Naguère assimilées à un plat de cantine peu appétissant, les lentilles véritable mine d'or reviennent en force dans les champs et les assiettes. Leur consommation est en plein essor (+ 12 % par an), la filière affichant un chiffre d’affaires de près de 80 millions d’euros. Et pour cause. Riches en protéines, fibres, vitamines et en minéraux, ces légumineuses constituent une mine d’or nutritionnelle qu’apprécient les végétariens.
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00:00Pour beaucoup, les lentilles, c'est un souvenir de cantine, et cela ressemblait souvent à
00:07ça.
00:08Des plats très trop cuits, sans saveur et souvent indigestes.
00:14Mais ça, c'était avant.
00:17Rentrée 2017, au menu de la très sélecte cantine du petit prince Georges d'Angleterre,
00:25des lentilles vertes du Puy.
00:26Le caviar du pauvre, servi à l'héritier du trône britannique, une consécration pour
00:32cette petite graine, devenue désormais ultra-tendance.
00:35Ces dernières années, les Français ont redécouvert les vertus des lentilles, des
00:41qualités nutritives exceptionnelles et une multitude de variétés.
00:45Alternative à la viande, sa consommation étant pleine essor, plus 12% par an.
00:52La légumineuse française revient en force dans nos champs et dans nos assiettes.
00:57En conserve, précuites en sachets, mais aussi en steaks, le consommateur a désormais l'embarras
01:04du choix.
01:05Dans quelles conditions sont cultivées toutes ces lentilles que nous mangeons ? Riches en
01:12protéines, cet or végétal se présente comme l'aliment du futur, mais est-il vraiment
01:18bon pour la planète et pour notre santé ?
01:20C'est l'histoire d'une mal-aimée qui signe son grand retour.
01:50En cuisine, Mathilde, 35 ans, et ses deux filles, Luna et Héloïse, préparent le dessert
02:09avec un ingrédient pour le moins surprenant.
02:11Un gâteau aux lentilles, un mariage inattendu qui aiguise les papilles.
02:23« Les lentilles, c'est rare qu'on les mange avec du sucre, mais c'est ce qui fait que
02:28c'est original et que c'est rigolo.
02:31Les lentilles, elles ont plein de vitamines.
02:33Il y a quelques vitamines, mais il y a des minéraux aussi.
02:36» Une fois cuites, les lentilles remplacent la farine dans une préparation sucrée.
02:43Et elles ont d'autres atouts méconnus.
02:46« Rien ne se perd dans les lentilles, vous pouvez aussi utiliser le jus de cuisson pour
02:55les monter en neige, pour remplacer les œufs dans une recette de gâteau.
03:01»
03:03En gâteau, mais aussi en salade ou en plat chaud, cette passionnée de cuisine accommode
03:09ce légume sec à toutes les sauces.
03:11Depuis quelques années, il a envahi ses placards.
03:15« J'aime bien les lentilles beluga, parce qu'elles sont noires et je trouve qu'il y
03:21a un petit goût différent, plus fin, je trouve.
03:24En tout cas, mes filles, elles préfèrent les beluga.
03:29Les lentilles vertes, on va plutôt faire un plat d'hiver, pourquoi pas avec du poisson,
03:34des saucisses en plus.
03:36Les lentilles noires, j'utilise plus en salade, l'été.
03:41J'ai aussi des lentilles corail que j'utilise vraiment très régulièrement, elles sont
03:45très faciles à cuire, ça fait juste dix minutes.
03:48Au niveau de la couleur aussi, mes filles adorent.
03:50»
03:51Oublier les lentilles comme simple accompagnement, Mathilde les utilise comme plat principal.
03:59« Deux dix quinze minutes, ça sera prêt.
04:01»
04:02Car cette légumineuse, riche en protéines, est un bon substitut à la viande.
04:07Comme un quart des Français, elle et son mari sont devenus flexitariens.
04:11« On consomme moins de viande dans notre famille depuis 4-5 ans.
04:18C'est un choix pour préférer des protéines animales de meilleure qualité, qui coûtent
04:28un peu plus cher, et ça veut dire que le soir, on a choisi de faire des plats plutôt
04:33végétariens.
04:34« Voilà le bon gâteau ! Mange un peu ! C'est trop bien ! Tu peux encore en avoir ? Un petit
04:43bout ! »
04:44Tombés dans l'oubli dans les années 70, les petites graines séduisent une nouvelle
04:54génération de consommateurs, attirés par leur qualité nutritive.
04:5825% de protéines, mais aussi des fibres, du fer et des minéraux comme le magnésium.
05:06Peu calorique, elle est sans gluten et peut se conserver plusieurs mois, voire des années,
05:13sans perdre ses vertus.
05:14Un super aliment qui est même promu en 2017 par l'INSES.
05:21L'agence de santé a mis les légumineuses au cœur de ses nouvelles recommandations
05:25alimentaires.
05:26Ce que disent les recommandations de l'INSES, c'est d'intégrer plus de légumes secs
05:32dans notre alimentation au quotidien et sur une semaine.
05:35Globalement, on consomme beaucoup trop de viande, beaucoup trop de protéines animales,
05:39notamment les plus jeunes, les enfants.
05:40L'excès de protéines animales contribue à une augmentation des apports en graisse
05:44et notamment une augmentation des apports en cholestérol.
05:46Quand vous pouvez diversifier ces apports en protéines et en intégrant par exemple
05:51des légumes secs, notamment des lentilles, vous diversifiez beaucoup mieux vos apports
05:55en protéines.
05:56Seul problème, les lentilles n'apportent pas la même qualité de protéines que la
06:02viande.
06:03Pour obtenir l'équivalent nutritionnel d'un steak, il faut ajouter des céréales,
06:07comme le riz, afin d'éviter les carences.
06:11Les protéines végétales sont déficientes en un acide aminé essentiel.
06:15Un acide aminé essentiel pour les légumes secs, c'est la méthionine qui est absente.
06:20En ce qui concerne les produits céréaliers, c'est plutôt la lysine.
06:23Et donc, quand vous associez les deux, vous allez avoir une qualité protéique équivalente
06:28à celle des protéines animales.
06:30Manger des lentilles, c'est aussi bon pour la planète.
