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Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale et députée "Ensemble pour la République" des Yvelines est l'invitée de Questions politiques ce dimanche. Elle évoque la (très lente) nomination d'un Premier ministre par Emmanuel Macron, et sa volonté de voir une Ve République plus parlementaire. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/questions-politiques/questions-politiques-du-dimanche-01-septembre-2024-5384802

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00:00Bonjour, ravie de vous retrouver pour une nouvelle saison de questions politiques, votre émission politique du dimanche sur France Inter, diffusée comme toujours sur France Info, la télé, Canal 27 et en partenariat bien sûr avec le journal Le Monde.
00:24Comment analyser notre nouvelle situation politique ? Huit semaines après les élections législatives, tout est bloqué, la nouvelle assemblée n'a toujours pas commencé à travailler, le précédent gouvernement officiellement démissionné n'a toujours pas été changé, comme si le résultat de ce scrutin était pour l'instant ignoré et mis de côté.
00:44On aimerait pourtant savoir à quoi va ressembler cette nouvelle cohabitation et avec qui Bernard Cazeneuve sera reçu demain matin à l'Elysée ? Bref, comment la vie politique dans notre pays va-t-elle s'organiser et fonctionner cette année ? On en parle avec la présidente de l'Assemblée, là où tout risque de se passer, Yael Braun-Pivet, et notre invité ce dimanche dans Questions Politiques, en direct et jusqu'à 13h.
01:08Questions politiques. Karine Bécard sur France Infer.
01:16Bonjour Yael Braun-Pivet. Bonjour.
01:18Merci d'avoir accepté notre toute première invitation de la saison et merci surtout de faire votre rentrée sur le plateau de Questions Politiques.
01:25A mes côtés, j'ai le plaisir, le grand plaisir de retrouver les copines, Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions. Bonjour Nathalie.
01:31Bonjour à toutes et tous et à tout le monde. Oui, quand même.
01:34Et Françoise Fressoz du journal Le Monde. Bonjour ma chère Françoise.
01:38Bonjour, je bise Nathalie. Bisez-moi Françoise.
01:42Alors, on va découvrir, pour commencer l'édition, comme toujours, vos images de la semaine, ce qui vous a marqué en particulier dans l'actualité.
01:49Mais j'aimerais d'abord vous soumettre ce portrait, celui d'un homme, Henri Leclerc, avocat, défenseur inlassable des droits de l'homme, une légende du barreau après 65 ans de carrière.
02:02Il est mort hier à l'âge de 90 ans. Tout simplement, votre réaction, Yael Braun-Pivet, je rappelle que vous aussi, vous êtes avocate.
02:10Vous l'avez peut-être d'ailleurs, je ne sais pas, rencontré, croisé, discuté avec lui ?
02:13Alors, j'ai fait plus que cela. J'ai travaillé avec lui parce que nous étions membres tous les deux des états généraux de la justice.
02:20Et donc, nous avons passé de longues heures à délibérer, à échanger.
02:25Et j'ai pu voir, effectivement, comme vous l'avez dit, un inlassable défenseur des droits, des droits humains, des droits de l'homme.
02:36Un amoureux de la défense, de la défense pénale, des libertés, des principes de l'état de droit qu'il rappelait inlassablement.
02:46Et donc, nous perdons une grande figure. Malheureusement, nous en avons perdu beaucoup dans le monde du droit et dans le monde des avocats,
02:52après Hervé Témime, après Pierre Haïk. Il va manquer et nous avons besoin de ces hommes et de ces femmes qui défendent ce que nous avons de plus précieux,
03:03nos valeurs et l'état de droit. Et il était de cela.
03:06Vous lui voyez un successeur ?
03:08Il y en a beaucoup dans le monde du droit et c'est important. Nous avons besoin de chacun.
03:14Ce n'est pas votre image de la semaine, en tout cas à vous, Yael Broun-Pivet. Qu'est-ce que vous avez choisi ? Qu'est-ce que vous avez eu envie de mettre en lumière ?
03:21J'ai eu envie de mettre en lumière un événement auquel j'ai participé vendredi, qui est la foire de Chalons.
03:28La foire agricole ?
03:30C'est une foire agricole, mais qui va bien au-delà de l'agriculture, parce qu'il y a le monde politique, le monde associatif qui s'y rencontre, beaucoup de familles.
03:41C'est un événement majeur et j'ai été très heureuse de pouvoir l'inaugurer parce que c'est important d'être au contact des Français, d'être sur le terrain
03:51et surtout aussi d'être au contact de ceux qui font notre agriculture.
03:57C'est un des sujets dont on a beaucoup parlé pendant les six premiers mois de l'année.
04:01L'été a été rude pour nos agriculteurs. Nous avons besoin de continuer à être à leurs côtés.
04:07Nous avons notamment une loi d'orientation agricole qui était en cours d'examen à l'Assemblée Nationale avant la dissolution.
04:14Vous voulez la reprendre ?
04:15Elle est maintenant au Sénat. Nous pouvons la reprendre et je pense que c'est un des premiers textes qu'il faudra remettre sur le métier
04:21parce que nos agriculteurs ont besoin de ce texte et besoin que le Parlement soit à leurs côtés.
04:27Cette foire de Chalons était un événement incroyable. Beaucoup de chaleur, beaucoup d'énergie.
04:33Beaucoup de chaleur, c'est-à-dire que les Français vous les avez trouvés comme optimistes ?
04:36Ils avaient des choses à vous dire ?
04:37Ils ont toujours des choses à nous dire. J'ai vu des Français et des élus aussi qui nous ont tous dit la même chose.
04:43Retroussez-vous les manches, travaillez ensemble, maintenant ça suffit, allez-y.
04:48On va en parler longuement mais c'était important de les rencontrer, de les entendre.
04:55Françoise, quelle est votre image à vous ? On pourrait la présenter peut-être comme la figure politique de l'été.
05:00Oui, alors moi j'ai retenu Lucie Castex qu'aucun Français pratiquement ne connaissait avant l'été
05:06et qui au fond finalement s'est imposée comme l'une des figures politiques de l'été.
05:10Elle a été conduite à Matignon en début de semaine par Emmanuel Macron
05:14qui a estimé que le nouveau Front populaire n'aurait pas la majorité et serait très vite renversée.
05:20Mais au fond on l'a vu aux universités d'été du Parti socialiste ce week-end
05:24et on voit que non seulement elle s'accroche mais qu'elle est populaire.
05:28Ce qui me fascine dans l'émergence de cette personnalité c'est qu'elle n'appartient pas aux serrails politiques,
05:35qu'elle a un profil de haut fonctionnaire, d'énarque,
05:38et on se dit mais c'est curieux, ça ne correspond pas tellement avec ce qu'on aurait pu imaginer à gauche.
05:44Et je me dis est-ce que c'est au fond la démonstration de cette crise de la représentation politique
05:48où pour être entendue ou avoir l'espoir d'être entendue par les Français,
05:52il ne faut plus appartenir au parti mais plutôt dans la société civile
05:56avec qui plus est un haut degré de connaissance des dossiers
06:00parce que dans son examen de passage face à Emmanuel Macron,
06:03la gauche reconnaît qu'elle a été extrêmement compétente
06:06et à l'Élysée on dit qu'effectivement elle tenait très bien ses dossiers.
06:10Donc je me demande est-ce que c'est un feu de paille ou est-ce que c'est un profil politique
06:14qui est en train de s'imposer aussi parce qu'on a une crise assez majeure de la représentation politique.
06:20Allez je termine avec vous Nathalie, images paralympiques je crois qui s'imposent également.
06:24Je crois surtout sur le droit des femmes.
06:26Celle de Zahia Khoudadadi qui a été médaillée en taekwondo,
06:31c'est surtout parce qu'elle est afghane d'origine et que c'est la première médaille pour les réfugiés.
06:36Alors là on la voit dans le bras de son entraîneuse, on peut imaginer tout ce qu'elle a vécu.
06:40Elle est partie en 2021, elle a été exfiltrée grâce à la France.
06:442021 c'est le moment où il y a l'évacuation par des Américains, des derniers,
06:47des personnes qui pouvaient projeter les femmes.
06:49Alors c'est facile là dans un fauteuil ou sur un siège de dire oh là là quelle horreur pour les femmes.
06:54Ça peut être de l'indignation qui donne une bonne conscience pour la journée voire pour l'année.
06:57C'est pas ça que je voulais dire, je voulais dire simplement que quand on a eu un pays, c'est presque grotesque,
07:02un pays qui interdit aux femmes d'aller à l'école, qui leur interdit d'avoir un visage,
07:05qui leur interdit d'avoir un corps ou qui le cachent.
