Yaël Braun-Pivet, députée Renaissance réélue des Yvelines, ancienne présidente de l'Assemblée nationale, appelle à une "alliance programmatique", estimant que le Nouveau Front populaire "ne peut pas prétendre à gouverner tout seul". Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mardi-09-juillet-2024-8630243
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00:00La France est-elle ingouvernable ? La question se pose toujours et sans doute plus que jamais
00:05deux jours après les résultats de ces élections législatives, pas comme les autres.
00:08Et nous recevons ce matin celle qui fut pendant deux ans la présidente d'une assemblée nationale
00:13déjà inédite.
00:14Bonjour Yael Bounepivet, vous avez été réélue dimanche dans la cinquième circonscription
00:18des Yvelines sous l'étiquette « Ensemble », c'est-à-dire le camp présidentiel.
00:22Comme d'habitude, j'attends les questions, les réactions, les vôtres, auditeurs d'Inter
00:27au 01.45.24.7000 et sur l'application France Inter.
00:31Yael Bounepivet, je le disais, vous qui avez présidé cette assemblée déjà quasi ingérable,
00:37la situation vous paraît-elle ce matin encore plus compliquée qu'avant ?
00:39La situation est très complexe, c'est le choix des Français de ne donner de majorité
00:46à personne, à aucun camp, que ce soit le camp du Nouveau Front Populaire, le camp du
00:51Rassemblement National ou le Bloc Central.
00:54Et donc, ils se sont exprimés en masse aussi, on ne peut pas considérer que cette élection
00:58s'est faite sans les Français, les Français ont été aux urnes, ils ont désigné cette
01:03Assemblée Nationale.
01:04Et vous savez, en 2022, je disais maintenant notre devoir en tant qu'élu c'est de respecter
01:09ce choix et de la faire fonctionner.
01:11Et donc plus que jamais, je redis cela, notre devoir en tant qu'élu c'est de respecter
01:17le choix des Français tel qu'il résulte des urnes et de faire fonctionner l'Assemblée
01:22et d'avoir un gouvernement pour la France.
01:24Les Français nous ont élus pour cela, pour agir et non pas pour avoir des querelles et
01:30pour ne rien faire et pour avoir un immobilisme qui serait mortifère.
01:34Mais tout de même, l'immobilisme, on y est pour combien de temps, c'est impossible
01:37à dire ce matin.
01:38Mais Edouard Philippe dit au lieu de clarification, cette dissolution a accouché d'une grande
01:42indétermination.
01:43Votre ancien homologue, président du Sénat, Gérard Larcher, dit « Emmanuel Macron nous
01:47a précipités dans une instabilité politique gravement préjudiciable ». Est-ce que cette
01:52opération clarification est un échec ?
01:53Vous savez, moi, je ne pense pas comme ça, je suis une femme de conviction et d'action.
02:00Moi, quand je vois une situation, quelle qu'elle soit, je fais avec et j'avance.
02:06Parce qu'on peut se lamenter pendant des siècles sur le fait de savoir, est-ce que
02:10c'était une bonne idée, est-ce qu'il fallait le faire, est-ce que c'était le
02:12bon moment, etc.
02:13C'est fait, c'est ainsi, l'Assemblée nationale est élue et maintenant, il faut
02:18aller de l'avant, il faut agir.
02:20A nouveau, nous ne pouvons pas nous permettre de ne rien faire, donc à nous de prendre
02:25nos responsabilités et moi, j'appelle chacun à prendre les siennes.
02:29Le blocage n'est pas une solution, les Français se sont exprimés.
02:34L'Assemblée nationale ne peut plus être dissoute, donc c'est l'Assemblée nationale
02:38qui va être la nôtre, pas la mienne, pas la vôtre, celle des Français, pendant un
02:43an.
02:44Le cœur de la vie politique française aujourd'hui n'est plus à l'Élysée, c'est le Parlement.