06:35Si on compare 1 kg de légumineuses et 1 kg de bœufs, pour produire des lentilles, il
06:40faut 50 litres d'eau, 13 000 pour la viande, c'est 260 fois plus.
06:45Les lentilles, c'est aussi 10 fois moins de surface agricole que les protéines animales.
06:50Le tout pour une empreinte carbone plus faible.
06:53Une vache produit 90 fois plus de gaz à effet de serre qu'un légume sec.
06:59La lentille aurait tout de l'aliment parfait.
07:03Un retour en grâce sur lequel mise désormais toute une filière de production.
07:08Les super légumes secs, certains les prennent pour de vrais durs à cuire.
07:14On les dit aussi lourds, voire indigestes, alors qu'il suffit de les tremper pour les
07:19attendrir.
07:20Cette campagne de publicité ludique vise à séduire un public plus jeune.
07:26Avec cette opération marketing, la filière française compte tirer profit de ce marché
07:31florissant de 80 millions d'euros.
07:34Et ils reviennent au goût du jour, les super légumes secs, ils nous volent du bien.
07:46Le puits envelé, au cœur de l'Auvergne.
07:49Sur ces terres volcaniques, pousse une variété unique au monde, la plus célèbre de France,
07:59la lentille verte du puits.
08:00Ici, on cultive des lentilles depuis très longtemps.
08:05Moi, je cultive des lentilles depuis que je suis installé, donc depuis 70, 75, chose
08:10que mon père faisait avant moi et que j'essaie de faire perturber.
08:15Emmanuel de Vérac cultive une vingtaine d'hectares de lentilles du puits, une AOP, appellation
08:22d'origine protégée.
08:23Donc, ces lentilles, elles font des toutes petites fleurs bleues qui donnent naissance
08:32à une gousse dans laquelle on trouve une à deux lentilles.
08:37Cette couleur verte, c'est vraiment typique lentille verte du puits.
08:44Dissimulée dans les herbes hautes, on la distingue à peine.
08:48Une petite plante séchée par le soleil qui a de quoi surprendre.
08:52La lentille a une grande particularité, elle n'a pas besoin d'avoir des engrais chimiques
08:59pour pouvoir se développer.
09:00Car cette plante cache un étonnant secret, ses racines.
09:06Lorsque les bactéries présentes dans le sol sont au contact de la plante, elle fabrique
09:14des nodules, ces petites boules sur les racines.
09:16Des nodules qui permettent de fixer l'azote de l'air et de le restituer à la plante.
09:23Un engrais naturel en quelque sorte.
09:25C'est un produit qui est bon pour l'environnement, bien sûr, et qui est bon pour nous parce
09:30que ça nous permet de faire des économies en engrais, tout simplement.
09:33Mais la demoiselle n'a pas que des avantages.
09:38Elle est difficile à cultiver, bien plus que les céréales traditionnelles comme le
09:42blé.
09:44Ses ennemis, les plantes sauvages comme les pâquerettes.
09:47Il y a des endroits où il y en a plus que d'autres.
09:50Quand il y a beaucoup de ces pâquerettes, que ça vous couvre un champ, tout le monde
09:59mange en même temps dans le sol.
10:00La mauvaise herbe comme les lentilles, il y a un moment donné où il y a quelqu'un
10:03qui va en pâtir.
10:04En général, les mauvaises herbes ont le dessus sur les lentilles parce que la lentille est
10:07plus fragile.
10:08Donc elles se nourrissent avant les lentilles et elles ne peuvent plus se développer.
10:12Un défi pour l'agriculteur, car là au pays, le contrat a utilisé très peu d'herbicides
10:18dans ses champs.
10:19Il y a deux ans, on a eu un printemps très humide, on n'a pas eu des désherbages qui
10:26nous ont permis de maîtriser les mauvaises herbes et il n'y a pas eu de lentilles, c'est-à-dire
10:32qu'au lieu d'avoir 800 kilos ou une tonne hectare, on est tombé à 20 kilos hectare.
10:38Soit une diminution par 40 de ses rendements annuels.
10:42Alors la cuvée 2018 va-t-elle être un bon cru pour l'agriculteur ?
10:47Ce mai au mois de mai, la lentille est récoltée quatre mois plus tard, au milieu de l'été.
10:54Pour Emmanuel Deverracq, c'est l'heure de vérité.
11:03Je vais aller voir ce qu'il se passe.
11:09Voilà la récolte de cette année.
11:13Elles craquent, donc elles sont bien sèches.
11:19Donc c'est des lentilles qui sont bien mûres, qui ne sont pas trop sales malgré l'état
11:22du champ qui n'est pas parfait.
11:24Donc elles ont toutes les qualités pour faire un bon produit à la vente.
11:28Une bonne récolte malgré les mauvaises herbes et une météo capricieuse.
11:35En 2018, le producteur a récolté 14 tonnes de lentilles.
11:44Il y a déjà plus que ce que j'espérais.
11:47La petite perle du Puy se vend très cher.
11:50Son prix est trois à quatre fois supérieur à celui d'une lentille classique.
11:55Quand on a des rendements honorables, c'est rémunéateur parce que la lentille va se
11:58négocier aux alentours de 2000 euros tonnes, sachant qu'il faut compter entre 600 et 700
12:04euros de frais globaux de mise en culture, de semences, de traitement.
12:09Donc, ça laisse une bonne marge.
12:10C'est quand même intéressant.
12:12Ça ne marche pas toutes les années, mais la nature est ainsi faite.
12:17Si ça marchait tout le temps, ce serait trop facile.
12:20Cette récolte est celle d'une bonne année.
12:22Elle va lui assurer un revenu confortable, environ 30 000 euros.
12:32À quelques kilomètres de là, les lentilles sont acheminées dans cette entreprise qui
12:38achète à 300 producteurs de légumineuses de la région.
12:41Le patron, Antoine Wassner, est à la tête de la société familiale depuis 11 ans.
12:55Il vient surveiller l'une des étapes clés, le tri des lentilles.
13:03Notre premier ennemi, c'est la pierre.
13:05Comme c'est une plante qui est toute petite, les moissonneuses bateuses râclent un peu le sol.
13:09Là, c'est le genre de pierre que, dans les années 50, on trouvait encore dans ses plats
13:15et qu'aujourd'hui, on n'a plus dans son accueil.