07:07Qui leur interdit de chanter désormais.
07:09Non, interdiction de chanter mais même de parler.
07:12C'est-à-dire l'invisibilisation totale de tout ce qui peut s'approcher.
07:16Déjà dans un pays où on n'aimait pas les cerfs-volants ni les canaris.
07:19Et on considérait que tout ce qui était joyeux, le jeu, le foot était quelque chose d'interdit,
07:23il y avait rien à s'inquiéter.
07:24Et surtout s'étonner sur une chose, c'est qu'il n'y a pas eu un mouvement mondial.
07:27C'est-à-dire que honnêtement, alors je ne vais pas vous faire l'éternel coup du
07:30les féministes quand ce n'est pas plus politique ne se bougent plus.
07:33Mais quand même, il aurait dû y avoir des rassemblements dans le monde entier.
07:36Avec les réseaux sociaux, tout le monde sait, tout le monde a vu, tout le monde peut savoir.
07:39Voilà, ça me semble être un combat qui est le premier à avoir et qu'il ne faut pas mollir là-dessus.
07:45Et pour l'instant, on n'entend pas grand-chose.
07:51Croyez bien que je fais tous mes efforts, et les jours et les nuits.
07:55Et que je le fais depuis des semaines, même si vous ne l'avez pas forcément vu,
07:59pour aboutir à la meilleure solution pour le pays.
08:02En tout cas, la France a un gouvernement qui gère les affaires courantes,
08:05qui a permis d'avoir des Jeux Olympiques, qui ont émerveillé le monde,
08:09qui a en même temps fait face aux défis, aux crises du moment.
08:12Donc, je ne voudrais pas qu'on laisse s'installer l'idée que, voilà, les affaires ne sont pas suivies.
08:17Après, je ferai mes meilleurs efforts et je parlerai au français en temps voulu et dans le bon cadre.
08:22Alors, le président Macron qui s'exprimait jeudi soir à son arrivée en Serbie.
08:27Alors depuis, ça s'est un petit peu accéléré.
08:29Depuis ce matin, depuis quelques minutes exactement,
08:32Bernard Cazeneuve doit être reçu demain matin à l'Elysée.
08:37C'est l'entourage de Bernard Cazeneuve, l'ancien Premier ministre de François Hollande qui le dit.
08:42C'est confirmé par nos services, par le service politique, par Simon Le Baron,
08:47qu'on connaît bien sur l'antenne de France Inter.
08:49Il y a le bon de pivet, ça fait avancer les choses.
08:51C'est la bonne personne, Bernard Cazeneuve, ou pas ?
08:54Alors, permettez-moi, je vais répondre évidemment à votre question,
08:56mais je voudrais juste rebondir sur les femmes afghanes.
08:59Vous avez raison, elles ont besoin de nous.
09:02Elles ont besoin que l'on soit leur voix.
09:05Moi, il y a quelques mois de cela,
09:07j'avais organisé le premier sommet des présidentes d'assemblées du monde entier
09:11pour justement que nous adressions une parole commune autour du droit des femmes.
09:16Et cela ne sert pas à rien.
09:18Nous avons, et elles en ont besoin, que l'on parle d'elles,
09:22que l'on les défende, qu'on soit à leurs côtés.
09:25Et donc, il faut, et chacun a un rôle à jouer,
09:28vous en tant que journaliste, moi en tant que responsable politique.
09:30Donc, faisons-le.
09:32Et peut-être l'ONU et les Etats-Unis qui continuent à financer les talibans,
09:36sans condition, contrairement à ce qui avait été dit au moment du retrait.
09:39Non mais voilà, donc, fondamentale.
09:41Et soyons-là à leurs côtés et pour elles, inlassablement.
09:44Et ça, c'est de l'importance.
09:46On l'a dit, mais il y a beaucoup de dossiers politiques maintenant.
09:48Bernard Cazeneuve.
09:50Je la vois bouillir, Françoise Fresseau.
09:53Elle veut sa réponse.
09:54En fait, les Français, comme vous, et comme nous, responsables politiques,
09:59nous attendons effectivement qu'un gouvernement soit formé,
10:03qu'un Premier ministre soit nommé.
10:05Le Président de la République a été parfaitement dans son rôle
10:09en organisant un certain nombre de consultations des forces politiques.
10:12Mais pas un peu long, quand même.
10:14Il y a un risque d'exaspération assez fort.
10:16Et donc là, on voit que cela avance.
10:17Et bien justement, je pense qu'il est temps, en cette rentrée,
10:20que les enfants vont faire leur rentrée scolaire demain,
10:23pour la plupart d'entre eux.
10:25Il est temps, effectivement, que nous ayons un gouvernement nommé.
10:29Et donc, je me réjouis que cela avance.
10:32Que ce soit Bernard Cazeneuve ou un autre Premier ministre,
10:36il ne m'appartient pas de me prononcer sur le choix que fait le Président de la République.
10:41C'est son choix souverain, dans des plaies à certains dans cette classe politique
10:45qui auraient souhaité choisir le Premier ministre à sa place.
10:48En tout cas, évidemment, Bernard Cazeneuve fait partie, on dirait,
10:53de la shortlist de profils qui, me semble,
10:57est à même de rassembler au-delà de son camp,
11:00puisque c'est de cela dont il s'agit,
11:02puisque personne ne détient la majorité à lui tout seul.
11:06En tout cas, moi, en tant que Présidente de l'Assemblée nationale,
11:09je me réjouis que cela avance,
11:11que nous puissions avoir un Premier ministre qui soit nommé,
11:14je l'espère, dans les jours qui viennent,
11:16pour qu'il puisse ensuite consulter à nouveau, probablement, l'ensemble des forces politiques
11:20pour composer un gouvernement qui soit à même d'agir dans l'intérêt des Français.
11:24Là, maintenant, ça peut aller très vite ?
11:26Eh bien, écoutez, ça doit, je pense, aller assez vite,
11:31puisque les consultations ont duré, vous l'avez rappelé, pendant des semaines.
11:35C'était important de prendre le temps.
11:37Maintenant, il faut aussi prendre le temps de construire un programme d'action.
11:41Il ne s'agit pas simplement de nommer un tel ou un tel.
11:45Il faut un programme d'action qui permette de rassembler
11:48les différentes forces politiques à l'Assemblée nationale
11:50et qui puisse permettre de trouver aussi un chemin avec le Sénat,
11:54puisque le Parlement est composé de deux chambres
11:56avec des tonalités politiques extrêmement différentes.
12:00Et il faut trouver quelque chose qui nous permette de converger.
12:03Et donc, je l'espère, en tout cas,
12:06que ça puisse commencer, ce travail-là, dans les jours qui viennent.
12:09Justement, Françoise, demandez quels sont ses avantages,
12:11enfin, en quoi, quelles sont ses qualités.
12:13Alors, vous allez sûrement répondre homme d'État,
12:15mais je ne vais pas faire les réponses à votre place.
12:17Nicolas Sarkozy a dit que le centre de gravité de la France,
12:19aujourd'hui, était à droite.
12:20Enfin, que la France était à droite.
12:22Est-ce que le centre de gravité de Bernard Cazeneuve,
12:24où vous, ce que vous sentez,
12:26vous avez parlé de la foire de Châlons-en-Champagne,
12:28ce que vous sentez du centre de gravité des Français,
12:31avec les élections, vous les sentez plutôt comment ?
12:33Moi, je peux vous répondre probablement mieux sur les Français
12:36que sur Bernard Cazeneuve.
12:37La foire, vous connaissez.
12:39Je le connais, mais ce n'est pas aujourd'hui mon rôle
12:42en tant que Président de l'Assemblée Nationale
12:44de participer aux commentaires...
12:46Non, non, mais je comprends très bien.
12:47Je vous ai demandé comment vous sentez la France.
12:49Ça, ça n'est pas possible.
12:50Non, mais la question est intéressante.
12:51Juste, pardonnez-moi, Yelbrande Bivet,
12:53c'est effectivement, est-ce que le centre de gravité,
12:55l'ancien Président Sarkozy a raison,
12:57est-ce que le centre de gravité de la politique française,
12:59aujourd'hui, est à droite,
13:01après les résultats qu'on a eus en juillet dernier ?
13:03Justement, moi, lorsque je regarde cette Assemblée
13:05que je connais bien,
13:07je vois que c'est une Assemblée qui est extrêmement éclatée,
13:11trois blocs, et vous l'avez suffisamment rappelé,
13:14et que les Français,
13:16et moi, c'est ce qu'ils me disent surtout,
13:18c'est qu'ils en ont vraiment marre des querelles de partis,
13:21ils en ont vraiment marre des étiquettes
13:24et des gens qui se disent de tel ou tel côté de l'échec
13:27et qui ne veulent pas surtout parler
13:29et construire avec l'autre côté.