02:47Alors vous savez, en 2022, on disait aussi, maintenant c'est l'Assemblée nationale
02:51qui est au cœur de la vie démocratique, moi je l'ai toujours crue, moi j'ai toujours
02:55plaidé pour une Assemblée nationale qui a des pouvoirs renforcés, j'ai même écrit
03:00un rapport plaidoyer pour un Parlement renforcé en 2020 ou 2021, donc moi je suis constante
03:07sur cette ligne.
03:08Un Parlement puissant, qui représente les Français dans leur diversité, maintenant
03:13il faut en faire quelque chose de ce Parlement qui représente les Français dans leur diversité.
03:17Il faut qu'on le fasse fonctionner, il faut que nous innovions, il faut que nous sachions
03:22construire des regroupements sur des projets, sur une feuille de route, et je pense que
03:28nous pouvons y arriver, en tout cas moi, je l'ai fait pendant deux ans, à la tête
03:32de l'Assemblée nationale, dans cette Assemblée qui n'avait pas de majorité, et moi je pense
03:36que l'on doit le faire, ça n'est à nouveau pas une option.
03:39Alors vous, vous dites regroupement, vous dites coalition, avec qui ? Ça c'est la
03:43grande question, vous allez pouvoir nous le dire, mais pourquoi tout simplement d'abord
03:46ne pas donner les clés au Nouveau Front Populaire, qui est la première force politique aujourd'hui
03:52dans cette nouvelle Assemblée nationale, et qui veut gouverner ?
03:54Alors, j'entends que le Nouveau Front Populaire veut gouverner, mais lorsque l'on regarde
03:59l'Assemblée nationale, on voit que le Nouveau Front Populaire représente 32% de l'Assemblée
04:06nationale.
04:0732% de l'Assemblée nationale, il est très très loin de la majorité, on n'est pas comme
04:12par exemple sous Michel Rocard, avec une majorité relative à quelques sièges pour avoir la
04:16majorité à l'Assemblée nationale, il faut 289 sièges, donc on est très très loin.
04:21Ils ne représentent pas la moitié des Français, pas la moitié de l'Assemblée nationale,
04:26donc mathématiquement, ils ne peuvent pas prétendre gouverner à eux tous seuls.
04:31Mais ce constat, il faut le faire pour le Bloc Central, qui mécaniquement a également
04:3530% des voix à peu près, il ne peut pas gouverner à lui tout seul, et le Rassemblement
04:40national a encore moins que 30% des voix, peut-être un peu moins de 25%, des sièges,
04:46et donc ne peut pas gouverner à lui tout seul.
04:48Donc on est face à cette situation où soit chacun se dit, moi je vais gouverner tout
04:52seul en ne représentant que 30% des gens, ce qui d'un point de vue démocratique est
04:57extrêmement problématique, soit nous parvenons à construire une feuille de route commune,
05:02feuille de route commune qui ne veut pas dire que nous sommes d'accord sur tout, qui ne
05:05veut pas dire que c'est insatisfaisant sur tout ce qui a été fait auparavant, ça ne
05:10veut pas dire qu'on se marie pour les 20 prochaines années, mais on peut très bien
05:13se dire, pour un an, voilà ce que les français nous ont dit, pouvoir d'achat, sécurité,
05:18organisation d'état, simplification, on prend 5 chantiers et on se dit, ces 5 chantiers,
05:23on les traite ensemble.
05:24Mais encore une fois, il n'y a pas eu une forme de lecture des institutions à géométrie
05:27variable, vous aviez aussi vous, qu'en présidentielle, une majorité relative en 2022, même si
05:34elle était plus importante que celle dont dispose le nouveau Front populaire aujourd'hui,
05:38et vous avez gouverné en créant des majorités, texte par texte, vous avez réussi à faire
05:43passer une soixantaine de textes, pourquoi ne pas laisser sa chance au nouveau Front
05:47populaire s'il dit qu'il peut y arriver ?
05:48Il ne vous aura pas échappé d'une part que nous avions, nous étions beaucoup plus
05:54représentatifs, nous étions beaucoup plus proches de la majorité absolue, et ensuite
06:03nous avions en face de nous des oppositions qui étaient incapables de se coaliser et
06:09de représenter une majorité alternative.