13:21Aujourd'hui, on élimine les lentilles qui sont creuses, les lentilles cassées pour
13:26vraiment avoir qu'un bon produit.
13:30Chaque année, 10 000 tonnes de lentilles transitent dans son entreprise pour être
13:35conditionnées.
13:39On produit différentes lentilles, par exemple ici, de la lentille corail qui part pour en
13:46autriche, par exemple ici.
13:48On a de la lentille brune aussi.
13:51C'est avec celle-ci qu'on fait de la lentille corail.
13:53Quand on enlève la peau, on garde juste l'amande à l'intérieur, qui est la lentille
13:57corail. Depuis cinq ans, il y a un vrai regain d'intérêt.
14:01Avant, on avait une lente érosion et là, on est parti sur des plus 30% d'augmentation de
14:07légumes secs. En sept ans, le chiffre d'affaires de l'entreprise a triplé et elle a
14:13multiplié par deux le nombre de ses salariés.
14:17Ces légumineuses, Antoine Wassner les revend sous sa propre marque, mais aussi sous une
14:23vingtaine de marques distributeurs.
14:25Un succès qu'il doit atteindre intuition.
14:30Il y a 15 ans, je me posais la question avec mon père si on allait arrêter les légumes
14:34secs, parce que tout le monde disait que les légumes secs, c'était pour les vieux.
14:38Et moi, j'y croyais quand même un petit peu et j'ai vu des tendances aux Etats-Unis où j'ai
14:41vu que ça explosait. Et je me suis dit non, non, il faut rester à fond, privilégier la
14:45filière France et les consommateurs français vont revenir sur la légumineuse parce que
14:50c'est bon. C'est bon pour la santé et c'est vraiment un subsidy parfait à la protéine
14:54animale. Ici, la star, c'est la lentille verte du puits.
15:01L'entreprise en commercialise 1000 tonnes chaque année.
15:04Elle pourrait en vendre le double, mais le volume des récoltes ne suit pas.
15:09Ce qui séduit le consommateur, c'est un label de qualité, l'AOP.
15:14La perle du puits a été le premier légume à l'obtenir en France.
15:20Mon grand père s'est battu dès 1935 pour avoir l'appellation d'origine au tribunal de
15:24commerce. Des experts qui sont venus pour défendre l'appellation d'origine et
15:29l'appellation lentille verte du puits. Cuit plus facilement que la lentille verte d'autres
15:33provenances, sans tomber en purée, possède une peau plus fine, une amande moins farineuse.
15:38Une lentille fine et délicate, victime de son succès.
15:42C'est devenu l'un des produits alimentaires les plus copiés au monde.
15:46Par exemple, ici, chez nos voisins allemands, Bjolinsen grûne le puits, donc voilà, avec
15:51une origine Canada.
15:53Encore une canadienne, par exemple, là, c'est en conserve, mais Green Puits French
15:57Lentilles, donc là, on mélange Puits French et puis, en fait, c'est bien un produit du
16:00Canada. C'est marqué, c'est marqué en gros.
16:04C'est un des rares produits d'appellation protégée qui est connu mondialement.
16:08Et donc, voilà, forcément, on attise un peu des convoitus, comme il y a des champagnes
16:12en Australie. Nous, on a notre lentille du puits au Canada en copie.
16:17Mais entre la lentille du puits, celle du Berry ou encore celle cultivée au Canada,
16:23y a-t-il une réelle différence dans les saveurs?
16:26Le goût de la graine aupé est-il si particulier?
16:30Car toutes les lentilles vertes sont issues de la même variété, l'anissia, peu
16:36importe sa provenance.
16:41Nous avons décidé d'organiser une dégustation à l'aveugle avec la complicité
16:46de Corinne Moreau, chef d'un grand restaurant du Puits en Velay.
16:52En cuisine, elle prépare différentes sortes de lentilles vertes.
16:56Bonjour Antoine, bonjour Monsieur de Vérac.
17:03Alors, prêt pour cette dégustation, messieurs?
17:06Bien écoutez, on vous attendait.
17:07La table est mise, installez vous.
17:11En guise de cobaye, nos deux spécialistes.
17:15Vous êtes prêts?
17:18Antoine Basner, le conditionneur de lentilles et Emmanuel de Vérac, le producteur.
17:24Leur mission, découvrir laquelle a été cultivée au puits parmi trois lentilles
17:29vertes. Pour leur corser la tâche, nous leur avons bandé les yeux.
17:37Vous avez l'assiette.
17:42Je pense qu'il y en a une qui se détache, mais.
17:47Moi, j'ai tenté les deux premières.
17:51En fait, c'est super chaud.
17:54Au goût, la différence n'est pas flagrante.
17:57Seconde tentative, cette fois sans bandeau.
18:09Moi, je pencherai pour celle ci, finalement.
18:13Moi, je suis, je suis sans appel.
18:15Pour moi, je pense que c'est ça, la jaune.
18:18Retournez l'étiquette.
18:24Gagné, c'est bien la lentille verte du puits.
18:27On voit, ça se tient beaucoup mieux.
18:28Assiette, la peau, c'est pas détaché.
18:31Et puis, en bouche, finalement, on avait quelque chose qui était vraiment beaucoup plus,
18:36beaucoup moins farineux.
18:37Dans la cuisine, il n'y a pas que le goût, c'est à cinq sens.
18:39On est toujours dans un restaurant.
18:41Il y a plusieurs sens qui rentrent et la vue en fait partie.
18:44Donc là, vous avez un visuel qui est clair et qui est sans appel.
18:47Là dessus, vous avez quelque chose qui est joli, homogène et d'une belle couleur.
18:51La nuance est légère et pourtant, la OP est vendue le triple du prix d'une lentille verte classique.
18:58La filière française mise essentiellement sur des graines haut de gamme, produites en faible quantité.
19:05Seulement 22 000 tonnes sont récoltées chaque année.
19:0830 000 sont importées de l'étranger.
19:11La France a un petit poussé face aux géants mondiaux que sont la Turquie, l'Inde et surtout le leader incontesté du marché, le Canada.
19:20Avec plus de 3 millions de tonnes, une province, la Saskatchewan, est devenue en seulement 30 ans la première région productrice de lentilles au monde.
19:41Dans ces gigantesques prairies de l'ouest canadien, est cultivée la moitié des lentilles consommées dans le monde.
