Le travail de Michel Barnier ne s'arrête jamais

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Michel Barnier sur tous les fronts !

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00:00Ce soir, je vais simplement dire que je suis profondément heureux pour Christian Cheneau
00:11et Georges Malbrunon, pour leur famille, pour tous leurs amis et je veux simplement aussi
00:19dire merci à tous ceux qui nous ont aidés pour cette libération.
00:22C'est le succès de la diplomatie française.
00:26Est-ce que les otages sont de retour en ce moment ?
00:30Je vous laisse.
00:34Quelques minutes plus tard, nous retrouvons le ministre au Quai d'Orsay où il a accepté de nous recevoir.
00:39Si vous venez de nous rejoindre, nous vous rappelons bien sûr l'information heureuse de la soirée.
00:43Georges Malbrunon et Christian Cheneau sont libres.
00:46L'information est tout à fait officielle.
00:48Jacques Chirac, qui était en vacances à Marrakech, rentre ce soir à Paris.
00:51C'est un aboutissement de quatre mois pendant lesquels, jour après jour, heure après heure,
01:00j'avais cette préoccupation principale dans ma tête.
01:03Vous avez souffert pendant ces quatre mois ?
01:05J'ai souffert parce que je pensais à eux en me disant qu'une bombe pouvait tomber sur leur maison,
01:10que chaque jour qui passait était un jour dangereux pour eux.
01:14Et puis j'ai souffert de ne pas pouvoir parler parce que pendant quatre mois,
01:18j'ai, en termes de communication, utilisé quatre mots.
01:21La patience, la confiance, la précaution, la discrétion.
01:26Ce n'est pas beaucoup, quatre mots, pour les gens qui ont envie de savoir, qui s'inquiètent.
01:31Cette maîtrise délibérée de notre communication pour des raisons de sécurité.
01:37Parce que tous les mots pouvaient être mal compris ou être utilisés contre eux.
01:43Ça vous met dans une position inconfortable vis-à-vis des médias, vis-à-vis de l'opinion.
01:47Aujourd'hui, on peut en savoir un peu plus sur les conditions de la libération des otages ?
01:51Ils ont été libérés après un long dialogue, comme je vous l'ai dit, après un dialogue politique.
01:57Vous avez dû payer ?
01:59Nous n'avons pas payé d'encens, non.
02:01Pas d'incens ?
02:02Nous n'avons pas payé d'encens.
02:03Juste une négociation ?
02:04Nous avons négocié avec des gens qui exigeaient des réponses
02:09et qui avaient envie probablement de choisir le moment où cette libération aurait le plus d'impact.
02:17C'est probablement la raison pour laquelle, finalement, elle est intervenue, au terme de ce dialogue, à la veille de Noël.
02:27Entouré de son épouse, de ses plus proches collaborateurs et des membres de son cabinet, le ministre offre le changement.
02:39Je leur avais promis une coupe de champagne si on sortait Christian Cheyneau et Georges Malbredon.
02:44Voilà, je tiens ma promesse.
02:48Quelques instants plus tard, le ministre s'éloigne un verre à la main.
02:57Il a tenu à apporter lui-même cette coupe de champagne à l'homme qui est au téléphone.
03:04Nous ne savons pas qui il est.
03:07Mais le ministre nous demande de sortir.
03:09Pourquoi est-ce qu'il tenait à porter lui-même ce verre de champagne ?
03:12C'est qui ce monsieur ?
03:14C'est le directeur de cabinet.
03:16C'est quelqu'un qui, depuis 124 jours, travaille jour et nuit dans la discrétion.
03:24Travaille jour et nuit à la libération des otages ?
03:26Oui. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le travail ne s'est jamais arrêté.
03:30Même si on a été silencieux, même si on a été critiqués en disant que la diplomatie française est dans le brouillard,
03:35c'est pas vrai. On n'a pas arrêté de bosser tout le temps, tout le temps, tout le temps.
03:43Pour le ministre, Michel Vimon, son directeur de cabinet, est l'un des principaux artisans de cette libération.
03:50Il le fait applaudir par ses collaborateurs.
