Fin juin 2023, après la mort de Nahel, touché par un tir policier à Nanterre, la France s’embrase. À travers les témoignages de jeunes émeutiers, blessés, spécialistes et militants, ce documentaire inédit de StreetPress décrypte cette semaine d’une rare intensité et décrypte comment cette révolte a été étouffée.
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00:00Ça y est, je savais, c'était fini, il n'y avait pas de retour en arrière possible,
00:16c'était terminé.
00:17Waouh, il s'est passé une dinguerie là.
00:22Un adolescent de 17 ans a été abattu par la police iranienne.
00:25Des heurts ont éclaté cette nuit à Nanterre dans les Hauts-de-Seine.
00:29Mon but c'est d'attaquer les policiers, carrément, ça ne peut pas rester un peu long.
00:34Je ne suis pas d'accord quand on dit émeute, c'est une révolte et c'est un sentiment
00:39qui est légitime et c'est un sentiment que l'on comprend.
00:41Des scènes de violence qui se répètent au même moment dans toute la France.
00:46C'est les émeutes les plus intenses vécues sur la période contemporaine.
00:49Depuis plusieurs jours s'est instauré dans le pays un état de désordre endémique.
00:55Le succès de la cagnotte, 1,6 million d'euros en trois jours.
01:00C'est l'extrême droite sur les réseaux qui a gagné la séquence.
01:02La leçon que j'en tire c'est un, l'ordre, l'ordre, l'ordre.
01:11Que peut-être espérer un être jeune qui naît dans un quartier sans âme ?
01:19C'est l'insulte de cette bande de racailles.
01:22Qui vit dans un immeuble lait, entouré d'une sorte de concours d'autres laideurs.
01:32Et je veux dire aux enfants des quartiers divisifs qu'ils sont tous les filles et les fils de la République.
01:52Je m'appelle Maïsane, j'ai 27 ans, j'ai grandi à Nanterre et je suis la grande cousine de Naël.
02:00J'étais chez moi, je venais de déposer mon enfant à l'école et j'ai reçu un coup de téléphone d'une connaissance et j'entends « Naël, Naël, qu'est-ce qu'il se passe ? »
02:16Elle me dit « Oui, ton petit-neveu il s'est fait tuer. »
02:21Je dis « Je n'ai pas de petit-neveu, je ne comprenais pas, donc je raccroche directement. »
02:25Et je vois qu'elle rappelle, elle rappelle, elle rappelle.
02:27Je vais voir mon mari dans la salle à manger, je lui dis « Je ne comprends pas, on me téléphone, on me dit qu'il y a eu un souci avec Naël, il faut que j'appelle ma grand-mère. »
02:33Donc du coup je téléphone à ma grand-mère entre temps, elle ne me répond pas, l'interphone sonne deux minutes après.
02:38Vraiment deux minutes après ce coup de téléphone et justement c'est la personne qui m'a téléphoné, qui est une connaissance à moi.
02:44Et elle me dit en pleurant, elle arrive, elle se jette à mes pieds mais voilà, elle s'abaisse à moi et elle me dit « Ouais, ils ont tué le fils à Mounia, ils ont tué le fils à Mounia. »
02:54Et je la regarde et je lui dis « Non, c'est pas possible, j'appelle ma grand-mère. »
03:00Je téléphone à ma grand-mère justement, elle était sur BFM au même moment quand elle répond au téléphone.
03:05Et je lui dis « Oui Mané, c'est vrai ce qui s'est passé, c'est vrai qu'ils ont tué Naël. »
03:10Et elle me dit « Oui, il avait que 17 ans. »
03:12Elle commence à pleurer, à s'énerver, etc. au téléphone.
03:14Donc moi je coupe directement parce que voilà, elle me met face à la réalité.
03:18Et j'arrive sur place et je vois ma tante.
03:23Quand je la regarde, quand j'ai vu ses yeux, j'ai compris que c'était fini, que Naël était parti.
03:27Parce que j'ai compris, je suis arrivé, je l'ai attrapé, je l'ai porté, je l'ai pris dans mes bras, je l'ai serré fort.
03:31Parce que j'avais besoin que de ça en vérité.
03:34Je ne pouvais faire que ça, donc je l'ai pris dans mes bras, je l'ai serré, je l'ai serré.
03:38Et en fait, je vois un drap blanc par terre.
03:41Et je vois le drap blanc et je me dis « Mais non, mais ce n'est pas Naël qui a… »
03:44En fait, je ne voulais pas réaliser la chose, donc je disais « Mais non, ce n'est pas Naël ».
03:47Je voulais juste me dire « Mais non, mais non ».
03:49Et je vois tous les policiers qu'il y a autour, etc.
03:51Et je l'ai appris par la suite, mais même le policier, il était sur place.
03:55Il était debout à côté de Naël, sous le drap blanc, donc on ne savait même pas.
03:59Donc la personne qui lui a enlevé la vie, elle était présente.
04:01À côté de lui, nous, sa propre famille, on n'a même pas pu être à côté de lui pendant ces derniers moments.
04:08À ce moment-là, la version de la police, c'est de dire que c'est un refus d'obtempérer
04:13et que Naël a appuyé sur le champignon, a voulu redémarrer la voiture
04:21et a failli écraser le policier.
04:25Et à un moment, la vidéo sort.
04:27Et c'est là qu'on se dit « Waouh ! Il s'est passé une dinguerie, là.
04:32Il s'est passé une dinguerie. »
04:35Il s'est passé une dinguerie, là.
04:37Il s'est passé un truc de fou.
04:52Il est rentré ! Oh putain !
04:57Oh putain !
05:00Chaud !
05:03Ils ont tiré, wesh.
05:07Il est mort, wesh.
05:09C'est fini.
05:14Et c'est fini pour lui.
05:16C'est assez rare, voire unique, d'avoir une vidéo où l'on voit le moment précis de la mort,
05:27c'est-à-dire du tir par arme à feu.
05:29Autant vous dire que c'est peut-être la première fois que je le vois
05:32et peut-être que les gens le voient.
05:34Et donc, finalement, ça rend impossible la narration,
05:37le contre-récit qui est souvent organisé, voire toujours organisé par l'État
05:42et par l'administration policière,
05:44qui consiste à dire « Ah oui, mais là, vous n'avez pas toutes les vidéos,
05:48vous n'avez pas toutes les images, vous n'avez pas tous les angles.
05:52Là, on a précisément le moment où Naël est tué. »
05:56Et donc, évidemment, il n'y a plus de contre-narration possible.
06:01C'est peut-être l'une des raisons qui expliquent aussi cette explosion.
06:05Les images de la mort de Naël deviennent virales.
06:08Et elles circulent.
06:12Ça va commencer par le tweet d'une jeune femme,
06:15la personne témoin du meurtre,
06:17sans savoir que c'était un meurtre d'ailleurs,
06:19quand elle publie cette vidéo,
06:21de façon relativement neutre, autour de 10h30.
06:24Ensuite, une demi-heure plus tard, autour de 11h,
06:27vous avez des médias pureplayers, agrégateurs de données,
06:31on peut citer Serfia ou Anonyme Citoyen,
06:33qui, eux, vont relayer la vidéo, là aussi, de façon relativement neutre.
06:38Et ensuite, autour de 11h45, 11h46,
06:42vous allez avoir deux figures influentes aux deux extrêmes du spectre politique
06:48qui vont publier cette vidéo.
06:50Vous allez avoir Bruno Attal, ancien policier,
06:52très influent dans les sphères d'extrême droite.
06:54Et de l'autre côté du spectre, vous allez avoir David Guiraud,
06:57député insoumis, mais aussi très puissant sur les réseaux sociaux,
07:00qui va, à son tour, publier cette vidéo.
07:03Dans l'émotion de cette journée, en fait,
07:05ce qui marque aussi, c'est la manière dont certaines personnalités,
07:09je pense notamment à Kyla Mbappé, je pense à Omar Sy,
07:13ont très vite dégainé, ont très vite tweeté sur la situation.
