CRISE HOPITAL- François Braun, Ancien ministre de la Santé et de la Prévention est l'invité de RTL Bonsoir

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La situation des hôpitaux en France est inquiétante, en effet de nombreux services d'urgences doivent faire face à un afflux trop grand de patients. Actuellement, « une cinquantaine d'hôpitaux sont en tension » a déclaré le ministre délégué à la santé démissionnaire, Frédéric Valletoux. Des services d'urgence contraints de fermer la nuit, une nouvelle fois en Mayenne, en Vendée, dans la Sarthe, à Carpentras ou encore Sarlat. Et ce n'est pas le seul couac en ce mois d'août, il y aura 1 500 internes en moins cette année, une baisse exceptionnelle. Certains internes s'estiment lésés par les choix proposés. Une pétition réclame des ouvertures de postes. François Braun, ancien ministre de la Sant
Regardez L'invité de RTL avec Stéphane Boudsocq du 21 août 2024.
Transcript
00:00Il y avait déjà l'afflux de nouveaux patients aux urgences, le manque annoncé d'internes
00:08et maintenant ce virus Mpox qui inquiète.
00:11Notre hôpital est-il sur le point de craquer ?
00:13Question posée ce matin à notre invité.
00:16Bonjour François Braun.
00:17Bonjour Monsieur Boutsol.
00:18Vous avez été ministre de la Santé de juillet 2022 à juillet 2023.
00:22Vous êtes médecin urgentiste de formation, ancien président du SAMU.
00:25Ce constat alarmant que je viens de dresser, est-ce que vous le partagez ?
00:28Je le partage dans le sens où on voit bien que notre système de santé, d'une façon
00:34globale d'ailleurs, parce que l'hôpital est en difficulté, je le partage moins parce
00:39que nous avons des raisons et je crois qu'il faut le dire d'être optimiste puisque ce
00:44système de santé vit actuellement une mutation, une mutation qui suit la mutation de notre
00:49société et nous avons les moyens d'accompagner cette mutation.
00:53Le système de demain ne sera pas le système d'hier et je crois que c'est d'abord
00:57ça qu'il faut accepter.
00:58L'actuel ministre de la Santé démissionnaire, Frédéric Veltoux, déclare, je le cite
01:02« une cinquantaine d'hôpitaux sont en tension ». Il fait notamment référence
01:06à l'afflux toujours plus important de patients aux urgences.
01:09Alors, on peut se dire que les Français ont souvent le réflexe d'aller directement
01:12à l'hôpital mais d'un autre côté, ils ont aussi du mal à trouver un médecin généraliste
01:17et non souvent que c'est une solution.
01:19On a l'impression qu'on ne sort pas d'une sorte de cercle vicieux.
01:22Bien sûr, il y a des besoins qui ne sont pas couverts ou en tout cas les patients ont
01:28le ressenti qu'on ne peut pas répondre à leur attente.
01:31C'est bien pour ça que nous avions mis en place le début des services d'accès
01:35aux soins, ces fameuses SASS qui malheureusement ne sont pas encore généralisés mais qui
01:39répondent à cette attente et qui d'ailleurs sur les services d'urgence ont un effet
01:44très positif puisque là où l'accès aux urgences est régulé et je crois que c'est
01:48ça aussi ce changement qu'il faut accepter, c'est-à-dire que vous n'accédez plus
01:53aux urgences comme vous le voulez, vous avez un contact d'abord avec un médecin, que
01:57ce soit votre médecin traitant ou que ce soit ce médecin du SAMU, du SASS qui vous
02:02dit ok, votre cas relève des urgences, vous pouvez y aller ou alors non, nous allons vous
02:06trouver une autre solution.
02:07Et bien lorsque ce système est en place, cela diminue de 10 à 20% la fréquentation
02:12des urgences.
02:13Donc on voit bien que ces changements un petit peu de paradigme, il faut les accompagner,
02:18il faut les suivre parce que c'est ça notre système de santé de demain.
02:21Alors on sait aussi François Braune qu'à la campagne notamment, mais c'est de plus
02:25en plus le cas en ville, on manque tout simplement de médecins, on a du mal à trouver un généraliste
02:30même pour une simple consultation.
02:32Comment faire pour susciter les vocations si je puis dire ? Certaines municipalités
02:35vont jusqu'à offrir de l'argent pour que des médecins s'installent.
