Les invités du jour : Olivier Goy et Anne Fulda, leur témoignage fort dans "Invincible"

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Retrouvez William Leymergie entouré d’experts, du lundi au vendredi en direct dès 12h30, pour une émission dédiée aux problématiques de notre quotidien.

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00:00Nos invités du jour viennent nous parler d'une maladie qui touche 7 à 8 000 personnes en France, la maladie de Charcot.
00:06Bonjour Anne Fulda, bonjour Olivier Gouin, bienvenue à tous les deux.
00:09Vous avez écrit ensemble un livre qui s'appelle Invincible, derrière le sourire, le combat d'une vie,
00:15publié aux éditions de l'Observatoire, qui retrace votre combat, Olivier, contre la maladie,
00:21et qui est surtout une ode, un appel à vivre, une ode à la vie.
00:25La maladie de Charcot, je le rappelle, c'est une maladie incurable qui paralyse petit à petit tous les muscles
00:31et qui prive le patient de la marche, de la parole, mais pas de sa tête, pas de son cerveau.
00:37Alors vous allez pouvoir vous communiquer grâce à la technologie, grâce à un ordinateur qui se substitue à votre voix.
00:45Vous signez donc ce livre, Olivier, vous avez fait un film, Invincible été, vous levez des fonds en faveur de la recherche,
00:52aussi pour mieux faire accepter le handicap, vous êtes l'ambassadeur de l'Institut du cerveau,
00:57vous organisez un concert à l'Olympia la semaine prochaine, où est-ce que vous puisez toute cette énergie ?
01:04Mon énergie vient de l'amour de mes proches et de mes très proches.
01:08C'est indispensable pour garder le sourire. J'ai aussi une soif insatiable d'action,
01:14besoin de me sentir utile au moment précisément où la maladie veut me réduire au silence.
01:20Mon corps est ce qu'il est, et paradoxalement, je l'oublie.
01:24Je me sens très bien dans ma tête, simplement heureux d'être vivant, vraiment vivant.
01:31Cela peut vous paraître prétentieux, mais je n'ai même pas le sentiment d'être un demi-homme.
01:37Justement, cet amour de la vie, est-ce que vous avez su l'avoir, est-ce que vous avez su apprécier la vie
01:43dès l'annonce de votre diagnostic ou il vous a fallu du temps ? Est-ce que votre réaction a évolué ?
01:50L'annonce de cette maladie en décembre 2020 a été un énorme choc.
01:55J'étais perdu. Incapable de voir du positif dans toutes les informations que je recevais.
02:013 à 5 ans à vivre. Pas de traitement. Prisonnier de mon corps qui se dégrade.
02:07Bref, je déprimais. Heureusement, une psychologue fantastique à l'hôpital me dit d'y mettre en la main.
02:14Au bout de trois mois, grâce à elle, je comprends que si je déprime, je vais me punir deux fois.
02:20Il faut que je vive intensément, malgré l'annonce de ma mort prochaine.
02:25Puis, j'ai ouvert les yeux sur le monde. Plus je me dévoilais, plus je comprenais le monde.
02:31J'ai reçu des milliers de témoignages poignants. Des témoignages fous.
02:36De gens connus et inconnus. Des handicaps invisibles.
02:40Des viols. Des violences familiales. J'ai commencé à voir le monde différemment.
02:47Avec ces cassures, ces fissures. Cela a été le déclic de tout ce qui arrive aujourd'hui.
02:53C'est pour cela que j'ai transformé ma vie en un combat pour la recherche et le handicap.
02:58Le film et, aujourd'hui, le livre, sont autant de porte-voix pour mes actions.
03:03Vous vous battez pour les autres, surtout, c'est ce que vous dites.
03:07Anne, c'est ce qui vous a touchée quand vous avez rencontré Olivier ? Cette résilience, cette force, ce courage ?
03:12Oui, bien sûr. J'étais aussi, moi-même, touchée personnellement.
03:15Parce que ma mère avait une maladie neurodégénérative assez semblable.