07:16Le choc qu'a représenté cette vidéo a forcément posé question.
07:22Et surtout, on savait.
07:24On savait qu'eu égard à la violence de ce qu'on découvrait à ce moment-là,
07:29que ça allait partir en vrille.
07:32Que forcément, ça allait partir en vrille.
07:34C'était évident.
07:35Ça y est les amis, on enterre et il commence à prendre feu.
07:39Ah ouais, ils ont tué un petit DC.
07:41L'exécution de ce gosse fait qu'à un moment, tout le monde avait la rage.
07:52Moi, en tant que journaliste, j'ai couvert beaucoup d'événements similaires,
07:55de refus d'obtempérer, de révolts comme ça dans les quartiers.
07:59Mais je n'ai jamais vu une colère aussi importante s'exprimer si tôt.
08:03C'était dès la fin d'après-midi, il faisait encore jour.
08:08Il y avait des tensions importantes dans ce quartier du Vieux-Pont.
08:11Et ça, c'est quelque chose que j'avais rarement vu.
08:13Et ça m'a saisi tout de suite de comprendre à la fois la colère
08:16et aussi l'importance des événements pour les habitants.
08:18Et le fait que potentiellement, ces violences urbaines,
08:21cette révolte allait durer quand même plusieurs jours.
08:24Et quand la nuit tombe, ça se calme dans ce quartier du Vieux-Pont.
08:27Et les tensions commencent dans un autre quartier, le quartier Pabot-Picasso.
08:31Et là, pareil, c'est très vite très impressionnant.
08:33Il y a plusieurs dizaines de personnes cagoulées, masquées, en colère,
08:37qui sont contre la venue des policiers.
08:40Parce que dès que la nuit est tombée, les policiers sont rentrés dans le quartier
08:43pour le sécuriser d'après leurs éléments.
08:46C'est en tout cas comme ça qu'eux l'expliquent.
08:48Et les jeunes, eux, sont en colère de voir des policiers rentrer dans leur quartier.
08:52Et donc, ça s'est tendu comme ça, très rapidement,
08:55à la fois dès le début de l'après-midi et aussi dans la soirée,
08:57pendant une bonne partie de la nuit.
09:01Le jour de la mort de Naël, je suis en sortie scolaire.
09:04Je vois mon téléphone, il sonne.
09:07Et à ce moment-là, tout s'arrête.
09:09Parce que nous, on a vécu, on se dit, il faut apporter ce soutien et de l'aide.
09:13Et on y va. Je vais tout de suite à Nanterre.
09:15Je me dis, il faut que j'aille à Nanterre. Il faut aller voir la famille de Naël.
09:19Il faut aller voir les jeunes dans le quartier.
09:22Je pense que quand j'arrive, il est peut-être 22h, 22h30,
09:25je vais rester jusqu'à peut-être 3, 4 heures du matin.
09:34Donc là, on est avec la mère de Naël, dehors.
09:38Quand on est dans le quartier, je lance un instant.
09:40Parce que ce moment-là, tout le monde doit le vivre et tout le monde doit le ressentir.
09:44Et je suis avec Mounia, les gens viennent la voir.
09:47Et je dis à Mounia, c'est important que tu puisses parler à ce moment-là.
09:51C'est important que toi, tu puisses casser cette déshumanisation
09:55qui s'est construite très rapidement, qui s'est organisée très rapidement autour de Naël.
10:00C'est très important que les gens puissent s'accrocher à une personne, à une émotion.
10:04Cette émotion, moi je l'avais parce que j'étais avec elle à ce moment-là.
10:07J'étais là et je ressentais les mots et l'émotion de Mounia, mais pas les autres.
10:12Et c'était important que les gens puissent ressentir l'émotion de la mère de Naël.
10:16C'était la seule personne qui pouvait le faire.
10:38Vraiment, ça me fout la rage.
10:40Je suis dans une tristesse folle d'écouter la détresse de cette femme
10:45qui raconte qu'on lui a pris son fils unique.
10:47Et elle était dans un tel état de sidération que c'était à la fois terrifiant et d'une tristesse folle.
10:58Et je sais que je vais écouter jusqu'au bout, en direct.
11:01Et je me suis dit que ça allait être encore un martyr.
11:06Encore un visage auquel il allait falloir qu'on s'habitue.
11:10Et le lendemain, en fait, c'est une flambée.
11:18J'ai 17 ans et là je suis au lycée, je vais passer le bac.
11:22Moi j'ai 17 ans, je viens de Morpa, dans les Yvelines.
11:26La vidéo de Naël, moi je l'ai vue dehors.
11:29Je connais, entre potes, ça tourne, regarde ce qu'il s'est passé et tout.
11:32C'est là où j'ai vu la vidéo de Naël.
11:35Premièrement, c'est choqué.
11:37Parce qu'il avait mon âge, Naël, quand il est parti.
11:40Je sais pas, ça aurait pu être moi.
11:42Il voulait conduire, il avait pas à faire ça, ça c'est vrai.
11:46D'accord avec ça, il a pas le droit.
11:48Mais c'est pas une raison pour mourir.
11:50Jamais de la vie.
11:51On peut pas enlever la vie de quelqu'un comme ça.
11:53Et c'est ça qui m'a fait encore plus mal, c'était quelqu'un qui avait mon âge.
11:56Donc tu te sens indirectement concerné.
11:58Donc je suis sorti le lendemain de la mort de Naël.
12:02On s'est dit que ça peut pas rester impunis ce qu'il s'est passé.
12:06Et que ce soir, on allait faire des émeutes.
12:11On disait qu'il faut qu'on récupère des mortiers, qu'on récupère des malentendants, tout ce qu'il faut.
12:24On a reçu des mortiers, on est partis pour cette mare.
12:27On a croisé les patrouilles de police.
12:29Il fallait pas qu'elle soit là.
12:30Elle est tombée au mauvais moment, elle s'est fait allumer, elle est partie.
12:35Mon but c'est d'attaquer les policiers.
12:37Clairement.
12:41Non mais c'est une dinguerie ça les gars.
12:44On a allumé tout ce qui avait à voir avec la police.
12:47Commissariat, voiture de police, tout.
12:50Tout ce qui avait à voir avec la justice de passé.
12:53Les pompiers, la police, ils prenaient énormément de temps à venir.
12:57Là c'était choquant parce qu'on avait l'impression que c'était l'anarchie et la ville elle était à nous.
13:01C'était vraiment cette impression de fin du monde.
13:05Tu pouvais faire ce que tu veux, tu rentrais dans n'importe quel magasin, tu prenais et personne pouvait rien faire.
13:18Quand t'as tes amis déterminés, franchement t'as peur de rien sur le coup.
13:23Tu te décours en fait.
13:25Tu te dis c'est moi je fais ça, je suis plus le même.
13:29On teste ses limites.
13:31On les teste pas mais on les met à l'épreuve.
13:34C'est vraiment marquant parce que j'étais là pour soutenir.
13:39Moi j'étais là pas pour piller.
13:41Je dis ça parce que je sais qu'à côté dans des villes ça va piller tout ça.
13:44Moi j'étais là pour défendre une conviction.
13:46Ça peut pas rester impuni.
13:48Parce qu'on se demande quand ça va s'arrêter.
13:51Quand je te parle des émeutes en 2005, après ça s'est calmé on va dire.
13:55Après ça repart avec Théo, ça repart avec...
13:58Même si je te parle à l'international, je te parle de George Floyd.
14:02Avec le mouvement Black Lives Matter.
14:04On sait pas quand ça va s'arrêter.
14:06Du coup c'est ça qui m'énerve un petit peu.
14:11Je suis susceptible en tout cas d'être dogé.
14:13Dans certains endroits avec ma couleur de peau.
14:15J'aimerais être cercueil.
14:17Il n'y a aucun voyou, en tout cas avec moi.
14:20Il n'y a pas de racaille.
14:21La plupart des gens ont un casier verge.
14:23On n'a pas de problème avec la police.