06:12Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, nous nous sommes capables, si nous construisons
06:17une alliance programmatique sur une année, sur 18 mois, avec les centristes, l'UDI et
06:25les républicains, nous sommes capables de représenter une autre force politique alternative.
06:29Donc là, nous ne sommes absolument pas dans la même situation.
06:32Pour vous, c'est ça votre option ? C'est d'aller chercher à la droite et au centre-droit ?
06:37Et chez les sociodémocrates, donc avec les socialistes et les écologistes, je reste
06:42sur cette option.
06:43Mais ce que je voudrais vous dire ce matin, c'est que depuis plusieurs jours, on ne parle
06:48que des alliances avec des groupes politiques.
06:50Moi, je crois qu'il faut maintenant qu'on change complètement de paradigme et qu'on
06:56parle du fond.
06:57Est-ce que nous sommes capables de nous entendre sur cinq priorités sur une année ? Cinq
07:04priorités qui ressortent de ce que les Français ont exprimé dans les urnes ? Je vous parlais
07:09du pouvoir d'achat, on a parlé des salaires.
07:11Beaucoup se sont exprimés sur cette question en disant que les Français avaient des difficultés
07:17à boucler les fins de mois et nous le constatons tous.
07:20Ne serions-nous pas capables, dans une démocratie mature, de nous mettre autour d'une table
07:25et de travailler pour améliorer le pouvoir d'achat de nos compatriotes ?
07:28Par exemple, les salaires, SMIC net à 1 600 euros, c'est le programme du nouveau front
07:32populaire.
07:33Est-ce que, pour attirer des élus de ce bord politique, vous êtes prêts à reprendre
07:36cette mesure ?
07:37Il ne s'agit pas de dire « je prends une mesure là, puis là, puis là », mais c'est
07:42comment améliorer le pouvoir d'achat des Français ? Travaillons ensemble avec une
07:47conférence salariale, avec les syndicats, les forces vives de la nation et regardons
07:51comment nous pouvons concrètement améliorer leur pouvoir d'achat.
07:54Mais vous voyez bien qu'il y a des blocs aujourd'hui qui ont fait campagne avec un
07:58programme.
07:59La gauche dit aujourd'hui d'ailleurs qu'il y a un certain nombre de mesures.
08:03Certains disent que c'est tout le programme et rien que le programme, d'autres sont
08:07plus souples en disant qu'il y a des mesures non négociables, dont ce SMIC à 1 600 euros.
08:13Vous voyez bien que la situation est bloquée.
08:15Ce qui est sûr, c'est que si chacun, qui représente 30% des Français, considère
08:19que c'est tout son programme, là on n'y arrivera pas.
08:22Mais je ne vois pas ce qui l'autorise.
08:25Vous tendre la main en reprenant certaines mesures.
08:26C'est pour ça que je dis qu'il faut, par exemple, la question du pouvoir d'achat est
08:31essentielle, il faut la traiter.
08:33Mettons-nous autour d'une table pour définir un certain nombre de mesures qui pourraient
08:38être mises en œuvre dans les mois qui viennent et qui amélioreraient concrètement la vie
08:43de nos compatriotes.
08:44Maintenant, je ne vois pas, quand on regarde les résultats des urnes, à un quelconque
08:49moment, que les Français aient validé un programme politique à 100%, sinon ils auraient
08:55donné la majorité à un des camps, ce qu'ils n'ont pas fait, et il suffit de regarder
08:59le résultat des élections.
09:01La gauche a bénéficié, en effet, en partie, en grande partie, du désistement de vos candidats
09:08en partie en tout cas, mais surtout le camp présidentiel en fait, qui a profité de ce
09:12front républicain.
09:13Pourquoi ne pas le reconnaître en tendant la main à la gauche ? Il y a un instant vous
09:16disiez, c'est plutôt vers la droite, vers l'UDI, vers les Républicains que je veux
09:21tourner.
09:22Non, j'ai dit que je voulais tendre la main à toutes les parties qui souhaitaient que
09:26l'on travaille ensemble, des Républicains à la gauche sociale-démocrate, c'est ce
09:30que j'ai toujours dit, et je l'ai dit également avant l'élection.