04:06Pas le temps de s'éterniser, l'emploi du temps du ministre est serré. Sa journée n'est pas terminée.
04:17Il est 22h30. Michel Barnier part pour Matignon, où le Premier ministre l'attend pour un entretien en prison.
04:29Les deux hommes doivent maintenant faire le point sur les conditions du retour des otages.
04:35La discussion aura lieu à huis clos, puis Jean-Pierre Raffarin raccompagne ensuite Michel Barnier sur le perron.
04:52Monsieur le Premier ministre, je peux vous poser une question ?
04:54Je vous en prie.
04:55Dites-moi un peu, justement, votre état d'esprit ce soir.
04:58Beaucoup de gratitude pour Michel Barnier. Parce que je crois que les premières heures de cette terrible affaire ont été très importantes.
05:07Et quand il est allé s'exprimer à Algeciras, quand il a porté le message de la France parmi de très nombreuses autorités du monde arabe,
05:16il l'a fait avec conviction, il l'a fait avec loyauté. Et on a pu tenir cette ligne d'un bout à l'autre.
05:22Ce soir, c'est un vrai bonheur, mais qui sera encore plus grand demain, quand ils seront en sécurité sur le sol national.
05:37Il est 23h.
05:42Le ministre repart dans son ministère.
05:44Bonsoir.
05:45Sa nuit va être courte.
05:46Bonsoir.
05:49Bonsoir.
05:51Bonsoir.
05:597h du matin, base aérienne de Villacoublay.
06:04C'est l'aéroport militaire d'où partent la plupart des vols des membres du gouvernement.
06:09Un endroit sous haute surveillance.
06:12C'est d'ici que Michel Barnier va partir pour aller chercher des otages.
06:16Destination l'île de Chypre, au milieu de la Méditerranée.
06:21C'est là que doit atterrir l'avion qui ramène Christian Chenot et Georges Malbruneau de Bagdad.
06:28Sur la piste, deux jets arborant la cocarde tricolore.
06:33Pour ce voyage, le ministre emmène avec lui l'un de ses conseillers, ses gardes du corps, et des membres de la DGS, les services secrets.
06:41Monsieur Barnier, votre sentiment ce matin, juste en deux mots, votre sentiment ?
06:45Écoutez, c'est un aboutissement.
06:49Je suis très heureux d'aller les chercher.
06:51Et en les allant les chercher, c'est au-delà de ce que j'ai pu faire.
06:56Je n'ai fait que mon travail, c'est aussi le témoignage de toutes les équipes qui ont travaillé pour eux.
07:02Et puis c'est bien de terminer les choses.
07:04On a tellement parlé d'eux, on a tellement pensé à eux pendant...
07:07des mois et des mois et des mois que j'ai envie de les voir et de leur serrer la main et voilà.
07:11Donc voilà sur quoi je pense maintenant.
07:13Bonne mission.
07:15Nous n'avons pas pu accompagner le ministre, mais nous avons confié un caméscope à un membre de la délégation.
07:24Voici donc les images exclusives de l'arrivée des otages.
07:28Nous sommes sur un aéroport militaire dans l'Île-de-Chine.
07:31L'avion en provenance de Bagdad se concentre sur la piste.
07:35Bonjour.
07:36Bonjour.
07:37Comment ça va ?
07:38Ça va ?
07:42Je leur ai dit bienvenue et que j'étais très heureux d'être là, que j'étais encore très heureux de faire le voyage avec eux.
07:48Et quand je parle de voyage, c'est pas seulement ce voyage-là en avion, c'était les quatre mois qu'on vient de vivre ensemble.
07:53Merci à moi, c'est la première expérience.
07:55Merci à vous.
07:56Merci à vous.
07:57Merci à vous.
07:58Merci à vous.
07:59Merci à vous.
08:00Merci à vous.
08:01Merci à vous.
08:02Merci à vous.
08:03Merci à vous.
08:04Merci à vous.
08:05Merci à vous.
08:06Merci à vous.
08:07Merci à vous.
08:08Merci à vous.
08:09Merci à vous.
08:22Ils sont pas sortis de l'avion abattus, effondrés, fatigués.
08:24Ils étaient très en forme.
08:25Ils ont parlé.