13:31Vous savez, moi, je me suis engagée
13:33parce que, justement, j'avais une autre vision politique.
13:36En 2017, vous parliez de Lucie Castet
13:39en tant que membre de la société civile.
13:41Moi, je fais partie de cette fameuse société civile
13:44qui s'est engagée en 2017,
13:45qui n'avait jamais fait de politique de sa vie.
13:48Et je me suis engagée pour, justement,
13:50que nous dépassions ces antagonismes
13:52qui avaient fondé notre vie politique
13:55pendant des décennies,
13:56et pour que nous soyons en capacité de travailler ensemble.
13:59Eh bien, aujourd'hui, c'est ce que nous devons faire,
14:01c'est ce que les Français nous demandent de faire.
14:04Alors, non pas de dépasser les clivages
14:06et d'être dans un parti unique,
14:09celui du Président de la République,
14:10mais, au contraire, de nous rassembler,
14:14de rassembler des forces politiques
14:15et de considérer que le problème,
14:17ce n'est pas tant je suis de droite, je suis de gauche,
14:19et ce n'est pas la question d'un barycentre éventuel,
14:22c'est de savoir qu'est-ce qu'on fait pour l'école,
14:25la santé, le pouvoir d'achat.
14:27Et ces réponses-là ne sont pas de droite ni de gauche.
14:30A gauche sur le social et à droite sur le régalien,
14:31si vous deviez résumer ce qu'on vous dit.
14:33Ce qui est important, et vous savez,
14:34les valeurs de notre République et les valeurs du régalien,
14:37elles ne sont pas de droite, elles ne sont pas de gauche.
14:39Vous avez été abandonnée par la gauche pendant un certain temps.
14:41Justement, les Français, ce qu'ils nous disent,
14:43c'est qu'ils ont besoin,
14:45ils ont besoin de colonnes vertébrales,
14:47ils ont besoin de valeur,
14:49ils ont besoin de savoir où on habite,
14:52et ça, ce n'est pas ni de droite ni de gauche.
14:54Mais malgré tout ?
14:55Simplement, c'est juste notre pays,
14:57et ils attendent de nous cela.
14:58Donc, maintenant, en fait, avançons,
15:01avec un gouvernement qui sera justement préoccupé
15:05uniquement par l'intérêt de notre pays
15:07et l'intérêt des Français,
15:08et non pas par l'intérêt de leur parti
15:11ou l'intérêt d'une éventuelle prochaine élection.
15:13J'en vois trop qui aujourd'hui jouent le coup d'après.
15:16C'est, pour moi, en tant que femme,
15:18en tant que mère de famille, en tant que citoyenne,
15:20en tant qu'aujourd'hui femme politique,
15:22je trouve que c'est absolument scandaleux.
15:24Les Français...
15:25Qui joue les coups d'après, s'il vous plaît ?
15:27Je ne jouerai pas à cela, à vous donner de noms.
15:31Mais justement, la situation est trop importante,
15:34trop grave, et les Français nous attendent.
15:37Regardez les résultats des derniers sondages,
15:39le regard qu'ils portent sur la classe politique.
15:42Mais ça devrait tous nous effrayer.
15:45Non, mais il y a la classe politique.
15:47Pardonnez-moi, Yael Grande-Pivet,
15:48il y a la classe politique.
15:49Il y a quand même un président qui donne le sentiment,
15:51et d'autres l'ont dit, qui procrastinait un peu.
15:53Pas du tout.
15:54Ça fait dix jours.
15:55Il avait promis un Premier ministre,
15:57là, avant la fin de cette semaine.
15:58On est dimanche, il est midi vent.
16:00Le Président, il a pris le temps de rencontrer
16:03toutes les forces politiques.
16:05De rencontrer la Présidente de l'Assemblée nationale,
16:07que je suis.
16:08De rencontrer le Président du Sénat.
16:10Il a consulté, il a avancé,
16:12et c'est comme ça qu'il a pu...
16:13Mais tout ça pour parler à Bernard Cazeneuve,
16:15dont on entend parler depuis des semaines.
16:16Mais c'est comme ça qu'il a pu, d'abord,
16:17écarter l'hypothèse de Lucie Castex,
16:19puisqu'elle était, si elle était nommée,
16:22susceptible de rencontrer une majorité contre elle.
16:25Et ça, il fallait bien que les forces politiques
16:28le disent au Président de la République.
16:30Il ne fallait pas l'écarter plus tôt.
16:31On n'a pas attendu trop longtemps.
16:32Oui, mais il fallait que les forces politiques...
16:33Il ne fallait pas l'écarter simplement
16:35parce que c'était elle,
16:36ou parce qu'elle venait du Nouveau Front Populaire.
16:38Il fallait l'écarter pour une raison qui est imparable,
16:42qui est que les forces politiques
16:44qui sont présentes à l'Assemblée nationale,
16:46et qui ont chacune un certain nombre de députés,
16:48ont dit qu'elles voteraient une motion de censure.
16:51Et le Président garant de la stabilité
16:54devait, en entendant ça,
16:56essayer d'explorer d'autres pistes.
16:58C'est ce qu'il a fait.
16:59Et moi, à nouveau, je pense que
17:01s'il arrive à nommer un Premier ministre qui...
17:04Vous savez, ce n'est pas un jeu de qui,
17:06je crois que c'est quelqu'un qui a utilisé cette expression.
17:09L'objectif, ce n'est pas de nommer
17:11pour avoir un gouvernement qui est renversé,
17:13pour renommer dans un mois, pour...
17:15Il ne faut pas qu'on participe,
17:17et le Président, plus que tout autre,
17:20a de l'instabilité institutionnelle.
17:22Mais vous entendez quand même...
17:24Ce que dit la gauche, c'est qu'au fond de dire
17:26Emmanuel Macron se compose comme s'il n'avait pas perdu.
17:29Tout continue comme avant.
17:31Il y a de l'entourloupe,
17:33et il y a de la colère qui va monter contre lui,
17:35parce qu'il ne tire pas les leçons de ses élections.
17:37Est-ce que vous entendez cet argument-là ?
17:39Je l'entends, et je vous avoue
17:41que je ne le comprends pas complètement.
17:43Parce que le nouveau Front populaire
17:46ne détient pas,
17:48et loin, 100 fois, une majorité à l'Assemblée nationale.
17:51Autrement, vous savez que je ne serais pas devant vous aujourd'hui.
17:54Puisque, lorsqu'il s'agit de procéder à l'élection
17:58du Président de l'Assemblée nationale,
18:00le nouveau Front populaire avait un candidat unique,
18:03qui n'a pas gagné cette élection
18:05à la présidence de l'Assemblée nationale.
18:07Donc, le nouveau Front populaire, seul,
18:10ne détient pas de majorité à l'Assemblée nationale.
18:14Mais en même temps, personne ne détient vraiment de majorité...
18:17Justement ! Personne ne détient de majorité à l'Assemblée nationale.
18:20Il n'y a pas de coalition contraire qui dise qu'il y a garantie de stabilité.
18:24Pour mon élection, il y a eu une coalition contraire,
18:27puisqu'il ne vous aura pas échappé,
18:29que j'ai été élue avec les voix de ma famille politique,
18:33Renaissance, Le Modem et le groupe Horizon,
18:36mais aussi des voix d'un certain nombre de membres
18:39de l'UDI et du groupe Lyot,
18:41un certain nombre de voix ultramarines,
18:43et les voix des Républicains.
18:46Donc, il y a d'autres majorités qui étaient possibles.
18:49Donc, il était important pour le Président de la République
18:52de pouvoir lever et examiner toutes les hypothèses
18:55avec comme seul objectif l'intérêt du pays,
18:58l'intérêt des Français, donc la stabilité
19:01et surtout la capacité à agir.
19:04Et donc, c'est cela qui a pris du temps.
19:07C'est normal. Moi, je ne le déplore pas.
19:10Bien au contraire, parce que l'objectif, c'est cela.
19:13Stabilité, capacité à agir.
19:15Quand on perd une élection, ce qui s'est passé pour le camp macroniste
19:18aux élections européennes et ensuite aux élections législatives,
19:21vous appartenez à ce camp présidentiel.
19:24Est-ce que ce n'est pas choquant pour une partie des Français
19:27que vous soyez la présidente de l'Assemblée nationale ?
19:30Vous appartenez au camp qui a perdu, qu'on a voulu démettre,
19:33que les Français, les électeurs ont voulu démettre ?
19:36J'entends certains qui disent cela.