09:33Maintenant, ce qui est sûr, c'est que je suis de plus en plus convaincue qu'il faut
09:38aujourd'hui changer de système électoral.
09:40On voit bien que le scrutin majoritaire a fait son temps, et que si nous étions sur
09:44un scrutin proportionnel, chacune des forces politiques serait représentée à juste proportion,
09:51sans avoir besoin de faire des alliances contre-nature comme le Front populaire l'a fait au premier
09:56tour, et sans avoir besoin de faire des désistements qui ont parfois choqué nos compatriotes au
10:01deuxième tour.
10:02C'est ce qui se passe dans tous les pays européens, qui fonctionnent avec un scrutin
10:06proportionnel, puis des majorités de projets et des coalitions.
10:10Il faut que notre pays en vienne à cela, je crois qu'il en va de l'existence même
10:15de notre démocratie.
10:16C'est fini un camp qui écrase un autre camp, les Français nous en joignent, de nous entendre,
10:22et maintenant que nous sommes élus, c'est notre responsabilité de le faire.
10:25Une réforme des institutions, avec justement l'introduction du scrutin à la proportionnelle,
10:30après on peut discuter des modalités, mais ça pourrait faire partie d'un programme
10:33commun de gouvernement.
10:35Tout à fait, ça pourrait également être sur la table.
10:38Je pense que ça clarifierait beaucoup les choses, et ça permettrait aux Français d'avoir
10:44une juste représentation, dès le premier tour, de leur sensibilité politique.
10:49Vous dites, on l'entend, que le nouveau Front populaire aujourd'hui n'est pas, selon
10:54vous, en mesure de gouverner, parce qu'il est trop faible.
10:57Emmanuel Macron, lui, a décidé de temporiser, en demandant à Gabriel Attal de rester au
11:02gouvernement pour gérer les affaires courantes, est-ce qu'il n'y a pas une forme de cynisme
11:06tout de même dans cet attentisme, qui consisterait à attendre que la gauche explose pour récupérer
11:12les miettes ?
11:13Je ne le pense pas, moi je pense qu'il faut vraiment qu'aujourd'hui les forces politiques
11:18se réunissent pour définir quelle pourrait être une plateforme programmatique.
11:23Il faut partir du fond, le fond, le fond, parce que c'est ça qui intéresse les Français,
11:28c'est ça qui changera leur vie.
11:29Les Français, ils se moquent de savoir quel ou quel parti sera dans la plateforme de gouvernement,
11:35ce qui les importe c'est est-ce qu'on va améliorer leur sécurité, est-ce qu'on va améliorer
11:40l'égalité des chances partout sur le territoire, est-ce qu'ils vont avoir un médecin demain
11:45qui va leur permettre de se soigner, c'est ça qui les intéresse.
11:49Revenons au fond, vraiment moi j'en peux plus de ces combinaisons politiques, on ne
11:53parle que de ça, et vraiment je pense que nous ne sommes pas à la hauteur si nous en
11:57restons là.
11:58On va prendre une question de Marc Austandard pour vous Yael Brune-Pivet, bonjour Marc on
12:02vous écoute.
12:03Oui bonjour, merci à France Inter de prendre ma question, et bonjour Madame la Présidente,
12:10je voulais vous demander si vous comptiez user de votre influence auprès du Président
12:16de la République, parce que quand même vous avez été Présidente de l'Assemblée Nationale,
12:19puis vous êtes quand même dans son cœur de réacteur de proximité, pour qu'il puisse
12:24enfin sortir de ce pas de son pas d'image depuis dimanche soir et faire son boulot,
12:29parce que là en gros ce que les Français lui demandent c'est de faire son boulot, c'est-à-dire
12:32de nommer un ou une Première Ministre qui vient du camp qui est arrivé en tête aux
12:36élections, c'est-à-dire la gauche, et je me réjouis, d'ailleurs je vous ai entendu
12:39il y a quelques minutes, vous aviez l'air de parler de justice sociale, d'égalité,
12:42d'accès aux soins, etc.