14:25On est juste des gens qui ont été choqués par ce qui s'est passé.
14:29On a vu une mère en pleurs.
14:31Et on s'est dit que ça pourrait être notre mère.
14:33Et qu'on s'est révoltés on va dire.
14:36Comme il y a eu plein de révoltes en France, moi aussi on s'est révoltés.
14:39On voulait pas juste faire du mal aux policiers.
14:42Faire du mal à la mairie qui paye.
14:44Aux parents qui payent des impôts.
14:46Ils sont rentrés chez nous, c'était pas ça le but.
14:48Le but c'était vraiment de viser la police.
14:51Qu'ils soient vraiment conscients de ce qui s'est passé.
14:54Et après que ça change.
14:56C'était vraiment une semaine où il fallait se faire entendre.
14:59Et je pense qu'on s'est fait entendre.
15:01Je parle pas spécialement de ma ville.
15:03Je parle du mouvement.
15:05Je pense qu'on s'est fait entendre.
15:17Rebours-toi !
15:19Rebours-toi !
15:22Rebours-toi !
15:24Rebours-toi !
15:26Rebours-toi !
15:28Rebours-toi !
15:34Rebours-toi !
15:39Moi je suis pas d'accord quand on dit émeutes.
15:41C'est une révolte et c'est un sentiment qui est légitime.
15:44Et c'est un sentiment qui est légitime et c'est un sentiment que l'on comprend et qu'on ne peut pas effacer.
15:50On ne peut pas les museler, on ne peut pas leur dire fermez les yeux, on ne peut pas leur dire taisez-vous, on ne peut pas leur dire asseyez-vous.
15:56Parce que quand Naël se fait tuer, Naël se rajoute à une liste de plusieurs jeunes qui se font tuer dans les quartiers.
16:02Et la question qu'il faut se poser au grand public, à tout le monde,
16:06et pourquoi ce sont toujours les mêmes jeunes, les mêmes profils de jeunes qui se font tuer,
16:11que des personnes de couleur, des personnes majoritairement noires et arabes ? Pourquoi ?
16:16Ça veut dire que c'est complètement ciblé, c'est complètement orienté.
16:19Quand il y a une exécution et qu'on voit qu'elle est visée sur un certain profil, c'est assez volontaire.
16:27Il est clair que la nature de la scène et le fait que Naël soit un jeune issu de l'immigration
16:33provoque une émotion très vive auprès d'une jeunesse qui s'identifie très clairement à Naël,
16:40à son expérience, à sa vie dans les différents quartiers de Nanterre.
16:43Mais c'est aussi un temps qui va susciter de l'émotion auprès des élus locaux, des parents, des enseignants, des travailleurs sociaux.
16:52Ce temps émotionnel est important à qualifier comme tel parce qu'il a touché au-delà de la population des jeunes
17:01des quartiers par exemple de Nanterre ou d'autres banlieues parisiennes.
17:05Ça a rassemblé différentes catégories de la population qui condamnent ce qui s'est passé
17:13et qui trouvent que cette scène a un côté insupportable.
17:17Ils étaient plus de 6000 rassemblés pour exprimer leur colère autour de la mère de Naël,
17:23l'adolescent de 17 ans tué par un policier.
17:26Ce n'est pas une marche blanche, c'est une révolte.
17:28Et après, bien évidemment, il faut l'exprimer en étant pacifiste.
17:32Une marche blanche, c'est silencieux normalement.
17:34Et je pense que les jeunes là, c'est un ras-le-bol et qu'ils ne peuvent pas contenir leur rage, leur colère.
17:40Les gens avaient besoin de cette marche-là.
17:43Tout le monde est venu, que ce soit des quartiers populaires, des centres-villes, du plus jeune au plus vieux.
17:50Tout le monde était là et c'était un moment très fort.
17:53C'était un moment où l'émotion était là, de dire là vous avez été trop loin, on ne va pas se laisser faire,
17:59vous n'allez pas recommencer et on est venu à Nanterre et on va marcher.
18:03Et on sentait quelque chose d'unitaire.
18:08Ce qui est arrivé le 27 juin 2023, ce n'est pas un fait isolé, ce n'est pas une bavure d'un policier.
18:14C'est une des victimes de violences policières en France.
18:19L'ONU, le 30 juin 2023, accuse la France d'un racisme systémique et de pratiques discriminatoires constantes.
18:27Elle lui demande de prendre les mesures nécessaires pour y remédier.
18:30La réponse de la France officielle ne se fait pas attendre.
18:33Il y a un déni absolu de ces accusations.
18:38Ce ne sont pas le fait d'individus isolés, des bavures, il y a des violences policières constantes
18:46et il y a un racisme systémique dans le maintien de l'ordre, mais pas que.
18:51Et pour lesquels il est absolument urgent que la France d'une part l'accepte, le reconnaisse et agisse.
19:00Le jour où les bavures seront encore confondues.
19:12C'est nous qui les ont confondues, tombe, tombe, tombe, tombe !
19:15A partir de la troisième nuit, on assiste à un temps que j'ai plutôt qualifié d'insurrectionnel.
19:41Il apparaît lors de la troisième nuit, va toucher progressivement un très grand nombre de petites villes et villes moyennes,
19:49qui étaient auparavant très peu concernées par les émeutes,
19:52et dans lesquelles on va assister aussi à des scènes de pillage et de destruction de magasins.
19:59Alors, l'exemple emblématique de ce deuxième temps, c'est la ville de Montargis, par exemple,
20:04qui est simplement à 120-130 kilomètres de Paris, et qui a connu une nuit typique de ce que j'indique là,
20:14c'est-à-dire avec une dégradation de plusieurs magasins, d'un grand nombre de magasins de la principale rue commerçante,
20:23incendie d'une pharmacie, et d'ailleurs aussi attaque du commissariat.
20:28Si on regarde les éléments statistiques au niveau national, ce que l'on constate,
20:37c'est que les villes qui ont été touchées par les émeutes sont plus pauvres,
20:44concentrent plus de logements sociaux, plus de familles monoparentales, plus de logements suroccupés, etc.
20:51Il y a une corrélation très forte entre le profil social de la commune et la probabilité que des émeutes aient lieu dans cette commune.
21:01Mais le plus important, ce que montre notre travail, ce n'est pas tellement d'établir ce lien qui est assez classique,
21:09mais de montrer que plus que la pauvreté, la précarité ou la présence de populations immigrées ou d'origines immigrées dans la commune,
21:18c'est la concentration dans un ou quelques quartiers spécifiques qui explique le mieux la probabilité de connaître une émeute.
21:26La concentration dans quelques quartiers spécifiques est un facteur amplificateur à la fois du ressentiment,
21:34du sentiment de relégation, de discrimination, qui sont bien évidemment des moteurs essentiels de mobilisation au moment des émeuteurs.
21:42Hier soir, les forces de l'ordre ont arrêté 875 personnes dans toute la France.
21:47Environ 400 en région parisienne et ça explique aussi l'appel d'Emmanuel Macron.
21:52Beaucoup sont très jeunes, Arthur Delaborde.
21:54Effectivement, selon une note des renseignements territoriaux, un tiers des émeutiers sont mineurs avec un âge médian de 17 ans.
22:01Moins de 2% d'entre eux sont connus des services et ce sont quasi exclusivement des hommes.
22:06Ils sont des primos délinquants et qui ne font pas la différence entre une mairie, un parc de loisirs, un accueil pour famille.
22:16Nous, malheureusement, sur mon territoire, on a eu un accueil social et un accueil de famille qui a été incendié.
22:22Et je pense que dans les jeunes qui incendient cet accueil, il y a des gamins qui ne savent peut-être pas que les mamans vont dans son centre.
22:28Donc c'est totalement irrationnel.
22:31D'abord, il faut partir du principe qu'il y a une diversité de profils. Il n'y a pas un profil type.
22:35Concernant les sources, c'est assez biaisé parce qu'on s'appuie sur des sources policières et judiciaires.
22:42C'est les personnes interpellées.