19:39Je vous avoue que je n'ai pas rencontré un Français cet été
19:43Moi, j'ai plutôt rencontré des Français qui m'ont dit
19:46qu'ils se satisfaisaient de mon élection parce que, justement,
19:49elle était un signe de stabilité de l'Assemblée nationale.
19:52Et comme ils savent que moi, je suis quelqu'un
19:55qui dirige cette Assemblée en écoutant les uns et les autres,
19:58en essayant de rapprocher les points de vue
20:01et en essayant de faire converger des forces politiques
20:04qui, d'habitude, ne convergent pas,
20:07moi, les Français que j'ai rencontrés m'ont plutôt rassurée.
20:11Après, évidemment que le camp présidentiel
20:14a perdu l'élection, mais on peut le dire 100 fois,
20:17c'est une réalité, mais nous avons
20:20à l'Assemblée nationale 166 parlementaires.
20:23On ne peut pas faire comme si ces 166 parlementaires
20:26n'existaient pas. Ils sont là.
20:29Ils portent des idées. Ils portent des valeurs.
20:32Et toute coalition, tout gouvernement
20:35qui devra avancer et proposer des actions
20:39pour les Français, devra évidemment tenir compte
20:42de ces 166 parlementaires. De même qu'il devra tenir compte
20:45des différentes forces politiques. C'est pour ça que je vous indique
20:48que nous n'avons pas le choix. Vous savez,
20:51ce que j'ai aussi expliqué aux Français que j'ai rencontrés cet été,
20:54c'est que cette Assemblée qu'ils ont élue,
20:57c'est la leur, c'est la nôtre, c'est la vôtre,
21:00et c'est notre Assemblée. Pendant un an.
21:03Nous n'avons pas le choix. Nous ne pouvons pas
21:06être comme des enfants gâtés et dire
21:09j'en veux pas. Cet équilibre politique ne me convient pas.
21:12Je veux que ça soit différent.
21:15Je vais nous dire comment on va réussir à fonctionner.
21:18Nous ne sommes pas des enfants gâtés, bien sûr. Mais c'est que le Président n'en soit pas un.
21:21Est-ce qu'il n'y a pas une logique
21:24qui serait de désigner un Premier ministre qui serait
21:27compatible et lui dire à toi de jouer
21:30avec tes majorités. Parce qu'en fonction des personnalités,
21:33c'est correctement avec certains socialistes, pas avec d'autres personnes.
21:36Est-ce que finalement c'est lui qui doit
21:39faire le gouvernement, faire le Premier ministre, faire le programme ?
21:42Ça c'était la question. Et deuxièmement, est-ce que vous croyez
21:45à une hypothèse d'un Premier ministre technique ?
21:48Ce qu'on a dit il y a quelque temps, on a parlé de Didier Migo,
21:51bien qu'il ait été politique dans le temps, qui était à la Cour des Comptes
21:54puis à la Haute Autorité pour la Transparence. On a parlé d'Éric Lombard
21:57qui est actuellement Président de la Caisse des Dépôts et Consignations.
22:00On a parlé Pierre Moscovici, Cour des Comptes. Bon, est-ce que ça tient la route
22:03l'idée du Premier ministre technique ?
22:06Qu'est-ce que ça veut dire ? Donc, est-ce que c'est pas un peu une marge
22:09de manœuvre du Premier ministre ?
22:12Je fais juste une petite parenthèse. Nathalie, arrêtez de vous battre avec votre micro.
22:15J'ai touché ? Oui, vous n'arrêtez pas.
22:18C'est pas grave. On vous écoute Yael Boutok.
22:21Le Président, lui, doit nommer le Premier ministre
22:24et la Constitution a dit qu'après, le Premier ministre
22:27doit déterminer et conduire la politique de la nation
22:30et qu'opposer le gouvernement qui sera nommé
22:33sur proposition du Premier ministre.
22:36Donc, chacun est dans son rôle.
22:39Le Président de la République, lui, devait et doit s'assurer
22:42que le Premier ministre qu'il nomme ne soit pas renversé
22:45quoi qu'il arrive. Et c'était le cas de Lucie Castex.
22:48Quoi qu'il arrive, à partir du moment où elle avait indiqué
22:51qu'elle appliquerait le programme du Nouveau Front Populaire
22:54et qu'il y aurait, au départ des ministres, la France Insoumise
22:57dans son gouvernement, tous les partis avaient indiqué
23:00qu'ils censuraient. Et donc, quoi qu'il arrive, cette nomination
23:03et ce gouvernement auraient été censurés.
23:06Donc, le Président de la République a raison au nom de la stabilité
23:09des institutions d'écarter cette hypothèse.
23:12À partir du moment où il réussit à trouver une personne
23:15qui, justement, n'emporte pas de majorité contre elle
23:18de façon immédiate, que ce soit Bernard Cazeneuve
23:21ou un Premier ministre plus technique, Didier Migaud, vous en avez cité quelques-uns.
23:24Dans ces cas-là, il reviendra, évidemment, à ce Premier ministre
23:27renommé, de déterminer ce fameux pacte d'action
23:30en rencontrant à nouveau, je ne veux pas lui dire
23:33ce qu'il a à faire, mais à mon sens, en rencontrant
23:36à nouveau l'ensemble des forces politiques présentes
23:39à l'Assemblée Nationale, pour savoir sur quelle feuille de route
23:42il peut s'engager à horizon un an, par exemple.
23:45Et c'est à le Premier ministre ou le Président la seule ?
23:48C'est à le Premier ministre d'organiser ses consultations
23:51et de composer un gouvernement qui puisse mettre...
23:54Mais c'est un technicien qui connaît rien à la politique, on fait comment ?
23:57Mais vous savez, quand vous citez notamment Pierre Moscovici ou Didier Migaud...
24:00Ils connaissent les règles à l'Assemblée, oui.
24:03Didier Migaud, il a été élu un certain nombre de reprises députée,
24:06il était rapporteur général du budget, il a été président de la commission des finances.
24:09Si quelqu'un connaît bien le fonctionnement de l'Assemblée Nationale, c'est lui.
24:12Donc moi, je ne suis pas inquiète. Ce que je pense profondément,
24:15c'est qu'il faut que ce Premier ministre,
24:18ensuite, dès qu'il sera nommé, puisse à nouveau
24:21entamer des consultations pour déterminer ce pacte d'action.
24:24Moi, j'ai vu aussi beaucoup, et ça m'a intéressée,
24:27j'ai reçu beaucoup de courriers en ce sens.
24:30Des gens de la société civile, des Singtons, des citoyens
24:33m'écrire en me disant, Madame la Présidente,
24:36si on regarde un petit peu tous les programmes des uns et des autres,
24:39il y a quelques sujets sur lesquels on peut s'entendre.
24:43Et certains me disent, regardez l'éducation, la santé,
24:46la stabilité budgétaire.
24:49Il y a un certain nombre de sujets sur lesquels
24:52nous pouvons voir des convergences.
24:55Donc ce sera au Premier ministre de regarder cela pour voir
24:58quelles peuvent être les grandes réformes.
25:01Parce que moi, je ne me résous pas à ce qu'il y ait simplement
25:04une gestion qui soit à minima.
25:07Nous devons, nous pouvons, je le crois,
25:10continuer à porter des grandes réformes pour notre pays.
25:13Il y a un sujet, c'est que le Premier ministre va être
25:16probablement nommé la semaine prochaine,
25:19mais l'Assemblée n'est pas réunie pour le moment.
25:22Est-ce que vous, vous entendez ceux qui disent
25:25qu'il faut la tenue d'une session extraordinaire ?
25:28On ne peut pas faire des consultations dans le dos des parlementaires ?
25:31Est-ce que vous allez demander la tenue d'une session extraordinaire ?
25:34Sur ce point, j'entendais au début de l'émission que l'Assemblée nationale
25:37était à l'arrêt aujourd'hui. Pas à l'arrêt, l'Assemblée nationale travaille.
25:40Elle a réuni ses instances au mois de juillet.
25:43Les caisseurs ont travaillé tout l'été sur le budget
25:46de l'Assemblée nationale que nous devrons voter
25:49au mois de septembre, qui avait été travaillé
25:52par les précédents caisseurs. Les commissions sont au travail.
25:55Oui, sauf qu'habituellement, on a des sessions parlementaires
25:58extraordinaires et que là, en ce moment, on n'en a pas.
26:01Donc c'est la question de Françoise. Est-ce qu'il en faut une ?