08:26Ils ont remercié tout le monde, ils ont serré les mains de tout le monde.
08:29Ils étaient très volubiles.
08:30Ils parlaient beaucoup.
08:31Et ensuite, la première chose qu'on a faite après les avoir salué, c'est leur donner
08:41chacun un téléphone et ils sont allés chacun sur le tarmac, séparés d'une quinzaine de
08:45mètres l'un de l'autre, téléphoner à leur famille.
08:47C'était très émouvant.
08:48Moi, je me suis trouvé à côté de Georges Malbruno.
08:51C'est tranquille, évidemment, j'étais à 5, 6 mètres de lui, mais j'ai entendu, j'ai
08:56entendu appeler sa mère.
08:57Là, je l'ai vu pris, lui, d'une forte émotion, il avait les larmes aux yeux.
09:15Il a dit Allô maman, c'est moi, écoute, tout va bien.
09:18Et bon, moi, ça m'a ça m'a profondément ému aussi.
09:21Donc ça, c'est un moment très fort.
09:22Ils ont chacun parlé longuement à leur famille, à plusieurs personnes de leur famille.
09:30Et puis ensuite, on est vite reparti parce que le temps pressait.
09:52Il était très ému parce qu'ils ont découvert à travers les journaux, les coupures de presse,
10:13l'ampleur de la solidarité.
10:14Ils pensaient qu'on s'occupait d'eux, mais ils ne se doutaient pas qu'il y avait eu un
10:18tel élan unanime, politique, administratif, amical, professionnel autour d'eux.
10:24Détendus, les deux hommes découvrent aussi leur portrait rédigé par leurs collègues
10:30journalistes.
10:31Le ministre leur raconte aussi les différentes étapes de leur libération.
10:44Pendant ce temps, sur l'aéroport de Villacoublet, sous une pluie battante, tous à l'aise,
11:13ils attendent le retour des otages.
11:15Il y a là des journalistes venus d'une ombre entière, mais aussi le président de la République
11:25venu accueillir en personne les deux hommes.
11:26Il est 19h30, l'avion se pose sur la piste sous les flashs des photographes.
11:42Après quatre mois de détention, Christian Cheneau et Georges Malbrunot retrouvent enfin
11:56leur famille.
12:12Nous apprenons la nouvelle en même temps que l'équipage.
12:41Le père de Michel Barnier est mort cette nuit, mais le ministre a quand même décidé
12:45de maintenir son voyage en Israël et en Palestine.
12:47Il était impossible d'annuler ce voyage, puisqu'il est mort le dimanche matin, très
12:54tôt, vers 5h du matin, et que je partais le jour même pour un voyage qui était entièrement
12:59monté.
13:00Donc j'en ai parlé avec ma mère et ensemble, on a pris la décision que je ferais ce voyage
13:05parce que vous êtes membre du gouvernement, vous représentez l'État, il y a un devoir
13:12il y a le service, ça n'a pas empêché la douleur, la peine personnelle, mais j'avais
13:19ce voyage à faire, il fallait que je le fasse, il était impossible, compte tenu de la masse
13:22de travail que ça exige, de l'importance de cette visite à ce moment-là, qu'on annule
13:28tout.
13:29Pour le ministre des Affaires étrangères, ce voyage est important, un nouveau processus
13:40de paix semble se dessiner au Moyen-Orient, la France veut y participer.
13:44Pour l'occasion, le ministre emmène un groupe de journalistes, de radio, presse écrite
13:49et télévision.
13:50L'avion transporte une quarantaine de passagers.
13:53D'habitude, cet Airbus est réservé aux déplacements du chef de l'État.
13:57Il a été acheté il y a trois ans, mais le gouvernement est toujours resté très discret
14:01à ce sujet.
14:02Je ne sais pas si vous vous rappelez, mais à un moment, la consigne avait été de faire
14:07l'état modeste.
14:08Et l'état modeste, les ministres, les excellences, tout le monde prenait les avions de ligne.
14:12Puis ça n'a eu qu'un temps, parce que les avions de ligne, ce n'est pas très pratique.