22:43Mais les personnes qui se font interpeller, notamment les jours où ça se passe, en flagrant délit, c'est souvent les personnes les moins expérimentées.
22:52Parce que la révolte, la confrontation, ça nécessite un savoir-faire tactique.
22:57On a différents profils, mais parce qu'il y a différents motifs d'engagement.
23:01Si l'essentiel des personnes se solidarise avec la victime, exprime un sentiment d'injustice,
23:06on a d'autres personnes qui viennent aussi par opportunisme économique, qu'on voit dans les pillages notamment.
23:15On a des personnes qui viennent aussi participer à un mouvement de foule, se faire filmer, filmer eux-mêmes, donc être dans le mood.
23:28Et puis il y a quelque chose qui relève aussi du contentieux politique qui se règle.
23:32C'est un moment qui offre l'opportunité de régler des contentieux politiques.
23:37Soit avec les autorités locales, soit avec certaines institutions, soit avec certains commerçants, soit avec certains voisins.
23:43Moi, c'est souvent quelque chose qui me frappe.
23:45On se dit, tiens, dans une ville, il y a tel ou tel commerce qui a été touché.
23:50La question qui m'intéresse, c'est pourquoi d'autres n'ont pas été touchés et qui étaient juste à côté.
23:54On a un contentieux avec la police municipale pour telle affaire.
23:57On a un contentieux avec tel équipement public qui ne prend pas les enfants du quartier.
24:02On règle ce contentieux-là.
24:04Même si le sentiment d'injustice, la révolte, c'est le moteur et la locomotive principale.
24:09Il y a d'autres rationalités de raison d'agir qui se greffent.
24:13Ils forcent la porte, une porte de l'école.
24:15Et là, mon sang n'a fait qu'un tour.
24:18Pour moi, on n'attaque pas une école.
24:19C'est une école, donc j'ai effoncé.
24:22J'ai essayé de les raisonner.
24:23Je les ai suppliés de ne pas toucher à l'école.
24:27Il est difficile de concevoir que l'école puisse être la cible de dégradation, d'incendie, de destruction.
24:36Puisque dans notre vision nationale républicaine d'intégration sociale,
24:43on place précisément l'école au cœur de ce processus.
24:48Mais c'est parce que l'école ne réussit pas aussi bien qu'ailleurs dans ces quartiers-là
24:54qu'elle est perçue comme une institution de déclassement, d'humiliation, de relégation.
24:59C'est sans doute aussi, pour une part, pour cette raison-là,
25:02qu'elle est parfois la cible d'incendie ou de destruction.
25:06Alors Bloom, on a suivi toute la séquence émeute à travers les publications sur les réseaux sociaux.
25:12Pour cela, on a utilisé nos outils pour aller collecter toute la donnée qui se viralisait
25:19sur les réseaux sociaux autour de l'école.
25:22Et on a aussi utilisé nos outils pour aller collecter toutes les données
25:27qui se viralisaient sur les réseaux sociaux autour de l'école.
25:31L'intensité telle qu'on l'a mesurée était très clairement inédite.
25:35À titre de comparaison, on avait étudié les violences autour de la réforme des retraites
25:40qui avait lieu quelques mois avant.
25:42Et ce qu'on a pu observer, c'est qu'on est à des niveaux à peu près 5 fois plus élevés
25:46pour une séquence beaucoup plus courte sur les réseaux sociaux.
25:49Globalement, on a deux grandes communautés qui se sont affrontées durant toute la séquence.
25:58Autour de thématiques différentes qui vont évoluer au fil du temps.
26:01On a d'abord la communauté d'extrême droite, donc on va dire tout ce qui est RN et au-delà,
26:09qui a beaucoup publié et qui a généré énormément d'engagement.
26:16Et ça sur toutes les plateformes, notamment sur Twitter et sur TikTok, beaucoup sur TikTok.
26:21Et ensuite, là aussi de l'autre côté du spectre politique,
26:25on a une gauche, on va dire qui part de la nupes jusqu'à l'ultra gauche,
26:30qui elle aussi s'est beaucoup investie sur les réseaux sociaux.
26:33Et au final, quand on fait la comparaison entre les deux communautés,
26:37on se rend compte, on a mesuré 5 fois plus d'interactions et donc 5 fois plus d'impact
26:43des contenus en provenance de l'extrême droite qu'en provenance de la gauche.
26:47Donc si on regarde là encore toute la séquence, très clairement,
26:51elle a bénéficié à l'extrême droite.
26:53On voit bien que nous sommes dans un des prodromes de guerre civile.
26:59On voit bien que nous avons...
27:01Vous savez, qu'est-ce que c'est la guerre civile ?
27:04La guerre civile, c'est les affrontements entre une partie de la population
27:08contre les autorités publiques, contre l'État.
27:11Voilà, c'est exactement ce que nous avons.
27:13Nous avons une révolte manifestement ethnique,
27:18mais qui n'est pas seulement définie par des termes ethniques,
27:21qui sont aussi par des termes utilitaires.
27:23Le spectre d'une guerre civile fait partie du narratif que l'on observe
27:27dans l'extrême droite et plus particulièrement sur les réseaux sociaux
27:30depuis des années.
27:31Et là, vous aviez un exemple extrêmement visuel.
27:34Ces images correspondaient exactement à ce narratif autour de la guerre civile qui vient.
27:41Et donc, on a pu observer une très forte mobilisation
27:44des figures d'extrême droite sur les réseaux sociaux.
27:47On peut citer par exemple Damien Rieux,
27:49qui a publié plus de 300 contenus sur la séquence.
27:52Et donc, il y a eu comme une opportunité, finalement,
27:55de prouver que ce qu'ils annoncent depuis des années maintenant
27:58était en train de se réaliser sous nos yeux.
28:08Voilà, on a ouvert ça dans un élan
28:10pour aider une famille en souffrance
28:13suite à l'arrestation et à l'emprisonnement d'un fonctionnaire de police
28:17qui, je le rappelle, est toujours présumé innocent.
28:19La famille n'ayant obtenu aucune aide de personne,
28:23j'ai voulu lui donner un coup de main.
28:25Donc, on a une troisième séquence qui va être initiée au bout de quelques jours.
28:28Donc, la première, la vidéo, la deuxième, la violence
28:31et la troisième, autour de la cagnotte pour le policier.
28:34Et pas seulement de la cagnotte, mais du succès de la cagnotte
28:37et là, ça va réactiver cette polarisation,
28:41ce clivage entre la gauche et l'extrême droite.
28:45Avec, d'un côté, un soutien affirmé
28:49et des relais très importants de cette cagnotte
28:53en soutien aux policiers.
28:55Et de l'autre côté, une dénonciation
28:58de l'existence même de cette cagnotte
29:01dans les sphères gauche-extrême-gauche.
29:03Et comme on a pu l'observer sur l'ensemble de la séquence,
29:06si on fait le bilan de ce moment précis de la cagnotte,
29:09on voit qu'une fois de plus, c'est l'extrême droite
29:12qui sort vainqueur de cette séquence finale.
29:15Ce qui énerve en la matière, c'est le succès de la cagnotte.
29:181,6 million d'euros en trois jours.
29:22Ça, c'est une signification politique, mais ce n'est pas moi qui la donne.
29:25Ce sont les Français qui la donnent.
29:27Et c'est une réponse à l'insurrection qui a eu lieu
29:30dans les cités et au fait que les gens,
29:33à travers cet exemple, veulent soutenir l'État de droit.
29:36Cette cagnotte nous a encore plus énervés,
29:39parce qu'étant donné qu'il y a un jeune qui est mort,
29:42il y a une maman en pleurs, une famille en pleurs,
29:45tu rajoutes de plus que le policier l'a pris
29:48le million d'euros en tuant un enfant,
29:51ça nous a encore plus déterminés.
29:54Si en plus il a eu le droit de toucher cet argent,
29:57il n'y a pas de justice.