26:04La session ordinaire de l'Assemblée nationale recommence en octobre
26:07de façon très classique. L'Assemblée nationale ne se réunit pas
26:10au mois d'août. Donc il faut quand même remettre un peu l'église
26:13au milieu du village. Nous ne sommes pas dans un fonctionnement
26:16complètement inhabituel de nos institutions.
26:19Même sur le budget ? Pour autant. Pour autant.
26:22Pour une éventuelle session extraordinaire qui, je le rappelle
26:25à vos auditeurs, est une décision du Président de la République.
26:28Moi, je considère qu'en tant que Président de l'Assemblée nationale,
26:32s'il devait y avoir, là, dans les jours qui viennent,
26:35un Premier ministre qui soit nommé, s'il devait y avoir
26:38un gouvernement qui puisse être nommé dans la foulée,
26:43moi, je considère que ce gouvernement et ce Premier ministre
26:46devraient venir se présenter devant l'Assemblée nationale.
26:49Donc je demanderais une session extraordinaire parce que,
26:52dans mon esprit, en tant que Président de l'Assemblée nationale,
26:55dans les circonstances politiques actuelles, nous ne pouvons pas
26:59ne pas entendre et questionner le Premier ministre
27:02qui serait nommé et son gouvernement.
27:05Parce que session extraordinaire veut dire possibilité de faire
27:08ce qu'on appelle une déclaration de politique générale,
27:11d'exposer aux parlementaires et donc par là même aux citoyens
27:14quel serait ce fameux pacte d'action,
27:17quel serait le programme que ce gouvernement
27:20et ce Premier ministre auraient l'intention de mettre en œuvre.
27:23Et puis, session extraordinaire veut dire aussi
27:27question au gouvernement et donc capacité pour tous les parlementaires
27:30d'interpeller le Premier ministre et les ministres sur la politique
27:33qu'ils souhaitent mener.
27:36Donc c'est important. Le gouvernement est responsable devant le parlement.
27:39Mais il faut se dépêcher d'avoir un gouvernement.
27:42Parce que pour l'instant, on a quand même des ministres-démissionnaires
27:45qui sont donc ministres et députés. Donc on imagine mal un député
27:48qui pose une question à son propre ministre, à ce qu'il est lui-même.
27:51C'est sûr que de toute façon, et c'est le propre d'un gouvernement
27:55démissionnaire, un gouvernement démissionnaire ne peut pas être
27:58renversé, ne peut pas répondre à des questions au gouvernement.
28:01C'est l'évidence.
28:04Il n'y a pas de vote de confiance. Je ne vais pas poser la question 18 fois.
28:07Est-ce qu'il est nécessaire, vu que vous avez vous-même dit
28:10qu'il fallait valider le fait qu'il y avait
28:13non pas une majorité forcément pour, mais en tout cas
28:16pas une majorité contre, qu'il y ait un test qui soit fait
28:19à l'occasion. Il n'y a aucune obligation.
28:23La réponse est contenue dans votre question,
28:26puisque vous venez de dire qu'on n'a pas forcément une majorité
28:29pour, mais il ne faut pas de majorité contre. Ce qui est important
28:32de savoir, c'est que lorsque nous sommes en cession,
28:35qu'elle soit ordinaire ou extraordinaire, les parlementaires
28:38peuvent déposer ce qu'on appelle une motion.
28:41Il faut être en cession pour cela. Et c'est une des raisons
28:44pour lesquelles je pense que s'il y a un gouvernement
28:47nommé, il faut qu'il y ait une cession extraordinaire
28:51pour que les parlementaires puissent, le cas échéant,
28:54déposer, s'ils le souhaitent, une motion de censure
28:57et qu'elle puisse être discutée et votée par le Parlement.
29:00Donc vous êtes d'accord avec Jordan Bardelin, avec Fabien Roussel,
29:03le Rassemblement National, le Parti Communiste
29:06qui demandent effectivement cette cession parlementaire extraordinaire.
29:09Non, mais vous savez, moi j'essaye
29:12en tant que présidente de l'Assemblée Nationale d'être la plus
29:15rationnelle possible, d'avoir du bon sens
29:18et il me semble qu'en tenu de la situation
29:21politique que nous vivons et de ce que je viens d'exposer,
29:24que le bon sens et l'esprit de responsabilité
29:27conduiraient le gouvernement à devoir être devant l'Assemblée.
29:30Et donc, évidemment, je demande cette cession
29:33extraordinaire, je n'ai pas à être d'accord avec un tel
29:36ou un tel, je sais et je suis en capacité
29:39de mener mes propres raisonnements et de prendre mes décisions
29:42comme une grande. Juste avant, on va rester sur ce qui va
29:45se passer à l'Assemblée pour comprendre comment les choses vont s'organiser.
29:48Juste une question sur ce qui se passe à l'extérieur en ce moment.
29:51On est dans la perspective, le week-end prochain, d'une manifestation
29:54contre le président de la République pour une destitution.
29:57Est-ce que vous craignez, malgré tout, un embrasement
30:00de la rue, des gens en colère, pas satisfaits
30:03de ce qui se passe en ce moment ? Qu'il y ait des gens pas satisfaits,
30:06je les comprends. Maintenant, moi je leur dis
30:09qu'il faut être
30:12patient, il faut surtout être respectueux des institutions
30:15et que parfois, malheureusement, certains les manipulent
30:18par le discours qu'ils tiennent.
30:21Il n'y a pas plus de déni de démocratie
30:24dans mon élection à la présidence de l'Assemblée nationale
30:27que dans le choix du président de la République
30:30de ne pas nommer Lucie Castex.
30:33Je crois que c'est important, vous savez, il faut se référer toujours,
30:36et on parlait d'Henri Leclerc, dans une démocratie,
30:39il faut se référer au texte, il faut se référer
30:42à la règle et à notre règle commune.
30:45Et la Constitution, et je l'ai dit très souvent,
30:48elle n'est pas à la carte. Et lorsque
30:51on invoque la violation de la Constitution pour
30:54entamer une procédure de destitution du président de la République
30:57qui n'a absolument aucun sens,
31:00mais regardons la Constitution, et la Constitution indique bien
31:03que le président de la République nomme le Premier ministre, c'est assez clair.
31:06Donc ne manipulons pas les gens, vous savez,
31:09lorsqu'on respecte les citoyens, lorsqu'on respecte
31:12le peuple comme je peux le faire, on ne leur ment pas.
31:15Pour autant, la Vème République,
31:18ça a toujours été au fond
31:21un rapport de force entre le président de la République, le Parlement,
31:24là on a un président de la République plus affaibli
31:27qu'il y a quelques mois, et une Assemblée nationale dont vous avez vu
31:30la difficulté de faire vivre en majorité relative.
31:33Là, quel rôle vous assignez-vous
31:36en tant que présidente de l'Assemblée nationale pour
31:39redorer, tenter de redorer le blason de l'Assemblée nationale
31:42qui est assez discrédité aussi, et au fond
31:45peser peut-être aussi par rapport à l'exécutif ?
31:48Est-ce que vous dites, il y a une méthode de travail ou il y a des choses
31:51à faire à l'Assemblée que je n'ai pas encore faites ?
31:54Vous l'avez rappelé, pendant deux ans l'Assemblée nationale ne disposait
31:57pas de majorité absolue, il y avait une majorité relative
32:00et nous avons collectivement
32:03souvent sur ma proposition, créé de nouvelles
32:06façons de travailler. Moi, quand je suis
32:09arrivée à la présidence, j'ai créé ce qu'on appelait les semaines
32:12transpartisanes. Au début, beaucoup
32:15se sont un peu moquées en se disant que cela ne marcherait pas.
32:18Une semaine transpartisane, c'était quoi ? C'était
32:21un partage de l'ordre du jour de l'Assemblée
32:24donc on inscrit des propositions de loi qui émanent
32:27des parlementaires et on inscrivait des propositions
32:30de loi qui venaient d'un parlementaire de la majorité
32:33et d'un parlementaire de l'opposition.
32:36Donc qui, dès le début, travaillait ensemble
32:39un texte de loi, le déposait sur le bureau
32:42de l'Assemblée nationale et nous le discutions.
32:45Et ces semaines transpartisanes, elles ont été créées à l'unanimité
32:48des groupes politiques. Tous les groupes politiques ont accepté
32:51de jouer le jeu. Nous ne les avons pas inscrites dans le règlement
32:54de l'Assemblée nationale. C'était une simple décision
32:57collective en disant, voilà, il faut trouver une nouvelle façon
33:00de fonctionner. Et ça a marché. Nous avons adopté
33:03de très nombreux textes dans ces semaines transpartisanes.
33:06Je pense par exemple à un texte
33:09qui venait du Sénat de Valérie Letart
33:12sur l'aide d'urgence, vous savez, pour les femmes victimes
33:15de violences. Une aide qui leur permet
33:18de quitter leur domicile très rapidement.