14:16On prend son billet, mais on ne voyage pas toujours très bien, et surtout des tributaires,
14:20des horaires et donc des changements.
14:22Et finalement, les bonnes résolutions de faire comme tout le monde n'ont pas duré très
14:28longtemps et cet avion a été commandé il y a deux exemplaires.
14:31Donc avec l'accord de Chirac et de Jospin, la majorité de l'opposition était d'accord
14:34pour avoir ce type d'avion ?
14:35Absolument.
14:37A ce moment, le conseiller en communication du ministre qui assiste à notre entretien
14:43veut apporter ses précisions.
14:45C'est un avion qui appartient à la Défense, qui circule entre un certain nombre de ministres
14:49qu'on utilise de temps en temps, mais aussi des avions de taille réduite quand celui-ci
14:54n'est pas disponible.
14:55Il n'y a pas d'avions qui appartiennent en propre au Quai d'Orsay.
14:57Est-ce que les ministres se battent un peu justement pour pouvoir utiliser cet avion ?
15:01Les ministres ne se battent jamais.
15:02A bord, le service assuré par des militaires triés sur le volet est impeccable.
15:10Ici bien sûr, pas de plateau repas sous cellophane et pour accompagner les plats, une sélection
15:18de bons vins.
15:19Mais rien d'exceptionnel, l'équivalent d'une classe affaire.
15:24En réalité, le vrai luxe de cet avion, c'est la chambre et la salle de bain située à
15:31l'autre bout de l'appareil.
15:32Mais vous ne les verrez pas, interdiction formelle de filmer, secret Défense.
15:37Après trois heures de vol, le ministre réunit les journalistes dans le salon situé à l'avant
15:48de l'appareil.
15:49Il est en train de faire ce que nous souhaitions.
15:53Mahmoud Abbas réforme, tient un discours clair, Sharon prend des risques politiques.
16:00Petite conférence de presse improvisée, Michel Barnier expose les enjeux de ce voyage.
16:06Le sens d'une démarche que je fais, c'est de dire que l'Europe veut être, comme elle
16:12est dans le quartet, partenaire du processus de paix.
16:15Il faut que tout le monde comprenne bien ça.
16:18Monsieur le ministre, mesdames, messieurs, nous allons vous poser dans quelques instants
16:22sur l'aéroport de Tel Aviv.
16:30Il est 22 heures, l'avion se pose sur la piste de l'aéroport Ben Gourion.
16:43Le lendemain matin, dans la banlieue de Tel Aviv.
16:47C'est ici, dans la résidence de l'ambassadeur de France, que le ministre a passé la nuit.
16:52Il est huit heures du matin, Michel Barnier embarque dans une voiture blindée.
16:57C'est parti pour un marathon diplomatique qui va durer 48 heures non-stop.
17:03Première destination, le centre-ville de Tel Aviv.
17:10Ici, il n'y a pas de trajet sans risque.
17:13Le véhicule du ministre est encadré par les voitures de ses officiers de sécurité,
17:17des policiers français, affectés à la protection des hautes personnalités.
17:26Nous sommes dans la voiture suiveuse, celle qui couvre les arrières en cas d'attaque.
17:31Au pied du policier, un fusil d'assaut.
17:33Si jamais il y a une grosse attaque, ça c'est pour arroser.
17:37C'est les gros calypses, c'est les calypses 5.57.
17:39C'est vraiment la puissance de feu, s'il y a un truc pour pouvoir nous faire évacuer,
17:42nous protéger, ça fait un mur de protection.
17:56Première arrêt, le parking d'un des grands hôtels de Tel Aviv.
18:06C'est ici que Michel Barnier doit rencontrer Chimone Perez.
18:13Dans le sous-sol, partout des hommes en arme.
18:16Pour des raisons de sécurité, on fait passer le ministre par l'entrée de service.
18:26Problème, l'ascenseur est bloqué.
18:38Le chef de la diplomatie américaine, Condoleezza Rice, est elle aussi venue rencontrer Chimone Perez.
18:43L'attente se prolonge, le service d'ordre est nerveux.
18:57C'est un simple panneau de bois qui est tombé dans le couloir, faux salaire, tout le monde reprend son souffle.