02:39C'est traiter la maladie en traitant simplement le symptôme de la fièvre si vous voulez,
02:46si je peux prendre cette comparaison.
02:48J'en fais état également, lorsque j'ai mis en application les conclusions de la mission
02:55FLASH, c'était ça, c'était un traitement un petit peu du symptôme mais pas de la maladie.
02:59Traitement de la maladie, c'est dire que le médecin ne fera plus tout, que d'autres
03:03professionnels de santé ont des missions qui sont complémentaires de celles du médecin,
03:07que le rôle du médecin doit se concentrer sur sa réelle plus-value, nous avons permis
03:11aux infirmiers, aux pharmaciens de vacciner, on se rend compte que ça marche, il doit
03:15y avoir ce travail pluriprofessionnel, en commun, qui est beaucoup plus développé,
03:21continuer à développer cela, continuer à développer des modes d'exercice différents,
03:25c'était tout l'intérêt des conclusions de ce fameux CNR sur la santé, qu'on a beaucoup
03:31brocardé mais qui a apporté énormément de solutions de terrain, parce que ce sont
03:35bien des solutions de terrain qu'il faut mettre en avant, certains déserts médicaux
03:39comme on les appelle se sont organisés différemment avec des médecins qui viennent une semaine,
03:44trois jours, de façon successive, il y a des outils de télémédecine qui permettent,
03:48par exemple en dermatologie, qui est une spécialité dont on parle souvent, de faire de la téléconsultation
03:53et c'est extrêmement efficace, nous avons aujourd'hui une palette d'outils, il faut
03:57les appliquer mais il faut surtout accepter que notre système de santé de demain n'aura
04:03pas la même image que notre système de santé de nos parents et de nos grands-parents et
04:06c'est tout à fait logique parce que les besoins évoluent et la société évolue.
04:10Je reviens au service d'urgence, certains sont obligés de fermer cet été, la nuit
04:14c'est le cas notamment dans la Sarthe, en Mayenne ou en Vendée.
04:17François Braune, je vous propose d'écouter Caroline Brémeau, elle est médecin aux urgences
04:22du CHU de Laval, elle s'adresse directement à vous.
04:25Moi ma question c'est de savoir dans quelle mesure il s'est rendu compte quand il est
04:30arrivé au ministère de la Santé qu'il n'avait pas le pouvoir de changer les choses.
04:35J'ai l'impression finalement que le ministère de la Santé est quand même pied et poing
04:42lié et que les décisions viennent de Bercy et du président directement, c'est la sensation
04:47qu'on a nous sur le terrain.
04:48Que lui répondez-vous ce matin sur RTL ?
04:51Que je suis désolé de ne pas avoir montré le contraire parce que ce qu'elle dit et
04:56ce qu'on entend trop souvent n'est pas vrai, je suis obligé de le dire.
05:00Oui le ministre de la Santé peut changer les choses, mais il ne peut pas les changer
05:04tout seul, c'est surtout avec les professionnels de santé et avec les patients qu'il faut
05:08le changer.
05:09J'ai repris ma blouse pour travailler au niveau du SAMU et de la régulation.
05:14J'ai vu par exemple l'autre jour une dame qui voulait rentrer dans le service des urgences
05:18parce qu'elle avait décidé un jeudi après-midi de faire changer son stérilet parce qu'elle
05:23avait fini ses courses et qu'elle avait du temps de libre.
05:26Eh bien ça aussi il faut changer cette idée auprès des patients.
05:29Donc oui nous avons tous ensemble la capacité de changer ce système de santé et ce n'est
05:36pas qu'une histoire d'argent loin de là.
05:38François Bronte, vous le disiez vous-même, vous étiez cet été aux côtés des équipes
05:42du SAMU de Metz, vous avez été le président du SAMU Urgences de France pendant huit ans.
05:48Vous les avez trouvés comment les urgentistes ? Ils sont démobilisés ? Ils sont fatigués
05:52ou ils ont toujours la foi ?
05:53C'est une question difficile.
05:56Ils sont toujours là et je crois que c'est important.