33:21On a adopté un texte, alors qu'il est en cours
33:24de navette en ce moment, mais à l'Assemblée nationale
33:27de façon très large, à l'initiative d'un député,
33:30de la majorité d'un député PS,
33:33sur les Airbnb, vous savez, ces locations.
33:36Donc nous avons appris à travailler
33:39comme cela. Nous avons adopté, mais on ne le sait pas,
33:4240 textes à l'unanimité
33:45de l'hémicycle. Unanimité.
33:4890% de ces 40 textes étaient des textes qui étaient portés
33:51par des parlementaires. Donc tout ça pour dire
33:54que tout n'a pas bien marché pendant ces deux années à l'Assemblée nationale.
33:57Mais nous avons montré que nous étions
34:00capables aussi de fonctionner ensemble.
34:03Donc il va falloir aller beaucoup plus loin
34:06sur ces méthodes de travail. Et justement,
34:09et par rapport au gouvernement, travailler beaucoup plus
34:12en amont. On a, et moi je l'ai toujours
34:15déploré, même lorsque j'étais présidente de la commission des lois,
34:18je l'ai écrit parce que moi j'avais écrit un plaidoyer pour un Parlement
34:21renforcé. Je crois en l'Assemblée nationale.
34:24Et j'ai toujours pensé qu'il fallait
34:27que le Parlement soit associé dès l'origine
34:30lorsque le gouvernement veut
34:33procéder au vote d'un texte.
34:36Aujourd'hui, on est associé beaucoup trop tardivement.
34:39Il faudrait que les parlementaires soient
34:42consultés et quitte à organiser des débats à l'Assemblée nationale.
34:45Typiquement, nous voulons travailler sur la question
34:48de la santé, des déserts médicaux. Les Français nous en parlent
34:51quel que soit leur bord politique. J'ai plein de propositions
34:54de loi qui ont été déposées à l'Assemblée nationale sur les déserts médicaux.
34:57J'ai Guillaume Garot, PS, qui travaille avec un groupe
35:00transpartisan sur les déserts médicaux depuis
35:03deux ans. Je l'avais reçu. Je le reçois la semaine prochaine.
35:06Eh bien nous avons ensemble des capacités d'avancer,
35:09de trouver des modalités. Moi, je serais
35:12l'animatrice de cela.
35:15Ce n'est pas idéologique.
35:18Est-ce que vous aurez véritablement le même poids pour faire avancer
35:21l'Assemblée comme vous l'avez fait ces deux dernières années, dans la mesure où,
35:24il faut le rappeler aussi, vous n'êtes plus majoritaire au sein de votre
35:27propre bureau ? Est-ce que ça risque de vous poser des problèmes ? Et comment
35:30vous allez gérer tout ça ?
35:33Tout ce dont je viens de vous parler sont des décisions qui se prennent
35:36en conférence des présidents, avec l'ensemble des présidents de groupes,
35:39en ce qu'ils représentent un certain nombre de parlementaires.
35:42Moi, je suis convaincue que
35:45j'aurais en face de moi, comme je les connais, vous savez,
35:48ce sont quasiment les mêmes avec lesquels j'ai travaillé
35:51pendant deux ans. Moi, à chaque fois,
35:54j'ai vu des présidents de groupes qui
35:57ne voulaient pas participer à un quelconque
36:00blocage de l'institution. Donc j'ai confiance.
36:03Vous avez fait des choses impressionnantes.
36:06Vous croyez peut-être que je suis naïve. Moi, je ne crois pas.
36:09Moi, j'ai fait fonctionner cette assemblée pendant deux ans.
36:12Avec un bureau majoritaire qui vous soutenait ?
36:15Toutes les décisions dont je viens
36:18de vous parler ne sont pas prises en bureau,
36:21mais en conférence des présidents, avec des présidents de groupes
36:24qui ont à cœur le bon fonctionnement des institutions.
36:27Moi, je ne doute pas que les présidents de groupes
36:30qui aujourd'hui ont été élus par leurs députés
36:33à l'Assemblée nationale auront à cœur la continuité
36:36de l'institution, la continuité de notre action
36:39parce que c'est le rôle que nous avons.
36:42Vous savez, moi, lorsque je suis avocate,
36:45vous savez que lorsque vous êtes élue,
36:48vous n'agissez pas pour votre propre compte. Vous n'agissez pas
36:51pour le compte d'un parti. Vous agissez pour le compte
36:54des citoyens. Vous agissez pour le compte de ceux qui vous ont
36:57confié cette mission-là. Elle ne vous appartient pas.
37:00Donc, je crois que la situation appelle à ce que chacun
37:03se dépasse, à ce que chacun se hisse
37:06au-dessus de lui-même. En tout cas, moi, c'est ce à quoi
37:09j'appelle l'ensemble des forces politiques et je ne doute pas
37:12qu'elles répondront à cet appel à l'Assemblée nationale.
37:15Dernière petite question d'actualité, puisque vous parlez
37:18d'un monde tel qu'il devrait être et non pas forcément tel qu'il est.
37:21Un des points d'achoppement, un truc qu'on a compris
37:24dans les relations Cazeneuve-Emmanuel Macron,
37:27c'est qu'il veut être vraiment dans une cohabitation et deuxièmement
37:30qu'il demande la suspension de la réforme des retraites.
37:33Et faut-il, à titre de précaution et pour remettre à plat,
37:36écoutez, parce qu'il y a quand même le Rassemblement national,
37:39le NFP, tout le monde presque, sauf LR, est-ce qu'il faut avoir
37:42cette sagesse, ou le chef de l'État doit avoir cette sagesse
37:45non pas de se contredire, mais de se mettre
37:48en contre-parenthèse en disant « Ok, il y a des choses qui ne vont pas,
37:51on rediscute ». Lui veut renégocier avec les syndicats,
37:54est-ce que ça serait déjà un bon début d'ouverture ?
37:57Que l'on rediscute avec les syndicats et avec
38:00l'ensemble de la société et des forces politiques,
38:03un certain nombre de points de cette réforme de retraite qui ont été
38:06mis en évidence, les carrières longues, la pénibilité,
38:09les inégalités entre les hommes et les femmes,
38:12ça moi j'y suis très favorable. En revanche,
38:15qu'on anéantisse cette réforme...
38:18Il ne dit pas ça, il ne dit pas abrogation, il dit suspension.
38:21Parce que l'abrogation, ça serait quelque chose de très néfaste
38:24et demander aux 1 700 000
38:27français qui bénéficient de cette réforme
38:30aujourd'hui, qui ont vu leur retraite
38:33s'améliorer jusqu'à 700 euros
38:36parce qu'ils ont bénéficié
38:39de la revalorisation du minimum de retraite,
38:42je pense qu'ils le prendraient de très mauvaise manière.
38:46Moi je ne ferme pas la porte,
38:49mais en revanche, je suis attachée
38:52à ce que nous avons fait parce que c'est ce qui permet
38:55de maintenir la pérennité
38:58de notre système, la confiance de chacun
39:01dans le système et ça c'est fondamental. Mais à la base,
39:04moi comme beaucoup, j'étais très favorable à une réforme
39:07beaucoup plus systémique, la fameuse réforme à points,
39:10mais il convient néanmoins
39:13de garder ce que nous avons fait
39:16en ce que ça permet de pérenniser le système auquel
39:19l'ensemble des français est extrêmement attaché et ils ont raison.
39:22Est-ce qu'un autre thème peut sauter ? Le fait que
39:25les impôts ne doivent pas augmenter, dit Emmanuel Macron.
39:28Est-ce que vous vous êtes prêts à ce que
39:31un certain nombre de choses soient réexaminées ?
39:34Ce qui est important, c'est que nous ayons de la stabilité,
39:37que nous ayons une continuité dans la politique de l'offre
39:40qui a été menée, c'est ce que j'ai exprimé aux universités
39:43d'été du Medef, c'est important pour la confiance, il faut créer
39:46de la richesse, il ne faut pas casser la croissance.
39:49En revanche, il faut, et je l'avais déjà dit aussi, donc je suis
39:52très constante en la matière, regarder
39:55là où nous pouvons travailler,
39:58la taxation de certains super-profits,
40:01regarder du côté des dépenses,
40:04repasser en revue l'ensemble des niches fiscales.
40:07Les Français ont besoin d'équité.