12:43J'avais l'impression d'entendre quelqu'un du Nouveau Front Populaire, donc je me réjouis
12:45que vous ayez basculé de la Macronie vers un peu plus de raisons, mais là j'allais
12:49dire on a quelqu'un qui est enfermé à l'Elysée d'ailleurs depuis 7 ans, qui est comme une
12:52espèce de forcené, arrogant, prétentieux et immature.
12:54Je voudrais savoir si vous comptez utiliser de votre influence auprès de lui pour lui
13:05demander de faire juste son boulot ?
13:06Merci Marc pour cette question incisive, il y a une voix de pivet.
13:12Écoutez, depuis 7 ans, nous travaillons pour plus de justice sociale, j'ai l'impression
13:20que vous n'en êtes pas convaincu, mais vous savez lorsque l'on crée 2 millions d'emplois,
13:24lorsque l'on baisse les impôts, lorsque l'on travaille à réformer l'apprentissage et qu'on
13:31réindustrialise la France, on travaille pour les Français, pour faire en sorte qu'ils
13:35retrouvent de la dignité dans l'emploi.
13:37Maintenant, aujourd'hui, le Nouveau Front Populaire n'est à mes yeux pas en capacité
13:42de gouverner puisque, comme je le disais, il a une assise parlementaire beaucoup trop
13:46faible et lorsque j'entends certains de ses dirigeants dire qu'ils vont gouverner à coup
13:52de 49.3 ou à coup de décret, je suis extrêmement inquiète de cette vision de la démocratie
13:58à géométrie variable selon qu'on est dans l'opposition ou qu'on se prétend être dans
14:02une certaine majorité.
14:03C'est le gouvernement que vous soutenez qui a fait adopter la réforme des retraites au
14:0649.3 ?
14:07Non mais j'entendais Olivier Faure dire qu'il pourrait faire des 49.3, j'entendais d'autres
14:12qui disaient...
14:13Pour supprimer justement cette réforme des retraites adoptée au 49.3 ?
14:16Manifestement pas seulement et par décret.
14:18Je crois qu'aujourd'hui il faut respecter le Parlement, si on veut que le Parlement
14:22soit renforcé, il faut que le Parlement puisse s'exprimer et donc il faut y trouver une majorité
14:28et le Premier Ministre doit être issu de cette majorité.
14:30Vous savez, moi je vais même plus loin, si nous arrivons et nous devons parvenir à composer
14:35un gouvernement, moi je suis extrêmement favorable à ce que ce gouvernement demande
14:39un vote de confiance à l'Assemblée Nationale.
14:42Vote de confiance ça veut dire déclaration...
14:44C'est l'usage mais c'est pas obligatoire.
14:45Ça n'est pas obligatoire, c'est prévu par la Constitution, c'est une faculté.
14:48Mais je pense que dans les circonstances actuelles, il faudrait que le gouvernement demande ce
14:54vote de confiance pour avoir cette légitimité parlementaire que lui confèrerait ce vote
15:00pour pouvoir gouverner.
15:01Et donc lorsque l'on a moins de 190 députés...
15:05Elisabeth Borne l'avait pas fait par exemple.
15:06Tout à fait.
15:07Mais je pense qu'aujourd'hui dans le contexte actuel, puisqu'il nous faut gouverner ensemble,
15:12il faudrait que nous trouvions une majorité à l'Assemblée Nationale et un vote de confiance.
15:16Et aujourd'hui, le nouveau Front Populaire, ça ne vous aura pas échappé qu'il n'a absolument
15:21pas le nombre de députés pour avoir un vote de confiance.
15:22Donc vous n'irez pas voir Emmanuel Macron à l'Elysée pour lui demander de désigner
15:26un Premier Ministre issu de la gauche ? Désolé Marc, en tout cas pas tout de suite.
15:30Combien de temps va prendre ce processus ? Peut-être plusieurs semaines, peut-être
15:35plusieurs mois comme en Belgique, on prend beaucoup cet exemple-là ?
15:39Vous êtes prête à travailler le temps qu'il faudra, quitte à ce que le pays soit bloqué
15:46pendant tout ce temps ?