29:59Ça dit quelque chose de la manière dont ces gamins,
30:02dans toutes les questions de quartier populaire,
30:05d'immigration, de descendants d'immigrés,
30:08sont aujourd'hui perçus par une part des citoyens français.
30:11Cette cagnotte, quand elle arrive,
30:16ce n'est pas un choc pour nous les familles
30:19qui avons perdu un proche.
30:21Ce qu'on laisse passer aura forcément des répercussions après
30:24et beaucoup plus fortes quand on dénonce ces violences policières,
30:27quand on allait dans la rue, au front, quand on en parlait.
30:30Ce n'était pas pour rien, ce n'était pas pour faire plaisir,
30:33ce n'était pas juste pour dénoncer une mort ou celle de mon frère,
30:36mais c'était pour dénoncer cette question des violences policières,
30:39ce racisme qui est en train de s'installer.
30:41La peine de mort a été abolie,
30:43mais on a l'impression qu'il y a une passation de pouvoir
30:46qui est en train d'être faite et qui est en train d'être légitimée.
30:49Cette cagnotte symbolise, mais on ne tente pas des nues
30:52quand on la voit.
30:54Si on avait pris au sérieux, si on avait mis au centre
30:57ces violences policières-là, les victimes, les morts,
31:00Naël ne serait pas mort ce jour-là.
31:07Les nuits de la banlieue lyonnaise ont été particulièrement chaudes.
31:10Tous les soirs ou presque, vols de voiture, rodéos, incendies
31:13et affrontements avec la police.
31:15Quelques arrestations, 14, et surtout une grande interrogation,
31:18que se passe-t-il et comment éviter le retour à de tels incidents
31:21dans la banlieue lyonnaise ?
31:23Il va y avoir des phénomènes d'émeute à partir des années 80.
31:29Et en 81, juste après l'arrivée de François Mitterrand au pouvoir,
31:34avec un programme qui était de changer la vie
31:37et l'idée aussi de changer la police,
31:39mais très vite, en fait, ils envoient les forces de sécurité mobile
31:43dans la banlieue lyonnaise immédiatement.
31:46C'est ce qu'on appelle les étés chauds.
31:48Parce qu'il y en a qui nous croient qu'on n'est capable de rien faire,
31:51qu'on est toujours réadaptable à la société, comme on dit en vrai.
31:54On a toujours un moyen de se redresser.
31:57Mais là, ils disent non, c'est les mecs, il faut les laisser.
31:59Bien sûr, si ils nous laissent comme ça, nous laisser tomber,
32:01ça va dégénérer, ça va faire du mal.
32:03Il se passe quelque chose, à la fois dans les pratiques de police,
32:05mais aussi dans le fait que ces pratiques sont jugées insupportables.
32:09Ils sont partis ce matin des quartiers sud de Marseille,
32:12de la Caïol, très exactement.
32:14Il va y avoir la marche pour l'égalité,
32:16qui va partir de Marseille et qui va remonter jusqu'à Paris,
32:19au début dans la différence très large,
32:22et après avec une assez grande attention des médias lorsqu'on s'approche de Paris.
32:25Et là, ce qui est intéressant, c'est qu'on a déjà la dénonciation des violences policières.
32:31Et là, on est en 1980.
32:33Aujourd'hui, on est en 2024.
32:36Donc, on parle de 40 années de dénonciations par des organisations,
32:42des associations, des ligues de protection des droits,
32:46de ces violences policières.
32:48C'est quand même quelque chose.
32:50Et puis, on va avoir la première grande émeute nationale en 2005.
32:53Bonjour, bienvenue au 13h.
32:5523 voitures brûlées, plusieurs bâtiments vandalisés.
32:58La ville de Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis,
33:00a été le théâtre d'émeute cette nuit.
33:02Un peu plus tôt, en fin d'après-midi,
33:04deux jeunes du quartier sont morts électrocutés.
33:06Ils s'étaient cachés dans un transformateur EDF
33:08alors que la police intervenait sur un vol de chantier.
33:10Probablement en raison de l'intensité du choc moral,
33:13parce qu'il y a quand même deux adolescents sur trois qui meurent.
33:16Il y a la police qui ment ostensiblement.
33:19Et ça, ça provoque de la colère.
33:21Comment vous pouvez avoir confiance dans les institutions
33:23quand vous avez des responsables politiques
33:25qui ne vous disent pas la vérité ?
33:27Ça accélère le mouvement de protestation.
33:29Le mal-être des banlieues s'exprime violemment,
33:31et pas seulement autour de Paris.
33:33Plotons de CRS, voitures incendiées, jeunes en colère.
33:36Contre la mort inexpliquée de deux adolescents.
33:38Contre le chômage et l'ennui.
33:40Contre le ministre de l'Intérieur.
33:43On va vous en débarrasser.
33:45Et ensuite, vous allez avoir régulièrement,
33:48et de façon continue,
33:50des mini-zémeutes en France.
33:52À chaque fois, à la suite d'un décès
33:55d'une personne qui va mourir
33:58au cours d'une opération de police.
34:00Donc on va avoir en fait une sorte d'habitude
34:02d'avoir deux phénomènes.
34:04Un, les zémeutes à date anniversaire,
34:0614 juillet et nuit de la Saint-Sylvestre.
34:09Et deux, les zémeutes en réaction
34:11à des homicides policiers.
34:13Aujourd'hui, la priorité absolue,
34:16c'est le rétablissement de la sécurité
34:20et de l'ordre public.
34:22Je réfute toute forme d'angélisme
34:28qui vise à trouver en chaque délinquant
34:31une victime de la société.
34:35En chaque émeute, un problème social.
34:38Ce qui s'est passé à Villers-le-Bel
34:40n'a rien à voir avec une crise sociale.
34:43Ça a tout à voir avec la voyocratie.
34:46La loi, l'ordre républicain et la justice
34:50doivent retrouver toute leur place
34:54ici à Amiens.
34:56Ces épisodes de révolts dans les quartiers
34:58sont étouffés par des discours
35:00de type martial.
35:02C'est le discours du retour à l'or,
35:04de l'or de l'autorité,
35:05qui écrase les autres formes de discours.
35:07Un mois après, qu'est-ce que vous avez compris ?
35:09La leçon que j'en tire, c'est un,
35:11l'ordre, l'ordre, l'ordre.
35:12Le gouvernement ne peut pas supporter
35:14qu'il y ait un désordre
35:16parce que c'est la négation de son essence.
35:19Un gouvernement, c'est l'affirmation
35:21d'un ordre politique sur un territoire.
35:23Lorsqu'il y a une émeute qui éclate
35:26et qu'elle se diffuse dans le territoire national,
35:28le travail du ministre de l'Intérieur
35:30c'est de réprimer l'émeute.
35:31Et comment ?
35:32En dissuadant, en montrant des policiers
35:35et en faisant des interpellations.
35:37Ça, ça ne peut pas être autrement.
35:39Dans n'importe quel pays, ça va être le cas.
35:42Après, la question, c'est comment on fait ça ?
35:44Avec combien de personnel ?
35:46Quel degré de brutalité ?
35:48Quel type d'armement ?
35:49Quel type d'unité ?
36:00Des fois, je me dis que je vais me réveiller,
36:02mais en fait, je me réveille toujours
36:03avec la tête déformée,
36:04avec ces migraines,
36:05avec cet oeil flou.
36:07Ça reste dur à porter, en fait.
36:09J'ai eu un trauma crânien
36:12dû à un tir de flashball.
36:14Du coup, j'ai une partie du crâne en moins.
36:17Il y a eu dans la rue une répression
36:19beaucoup plus intense,
36:20mais une répression violente
36:22des personnes qui pouvaient exprimer leur colère
36:25ou des personnes qui étaient juste de passage.
36:27C'est-à-dire qu'on a eu beaucoup de personnes
36:28qui ont été blessées.
36:30Il y a eu des attentes graves
36:32pour des personnes qui étaient juste de passage
36:33où les policiers, dans certaines villes,
36:34étaient en roues libres.
36:36En roues libres, en matière de tabassage,
36:38de coups de tir, de flashball.