40:10Concernant les salaires et les revenus,
40:13vous savez que moi je pense qu'il faudrait
40:16faire une grande conférence sociale autour
40:19de la question des salaires, du pouvoir d'achat
40:22pour essayer de désmicardiser
40:25la France, comme on le dit de façon très moche
40:28mais très vraie. Il faut que nos Français
40:31aient de la visibilité et la capacité
40:34de progresser par leur travail, par leur activité,
40:37qu'ils aient la capacité à grandir
40:40et donc travailler sur la question
40:43des salaires. Mais à nouveau, ça, tous les sujets
40:46qu'on vient d'évoquer, c'est des sujets finalement
40:49que nous pourrions travailler ensemble et qui pourraient
40:52faire l'impact d'action.
40:55Je pense que
40:58ce que nous avons fait, qui n'était pas l'abandon total
41:01de l'IFI, tout se regarde.
41:04Mais moi je ne suis pas pour une déconstruction
41:07totale. Là aussi, les Français en ont marre.
41:10Parce que c'est ça, les oppositions stériles, c'est de dire
41:13tout ce que vous avez fait c'est pas bien et on défait
41:16et on refait autre chose. Ça, ça ne sert à rien.
41:19Ça fait à une conduite des affaires de l'État complètement
41:22erratique. Les Français ont besoin d'un cap, les Français ont besoin
41:25de stabilité, de continuité, de valeur
41:28et je crois que c'est ça que nous devons leur apporter en cette rentrée.
41:31La Présidente de l'Assemblée nationale, Yel Bounpivet
41:34est avec nous jusqu'à 13h. Merci. Vous restez évidemment
41:37avec nous. Il est temps de recevoir notre second invité pour le livre
41:40de la semaine.
41:51Il a salué tout le monde, tranquillement. Vous avez bien fait.
41:54Bonjour Michel Viviorca. Bonjour. Merci de nous avoir rejoints
41:57sur le plateau de questions politiques. Vous venez de
42:00rééditer l'un de vos ouvrages qui tombe à pic.
42:03L'antisémitisme expliqué aux jeunes au moment où
42:06l'attaque d'une synagogue le week-end dernier a choqué
42:09en France. Là, c'est passé à la grande mode. Je rappelle que
42:12l'auteur des faits a été arrêté, qu'il a reconnu avoir
42:15voulu défendre la cause palestinienne 10 mois
42:18après les attentats du Hamas en Israël et après
42:2110 mois d'une guerre intensive de l'armée israélienne
42:24dans la bande de Gaza. Michel Viviorca, cette attaque
42:27de samedi dernier, elle est antisémite
42:30ou elle est antisioniste ?
42:33On rentre dans des questions
42:36compliquées. Je vais vous répondre non pas sur cette attaque
42:39en particulier, mais de façon générale.
42:42Je pense que l'antisionisme, c'est
42:45l'idée qu'il n'y a pas place sur cette
42:48terre pour un état juif ou un état hébreu.
42:51C'est une idée qui est née dans des milieux juifs.
42:54A la fin du 19e siècle, quand il était question de créer
42:57un état d'Israël, il y avait dans le monde
43:00juif, soit pour des raisons religieuses, soit pour des raisons politiques,
43:03des gens qui n'en voulaient pas. Je ne rentre pas dans le détail.
43:06Et puis évidemment, il y a eu la création de l'état d'Israël
43:09et l'idée d'antisionisme s'est
43:12transformée. Je pense que la grande, grande majorité
43:15des juifs, à partir de 1967 et de la guerre des 6 jours,
43:18ont tous été sionistes en quelque sorte,
43:21ou en tout cas neutres par rapport à l'idée d'un état.
43:24Mais évidemment, il y a des courants qui s'opposent
43:27à l'existence de cet état. Alors j'en arrive à votre question,
43:30mais vous voyez, il faut avoir en tête ce paysage.
43:33J'en arrive à votre question. Quand il s'agit
43:36de critiquer le gouvernement ou la politique
43:39israélienne, et en particulier
43:42ce que fait Netanyahou,
43:45je pense qu'on n'est pas du tout
43:48dans de l'antisémitisme, ou pas nécessairement en tout cas.
43:51Et qu'on n'est pas non plus dans un antisionisme virulent.
43:54On critique la politique d'un état.
43:57Quand on dit qu'il n'y a pas place sur cette terre
44:00pour un état hébreu ou un état juif,
44:03il faut jeter les juifs à la mer, il faut détruire tout ça,
44:06on entend autre chose. On rentre dans l'idée
44:09que les juifs n'ont pas le droit
44:12d'avoir un état.
44:15Si je vous dis, je vais prendre un exemple,
44:18mais je pourrais malheureusement prendre beaucoup d'autres, si je vous dis
44:21la théocratie iranienne est infecte,
44:24c'est une catastrophe pour la société, pour la démocratie,
44:27etc., il faut en finir avec ça.
44:30Personne n'en déduira qu'il faut supprimer l'Iran.
44:33Si je vous dis de tel ou tel pays arabo-musulman
44:36les pires horreurs, personne ne dira
44:39qu'il faut supprimer ce pays et cet état.
44:42Quand on dit qu'il faut supprimer
44:45l'état d'Israël, là on rentre
44:48dans l'antisémitisme. Je ne dis pas qu'on y est
44:51de façon forcenée forcément, mais vous voyez,
44:54on rentre dans cette zone-là. Donc c'est ça ma réponse,
44:57ça n'est pas exactement la même chose, ça se chevauche
45:00et parfois c'est la même chose.
45:03Alors ça se chevauche et on a l'impression de plus en plus aujourd'hui en France
45:06que l'antisémitisme est en train d'être dépassé,
45:09écrasé par l'antisionisme. Vrai ou pas ?
45:12Alors, et c'est aussi pour ça que j'ai fait cette publication.
45:15C'est ce qu'on comprend avec vos derniers chapitres.
45:18On gomme l'histoire. Il y a un livre,
45:21je ne sais pas s'il a été traduit en français, le titre en anglais veut dire quelque chose
45:24comme la haine la plus longue à propos des juifs.
45:27Ça commence dans l'Antiquité, alors laissons ça de côté,
45:30ça se développe avec le christianisme,
45:33c'est plutôt religieux, ça devient racial à la fin du XIXe siècle,
45:36ça culmine avec le nazisme.
45:39Il y a une histoire hallucinante.
45:42Et donc, oublier toute cette histoire,
45:45faire comme si elle n'avait pas façonné
45:48tout ce qui se dit, se pense, se fait
45:51avec les juifs à propos des juifs,
45:54c'est être complètement ignorant
45:57des raisons qui font que
46:00tel ou tel crime, tel ou tel acte antisémite,
46:03tel ou tel action terroriste a un substrat
46:06qu'on ne peut pas gommer. Et donc, tout ramener à Gaza
46:09et à la période actuelle, c'est être dans
46:12la méconnaissance et l'oubli, et si vous permettez,
46:15j'ajoute juste un dernier mot, c'est en réalité
46:18lié à un phénomène de génération qui est très important,
46:21c'est aussi pour ça que j'ai fait ce livre,
46:24jusque dans les années 2010, 2015 à la limite,
46:27il y avait encore des témoins de la Shoah,
46:30des survivants, des familles où on en parlait,
46:33ça faisait partie de la mémoire et d'une mémoire encore vivante.
46:36C'est fini tout ça, ou quasiment, ça fait partie
46:39maintenant de l'histoire. Et donc, il y a un changement
46:42et je suis effaré de voir à quel point
46:45les nouvelles générations, et pas seulement les lycéens
46:48ou les jeunes étudiants, mais aussi les jeunes enseignants,
46:51il y a un énorme travail à faire du côté de l'éducation nationale.
46:54Voilà, je suis effaré de voir à quel point
46:57une sorte de rupture s'est effectuée, et à quel point
47:00il y a une méconnaissance de tout ce substrat dont je viens de vous parler.
47:03Est-ce que vous avez l'impression que les choses se sont aggravées ?
47:06C'est-à-dire, en clair, vous avez répertorié toutes les différentes
47:09formes d'antisémitisme, le peuple déicide,
47:12est-ce que vous trouvez qu'aujourd'hui,
47:15notamment en plus avec ce qui peut se passer en Israël et à Gaza,
47:18il y a une libération du discours politique
47:21qui fait qu'on ose plus, ou on est plus antisémite ?
47:24Mais ça, le faux nez étant l'antisionisme.
47:27En clair, est-ce qu'il y a des partis politiques ?
47:30Avant c'était le RN, peut-être c'est toujours...
47:33Est-ce qu'il y a une espèce de discours ambiant qui libère la parole, comme on dit,
47:36et libère l'action, et pas dans le bon sens ?
47:39Il faut faire une réponse en deux temps.
47:42En premier temps, les formes par lesquelles transite la haine des Juifs sont variées.