15:47Le pays n'est pas bloqué, on est au mois de juillet, là nous avons d'abord des grandes
15:53échéances qui sont les Jeux Olympiques.
15:55Il faut que ce soit une fête pour tout le monde, il faut qu'il soit réussi.
15:58Donc il m'apparaît tout à fait sain que le gouvernement qui est en place puisse assurer
16:04la continuité des affaires pour pouvoir gérer ce moment important d'un point de
16:09vue sécuritaire avec le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et la ministre des Sports
16:14Amélie Oudéa-Castérat.
16:15Après, vous savez, toutes les grandes démocraties mettent plusieurs semaines pour se mettre
16:18d'accord.
16:19En Allemagne, trois ou quatre semaines pour établir un programme de gouvernement.
16:23En Espagne, au Portugal, etc.
16:26Donc il ne faut pas non plus se précipiter, mais vraiment c'est une feuille de route,
16:30quelques points à travailler, à définir ensemble.
16:33Moi je trouve que c'est très sain parce qu'on annonce la couleur aussi.
16:38On se met ensemble.
16:39Vous avez trois points par exemple à nous donner ce matin ?
16:41Non pas.
16:42Mais c'est ce que je vous les ai déjà donnés ces points.
16:44C'est le pouvoir d'achat.
16:45Non mais des mesures concrètes.
16:46Mais écoutez, si vous arrivez dans une discussion en disant c'est ça ou rien, vous pouvez
16:53terminer la discussion.
16:54Ça n'est plus une discussion.
16:55Moi ce que je veux c'est qu'on ait des objectifs qu'on se définisse ensemble, le pouvoir
16:59d'achat des Français, la sécurité, les services publics par exemple, et qu'après
17:03on puisse se mettre autour d'une table en se disant voilà quelles sont les mesures
17:07que nous pouvons prendre pour améliorer cela.
17:09Parce que le pouvoir d'achat c'est beaucoup plus large que simplement le SMIC à 1600
17:13euros.
17:14Ça n'est pas que ça.
17:15Parce que c'est les taxes, c'est le prix des produits de première nécessité, c'est
17:21le prix de l'énergie, c'est la question du logement.
17:23Donc en fait vous voyez bien que ces sujets là ils sont très vastes et donc il faut
17:27qu'on se mette autour d'une table pour discuter et travailler ensemble.
17:31Je pense que c'est assez sain et assez basique.
17:34Avant d'arriver à cet éventuel rassemblement, cette coalition, cette fédération, quelle
17:39que soit la manière dont on l'appelle, il faut peut-être que l'ex-majorité présidentielle
17:44soit elle-même unie, ce qui n'est pas du tout garanti à l'heure où l'on se parle.
17:50On voit les uns à droite, Gérald Darmanin, ou Bruno Le Maire, les autres à gauche,
17:54Gabriel Attal ou le président de la commission des lois, Sacha Houllier, commencer à révéler
17:59leurs ambitions de plus en plus clairement.
18:02Est-ce que vous êtes inquiète de voir votre camp exploser ?
18:05Je ne suis pas inquiète parce que j'ai vu aux dernières élections, que ce soit les
18:10élections législatives ou aux élections européennes, et ce sont de bons tests, que
18:16nous partions ensemble, unis, avec un programme, avec des mesures que nous partageons.
18:22Donc moi je ne suis pas inquiète, après qu'il y ait des nuances, mais des prises
18:29de position des uns et des autres, c'est bien normal.
18:31Et moi-même, j'ai été aussi, en mon temps, l'auteur de prises de position qui n'étaient
18:37pas complètement alignées, notamment sur la dissolution, sur plein d'autres sujets.
18:43Je pense que c'est ça aussi qu'attendent les Français, des hommes et des femmes politiques
18:46qui ont une pensée propre.
18:47Mais vous vous réclamez encore d'Emmanuel Macron aujourd'hui ?
18:48Oui, bien sûr.
18:49Moi je suis toujours dans la majorité présidentielle, en tout cas dans le camp présidentiel.