36:40Mais il y a eu la volonté,
36:41dans beaucoup de villes de l'État,
36:42de dire que si vous restez dehors,
36:44vous allez le payer cher,
36:45mais dans votre corps.
36:50Je croise la police dans la nuit.
36:53Je ne sais pas exactement quelle heure il était.
36:55Il était tard, après minuit.
36:57J'étais avec de la famille et des amis.
37:00Je suis sorti un peu
37:01pour voir s'il y avait encore une épicerie d'ouverte
37:04ou quelque chose comme ça
37:05pour acheter à manger, à boire, etc.
37:08Puis j'ai croisé une patrouille de plusieurs policiers.
37:12Quand je suis arrivé à leur niveau,
37:14il y a un policier qui m'a dit
37:15« Hé, toi, qu'est-ce que tu fais là ? Casse-toi ! »
37:17Il a élevé son arme et il m'a tiré en plein visage.
37:20Donc je n'ai pas eu trop le temps de réfléchir.
37:23Et puis, j'avais l'impression
37:27qu'on m'avait arraché la partie gauche du visage.
37:30Je me suis senti tombé à la renverse.
37:32J'ai eu une sorte d'instinct de survie
37:35où je ne me suis pas laissé tomber contre le sol
37:39parce que je sentais que j'étais en danger.
37:41Du coup, les policiers m'ont dit de me casser.
37:45Donc je suis parti.
37:48Ils n'ont pas tenté de me suivre ou autre.
37:50Ce n'était pas une interpellation,
37:52une tentative de contrôle ou autre.
37:54C'était vraiment « Casse-toi ! »
37:58Pour faire simple,
38:00de ma bouche jusqu'à mon front,
38:04tout était cassé, fracturé, endommagé.
38:07J'ai même perdu de l'audition au niveau de l'oreille gauche, etc.
38:11Et puis forcément, mon œil avait subi trop de dégâts
38:17pour pouvoir le récupérer.
38:19Mais sinon, mâchoire déplacée, gonflée,
38:23tout était cassé, fracturé.
38:27Au niveau de la partie gauche de mon visage.
38:29Je ne pouvais pas manger.
38:31Forcément, je ne pouvais plus voir.
38:34Je ne pouvais pas non plus écouter de musique du côté gauche
38:38parce que mon oreille était endommagée.
38:40Le tir était tellement proche
38:42que ça a tout détruit sur la partie gauche de mon visage au début.
38:45On pense que ça n'arrive qu'aux autres,
38:47jusqu'à ce que ça nous arrive.
38:49En plus, comme j'étais militaire,
38:51c'est pour ça que je ne me suis vraiment pas méfié
38:54quand je me suis rapproché d'eux.
38:56Je suis quelqu'un de très humain
38:58qui croit beaucoup en l'être humain.
39:01Quand je croise des êtres humains,
39:03même s'ils sont policiers, etc.,
39:05je ne pense pas du tout à la violence gratuite.
39:08Donc à ce moment-là, je ne m'imagine pas un seul instant
39:11que la minute d'après, j'allais perdre mon œil.
39:25L'hébergement
39:43Il y a eu plusieurs éborgnements
39:45que l'on constatait avec l'usage d'armes.
39:47De nouvelles munitions, d'ailleurs,
39:49les beanbags.
39:51On n'avait jamais vu ces munitions
39:53de cette sorte, c'était quelque chose de nouveau.
39:55Et puis, une nuit,
39:57où certes, il y avait des pillages dans le centre-ville,
40:00il y avait eu pas mal de dégradations,
40:02des confrontations.
40:04Il y a un jeune homme qui filme
40:07avec son téléphone portable
40:09des policiers
40:11en train d'interpeller violemment
40:13des manifestants.
40:16Et puis après,
40:18la famille n'a plus de nouvelles de lui.
40:22Et ce n'est que beaucoup plus tard
40:24qu'on apprendra
40:26qu'il a été tué
40:28du fait de tirs
40:30de munitions par le RAID,
40:32qui était justement en faction
40:34dans une des rues de Marseille,
40:36une des rues commerçantes de Marseille.
40:38Et ils lui ont tué dessus, il y avait des vidéos,
40:40on les a retrouvées.
40:42On apprendra même que
40:44le RAID disposait de ces vidéos depuis longtemps,
40:46mais ne s'est jamais manifesté auprès de la police,
40:49essayant de dissimuler
40:51ce qui s'était passé.
40:53Et en fait,
40:55le tir sur Mohamed,
40:57alors qu'il était en scooter,
40:59a atteint le cœur
41:01et il est mort d'une crise cardiaque.
41:03Il y a eu aussi
41:05un autre drame
41:07la veille de la mort de Mohamed,
41:09toujours dans le centre.
41:11C'est un jeune homme qui s'appelle Abdelkarim,
41:13qui se promène
41:15dans les rues de Marseille
41:17et qui va
41:19être visé
41:21par des projectiles.
41:23On apprendra plus tard que ce sont des projectiles
41:25tirés également par le RAID.
41:27Et il se trouve que c'est le cousin
41:29de Mohamed. On pense
41:31d'ailleurs que Mohamed était dans les rues de Marseille
41:33le soir où il était tué,
41:35pour essayer de comprendre comment son cousin
41:37Abdelkarim avait perdu la vue.
41:39Donc voilà,
41:41deux cousins à deux jours d'écart.
41:43L'un qui perd la vue
41:45du fait d'un tir d'arme
41:47du RAID, l'autre qui perd la vie
41:49du fait d'un tir
41:51d'arme du RAID.
41:53Voilà les conséquences
41:55de l'usage
41:57de ces unités
41:59d'élite dans les rues de Marseille
42:01et ailleurs en France également.
42:07Ce qu'on voit, c'est qu'on va s'installer un modèle
42:09de maintien de l'ordre
42:11dans lequel il y a les unités
42:13qui avant étaient les unités dites spécialisées
42:15CRS Gendarme mobile
42:17et on bascule vers un nouveau modèle
42:19où les nouvelles unités spécialisées
42:21en fait c'est quoi ?
42:23C'est la BAC,
42:25c'est le RAID, c'est la BRI.
42:27On voit s'affirmer
42:29un nouveau modèle de gestion
42:31des troubles qui est un modèle
42:33beaucoup plus militarisé,
42:35beaucoup plus
42:37offensif
42:39et qui s'appuie sur des unités
42:41qui ont des armes beaucoup plus dangereuses.
42:43La demande qu'Amnesty
42:45porte sur
42:47le maintien de l'ordre en général
42:49et les forces de l'ordre
42:51qui doivent intervenir en maintien de l'ordre
42:53c'est que ce soit des forces de l'ordre
42:55spécialisées, formées
42:57à intervenir,
42:59à utiliser les armes
43:01dont ils ont la responsabilité,
43:03à avoir une attitude
43:05particulière, à répondre
43:07justement notamment au
43:09rétablissement de l'ordre
43:11et pour cela c'est des heures de formation,
43:13c'est une doctrine
43:15à intégrer
43:17et donc toute unité
43:19spécialisée mais sur d'autres sujets
43:21qui intervientient en maintien de l'ordre,
43:23nous on s'y oppose, on le critique
43:25puisque ça peut entraîner derrière des dérives
43:27et une gestion du maintien de l'ordre qui n'est pas du tout
43:29adaptée.
43:31C'est Gérald Darmanin lui-même
43:33qui a décidé de positionner
43:35le RAID et la BRI
43:37dans les rues
43:39de Paris, Marseille,
43:41Strasbourg et ailleurs
43:43et je crois même,
43:45je pense, j'en suis même presque sûr connaissant
43:47quelques éléments,
43:49que le RAID lui-même
43:51ne comprenait pas
43:53ce choix de Gérald Darmanin.
44:01Beaucoup de membres spécialisés de la police
44:03ou de la gendarmerie
44:05n'ont pas compris encore
44:07pourquoi est-ce qu'on mettait des unités spécialisées
44:09dans l'antiterrorisme
44:11ou dans la grande criminalité
44:13pour des populations civiles
44:15s'agissant des meutes.