03:19Mais c'est vrai que ce qui m'a touchée et frappée chez Olivier, c'est cette force vitale incroyable.
03:25Cette énergie incroyable. Il l'a dit, il vient de le dire.
03:29Il y a eu, évidemment, une période extrêmement difficile suite au diagnostic.
03:33Mais très vite, il a décidé, j'allais dire, de se muer.
03:38Mais non, pas de se muer, parce que c'est un combattant de toute façon.
03:41Donc, il a continué dans la même veine qu'avant.
03:45Avant, c'était un chef d'entreprise, entrepreneur qui réussissait très bien.
03:52Qui a créé des entreprises avec beaucoup de succès.
03:55Qui était vraiment très, très impliqué dans sa carrière professionnelle.
04:01Et dans le devenir de son entreprise.
04:04Et en fait, cette énergie qu'il a en lui, il l'a utilisée pour désormais se battre pour la recherche sur la maladie de Charcot.
04:12Et plus généralement, sur la condition des personnes handicapées en France.
04:18Qui reste un vrai sujet.
04:20On voit d'ailleurs, il y a eu un petit épisode dont on avait parlé rapidement.
04:23Lorsqu'après les paralympiques, tout le monde disait, extraordinaire, ça fait bouger les mentalités.
04:28Et la constitution du gouvernement, ils ont rattrapé, il n'y avait pas de ministre délégué aux personnes handicapées.
04:34Mais vous étiez exprimé, d'ailleurs.
04:35D'ailleurs, Olivier s'était exprimé.
04:37Parce qu'effectivement, c'était étonnant.
04:39Ils vous ont écouté, puisqu'ils ont nommé depuis un ministre.
04:42Et alors, comment de cette rencontre qui vous touche, qu'on arrive à décider d'écrire un livre ensemble ?
04:49Écoutez, en fait, la première fois que j'ai rencontré Olivier, c'était pour un portrait pour Le Figaro.
04:54C'était avant la sortie du film.
04:55Et puis, peu à peu, j'ai vu, avec la sortie du film, combien Olivier devenait un autre homme.
05:02Il était, d'une certaine façon, transfiguré par la maladie, étonnamment.
05:05C'est-à-dire que ce n'est plus le même homme.
05:08C'est vrai que ce n'est plus le même homme.
05:10Vous dites qu'il pourrait être diminué.
05:11Et au lieu de ça, il est augmenté.
05:12Il est devenu une sorte d'homme augmenté.
05:14Et parce qu'il a mis cette énergie folle dans ce combat.
05:21Et qu'en plus, comme il le disait tout à l'heure, il y a énormément de gens qui se confient à lui.
05:26Il y a quelqu'un, Alexandre Kouchner, qui a utilisé le terme d'influenceur bonté.
05:32C'est vrai qu'il y a de ça.
05:35Mais alors après, même physiquement, il y a une...
05:40C'est-à-dire qu'avant, il ne souriait pas autant.
05:42Ça, c'est incroyable.
05:43C'est vrai que cette lumière dans les yeux et ce sourire.
05:45C'était un entrepreneur très sérieux.
05:48Parfois un peu dur.
05:51Mais c'est vrai que tous ses proches le disent.
05:54Ses centres d'intérêt ont bougé.
05:56Après, ce qu'il est à l'intérieur, ça demeure.
05:59Je le dis souvent.
06:00Et ça fait partie aussi, ça explique aussi le succès.
06:03La façon dont il arrive à faire bouger les choses, à faire bouger les lignes.
06:08À obtenir des fonds pour faire avancer la recherche.
06:11C'est quelqu'un d'extrêmement exigeant.
06:13Et il l'est toujours.
06:16L'exigence pour lui et pour les siens demeure.
06:21Parmi les combats, il y a Loïc Rézy-Bois,
06:23qui lui aussi atteint la maladie de Charcot,
06:25qui est décédé le 24 septembre dernier.
06:27Il y a très peu de temps.
06:28Et qui était un fervent défenseur du suicide assisté.