19:27A l'étage, Michel Barnier succède à Condoleezza Rice, qui vient de repartir.
19:43Après la poignée de main rituelle, les deux hommes vont s'entretenir pendant une heure.
19:49Pour la France, Chimone Perez, leader de la gauche israélienne et vice-premier ministre,
19:55devrait être l'un des hommes clés du processus de paix.
20:03Ensuite, le convoi repart direction Jérusalem.
20:07Nous nous rendons dans les bureaux du premier ministre Ariel Sharon, sans doute l'un des lieux les plus sécurisés d'Israël.
20:20Depuis quelques mois, les relations sont tendues entre les deux pays.
20:24Si la France veut réussir à s'imposer aux côtés des Etats-Unis dans le processus de paix,
20:29Michel Barnier doit convaincre Ariel Sharon.
20:32Aujourd'hui, c'est sur cet homme que reposent tous les espoirs de paix.
20:40Nous n'assisterons bien sûr à aucun de ces entretiens.
20:43Pour comprendre ce qui se passe, il faut profiter d'une pause dans le programme officiel.
20:49Un déjeuner est prévu au consulat de France à Jérusalem.
20:53C'est l'occasion d'une discussion informelle entre le ministre et les journalistes.
21:05Ce qui lui rapporte, c'est le rôle qu'un Français et plus encore un Européen peut jouer dans cette partie-là.
21:12Et donc, à un moment, on voit qu'il y a encore du chemin à faire, que l'Europe n'est pas un partenaire majeur dans ce processus.
21:19Et pour Michel Barnier, si la France veut s'imposer, c'est maintenant ou jamais.
21:27Pour la première fois depuis plusieurs années, le dialogue reprend entre Israéliens et Palestiniens.
21:31Il n'y a pas de paix s'ils ne se parlent pas.
21:33On est à la veille du moment où ils se parlent à nouveau, donc c'est un moment important.
21:37Et pourquoi vous, ministre, vous venez en personne sur place ? A quoi ça sert ?
21:41Mais qu'est-ce que c'est que la diplomatie ?
21:43Comment la France peut-elle agir si son ministre ne vient pas lui-même voir les gens ?
21:49Venir ici, c'est respecter les gens.
21:51C'est avoir une marque d'attention, d'amitié et de respect.
21:56La France ne peut pas toujours attendre qu'on vienne la voir.
21:58Il faut qu'elle aille au-devant des autres.
22:01Fin d'après-midi, départ pour Ramallah en Palestine.
22:05C'est l'autre versant de ce marathon diplomatique.
22:08Arrivée de nuit au checkpoint d'Erez qui marque la frontière entre Israël et la Cisjordanie.
22:15Une zone évidemment très sensible et contrôlée par les militaires israéliens.
22:26Pour des raisons de sécurité, impossible de pénétrer en Palestine avec des plaques d'immatriculation israélienne,
22:34tous les membres de la délégation doivent changer de véhicule, même le ministre.
22:41Il repart dans une Mercedes noire blindée.
22:49Des 4x4 de la police palestinienne encadrent les véhicules du ministre et de ses gardes du corps.
22:55Très vite, le convoi prend de la vitesse.
22:57Ils foncent sous la pluie dans les rues noires mal éclairées.
23:01Dans le véhicule des officiers de sécurité, la tension monte.
23:11Le chauffeur fait partie des services de sécurité palestiniens.
23:15Il a reçu des consignes très précises.
23:24Peine perdue, le chauffeur accélère.
23:30C'est dur cette passagerie, tu vois ?
23:42Ça te fait rire, hein ?
23:47C'est juste là, l'arrivée. On y est.
23:51Merci pour la balade, à bientôt.
23:53Le ministre vient déposer une gerbe de fleurs sur le tombeau de Yasser Arafat,
23:58le leader palestinien mort en novembre dernier à Paris.
24:10Ensuite, accompagné de ses gardes du corps, ils traversent la Mokatta,
24:15l'ancien quartier général d'Arafat, où le ministre de l'Intérieur,
24:18longtemps assiégé par l'armée israélienne.
24:21Un lieu symbolique devenu aujourd'hui le siège de l'autorité palestinienne.