18:54Moi je crois plus que jamais au dépassement, maintenant je suis dans le temps de, plutôt
19:00le temps du rassemblement.
19:01Je crois plus que jamais au renouveau démocratique, je crois plus que jamais aussi à la féminisation
19:07de la vie politique.
19:08Oui, il y a moins de femmes qu'avant, que lors de la précédente législature à l'Assemblée.
19:12En 2017 nous avions beaucoup de femmes, en 2022 nous en avions perdu, nous en avons
19:17encore perdu aujourd'hui en 2024, et c'est aussi une des raisons pour laquelle moi j'aimerais
19:21bien retourner au perchoir, parce que les femmes m'ont dit à quel point c'était important
19:26que nous brisions ce plafond de verre, et j'en avais brisé un sacré en devenant président
19:30de l'Assemblée Nationale.
19:31Donc il faut aussi penser à la place des femmes dans la société, que ce soit dans
19:35le monde politique, dans le monde économique, dans notre vie de tous les jours, on voit
19:40bien que les femmes ont encore aujourd'hui de grandes inégalités de salaire, de grandes
19:44inégalités dans le monde du pouvoir, et donc pensons à cette égalité entre les
19:49hommes et les femmes.
19:50Et les électeurs du RN et de ses alliés, 10 millions tout de même, qui envoient 143
19:55députés à l'Assemblée Nationale, quoiqu'on en dise c'est du jamais vu, qu'est-ce que
19:58vous faites pour leur parler ?
20:00Justement, je crois que ce qu'ils ont exprimé pendant les élections doit être considérablement
20:06entendu, donc ça doit être entendu sur le fond et sur la forme.
20:10Sur le fond, c'est les sujets dont je parlais, je ne les ai pas pris par hasard.
20:14Lorsque je parle de services publics, lorsque je parle de sécurité, lorsque je parle de
20:19pouvoir d'achat, de la valeur travail, tout cela c'est des sujets que les électeurs
20:24du Front National mettent au rang 1 de leur priorité, donc entendons-les.
20:28Et d'autre part, nous avons entendu qu'il y avait une forme d'exercice du pouvoir qui
20:35était à remettre en question, et c'est pour ça que moi je plaide aussi depuis longtemps
20:39pour un pouvoir plus horizontal, plus participatif, plus intégrateur et des citoyens et des
20:44corps intermédiaires et des différentes forces politiques.
20:46Parce que l'enjeu, si vous ne les entendez pas, c'est que la victoire du RN, comme le
20:51dit Marine Le Pen, ne soit que différée.
20:53Mais c'est surtout si nous ne les entendons pas que nous ne remplirons pas notre mission
20:59d'homme ou de femme politique, puisque notre mission c'est de changer la vie des gens et
21:02d'apporter des réponses très concrètes aux problèmes qu'ils éprouvent aujourd'hui.
21:06La nouvelle assemblée va se réunir le 18 juillet, est-ce que vous serez candidate, si
21:11le paysage vous le permet, à votre succession comme présidente ?
21:15C'est mon souhait, il faut évidemment que j'en discute avec mon groupe politique, avec
21:19les partenaires de la majorité, mais c'est mon souhait.
21:22J'ai été la première femme présidente de l'Assemblée nationale à un moment où la
21:27place des femmes recule encore en politique.
21:29Je pense que si cette fonction était à nouveau confiée à un homme, ce serait un très mauvais
21:34signal pour les femmes.
21:35Donc pas forcément un président ou une présidente de gauche ?
21:39J'ai été surtout la présidente d'une assemblée qui était sans majorité, je l'ai faite fonctionner
21:44pendant deux ans.
21:45J'ai fait des innovations démocratiques et j'ai surtout ouvert l'Assemblée aux citoyens
21:50en doublant le nombre de visiteurs.
21:51Et ça je crois que c'est important, les citoyens aussi nous ont exprimé cela.
21:54Ils ont envie de retrouver leurs institutions et c'est ce que j'ai essayé de faire pendant
21:58deux ans.
21:59Merci beaucoup Yael Bounpivé, députée Renaissance des Yvelines et présidente sortante de l'Assemblée
22:04nationale.