06:30Il a dit espérer que sa mort serve de déclic.
06:33Est-ce que vous allez continuer son combat ?
06:36Pas forcément pour vous d'ailleurs.
06:37Parce que je ne crois pas que ce soit une solution que vous envisagiez.
06:41Nombreuses sont les personnes qui veulent entendre mon avis sur la fameuse fin de vie.
06:46Un sujet extrêmement complexe.
06:48Déjà, je dois confesser que je n'aime pas que la SLA soit systématiquement choisie comme la maladie justifiant cette loi.
06:55On peut vivre heureux avec Charcot.
06:58Si je personnellement choisis le camp de la vie, je comprends, en revanche, totalement la nécessité de nouvelles règles.
07:05À condition qu'elles s'accompagnent d'un discours pro-vie et de moyens massifs pour mourir confortablement.
07:10Les fameux soins palliatifs.
07:13Le décès récent de Loïc est particulièrement un choc pour nous tous.
07:17Un grand combattant de Charcot.
07:19Un grand militant.
07:21Il était entré en sébation profonde.
07:24Faute de mieux.
07:26Comprenez bien ce que cela veut dire.
07:28On vous endort et on arrête de vous alimenter.
07:31Jusqu'à ce que votre cœur lâche.
07:34Une torture mentale et physique.
07:36Oui, c'est très douloureux.
07:38Oui, c'est sûr que...
07:39Alors vous, quel est le message, Olivier, que vous voulez absolument transmettre en vous exprimant par tous les moyens possibles ?
07:45La vie, on l'a compris, mais au-delà ?
07:49Je veux éclairer la vie en parlant de la mort.
07:52Notre questionnement, avec âme, se veut utile au plus grand nombre.
07:57Les malades, évidemment, mais aussi les proches comme les moins proches.
08:01La maladie de Charcot est un prétexte pour parler de la vie sans faux semblants.
08:06Que dire ? Que faire ? Comment réagir quand la foudre frappe à côté de vous ?
08:11Comment interagir au quotidien avec un malade que l'on soit du cercle familial ou un soignant ?
08:16Comment définir ses nouveaux objectifs de vie ?
08:19Comment éviter les pièges tendus par tous les indélicats profiteurs du désespoir ?
08:24Il est possible que, malgré tout, le sujet frévote les spectateurs.
08:29Mais je leur fais une promesse.
08:31S'ils ne rient pas au moins une fois au fil des 224 pages, je les rembourse.
08:35Vous les remboursez. Moi, pas besoin de me rembourser parce que j'ai beaucoup ri en lisant votre livre.
08:40Merci beaucoup à tous les deux.
08:42D'un mot, Anne, ça a changé quoi dans votre vie, la rencontre avec Olivier ?
08:45Ça vous a transformé, vous aussi ?
08:47Je ne sais pas si ça m'a transformé, en tout cas, cette exigence que je peux avoir.
08:52Peut-être qu'elle s'est accrue, il l'a nourrie.
08:56Il y a une chose aussi, c'est qu'Olivier a beaucoup d'humour.
08:59C'est quelque chose de très intéressant.
09:01Ça a peut-être changé juste une chose.
09:04Effectivement, la maladie de Charcot est souvent mise en avant par ceux qui sont des partisans du droit à mourir, comme on dit.
09:11On a rencontré plusieurs malades de Charcot, au stade beaucoup plus avancé qu'Olivier,
09:20et qui n'avaient pas envie de mourir.
09:23La neurologue d'Olivier que j'ai rencontrée a des propos très intéressants,
09:26parce qu'elle dit que ça peut rassurer certains de savoir qu'ils peuvent y recourir.
09:30Certains vont en Suisse, en Belgique, pour éventuellement pouvoir abréger leur vie.
09:36Mais finalement, ils sont très minoritaires à décider d'y recourir.
09:41Merci à tous les deux.
09:42En tout cas, merci Olivier Gouin, merci Anne Fulda.
09:44Je rappelle votre livre Invincible aux éditions de l'Observatoire.

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