19:50Des champs à perte de vue et sans mauvaises herbes.
19:57Comment les Canadiens parviennent-ils à cette production à échelle industrielle?
20:08On peut conduire 150 kilomètres par ici, 300 par là.
20:11Vous ne verrez que des champs de lentilles.
20:12Roland Levac est l'un des 15 000 producteurs à s'être converti à l'or végétal.
20:23Dans les années 80, ce céréalier a été l'un des premiers à parier sur ses petites graines, sans imaginer un tel succès.
20:34Quand j'ai eu mes 4 premiers sacs de semences, mon père m'a dit qu'est ce que tu veux faire avec ça?
20:38C'est pour nourrir les poules, car les graines étaient minuscules.
20:41J'ai répondu non, c'est une nouvelle variété de culture.
20:44C'est censé être bon pour les sols, c'est différent.
20:46Alors allons y, essayons.
20:53C'est un succès pour la simple raison qu'on a un marché qui s'est développé et on a réussi à exporter 90% de notre production à l'Inde, au Pakistan, en Turquie et même à des petits pays dont on n'avait jamais entendu parler.
21:11Tout ça, car ils mangent beaucoup de légumineuses, de lentilles, de pois chiches.
21:17Car le comble, c'est que les Canadiens n'aiment pas vraiment ça, les lentilles.
21:23La quasi totalité de la production est exportée à bas prix, 40% moins cher que des légumineuses cultivées en France.
21:32Les lentilles canadiennes ont conquis la planète et ont fait la fortune des agriculteurs comme Roland Levac.
21:42Ce jour-là, il vient surveiller le début de la récolte.
21:46C'est son fils qui est en charge de la moisson.
21:53Pas pris trop de cailloux?
21:54Non, ça va.
21:55Super.
22:01La récolte, c'est un moment important pour vous?
22:04Oui, c'est l'argent.
22:07Si l'argent ne rentre pas, on ne cultivera plus de lentilles l'année prochaine.
22:12Cette année, tout le monde est surpris de la récolte.
22:15On ne pensait pas avoir autant de lentilles.
22:17Vu la sécheresse qu'on a eue, on ne peut pas se plaindre.
22:20On essaye toujours d'avoir les meilleurs rendements possibles, car c'est ce qui paye les factures.
22:26Paris réussit.
22:29300 tonnes de légumineux sont récoltées grâce à des rendements exceptionnels, deux fois et demi supérieurs à ceux des agriculteurs français.
22:41Roland Levac cultive des lentilles blondes et vertes sur plus de 200 hectares.
22:50Pourtant, dans la région, il reste un petit exploitant familial.
22:57L'agriculteur vient vérifier sa production avant de la mettre en silo.
23:07C'est une bonne récolte, car les lentilles sont très uniformes.
23:11Plus la qualité est bonne, plus on obtiendra un prix élevé.
23:15Autour de 100 000 euros pour cette récolte.
23:18Alors, quel est son secret pour obtenir une qualité si homogène et de tel rendement ?
23:27Les lentilles, c'est vraiment une bonne culture, car les semenciers nous fournissent chaque année de meilleures graines.
23:34Il y a 15, 20 ans, vous n'aviez pas une telle qualité.
23:38On voit des variétés qui ont des meilleurs rendements, qui s'acclimatent mieux, qui sont plus résistantes aux maladies.
23:44La variété, c'est vraiment ce qui fait la différence.
23:48La clé de son succès, ce sont donc ces plantes ultra performantes, fruits d'innovation scientifique uniques au monde.
23:56À quelques centaines de kilomètres de là, dans le nord de la province, voici un immense champ expérimental.
24:08Pas moins de 324 variétés de lentilles venant du monde entier poussent ici.
24:17Albert Vandenberg, chercheur, est à la tête de ce puissant programme de sélection de légumineuses.
24:24Il tient à nous montrer son dernier bébé.
24:28Et voilà une plante olympique.
24:31Regardez, on a quatre gousses.
24:33Une plante avec pas une, mais bien quatre gousses sur chaque branche.
24:38Du jamais vu.
24:39C'est une lentille heureuse et ça, c'est grâce à une bonne génétique et une bonne acclimatation.
24:44Et si la météo coopère, alors cela permet vraiment d'augmenter vos rendements.
24:49Des super lentilles qui permettent des gains de productivité jusqu'à 40%.
24:58L'arme du scientifique pour obtenir ces lentilles hors norme, c'est la génétique.
25:03Université de la Saskatchewan.
25:20C'est ici, dans son laboratoire, qu'il y a 15 ans, il a créé une graine miracle qui a permis au Canada de devenir le leader mondial du marché.
25:30La lentille Clearfield, une lentille résistante aux herbicides.
25:37Les mauvaises herbes étaient le problème numéro un.
25:40Pourquoi? Ici, au Canada, c'était le principal facteur de baisse de productivité.
25:47Si vous ne contrôlez pas les mauvaises herbes, vos rendements peuvent baisser de moitié.
25:54Alors, comment a été créée cette lentille Clearfield?
25:57En exposant la plante à des produits chimiques, le chercheur a réussi à provoquer une mutation de certains de ses gènes pour qu'il soit résistant aux pesticides.
26:08Une plante mutante qui, selon le chercheur, n'est pas un OGM.
26:15Les OGM sont une technologie très compliquée dans laquelle vous introduisez un gène extérieur dans un organisme.
26:23Vous ne faites pas ça dans la mutagénèse.
26:27Il n'y a pas de gène étranger à la plante.
26:30Selon mon point de vue, ce ne sont pas des OGM.
26:35Pour les écologistes, il s'agirait en réalité d'OGM cachés.
26:40En Europe, un certain flou juridique subsiste, ce qui permet au Canada de continuer d'y exporter ses légumineuses.
26:47La semence Clearfield, brevetée par le géant de l'agrochimie BASF, a révolutionné la culture de la lentille dans la Saskatchewan.
27:05Roland Levac, comme la grande majorité des agriculteurs canadiens, cultive des lentilles Clearfield.
27:12Vous voyez cette plante ici ? C'est une moutarde sauvage.
27:18J'en ai une ici, j'en ai une là et une autre là-bas.
27:23Si vous regardez ce champ, vous pouvez voir qu'on a vraiment un champ propre.
