Décryptage du mot Extrême - Madame Langage

  • il y a 3 mois
Avec Jeanne Bordeau, chroniqueuse

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##MADAME_LANGAGE-2024-07-27##

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Transcription
00:00Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
00:31Alors, bien sûr, il y a eu cette dissolution dont on avait déjà parlé,
00:35mais au fond, ça n'est pas un hasard, parce que nous regardons la langue toutes deux
00:41et on avait vu déjà monter des préfixes comme hyper, giga.
00:46L'an dernier, ça a été ultra.
00:48Donc, quand on a ultra-droite, ultra-gauche, on sent que ce sont des préfixes qui annoncent l'extrême.
00:55Après, en même temps, il faut peut-être un petit peu vous-même clarifier la notion d'extrême,
00:59parce que tout peut être extrême ou extrémisme.
01:02Oui, vous avez raison, c'est un mot de l'époque.
01:04C'est-à-dire, quand on est extrême, c'est qu'on est à la limite, au bout.
01:07Et ce qui est extrême est intense, mais également immodéré, voire désespéré.
01:14Donc, dans le milieu extrême, il n'y a pas, ça va vous amuser, de centre, de modération.
01:20On va parler d'extrême-centre à un moment donné.
01:22Oui, bien sûr. Parfois, on fait des associations de langage tout à fait étonnantes.
01:27C'est justement le centre que le Président de la République a remis en question en décidant de cette fameuse dissolution.
01:34Donc, il est le premier, d'ailleurs, à se servir beaucoup de ce mot,
01:37parce qu'il nous avait dit que choisir les extrêmes, c'est choisir la guerre civile.
01:41Et vous vous souvenez, la phrase avait beaucoup fait réagir.
01:43Oui, parce que c'est une déclaration qu'on peut peut-être juger, considérer extrémiste, d'ailleurs.
01:47Jeanne, d'autres mots non politiques ont circulé autour de ce mot.
01:53Il y a des mots, d'ailleurs, qui ressemblent à cette notion d'extrême, qu'ils font comprendre, en fait.
01:58Oui, il y a toujours ce que j'appelle moi des mots cousins.
02:01C'est-à-dire que M. Glucksmann a parlé de brutalisation des mœurs.
02:06Mais l'outrance des propos n'a fait que continuer.
02:09Vous voyez, on a eu la foudre, le feu.
02:12On a vraiment M. Mélenchon qui a aigréné des mots comme bordélisation, foutoir, bazar.
02:19Aucune mesure dans ses propos.
02:21Il est le plus souvent, lui aussi, dans l'extrême.
02:24Ce n'est pas un hasard.
02:26Donc, de façon implicite également, notre président de la République, lors de la dissolution,
02:31s'est référé à la série qui a eu beaucoup de succès, la fièvre,
02:35en évoquant le climat électrique qui existait dans la société.
02:39Il a même dit, s'ajoute une fièvre qui s'est emparée du débat public.
02:44Tout ça ne fait pas respirer la modération, n'est-ce pas ?
02:47Alors, fièvre, ambiance extrême, chaude.
02:50Dans tous les mots, vous avez pu un peu piocher dans les journaux.
02:54On peut parler d'incandescence aussi, des faits.
02:56Oui, et puis on en parlait toutes les deux.
02:58En fait, ce n'est pas un hasard, parce qu'on a vu haine en ligne.
03:02Et puis on a vu monter les gilets jaunes.
03:03Et puis on a vu la colère des agriculteurs.
03:05Et puis on entendait tout le temps ce mot état d'urgence.
03:08Le monde politique lui-même, maintenant, est devenu comme le climat, en état d'alerte orange.
03:12Récemment, il y a quand même eu viol, injures.
03:15Toute cette notion aussi de débat enflammé, et c'est normal, autour de l'antisémitisme.
03:20Vous vous souvenez que là encore, le public est resté, mais sidéré,
03:24face au récent calvaire d'une petite fille de 12 ans, victime d'un viol antisémite.
03:28Les événements sont rudes, durs.
03:31Il y a des violences monstrueuses et elles sont régulières.
03:34Donc, pas étonnant.
03:36On le voit bien, d'ailleurs, même avec la notion de front.
03:38On s'affronte, on se confronte.
03:40Et le front suscite un peu, et génère parfois, un état guerrier.
03:45Une eurodéputée écologiste a dit, le président lui-même jette de l'huile sur le feu.
03:50On a l'impression que c'est un cercle infernal.
03:52Et les Français sentent que ça chauffe.
03:54Regardez, moi qui adore les verbes,
03:56un verbe très important qui pourrait annoncer les flammes de l'enfer,
03:59c'est diaboliser et dédiaboliser.
04:02On a cessé de l'utiliser.
04:04Je trouve qu'on l'a quand même entendu pas mal.
04:06Oui, on n'a pas arrêté de l'utiliser, c'est ça que je voulais dire.
04:09D'autres mots encore qui sont liés à ce champ un peu lexical,
04:13liés à l'extrême ou l'extrémisme ?
04:15On a pu en parler, parce qu'au départ, vous dites,
04:17le mot extrême n'a pas une part positive.
04:19Ce sont les JO.
04:20Vous voyez, dans les Jeux Olympiques qui sont en train d'avoir lieu,
04:23on doit être au plus haut, on doit être au-delà du médiocre.
04:26Et les grands sportifs, eux-mêmes, cherchent les performances extrêmes.
04:29C'est là.
04:30C'est une autre forme.
04:31Oui, mais les mots ont toujours ce sens pluriel.
04:33Et finalement, ils prennent leur sens souvent dans un contexte.
04:37Et en fait, qu'est-ce qu'on constate ?
04:39On est quand même dans une société qui aime énormément la démesure.
04:43D'ailleurs, à un moment donné, on parlait aussi de soif de radicalité,
04:46de radicalisme.
04:47C'est la même idée.
04:49Pourquoi ce mot, finalement, nous fascine ?
04:53Parce qu'il y a une fascination autour de la notion d'extrême, en fait, Jeanne.
04:57Je ne sais pas.
04:58Je ne sais pas si...
04:59Je pense qu'on adore se faire peur.
05:01Et vous voyez, il y a un homme qui est souvent cité pour ses citations,
05:05c'est Georges Bernard Shaw.
05:06Il avait dit « la peur pousse les hommes à n'importe quelle décision extrême ».
05:11Donc, au fond, pour conclure, souvenons-nous aussi que le président de la République
05:15n'a pas cessé de dire pendant la campagne « n'ayez pas peur ».
05:19Donc, on voit que ce climat d'intensité dont on parlait dès le début,
05:23il est entretenu, et par bien des biais, bien des phrases,
05:26et bien des personnes qui, presque malheureusement, là-dessus et sur ce mot,
05:30sont toujours toutes en train d'utiliser.
05:32Ce n'est pas pour autant qu'elles sont d'accord.
05:34C'est ça.
05:35La peur sur les peurs, ce n'est pas nouveau, finalement, en politique.
05:38La peur du loup.
05:39La peur du loup. Voilà pour ce décryptage, encore une fois.
05:41Merci pour vos lumières, Jeanne Bordeaux, Madame Langage,
05:43à réécouter en podcast sur sudradio.fr.
05:45Et on vous retrouve le week-end prochain. Merci, Jeanne.
05:47À la semaine prochaine. Au revoir.

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