05:59En tout cas, il y en a qui ont quitté l'hôpital, un petit peu déçus de cette charge de travail,
06:06mais ils ont la foi parce que travailler main dans la main avec nos collègues généralistes
06:11qui, entre parenthèses, sont dans les mêmes difficultés en termes d'effectifs, travailler
06:16au changement un petit peu de l'organisation de notre hôpital public qui là aussi a modifié
06:22sa façon de fonctionner dans la façon de prendre en charge, d'hospitaliser les gens
06:25et c'est d'ailleurs pour cela que les urgences sont trop souvent une voie sans
06:29issue, sans possibilité d'hospitalisation derrière.
06:32Se mettre tous autour de la table et discuter de ces évolutions et mettre en avant ce
06:37qui fonctionne, ça c'est motivant.
06:39Par contre, se contenter de subir et ne pas voir le bout du tunnel, ça, ça amène des
06:45gens à quitter malheureusement l'hôpital public.
06:47Mais quand on revient au terrain comme vous cet été, qu'on a été d'abord et avant
06:51au ministère de la Santé, on voit, j'imagine, ce qui reste aussi quand même à accomplir.
06:56Oui, il y a énormément de choses à accomplir.
07:01Je crois que nous avions commencé par la mission Flash à donner le paracétamol pour
07:06faire tomber cette fièvre, à mettre en place quelques mesures structurelles comme la régulation
07:13de l'entrée aux urgences, changement d'organisation de l'hospitalisation à l'échelle d'un
07:17territoire.
07:18Il faut aller plus loin, il faut absolument continuer dans cette voie et aussi un petit
07:23peu arrêter cet hôpital bashing que l'on entend partout parce que bien sûr ce n'est
07:30pas parfait en France, mais en France tout le monde peut se faire soigner à l'hôpital
07:35quel que soit le coût des médicaments.
07:36Et puis n'oublions jamais qu'en France, où que vous soyez et quelle que soit l'heure
07:41de la journée, en cinq minutes vous avez un médecin, c'est ce médecin au SAMU, c'est
07:45ce médecin au SAS au téléphone qui va pouvoir préparer avec vous le parcours de soins qui
07:51vous est nécessaire et vous envoyer les moyens qui sont nécessaires à ce que vous ressentez.
07:55Pour être parfaitement clair, François Braun, si vous avez donné un coup de main cet été
07:58à Metz, c'était pour retourner sur le terrain ou parce qu'il y avait vraiment besoin de bras ?
08:02C'est parce que c'est mon métier déjà, mon métier c'est urgentiste et puis bien sûr à Metz
08:10nous avons des grosses difficultés en termes d'effectifs médicaux sur les urgences,
08:14ce qui a aussi besoin de bras et c'est tout à fait normal que je vienne aider mes collègues.
08:18Alors n'oublions pas les pathologies qui menacent toujours d'engorger nos hôpitaux.
08:22Le Covid, il est toujours là, on en parle moins, mais il est là.
08:25L'Organisation Mondiale de la Santé le dit, impossible développement de l'épidémie de
08:30Mpox en Europe. Est-ce que ce sont des facteurs inquiétants, aggravants ?
08:34Alors ce sont des facteurs qu'il faut surveiller, bien entendu. Alors le Covid est toujours là,
08:39j'ai hospitalisé une patiente d'ailleurs hier pour le Covid sévère. Le Mpox, on a eu il y a un peu
08:46plus d'un an, un an et demi maintenant, une première alerte sur ce Mpox. Nous avons la
08:52capacité de prendre en charge, nous avons les vaccins, c'est une maladie que l'on connaît,
08:56que l'on connaît bien. Alors ce nouveau variant laisse un certain nombre d'interrogations,
09:01mais je crois que nous avons en place en France maintenant aussi bien des systèmes d'alerte que
09:06des systèmes de définition des prises en charge. Je pense en particulier à ce fameux COVARS,
09:12ce comité de veille et d'alerte sanitaire, qui nous permettent de prendre en charge correctement
09:17ces patients et d'aborder avec, j'allais dire sérénitude, c'est peut-être un petit peu trop
09:23fort, mais en tout cas d'aborder cette possible épidémie de Mpox de façon tout à fait sérieuse
09:29et professionnelle. Vous retournez sur le terrain avec le Samu de Metz aujourd'hui ? Ah oui,
09:33j'y serai dans une demi-heure. Courage à vous François Braun, ancien ministre de la Santé.

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