24:28C'est là qu'il va rencontrer Mahmoud Abbas, le nouveau président élu en janvier.
24:33C'est l'un des plus anciens compagnons de route de Yasser Arafat
24:37et l'une des figures historiques de l'OLP.
24:41C'est cet homme qui sera le quartier général d'Arafat.
24:45C'est cet homme qui sera le partenaire d'Ariel Sharon.
25:05Il est 21 heures, mais la journée n'est pas terminée pour le ministre.
25:10L'escorte repart.
25:11Cette fois-ci, destination Gaza, un autre territoire palestinien.
25:17Après deux heures de route, le convoi arrive enfin.
25:26Il est 23 heures, pour le ministre, une dernière interview
25:30dans le hall d'un des rares hôtels de la ville.
25:41C'est assez émouvant de se trouver à Gaza, puisque c'est le premier point
25:45d'où Israël a décidé de se retirer.
25:48On voit bien la situation dans laquelle ce territoire se trouve.
25:52Il faut très vite réussir ce retrait, c'est-à-dire créer ici les conditions
25:56d'un avenir pour les jeunes palestiniens.
25:58Au-delà de la sécurité, il y a le problème du port, de l'aéroport, de l'agriculture,
26:03les conditions de travail et d'emploi pour tous ces jeunes.
26:07Merci.
26:10Merci beaucoup.
26:12Salut.
26:19Le lendemain matin, changement d'ambiance.
26:25On découvre Gaza, un décor de ruines, des immeubles détruits
26:29par des années de guerre.
26:32Aujourd'hui, pour le ministre, pas d'entretien officiel,
26:34mais une visite de terrain.
26:36Le convoi s'enfonce dans Gaza.
26:38La tension est sensible chez les gardes du corps.
26:40Brusquement, le convoi s'arrête.
27:05Le ministre a décidé de faire une visite impromptue, dans un camp de réfugiés.
27:08un camp de réfugiés. Les gardes du corps sont pris de court. Le ministre s'enfonce
27:15dans un étroit passage qui mène à des logements de réfugiés.
27:23Les officiers français décident de bloquer l'entrée.
27:32La situation est compliquée, tout autour des hommes en arme et des passants qui s'attroupent.
27:38C'est un peu compliqué pour savoir qui est qui. Regardez, vous avez des hommes en arme partout.
27:58Pendant ce temps, le ministre rencontre une famille de réfugiés.
28:01J'ai vu la misère, une misère qui dure depuis des dizaines d'années. Un homme que j'ai rencontré
28:10dans une pièce avec la pluie qui tombait, il faisait d'ailleurs froid ce matin-là,
28:14sa femme et ses enfants. Cet homme avait 37 ans, il était arrivé dans ce camp à Gaza,
28:20il avait 7 ans, 30 ans plus tôt. Donc il faut très vite sortir de cette situation.
28:25Et pour finir, le ministre a souhaité visiter l'école du camp, à quelques centaines de mètres de là.
28:55Cette école de filles est financée par le programme d'aide aux réfugiés de l'ONU,
29:04un organisme auquel la France apporte une aide économique.
29:17Il est 10h du matin, il faudra encore deux heures de route au ministre pour rejoindre l'avion qui le ramènera en France.
29:25Sur le plan politique, j'ai voulu clairement affirmer le soutien de la France et de l'Europe naturellement
29:38au nouveau président palestinien, qui est le partenaire de la paix, le partenaire des Israéliens,
29:44et le reconnaître en tant que partenaire. J'ai voulu également réaffirmer, je le fais chaque fois
29:50et je continuerai, au-delà de la présence du ministre français, la présence de l'Union européenne.
29:56Qu'on s'habitue dans cette région à ce que l'Union européenne soit là en tant que telle.
30:00Nous sommes non pas seulement un grand marché qui envoie des chèques, nous sommes une union politique, un acteur politique.
30:06Et puis j'ai voulu continuer le travail de dialogue avec le gouvernement israélien,
30:10parce qu'il y avait besoin de dialoguer entre Français et Israéliens.
30:13Vous avez des journées de 12 à 14 heures de voyage, comment vous le mettez ?