27:29Grâce aux lentilles Clearfield, on peut utiliser différents herbicides qui nous permettent de contrôler les mauvaises herbes.
27:36Alors que si vous semez une variété classique, vous n'avez pas le choix.
27:39Impossible d'utiliser des pesticides, sinon vous tuez aussi les plants de lentilles.
27:46Cette variété permet au producteur de maîtriser totalement la croissance des lentilles grâce à de nombreux pesticides, entre 3 à 4 épandages par récolte.
27:58Ce jour-là, Roland Levac va justement se fournir en produits chimiques.
28:04Il vient s'approvisionner ici, dans cet immense hangar, sorte de supermarché des pesticides pour les agriculteurs.
28:15Salut, salut.
28:18T'as un peu de réglons pour moi aujourd'hui ?
28:20Oui, bien sûr.
28:22Ici, des dizaines d'herbicides, fongicides ou insecticides.
28:28Ils sont vendus librement, sans aucune limite sur les quantités utilisées.
28:34Si tu penses que tu dois pulvériser 4 fois ta récolte, alors tu fais 4 épandages, c'est ta décision.
28:40Ou alors, si tu es conseillé par un ingénieur agronome, tu es libre ou non de suivre ses recommandations.
28:46Tout dépend de ce que tu veux au final comme rendement.
28:51Le produit le plus vendu, c'est le désherbant le plus controversé.
28:56C'est du glyphosate, ça tue tout.
28:59Le glyphosate, un pesticide extrêmement puissant qui a aussi l'avantage d'être bon marché.
29:05Près de 500 euros seulement pour cette cuve de 1000 litres.
29:10Un désherbant qui a pourtant été classé cancérigène probable par l'Organisation mondiale de la santé.
29:17Mais ici, le débat sur sa dangerosité ne pèse visiblement pas lourd face aux enjeux économiques.
29:24Pour l'instant, on ne connaît pas vraiment les conséquences.
29:27Beaucoup de gens disent que si on en utilise trop, ce n'est pas bon, que ça va dans la plante.
29:33Nous, on est là pour nourrir les gens, pour nous nourrir et on essaie de le faire en toute sécurité.
29:39Mais on est aussi là pour être efficace et pour faire du business, pour faire de l'argent.
29:45Et dans cette course à la rentabilité, les agriculteurs n'hésitent pas à utiliser les produits phytosanitaires, même quelques jours avant la moisson.
29:57A la tombée de la nuit, nous retrouvons Roland Levac dans le champ d'un de ses voisins, qui a prévu de récolter dans une semaine.
30:07L'agriculteur remplit son conteneur avec un herbicide, le réglon, et ce n'est même pas pour tuer les mauvaises herbes.
30:16C'est pour assécher les lentilles, c'est pour nous aider à la récolte.
30:20Si nous ne le faisions pas, tout ne serait pas mûr en même temps.
30:24Cela sert à accélérer la maturité des plantes.
30:27Cette pratique, la dessiccation, permet simplement de faciliter la moisson et d'éviter la moindre perte de rendement.
30:35Mais à quel prix ?
30:40Il vaut mieux prendre une douche en rentrant à la maison, changer de vêtements.
30:43C'est dangereux donc ?
30:45Oui, en fait.
30:46Oui, c'est absorbé par la peau comme n'importe quoi d'autre.
30:49Donc si vous ne vous protégez pas, cela peut être dangereux.
30:56Pour sécher leurs plantes de lentilles, ils utilisent également du glyphosate.
31:00La dessiccation avec ce pesticide controversé est interdite en France depuis 15 ans.
31:10Restent-il des traces de tous ces pesticides dans les lentilles que nous consommons en France ?
31:16Septembre 2017, l'association Génération Futur a décidé d'analyser divers produits de notre alimentation achetés en supermarché.
31:26Objectif, rechercher les résidus de glyphosate.
31:30On en a trouvé beaucoup dans certaines légumineuses, notamment dans certaines lentilles.
31:34Dans 4 échantillons sur 7, on a trouvé des traces de glyphosate.
31:39Aliment le plus contaminé, ce paquet de lentilles importées du Canada, avec pas moins de 2,1 mg de glyphosate par kilo.
31:47Les résidus de pesticides au-dessus du milligramme par kilo, ce n'est pas d'infimes traces.
31:52Cela veut dire qu'on a utilisé le produit de manière intensive sur la culture, probablement en fin de culture, pour sécher les plantes avant la récolte.
32:02Le glyphosate a été classé comme un produit probablement cancérogène pour l'homme.
32:05Cela paraît de bon sens de penser que moins on mange de résidus de produits cancérogènes, mieux c'est.
32:10Alors que là, on s'aperçoit qu'on peut en manger plusieurs milligrammes par kilo d'aliments qui ont été exposés.
32:18Nous, cela nous paraît assez important pour pouvoir tirer la sonnette d'alarme et faire en sorte que, pour nous, on ne devrait pas trouver cela dans les assiettes des Françaises et des Français.
32:29Malgré ce taux élevé de glyphosate, ce paquet de lentilles d'origine canadienne est bien en dessous des limites maximales de résidus autorisés en Europe.
32:39Ces limites sont fixées actuellement à 10 mg par kilo.
32:43Mais cela n'a pas été toujours le cas.
32:46Avant 2012, le taux était de 0,1 mg par kilo, comme la plupart des fruits et légumes.
32:53Alors pourquoi ces limites ont-elles été multipliées par 100 pour les lentilles ?
33:01Derrière ce changement de normes européennes, il y a un pays, le Canada.
33:08Nous avons retrouvé le lobbyiste qui a mené campagne pour le compte des producteurs canadiens.
33:14L'Union européenne n'avait jamais établi de limites maximales de résidus de glyphosate spécifiquement pour les lentilles.
33:22C'était fixé à un niveau très bas, proche de 0, à 0,1 mg par kilo.
33:29Donc c'était très difficile pour nous d'exporter nos produits.
33:32Une fois que nous les avons convaincus qu'il y avait un manque dans la réglementation,
33:36un réexamen des données scientifiques a été entrepris par les autorités européennes.
33:41Elles ont analysé les données et elles ont fini par multiplier les limites de résidus de pesticides par 100.
33:48Et on a pu ainsi continuer à exporter nos lentilles dans l'Union européenne.