44:17Le drame ne pouvait qu'arriver.
44:19Gérald Darmanin
44:21est le principal, le premier
44:23responsable politique
44:25de la mort et des éborgnements,
44:27la mort de Mohamed,
44:29l'éborgnement d'Abdelkarim
44:31et d'autres encore.
44:33Pour comprendre, lire des forces de l'ordre
44:35dont certains se sont mis en arrêt maladie
44:37pour exprimer leur colère,
44:39il faut remonter au début du mois de juillet.
44:41En marge des émeutes
44:43qui ont secoué le pays,
44:45des policiers sont soupçonnés
44:47d'avoir passé à tabac
44:49un jeune homme de 22 ans.
44:51Comma, mâchoire fracturée,
44:5360 jours d'ITT.
44:55Quatre policiers de la BAC
44:57sont mis en examen.
44:59L'un d'entre eux est placé en détention provisoire.
45:01Frédéric Vaud estime
45:03qu'un policier n'a pas sa place en prison
45:05avant un procès. C'est un soutien
45:07à ce fonctionnaire de la BAC de Marseille
45:09placé en détention provisoire
45:11pour des soupçons de violence sur un jeune.
45:13Savoir ce policier en prison,
45:15dit-il aussi, m'empêche de dormir.
45:17La réaction
45:19du directeur général de la police nationale,
45:21c'est du jamais vu.
45:23C'est une réaction qui consiste
45:25à dire, et puis
45:27il le dit dans un interview qu'il donne aux parisiens,
45:29donc avec l'assentiment
45:31du ministre de l'Intérieur.
45:33Jamais un directeur général peut
45:35aller dans un journal, donner une interview
45:37sur deux pages sans l'assentiment
45:39du ministre.
45:41Parce que le ministre est,
45:43comme il le dit lui-même, le premier flic de France.
45:45Donc le directeur général est en fait le deuxième
45:47ou un des seconds, pas le premier.
45:49Donc il ne peut pas agir sans
45:51l'autorité de son chef. Donc il y va
45:53et là il dit, un policier
45:55n'a pas sa place en prison
45:57même s'il a fait des fautes.
45:59C'est incroyable !
46:01On parle de devoir de
46:03réserve, mais là on est complètement
46:05sortis du devoir de réserve.
46:07On a tout d'un coup des fonctionnaires qui disent
46:09à l'Assemblée nationale,
46:11aux pouvoirs judiciaires,
46:13ce qu'ils doivent faire et ce qu'ils ne doivent pas faire.
46:15Et il est appuyé par
46:17le préfet de police de Paris,
46:19qui fait un tweet en disant à moi
46:21et je suis à la tête de 30 000 hommes.
46:23Et là,
46:25c'est vrai que ça faisait un peu
46:27froid dans le dos. Le directeur
46:29général dit que la police ne doit pas être en prison
46:31et moi, préfet de police
46:33de Paris, à la tête de 30 000 hommes,
46:35je vous dis pareil.
46:37C'est quand même impressionnant.
46:3930 000 hommes, ce n'est pas
46:41une petite force.
46:43Donc je ne dis pas qu'il préparait
46:45un coup d'État, mais
46:47je dis que ce sont des propos
46:49qui sont profondément
46:51choquants
46:53pour un politiste
46:55et encore plus pour un citoyen.
46:57Et ce qui va arriver après,
46:59c'est que le ministre de l'Intérieur
47:01et le président de la République
47:03vont très bien s'accommoder
47:05de ces déclarations.
47:07Les policiers ne réclament pas d'être au-dessus des lois.
47:09Ils ne réclament pas d'être en-dessous des lois.
47:11Et les policiers, ça ne peut pas être les seules personnes
47:13en France pour qui la présomption d'innocence
47:15ne compte pas, pour qui les procès
47:17bienatiques l'emportent sur le procès juridique.
47:19Et le président de la République,
47:21il ne se prononce absolument pas
47:23sur ces éléments
47:25et il dit
47:27c'est une affaire en cours, je ne veux pas me prononcer.
47:29Je pense que le ministre de l'Intérieur est plutôt
47:31de notre côté, même idéologiquement parlant.
47:33Je crois qu'il a fait un grand pas aujourd'hui.
47:35Il montre qu'il est encore proche de ses troupes.
47:37Il montre qu'il est prêt
47:39à évoluer et même légiférer
47:41et faire appel peut-être
47:43à son parti politique pour faire en sorte
47:45d'évoluer sur certains sujets.
47:47Il y a une forme d'idéologisation de la police
47:49par le prisme syndical
47:51qui mène
47:53une course, tous les syndicats de police
47:55mènent une course à l'échalote. Ils ont vraiment un rôle
47:57politique et idéologique
47:59qui se rapproche de plus en plus des mesures
48:01d'extrême droite.
48:07J'ai quand même eu un petit peu
48:09peur que les institutions
48:11ne basculent à ce moment-là.
48:13Ça aurait pu être le cas.
48:15Ça n'a pas été le cas. Je ne sais pas ce qui va se passer
48:17les fois prochaines
48:19parce qu'il y en aura d'autres.
48:21Il y a tellement de policiers qui vont être jugés
48:23dans les prochains
48:25mois et prochaines années s'agissant
48:27de violences policières parce qu'il y a beaucoup d'instructions qui
48:29arrivent à leur terme, notamment celles
48:31concernant les gilets jaunes, qu'il y a un moment
48:33ou un autre, les syndicats de police
48:35vont recommencer à taper du pied,
48:37du poing et l'État
48:39fragile à l'égard
48:41des syndicats de police puisqu'ils acceptent
48:43tout ce qu'ils demandent. À un moment ou à un autre
48:45ils vont faire un faux pas.
48:47La peur qu'on a
48:49globalement d'un point de vue institutionnel
48:51c'est que la police devienne
48:53un pouvoir à part entière
48:55au même rang que le pouvoir
48:57législatif, le pouvoir
48:59exécutif et l'autorité judiciaire.
49:01Et là, si on a quatre pouvoirs
49:03au lieu d'en avoir trois, ce qui est
49:05le cas depuis la révolution française
49:07et ce qui permet une séparation des pouvoirs,
49:09on pourrait avoir ce qu'on appelle
49:11un État de police. C'est ça qui est inquiétant
49:13dans la réaction des institutions.
49:27Ils ont mis en place cette mission
49:29avec l'objectif
49:31de comprendre ce qui s'est passé
49:33à l'occasion de ces émeutes.
49:35François-Noël Buffet, je suis sénateur du Rhône
49:37et je préside la commission
49:39des lois du Sénat
49:41d'octobre 2020.
49:43Et dans le cadre
49:45de notre travail parlementaire
49:47et de notre travail de contrôle,
49:49nous avons décidé,
49:51j'ai proposé à la commission, de mener une mission
49:53sur les émeutes
49:55qu'a connues la France en juin 2023.
49:59Dès qu'on a une exposition nationale
50:01comme en 2005 ou là en 2023,
50:03on a des commissions d'enquête.
50:05Sur les raisons
50:07qui ont amené
50:09à ce niveau
50:11d'intensité inédit.
50:13On fait mine de s'interroger.
50:15Tout le monde est interrogé, tout le monde a le droit à la parole.
50:17On fait des grandes synthèses et on fait des préconisations.
50:19C'est un outil formidable
50:21pour dire je suis à tel endroit, on se retrouve à tel endroit,
50:23tout le monde se regroupe à tel endroit, ici ça ne se passe pas,
50:25la police n'y allait pas, ici il n'y est pas,
50:27on y va, là on peut rentrer par là.
50:29On demande un renforcement de la coopération, des échanges
50:31entre les réseaux sociaux et les services de l'État
50:33pour la réunion régulière du groupe de contact permanent
50:35pour mieux anticiper la coordination...
