre pays d'avoir un bloc central qui
21:19donne de la stabilité pour régler des problèmes qui sont très profonds dans notre pays et
21:26qui méritent d'être gérés dans la durée.
21:29Et agir de cette façon, c'est-à-dire partir des problèmes vécus par les Français.
21:35Moi je suis élue d'une circonscription rurale, vous savez, les fractures territoriales, c'est
21:39quelque chose qui me parle.
21:40Le manque de promotion sociale dans notre pays, l'ascenseur social qui est en panne,
21:45la nécessité de permettre à chacun, je le disais, quel que soit son origine, de pouvoir
21:50accéder à un métier qui lui plaît et puis de progresser tout au long de sa vie, c'est
21:55des sujets sur lesquels il n'y a pas des solutions toutes faites, ni à droite, ni
21:59à gauche, et sur lesquels je pense que c'est important que le centre puisse proposer des
22:04solutions.
22:05Vous écrivez dans le livre qu'Emmanuel Macron est darwinien, qu'est-ce que ça veut dire ?
22:09Il laisse ses ministres s'entretuer et attend de voir qui va gagner à la fin, c'est ça ?
22:14Je pense qu'il laisse effectivement des débats entre les ministres, qu'à la fin c'est le
22:22plus fort qui gagne, c'est une conception du management de son équipe.
22:26Est-il darwinien par rapport à ce qui va se passer dans son parti, Renaissance ?
22:32Puisque effectivement vous êtes candidate, que vous affronterez Gabriel Attal, qui doit
22:37écrire dans les prochaines heures, je crois, aux militants pour leur dire qu'il est candidat.
22:42Récemment, 62 présidents d'Assemblée départementale Renaissance sur 94 ont réclamé une candidature
22:47de Gabriel Attal dans une tribune à l'Opinion, pourquoi seriez-vous une meilleure présidente
22:51que lui ? Je pense qu'on ne va pas faire le débat
22:54sur le parti ici, moi je vous dis que ce qui m'importe, c'est que je constate que les
22:59français ne se reconnaissent plus forcément dans leur classe politique, comme ils ne se
23:04reconnaissent plus dans leurs élites, que notre pays il est fait de femmes et d'hommes,
23:09qu'il est fait de gens jeunes, brillants, de gens plus âgés et plus expérimentés,
23:16qu'il est fait de gens issus des grandes villes, de Paris, et d'autres issus des territoires
23:21ruraux, et je pense que c'est important que notre parti reflète cette diversité.
23:25Et puis je vous dis, je pense que c'est essentiel qu'on se retrousse tous les manches, qu'on
23:31porte un projet collectivement, que ce ne soit pas une aventure individuelle, et qu'on
23:36puisse collectivement bâtir un projet qui donne de l'espoir à nos concitoyens.
23:42Mais collectivement, pourquoi dans ces cas-là, refuser un ticket avec lui ?
23:46Je suis à ce stade la seule à m'être déclarée candidate, et je vous dis pourquoi, parce
23:52que je pense vraiment qu'il est essentiel qu'on propose aux français, qu'on leur
23:57dise où on veut mener le pays dans les prochaines années, et comment on va s'attaquer aux
24:02difficultés qui vivent au quotidien, et pour avoir beaucoup circulé en France, rencontré
24:08des français, rencontré des militants, je peux vous dire que des difficultés de ceux
24:13qui vivent dans le monde rural, elles sont importantes, que c'est plus compliqué quand
24:17vous habitez dans le monde rural, qu'il y a des injustices, c'est compliqué de se
24:20rendre à son travail, d'aller faire ses courses, c'est compliqué de devoir choisir
24:24sa formation dans le lycée professionnel d'à côté, parce que ça coûte cher d'aller
24:28en ville.
24:29Et vous pensez que vous comprendrez mieux ces attentes des français que quelqu'un
24:32qui habite à la TAL ?
24:33C'est des sujets, moi je n'ai pas envie de faire des comparaisons et des débats ici
24:36sur ce plateau, mais je vous dis que ce qui me tient à cœur, c'est qu'on puisse
24:43collectivement proposer un projet aux français, qui leur donne de l'espoir et qui leur donne
24:50envie, demain, de voter pour notre parti.
24:53Et pas seulement centré sur la com', c'est ce que vous écrivez, vous visez ces hommes
24:56qui n'ont aucun bilan mais soignent leur punchline et leur compte TikTok.
25:00C'est un propos général.
25:02Une dernière question de Gilles sur l'application d'Inter, l'Assemblée nationale est affligeante,
25:10compte tenu de ce que vous connaissez de la fonction de Premier ministre, dans la
25:14situation actuelle, avez-vous de la compassion pour M. Barnier ?
25:19Je pense que je mesure la difficulté de ce que vit Michel Barnier, parce que ce n'est
25:26pas simple d'avoir affaire à une assemblée déjà en majorité relative, on voit que
25:32la situation est encore plus compliquée aujourd'hui puisqu'on a des blocs et il n'y a plus
25:37du tout de majorité.
25:39Donc je pense que c'est vraiment le moment aussi de chercher des compromis, vous voyez
25:43contrairement à l'image qu'on a pu donner de moi, moi je suis plutôt une femme d'écoute
25:48et de dialogue et j'ai essayé de trouver des chemins avec évidemment les députés
25:53de la majorité mais aussi des compromis avec les oppositions et c'est ce qui sera amené
25:58à faire.
25:59Et bien merci Elisabeth Borne, 20 mois à Matignon, le titre de votre livre chez Flammarion
26:06en librairie aujourd'hui.
26:08Merci encore d'avoir été à ce micro.

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