33:55Et le Canada n'a pas été le seul à faire pression pour revoir à la hausse les doses de glyphosate autorisées dans les lentilles.
34:03Dans la décision de l'EFSA, l'Agence européenne de sécurité alimentaire,
34:08on peut ainsi dire que c'est à la demande du géant de l'agrochimie Monsanto,
34:12inventeur du glyphosate, que les normes ont été modifiées.
34:17L'eurodéputée Michèle Rivasi est scandalisée par ce qu'elle considère être un manque d'indépendance de l'EFSA.
34:25Alors là, on a le document de l'EFSA.
34:28C'est quand même incroyable que sous l'influence d'un lobby aussi important que Monsanto,
34:35l'EFSA aille dans ce sens-là. Parce que ça ne va pas sur la sécurité sanitaire.
34:40Selon elle, l'Europe n'aurait jamais dû accepter les demandes canadiennes de relever les limites de résidus de pesticides.
34:48Ce qui est fou, c'est que l'Agence européenne devrait protéger les citoyens européens en disant
34:53nous on a des garanties supérieures, on a une protection supérieure, donc c'est à vous de changer de pratique.
34:59Mais on ne leur demande pas de changer de pratique, on augmente les normes pour qu'ils puissent vendre sur le marché européen.
35:06L'EFSA réfute fermement les allégations de l'horreur députée.
35:10Elle assure être une agence indépendante agissant dans l'intérêt des citoyens européens.
35:16Aujourd'hui, la majorité des lentilles vendues en conserve est d'origine canadienne.
35:23Pour échapper à leur mode de production, mieux vaut privilégier les petites graines cultivées en France.
35:30Des lentilles françaises et bio, on en trouve aujourd'hui sous toutes les formes, en sachets précuites et même en steaks végétales.
35:42Les industriels surfent sur la tendance végane et veulent conquérir un nouveau marché, celui des substituts à la viande.
35:49La roche sur Fauron, en Haute-Savoie.
35:59Ça va les filles ?
36:06T'as de la sauce là-bas, avec du curry et ananas, ou sauce tomate ?
36:11T'en veux un demi ? Ouais, tiens.
36:14Dans ce collège, à la cantine, ne vous fiez pas aux apparences. Ce steak ressemble à s'y méprendre à du bœuf, et pourtant.
36:25C'est des steaks de lentilles, à base de lentilles, bio. Tu en mets un petit bout pour goûter ?
36:32On va trouver un terrain d'entente tous les deux. Je t'en mets un demi ?
36:37Un steak de lentilles, riche en protéines, bio et français.
36:43Ici, les 800 élèves mangent une fois par mois des plats végétariens.
36:49Et depuis la rentrée scolaire, ils expérimentent ces recettes plutôt innovantes.
36:54C'est du steak végétarien.
36:56Si les jeunes gourmets sont partagés sur le goût...
36:58Je dis que c'est original et qu'il faut essayer de tout.
37:01J'ai pas l'habitude. Avec la sauce, ça va, mais ça va pas trop.
37:05J'ai plus l'habitude du steak normal.
37:07C'est bon, c'est très bon.
37:09Ils semblent emballés par la démarche.
37:11Ça peut apporter de l'énergie, alors que la viande aussi, ça apporte de l'énergie, mais c'est différent.
37:17Je crois qu'il y a beaucoup de fer dans les lentilles.
37:19Un jour, il y aura plus de steak, il y aura plus de tout ça.
37:22Il faut trouver une solution durable. Et justement, les légumes, c'en est une.
37:26C'est équilibré, c'est ce qui compte, quoi.
37:28Je te donne deux moitiés, ça le fait ?
37:31Des steaks de lentilles, qui ont aussi l'avantage d'être 20 % moins chers qu'un steak de bœuf.
37:36En Chelsea, s'il vous plaît.
37:38Bon marché et tout aussi nourrissant, ces copies végétales pourraient se généraliser dans les cantines.
37:45Même si certaines habitudes ont la peau dure.
37:48Je suis pas fan. Je suis un viandard, donc un steak, c'est un steak.
37:53Après, l'idée est originale, je pense que trouver des alternatives pour manger un peu moins de viande, oui, pourquoi pas.
38:00La société de restauration qui fournit cette école s'est convertie aux végétales.
38:05Car c'est un marché d'avenir.
38:08Peut-être qu'il va y avoir une évolution dans la loi qui va imposer un menu végétarien par semaine.
38:13Il va aussi falloir trouver des alternatives à la viande de manière durable et responsable.
38:18Ça permet d'imaginer que ce type de produit peut avoir de l'avenir pour les consommateurs.
38:24Derrière ces steaks de lentilles consommés dans cette cantine, il y a une success story.
38:31Deux jeunes entrepreneurs qui ont vendu un million de ces galettes en 2017.
38:40À Lyon, Benoît Plisson, 29 ans, et Emmanuel Breillet, 28 ans.
38:47Deux amis qui ont imaginé ces steaks de lentilles.
38:51Au départ en 2013, un simple projet de fin d'études dans leur école d'ingénieurs.
38:58On a travaillé sur un projet où il fallait imaginer l'ingrédient de demain, l'aliment de demain.
39:04On a voulu relier deux tendances fortes.
39:06Les légumineuses qui sont des matières premières intéressantes, anciennes, etc.
39:10Et d'un autre côté, le végétal qui est un marché qui a énormément de croissance, qui a énormément de potentiel.
39:17Manger du végétal, ça ne veut pas forcément dire ne plus manger de viande.
39:20Ça veut dire diversifier son alimentation.
39:22C'est cette démarche-là qui est dynamique, autour de laquelle on peut rassembler du monde.
39:28On va essayer de rajouter un peu plus de polémique.
39:31Je pense que c'était pas mal les dernières essais.
39:34Ce jour-là, les deux fondateurs de la start-up passent une nouvelle fois à l'épreuve leurs produits phares.
39:40Avec leurs steaks, ils ont voulu donner un coup de jeûne aux lentilles.
39:45En fait, on a voulu des légumineuses connues de tout le monde.
39:47On a mangé un petit plat de lentilles, un petit salé aux lentilles.
39:50Et nous, notre objectif, c'est de faire redécouvrir des produits connus de tous, mais moins consommés aujourd'hui.
39:55Et qui, pourtant, ont plein d'avantages nutritionnels, environnementaux, gastronomiques.