30:17Je tiens avec un peu de discipline, en faisant du sport, je cours 2 à 3 fois par semaine,
30:22je fais attention à ce qu'on peut manger.
30:24Pas de médicaments, pas de choses particulières ?
30:26Pas de médicaments.
30:29100.
30:3550.
30:3640.
30:3730.
30:3820.
30:39Retard.
30:4017 heures, l'avion se pose sur la piste d'Orly.
30:43Et pour le ministre, une nouvelle course contre la montre commence.
30:49Car au même moment, à Paris, Condoleezza Rice, le chef de la diplomatie américaine, est en visite officielle.
30:56Discours à Sciences Po, réception à l'Elysée, l'heure est au rapprochement entre la France et les Etats-Unis.
31:02Et ce soir, le docteur Rice dîne au Quai d'Orsay avec Michel Barnier.
31:11Pierre-Henri Guignard, le chef adjoint du protocole, surveille les derniers préparatifs.
31:20Un invité s'est décommandé du côté de la délégation américaine.
31:24Il faut faire un petit tour de passe-passe, mais la hiérarchie du protocole sera respectée.
31:42Quelques minutes plus tard, nouveau coup de fil et nouveau changement. Cette fois-ci, c'est du côté français.
31:55Il laisse sa place à notre ambassadeur à Washington, qui sera à côté de Mme Rice.
31:59Petit ajustement sur le plan de table, qu'on va prendre en compte immédiatement.
32:02On va être arrêté à M. Pierre Limon, qui est le directeur de cabinet du ministre, avec l'ambassadeur, M. Jean-David Gellitte.
32:10Donc l'ambassadeur va être immédiatement à côté de Mme Rice.
32:13À sa droite.
32:14De la part du directeur de cabinet, c'est la volonté de privilégier le dialogue entre le secrétaire d'Etat américain et notre ambassadeur sur place.
32:21Donc en les rapprochant, ils favorisent ce dialogue.
32:24Le protocole ou l'art de faire de la diplomatie avec un simple plan de table.
32:29Concrètement, ce soir, il faut bien renouer les liens avec les États-Unis. C'est ça, l'enjeu ?
32:33Oui, oui, absolument. Mais ça, c'est Michel Barnier qui vous le confirmera quand il parlera.
32:40Mais nous, en tant que protocole, nous avons compris, comme tout le monde, cette volonté.
32:44C'est-à-dire qu'il suffit d'écouter les discours du ministre et de comprendre son intention pour savoir qu'il faut accorder une intention toute particulière à ce dîner.
32:50Cela dit, comme je vous le disais, le dîner n'est pas très différent d'un dîner offert à un autre ministre des Affaires étrangères,
32:56parce que nous recevons toujours bien les gens. Il n'y a pas de volonté de mal recevoir les gens.
33:01Venez voir la table.
33:05Bonsoir, Thierry. Alors, tout est en place ?
33:07Tout est en place.
33:08Dites-nous un petit peu comment vous avez préparé cette table.
33:11La verrerie Saint-Louis. Et donc le couvert en argent Christophe.
33:16Mais le vrai luxe, c'est l'assiette.
33:20Ce qui a de particulier, c'est qu'elle est en sèvres, déjà. Donc sèvres dorées.
33:25A l'or fin.
33:26A l'or fin, bien sûr. Et donc, justement, quand on a une assiette cassée, on le redonne à Sèvres pour qu'ils refondent l'assiette pour récupérer l'or. C'est vraiment quelque chose...
33:38Si une assiette se brise, on garde tous les morceaux.
33:41Ça, on ne le jette pas. Surtout pas.
33:43C'est marqué, donc, Manufacture Nationale de Sèvres.
33:45Ministère des Affaires Étrangères.
33:47Elles sont assez récentes, celles-ci. Elles datent de 2001.
33:50Tous les ans, si vous voulez, on a le droit... Sèvres nous donne un certain quota d'assiettes.
33:56Une assiette comme ça, on peut évaluer sa valeur ?
33:58Très chère.
34:00Le rôle du ministre des Affaires Étrangères, c'est aussi de faire la promotion des produits français.