47:45Et ça peut très bien monter sur un registre et descendre sur un autre.
47:48Des sondages assez généraux montrent que les préjugés antisémites
47:51dans la population française dans l'ensemble sont à la baisse.
47:54Si on ne regarde que ça, je vous dirais qu'il y en a moins.
47:57Et puis évidemment, si je regarde l'accroissement des actes antisémites
48:00depuis quelques mois, c'est à la hausse.
48:03Un attentat réussi devant une synagogue,
48:06s'il n'y a aucun mort, les chiffres sont bas.
48:09S'il y a 80 morts, ça explose.
48:12Donc c'est très difficile, c'est le premier point pour vous répondre.
48:15Mais je crois surtout qu'il faut regarder
48:18les transformations du phénomène,
48:21plutôt que d'essayer de dire ça monte ou ça descend.
48:24Ma question c'est sur la libération de la parole,
48:27de faire l'antisémitisme de climat, de l'atmosphère.
48:30Oui, je trouve que ce n'est pas une très bonne expression, l'idée d'un climat.
48:33Mais bon, moi ce que j'observe, c'est quoi ?
48:36C'est d'abord une classe politique en dehors de la gauche...
48:39Parlez bien dans le micro qu'on vous entend.
48:42Une classe politique en dehors de la gauche,
48:45qui est absolument claire,
48:48absolument limpide sur ses enjeux.
48:51Deuxièmement, j'observe que le RN,
48:54à sa tête, a décidé clairement
48:57d'en finir avec l'antisémitisme,
49:00de soutenir même Israël, qui n'est pas forcément la même chose.
49:03Et vous les trouvez sincères ?
49:06Je trouve le discours de la patronne sincère,
49:09mais je vois aussi que telle candidate
49:12aux élections législatives récentes
49:15apparaît avec une casquette hitlérienne
49:18et ce genre de choses.
49:21Bon, autrement dit,
49:24ce n'est pas parce qu'au sommet, on affiche une idéologie,
49:27que tout le monde va suivre.
49:30Donc je serai prudent, il existe encore des réseaux, des relations, etc.
49:33Mais de ce côté-là, il y a quand même un progrès considérable.
49:36Et donc, oui, ce qui me préoccupe,
49:39c'est d'une part ce qui reste, j'ai envie de vous dire,
49:42dans l'ultra-droite, dans la base de cet électorat.
49:45Ça, ça reste, ça n'a pas disparu.
49:48Il se dirait même que dans les banlieues,
49:51des gens qui relèvent plutôt de cet électorat,
49:54qui peuvent être sensibles à ce genre de thèses,
49:57qu'est-ce qu'ils lisent ? Ils lisent le site d'Alain Soral,
50:00antisémite d'extrême droite.
50:04Mais le phénomène nouveau, c'est évidemment la montée à gauche de la gauche.
50:07Alors, je voudrais qu'on se tourne vers l'élu,
50:10vers Yelbrun Pivet.
50:13Tout ce qu'on vient de dire, est-ce qu'aujourd'hui, effectivement,
50:16on est plus ou moins antisémite et plus ou moins antisioniste ?
50:19Et à quel point, finalement, les jeunes, aujourd'hui,
50:22se positionnent, et pour le coup, ils donnent le sentiment
50:25de se positionner plutôt sur un antisionisme ?
50:28C'est évidemment une situation,
50:31des choses très compliquées.
50:34Moi, ce que je voudrais dire, c'est, d'une part,
50:37je suis assez d'accord sur le fait que quand même, il y a une parole qui s'est libérée.
50:40Et peut-être parce que certains politiques
50:43ont assumé aussi cette libération de la parole
50:46et peut-être l'ont entraînée. Et ça, ça m'inquiète considérablement.
50:49Là, vous visez la France insoumise ?
50:52Oui, mais pas seulement. Je trouve que
50:55la parole antisémite avait
50:58davantage disparu de l'espace public.
51:01On n'osait pas, en fait, avoir cette parole-là.
51:04Et sous couvert de l'antisionisme, en fait, elle s'est, je trouve,
51:07elle a repris de la vigueur.
51:10Ça, c'est la première chose. La deuxième chose, c'est que
51:13moi, qui suis victime d'actes antisémites
51:16de façon régulière, encore cet été, je suis rentrée
51:19de congé, ces trois lettres antisémites
51:22qui sont arrivées à ma permanence. Et je peux vous dire que là,
51:25ce n'est pas de l'antisionisme, c'est de l'antisémitisme crasse.
51:28On vous dit quoi ?
51:31Là, c'est vraiment tout le vocabulaire de la Deuxième Guerre mondiale,
51:34le Ziclombé, Salioupine, etc. Donc là, c'est vraiment
51:37de l'antisémitisme basique.
51:40Et on voit que les jeunes, et vous le dites très bien,
51:43et bravo et merci de cette expression vers les jeunes,
51:46sont très souvent ignorants de ce que ça peut recouvrir,
51:49des conséquences aussi que cela entraîne
51:52et que cela peut emporter sur une société.
51:55Et donc, il faut, à un moment où les survivants
51:58disparaissent, faire ce devoir de mémoire,
52:01ce travail de pédagogie, d'explication.
52:04C'est notre devoir, c'est le plan qu'avait initié
52:07Nicole Belloubet en tant que ministre de l'Éducation à destination
52:10de nos jeunes, mais c'est un devoir collectif.
52:13Et c'est la raison pour laquelle aussi, avec le président du Sénat,
52:16lorsque nous avions vu cette montée des actes antisémites,
52:19nous avions fait cette marche parce que nous avions considéré
52:22que nous devions prendre nos responsabilités. Je crois que chacun
52:25doit prendre ses responsabilités. Vous les prenez en vous adressant
52:28aux jeunes, vous en tant que journaliste, nous en tant que politique,
52:31nous en tant que citoyens, pédagogues. C'est quelque chose
52:34qui nous concerne tous. Et donc, ne laissons pas
52:37cela s'installer à bas bruit.
52:40Est-ce que les jeunes sont aussi influencés par ce qui se passe aux Etats-Unis ?
52:43Sur les campus, effectivement, mais aussi
52:46à l'occasion de la dernière convention
52:49du Parti Démocrate.
52:52Percutés par cette question, est-ce que les démocrates
52:55aujourd'hui aux Etats-Unis sont trop pro-israéliens par exemple ?
52:58Est-ce qu'on peut dire les choses comme ça ?
53:01On est dans un monde global. Donc aujourd'hui, ce qui se passe à l'Université Columbia,
53:04on le sait aussitôt quand on est étudiant à Sciences Po.
53:07Donc là-dessus, ça circule.
53:10Est-ce que c'est la même chose ? Je crois qu'il faut faire très attention.
53:13La société américaine est très différente de la société française.
53:16Et si vous voulez comprendre ce qui se passe aux Etats-Unis,
53:19excusez-moi d'introduire cette dimension supplémentaire,
53:22il faut introduire la dimension noire.
53:25C'est-à-dire que le monde noir et le monde juif, aux Etats-Unis,
53:28c'est des chocs très compliqués. C'est des tensions, il y a eu des moments de rapprochement.
53:31C'est une histoire très compliquée.
53:34Et la population qui est dans les universités américaines
53:37sensible à la cause palestinienne
53:40dans ses dimensions les plus radicalisées,
53:43elle a quelque chose à voir avec ces tensions entre le monde noir et le monde juif.
53:46Donc vous voyez, on est dans des mondes qui ne sont pas exactement les mêmes.
53:49Mais les informations circulent, on est au courant.
53:52Et je suis assez surpris d'ailleurs.
53:55Ce serait ça peut-être pour moi la principale surprise.
53:58Je trouve que le monde des juifs de gauche est relativement silencieux
54:01sur tous ses enjeux,
54:04même s'il y a des gens qui essayent de construire des organisations.
54:07Est-ce que vous pouvez expliquer ce silence ?
54:10Je ne me l'explique pas. J'essaie d'y réfléchir.
54:13C'est un silence coupable.
54:16C'est d'autant plus fâcheux.
54:19Un silence religieux, comme disait le livre de Birnbaum.
54:22Oui, alors que souvent l'ultra-gauche et l'extrême-gauche ont été façonnés en France
54:25par des intellectuels juifs.
54:28Merci à tous les deux. En tout cas, ça passe toujours trop vite.
54:31Merci Michel Viviorca. Je rappelle le titre de votre livre qui vient de reparaître
54:35Merci à vous aussi, Yael Brown-Pivet, d'être venu dans Question politique ce dimanche.
54:38Je vous souhaite une belle fin de week-end à toutes et à tous.
54:41Je vous dis à la semaine prochaine.

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