40:00Là, on verse les lentilles dans le pétrin qu'on va mélanger avec le reste des ingrédients.
40:08Des carottes, de la farine ou encore un peu d'huile.
40:12On va mélanger l'ensemble.
40:14Les apprentis sorciers du végétal tentent de trouver la bonne recette.
40:18Car les légumes secs ont un inconvénient de taille, leur texture farineuse.
40:24On doit pas avoir l'impression de pâteux en bouche.
40:26On travaille beaucoup les légumineuses et les céréales.
40:28C'est des ingrédients naturellement assez pâteux.
40:30Donc nous, en fait, on essaye, par tous les ingrédients qu'on rajoute, que ça soit plus fondant.
40:35Maintenant, on va bouler un steak. On va voir cette recette, ce qu'elle donne.
40:41Un défi, car ils refusent d'ajouter des additifs alimentaires, comme des texturants.
40:46Et voici.
40:47Qui pourraient pourtant rendre leur steak plus appétissant.
40:50Un des gros enjeux pour nous, en fait, c'est un enjeu de transparence.
40:53Que le consommateur comprenne ce qu'il a dans son assiette.
40:56Et qu'il ait pas plein de choses pas identifiables, des additifs, des choses comme ça.
41:00Donc nous, vraiment, un parti pris fort, c'était d'utiliser que des ingrédients bruts.
41:04Pour que le consommateur ait l'assiette la plus clean possible.
41:10Un produit 100% naturel, avec lequel ils espèrent conquérir de nouveaux clients.
41:15Au Siragrine, le salon de la restauration responsable à Lyon.
41:22Aujourd'hui, nous, on valorise la légumineuse toujours dans un contexte plat végétal et bio.
41:29Benoît Plisson en profite pour tester sa nouvelle recette.
41:33Bonjour, vous voulez goûter ?
41:34Oui, bien sûr, qu'est-ce que c'est ?
41:36Allez-y, mettez un peu de sauce, goûtez, et vous allez me dire ce qu'il y a dedans.
41:40D'accord.
41:42Le flageolet, non, pas d'amour.
41:45Les lentilles.
41:46Tout à fait, oui.
41:47Les lentilles vertes.
41:48Très bon, j'adore les lentilles.
41:49Oui.
41:50Très bon.
41:51C'est avec ou sans sauce ?
41:52C'est comme vous voulez.
41:59Tu bois aux lentilles ?
42:00Oui.
42:02Il y a des lentilles.
42:03Il y a des lentilles, oui.
42:04C'est fait principalement à base de lentilles, oui.
42:05Les lentilles vertes.
42:06C'est très bon, mais j'allais dire, on se nourrit, quoi.
42:09C'est pas...
42:10Il manque quelque chose.
42:15Ça manque un petit peu d'assaisonnement, moi, je trouve.
42:19C'est pas inintéressant.
42:21Verdict, on est encore loin du steak savoureux qui ravit les papilles.
42:29Ici, beaucoup ont trouvé la solution miracle.
42:32Tout simplement copier le goût de notre bon vieux biftec.
42:37Une nouvelle tendance, le simili-carnet, où on trouve désormais de tout.
42:43Fausses saucisses, fausses escalopes, fausses aiguillettes et même fausse charcuterie.
42:52Du végétal, mais avec l'odeur et le goût de la viande.
42:57Des rois de l'illusion, une stratégie qui ne convainc pas le jeune startupper.
43:03On maintient notre positionnement légumineuse assez fort, assez marqué.
43:07Et c'est vrai que c'est pas forcément le cas de tout le monde.
43:09On cherche pas à faire de la fausse viande.
43:10On cherche pas juste à remplacer une portion protéique dans une assiette.
43:13Mais vraiment, on permet de diversifier l'alimentation.
43:17Et aujourd'hui, c'est des choses qui parlent au plus grand monde.
43:21Fausses viandes ou simples galettes.
43:23Ce marché des steaks végétaux est en plein essor.
43:26Plus 80% de croissance par an.
43:29Un marché juteux dans lequel se sont engouffrés les géants de l'agroalimentaire.
43:34Avec des recettes industrielles.
43:37Sur les emballages, ils vantent leur bienfait santé.
43:41Mais ces produits sont-ils vraiment aussi sains que le prétendent les fabricants ?
43:46Anthony Fardet, chercheur et spécialiste des produits ultra-transformés.
43:52Nous lui avons apporté des steaks végétaux à base de lentilles, achetés en supermarché.
43:58Croc, tofu, lentilles et carottes.
44:02Donc là, vous avez des gélifiants, qui sont donc des texturants.
44:07Et vous avez aussi des gélifiants, qui sont des gélifiants,
44:11qui sont quand même le marqueur de l'ultra-transformation.
44:15Si on prend le bon végétal, galettes gourmandes, lentilles et carottes,
44:19on va sans doute trouver un épaississant.
44:21Oui, aminon de maïs, voilà.
44:23C'est un épaississant, c'est pour donner de la consistance au produit, du liant.
44:27Alors ensuite, vous avez une galette serrée à la lentille écurie, bio, véggie.
44:30Donc c'est vrai que bio et véggie sont vraiment des marqueurs de naturalité.
44:34Donc il faut quand même vérifier que ce n'est pas ce qu'on appelle du greenwashing,
44:36c'est-à-dire qu'il n'y a pas de gélifiant.
44:38Donc il faut quand même vérifier que ce n'est pas ce qu'on appelle du greenwashing,
44:40c'est-à-dire des termes qui font bien, mais qui cachent quand même un produit ultra-transformé.
44:45Donc si on regarde la liste des ingrédients,
44:47voir s'il y a des colorants texturants ou exhausteurs de goût,
44:51apparemment, voilà, il y a juste un épaississant, gomme d'acacia,
44:55qui est quand même un texturant.
44:58C'est quand même des molécules d'origine strictement industrielle
45:00que ne produit pas la nature, qui ont souvent été modifiées.
45:02Donc on a très peu de recul sur l'effet cocktail,
45:05comment ces molécules vont agir à long terme sur la flore digestive, par exemple.
45:10Dans les galettes de lentilles que nous lui avons apportées,
45:13un, deux additifs, rien de vraiment dangereux pour la santé.