50:37J'ai vu ce qui a été gardé
50:39dans les préconisations,
50:41tout l'aspect
50:43remis en question
50:45de la plupart des sociologues, des experts locaux
50:47et des manières de faire de la police,
50:49tout ça passe à la trappe,
50:51à la fois des solutions gouvernementales,
50:53à la fois des préconisations
50:55d'une commission sénatoriale,
50:57c'est-à-dire qu'on a une espèce de surdité politique organisée
50:59et assumée.
51:01Moi je pense
51:03qu'ils ont une incompréhension chronique
51:05parce que
51:07on n'est pas du tout sourds à rien.
51:09En tous les cas, le pouvoir législatif
51:11je pense a fait son travail de contrôle
51:13et d'analyse. Il appartient maintenant
51:15au pouvoir exécutif
51:17de se saisir de ces sujets-là
51:19et d'aller au bout des choses.
51:21Je pense, et ça ira dans le sens
51:23de nos
51:25universitaires,
51:27et de nos chercheurs,
51:29que si on s'en arrête là,
51:31on aura des problèmes à nouveau.
51:33Et tant qu'on ne sera pas capable,
51:35de façon plus large,
51:37de définir ce qu'est un destin collectif,
51:39de définir quel est le rôle de chacun,
51:41de faire respecter les règles
51:43de notre vie en société, mais également
51:45que chacun trouve la possibilité
51:47de faire son parcours
51:49sur le territoire, on sera en difficulté.
51:51C'est un sujet fondamental,
51:53un sujet politique fondamental
51:55et il faut que ceux qui sont en capacité
51:57de proposer des solutions,
51:59en réalité, les gouvernants,
52:01nous on peut faire bien tous les rapports du monde,
52:03c'est très intéressant,
52:05mais ce sera insuffisant, se saisissent
52:07de ce sujet à défaut, on aura des lendemains
52:09difficiles.
52:11Et le problème c'est ça,
52:13c'est comment on arrête de faire bégayer l'histoire.
52:15Et donc pour ça,
52:17il faut une volonté politique.
52:19Voilà, il faut faire en sorte
52:21d'offrir à chacun et à chacune
52:23un horizon possible,
52:25un horizon désirable.
52:27C'est ce que l'État français
52:29à l'égard des populations
52:31issues de l'immigration post-coloniale,
52:33tant que la France
52:35n'aura pas à régler ce problème,
52:37tant qu'on aura un regard criminalisant
52:39sur les quartiers populaires,
52:41tant qu'on commettra des contrôles
52:43de faciès en permanence,
52:45tant qu'on commettra des violences
52:47et qu'on tuera des gamins de 16 ans,
52:49tant qu'il y aura ça,
52:51il y aura d'autres émeutes,
52:53d'autres révoltes populaires, quel que soit le terme
52:55qu'on légitimise, d'autres morts,
52:57d'autres blessés, d'autres colères.
52:59Et évidemment,
53:01on attend impatiemment
53:03que l'État,
53:05ses représentants,
53:07puissent prendre la mesure du problème.
53:09C'est une question
53:11aussi ethnique parce qu'on est dans un continuum colonial,
53:13mais c'est aussi
53:15et surtout une question sociale.
53:17Si on met tous les pauvres
53:19au même endroit, dans des cages à poules,
53:21dans des conditions de vie pourries,
53:23sur une bretelle du périphérique
53:25ou de l'autoroute A1
53:27et de l'A86,
53:29avec pas de transport,
53:31pas d'école
53:33digne de ce nom,
53:35pas de prof,
53:37pas de taf,
53:39bien sûr que c'est criminogène,
53:41mais ça, n'importe qui d'un peu sensé le sait.
53:43Donc on le sait,
53:45mais pour ça,
53:47il faut y croire,
53:49il faut avoir un projet, il faut investir,
53:51il faut avoir un récit.
53:53Sauf qu'en ce moment, ceux qui portent un récit
53:55qui s'avère plus désirable,
53:57c'est peut-être pas le bon côté de la pièce.
54:01Les gilets jaunes, c'est aussi ce qu'ils ont dit.
54:03On veut de la dignité.
54:05Et ça s'est fini comme un pareil.
54:07Et on ne leur a pas répondu.
54:11La banlieue, c'est des zones pauvres,
54:13dans lesquelles les gens ne votent pas beaucoup.
54:15Donc électoralement,
54:17100 habitants en banlieue pèsent beaucoup moins
54:19qu'une petite ville française.
54:21Parce qu'il n'y a pas
54:23l'expression politique
54:25qui lie le gouvernement
54:27à la population.
54:29Un gouvernement, il va répondre
54:31aux attentes exprimées
54:33dans les urnes. Mais si vous avez des zones
54:35où les gens ne votent pas et qui sont pauvres
54:37et donc où il n'y a pas beaucoup de moyens de se faire entendre non plus,
54:39il va être plus insensible
54:41à ces personnes-là.
54:45C'est nous qui avons des questions.
54:47C'est le gouvernement de répondre à nos questions.
54:49Pourquoi ça se passe comme ça ?
54:51Pourquoi la police est-elle violente ?
54:53Pourquoi il y a-t-il des violences policières ?
54:55Pourquoi il y a-t-il de l'impunité policière ?
54:57Pourquoi il y a du racisme ?
54:59Pourquoi il n'assume pas qu'il y a du racisme ?
55:01Assumer qu'il y a du racisme, ce n'est pas une faiblesse,
55:03c'est pouvoir sauver des vies.
55:05Pourquoi ? Nous avons tant de questions.
55:07Et nos vies en dépendent.
55:09Mon frère a été tué. Naël a été tué.
55:11Et beaucoup d'autres ont été tués.
55:13On est dans un tournant.
55:15C'est important que ces jeunesses se disent
55:17qu'ils sont complètement légitimes
55:19et qu'en face, ils ne se rendent pas compte
55:21que c'est eux qui ont de la chance
55:23de les avoir.
55:25Et toutes ces jeunesses,
55:27elle a une histoire qui revient de loin.
55:29Et j'ai envie de leur dire que ce sont des enfants
55:31et des petits-enfants de héros qui ont combattu
55:33pour ce pays, pour la France.
55:35Si on avait considéré
55:37nos arrières, leurs arrières,
55:39grands-parents, aujourd'hui,
55:41ils auraient un statut de héros.
55:43Les petits-enfants de héros.
56:13...
56:29Voilà 3 mois que la Nouvelle-Calédonie
56:31est dans l'impasse, en proie
56:33à une nouvelle flambée de violence.
56:35Le bilan est porté à 11 morts
56:37après qu'un homme a été tué par des tirs de gendarmes
56:39à tilleau. Les esprits s'échauffent
56:41en Martinique. Et ça fait depuis
56:43une quinzaine de jours que ça dure.
56:45Depuis le début du mois de septembre.
56:47Regardez les dernières images
56:49dans les rues de Fort-de-France
56:51ces derniers jours.
56:53Le préfet
56:55de Martinique a instauré
56:57un couvre-feu partiel dans certains
56:59quartiers.
57:01Monsieur François-Noël Buffet. Je ne sais pas.
57:03Je ne suis pas gouvernement. Ministre du Premier
57:05ministre, chargé des Outre-mer.
57:07Chacun sait ici que
57:09il y a des situations de tension.
57:11Évidemment que
57:13je les connais.
57:15Et que ça va être la première des priorités.
57:17Bien sûr.
57:19À peine nommé,
57:21Bruno Retailleau annonce la couleur
57:23sur ses réseaux sociaux.
57:25Honoré et fier de servir la France, au sein du
57:27gouvernement de Michel Barnier.
57:29Les forces de l'ordre, qui risquent leur vie pour la sécurité
57:31de nos compatriotes, peuvent compter
57:33sur moi. Je serai leur premier soutien.
57:35La politique de la majorité
57:37nationale, avec trois priorités.
57:39Vous les retiendrez
57:41facilement.
57:43La première, rétablir l'ordre.
57:45La deuxième,
57:47rétablir l'ordre.
57:49La troisième, rétablir l'ordre.