34:03Et en mettant sur la table des belles assiettes françaises, nous montrons ce que nous savons faire.
34:07Est-ce qu'on peut imaginer qu'à la fin du repas, il offre un service à Mme Rice ?
34:11Pas du tout. Ça fait partie du patrimoine. Il n'est pas question de s'en séparer. Pas du tout.
34:15Vous remarquerez qu'on reçoit au coin du feu.
34:18Il y a ce côté sympathique du feu dans la cheminée qui est là pour illustrer qu'on est dans une maison qui est vivante,
34:22où il y a un feu dans l'âtre, et c'est sympathique. Je pense que Mme Rice y sera sensible.
34:26Et puis, si elle a un peu froid, elle sera réchauffée par le feu juste derrière elle.
34:30Et ici, le luxe est dans les petits détails.
34:33Voilà le carton de Mme Rice qui a été calligraphié par la blanche main d'Ophélie, n'est-ce pas ?
34:40Exactement. Avec donc une très jolie écriture anglaise.
34:44Et nos trois agents de la cellule invitation pratiquent la calligraphie avec bonheur.
34:50Et notre calligraphie est bien évidemment enviée par le monde entier. C'est clair.
34:55Ça aussi, ça fait partie de ce genre de petits détails qui montrent l'effort.
34:59Exactement. C'est pas tapé à la machine. C'est fait à la main et ça montre qu'il y a une attention personnelle.
35:1020h. A l'Elysée, Condolitza Rice termine son entretien avec Jacques Chirac.
35:15Il est 20h05. Donc on a 5 ou 10 minutes de retard, mais c'est pas très méchant. On va rattraper ça assez vite.
35:23Les huissiers sont en place. On va pouvoir commencer.
35:30Quelques minutes plus tard, un impressionnant cortège d'une quinzaine de voitures fait son entrée au quai d'Orsay.
35:41Condolitza Rice apparaît enfin.
35:43Photographie officielle, puis conférence de presse. Et surprise, devant le parterre de journalistes, le ministre appelle le docteur Rice par son petit nom.
36:07Bienvenue, Candy. Bienvenue au Quai d'Orsay.
36:11Candy, c'est mignon pour un chef de la diplomatie américaine.
36:14On a eu un contact très, très candial, très simple. Et puis voilà, elle m'a appelé Michel, je l'ai appelé Candy.
36:21Pourquoi on n'aurait pas des relations personnelles ? J'observais en matière diplomatique, mais c'est aussi vrai dans la vie, c'est vrai dans la politique,
36:31que quand on a une confiance personnelle, ça ne veut pas dire qu'on est toujours d'accord, ça ne veut pas dire qu'on se donne raison spontanément,
36:41mais ça facilite beaucoup les choses, c'est ce que je crois.
36:46Plus tard dans la soirée, le dîner a lieu à huit clous. Nous ne sommes pas autorisés à filmer dans la salle à manger,
36:52mais uniquement dans le salon voisin où dînent les membres des délégations des deux pays.
36:58L'ambiance est détendue. Les deux chefs du protocole, français et américain, font un saut d'amabilité.
37:11Vous avez eu des échos du repas qui se passe en ce moment avec les ministres ?
37:14Nous suivons le rythme et nous essayons d'être prêts avant eux pour être tous opérationnels au moment de leur sortie.
37:21Et sur le fond, pas un mot.
37:23A priori, tout se passe bien.
37:24Évidemment.
37:2722h30. Condit 120, mais la journée de Michel n'est pas terminée. Direction les plateaux de France Télévisions.
37:37Le ministre doit participer en direct à l'émission de Christine Ockrent et de Serge Julie.
37:42Je n'ai pas beaucoup de temps avec PoliRice pour l'instant.
37:48Je vais faire une émission.
37:50Tu aurais pu l'emmener.
37:55Pour le ministre, c'est la fin d'un marathon qui aura duré plus de 48h.
37:59Ce matin encore, il visitait les camps de réfugiés de Gaza.
38:02Ce soir, il recevait Condoliza Rice.
38:07Il est 23h. Le débat télévisé va durer plus d'une heure et demie.
38:13Demain, Michel Barnier enterre son père.

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