45:17Mais dans certaines préparations, il peut y avoir trop de sel,
45:21et paradoxe, pas suffisamment de fibres et de protéines.
45:25Mon conseil, par exemple, pour les légumineux,
45:27c'est de manger des haricots, des lentilles bouillies,
45:29ou avec, cuisiner avec de la tomate, du beurre, des épices, du thym.
45:33On peut faire des soupes de haricots, des soupes de lentilles,
45:36que vous faites vous-même, avec de la crème fraîche, pourquoi pas.
45:40L'idée, c'est de cuisiner soi-même et d'utiliser des vrais ingrédients et des vrais aliments.
45:45La clé, c'est donc de revenir au goût authentique des lentilles,
45:49incarnées en France par des terroirs.
45:52Depuis peu, des variétés oubliées sont remises au goût du jour.
46:03Saint-Flour, dans le Cantal.
46:08La planèze, ce vaste plateau volcanique et agricole,
46:13a été le théâtre d'une belle histoire,
46:16celle d'une résurrection.
46:23Complètement disparue il y a 50 ans,
46:25la belle endormie, la lentille blonde de Saint-Flour,
46:29fait doucement son retour dans les champs.
46:33Il fait moins chaud, moi.
46:38Ces agriculteurs passionnés font revivre la demoiselle depuis une dizaine d'années.
46:43Une variété qui ne pousse qu'ici,
46:46et qu'ils ont voulu cultiver comme les anciens,
46:49sans impact sur l'environnement.
46:52On n'apporte pas de produits chimiques.
46:55On travaille le sol, on sème les lentilles,
46:57et après on attend que ça pousse tout seul.
47:00On est fiers de notre produit, là.
47:02On en mange.
47:04J'ai pas peur d'en manger.
47:08Un retour à l'authentique,
47:10et des récoltes confidentielles.
47:13130 tonnes seulement chaque année.
47:20La renaissance de la lentille blonde
47:22n'aurait pas pu se faire sans Gérard Sibiel.
47:25Tout s'est joué dans son grenier il y a une vingtaine d'années.
47:30Ce petit fils de producteur
47:32répond alors à un appel du maire
47:34et du prêtre du village
47:36qui recherchent les graines devenues introuvables.
47:39C'est des lentilles que j'ai retrouvées
47:41dans le grenier de mon grand-père.
47:43J'ai vu ça sur un journal paroissial
47:46qu'on recevait tous les mois,
47:48et que M. le curé cherchait
47:50un SOS recherche lentilles blondes de la planèze.
47:53Alors je suis monté là, sachant que mes grands-parents en faisaient,
47:56j'ai dit peut-être par chance j'en trouverais,
47:59et j'en ai trouvé un petit peu.
48:01Un coup de chance qui a permis de faire renaître
48:04cette lentille très populaire dans la région dans les années 50.
48:091200 tonnes étaient produites chaque année.
48:12Le caviar jaune est alors récolté en famille.
48:15Les champs sont fauchés à la main
48:17et les graines vendues dans toute la France.
48:20C'est un bon revenu pour les agriculteurs.
48:23Dans son grenier,
48:25Gérard Sibiel conserve des traces de cet âge d'or.
48:29Cette machine savait trier les lentilles après la moisson.
48:32Il mettait des graines dedans.
48:37Il tournait la manivelle
48:39et ça triait par rapport aux déchets qu'il y avait.
48:47Ils passaient leurs soirées d'hiver bien souvent à trier les lentilles.
48:50C'était tout fait à la main,
48:52pas d'industrie, tout manuel.
48:58Un travail pénible
49:00qui sonne la fin des lentilles blondes de Saint-Flour dans les années 60.
49:06A l'époque, la main d'oeuvre disparaissait.
49:08Ils partaient à la ville bien souvent,
49:10travaillaient à l'extérieur.
49:12Ils se trouvaient tout seuls, alors manque de personnel,
49:14ils ont abandonné la lentille pour se mettre sur l'élevage et le lait.
49:18Aujourd'hui, la petite graine oubliée revit.
49:23Une centaine d'hectares a pu être replantée.
49:26En quelques années, elle est même devenue un produit d'exception
49:30qui séduit désormais les plus grands chefs.
49:37Dans les cuisines de ce restaurant gastronomique...
49:40Aubergine à griller, on dresse un bœuf express, de suite.
49:43Envoyez la famille.
49:4523,2 à 5,40.
49:47Sébastien Brasse ne jure que par ses perles blondes.
49:53L'idée aujourd'hui, c'est d'associer
49:55deux produits qui sont emblématiques de mon territoire,
49:58le bœuf fermé au braque et la lentille de la planaise.
50:01Non seulement elle est belle, elle est bonne, très douce,
50:04mais en plus, elle raconte une belle histoire
50:06parce que c'était un produit qui était quasiment disparu.
50:10Et aujourd'hui, moi, chaque saison,
50:13j'ai le plaisir de réinterpréter des recettes
50:16qui tournent autour de ce produit emblématique.
50:19Une légumineuse revisitée par le grand chef.
50:23Refroidie, elle accompagne et pimente le bœuf.
50:29Mais aussi en assaisonnement, des lentilles germées, réduites en poudre.
50:36Sébastien Brasse aime explorer l'inattendu
50:39et marier terroir et inspiration japonaise.
50:43Au Japon, on connaît très bien le miso.
50:46Et moi, j'ai remplacé la fève de soja par de la lentille.
50:50Cette pâte, je l'utilise pour assaisonner,
50:52pour faire mariner mon bœuf et le badigeonner au dernier moment.
50:55On a une certaine forme de douceur, un côté un petit peu terrien,
50:59qui, je trouve, s'associe parfaitement avec le goût de bœuf au braque.
51:04Bon appétit !
51:10C'est extrêmement savoureux et très complexe
51:12parce qu'on a des lentilles fraîches,
51:16des lentilles fermentées, donc dans la sauce.
51:19C'est un plat qui donne, c'est l'être de noblesse,
51:22à une légumineuse qui est considérée comme plutôt populaire et simple à l'origine.
51:28C'est extrêmement complexe et raffiné.
51:30Oui, là, vraiment, c'est une découverte de la noblesse de la lentille.
51:36Des gamelles des cantines,
51:39au raffinement des tables les plus précigieuses,
51:43la lentille tient sa revanche
51:46et joue désormais dans la cour des grands.