• il y a 3 mois
Interview exclusive de Xavier Beulin

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Transcription
00:00D'abord, une première question. Est-ce que vous allez vous représenter pour un nouveau mandat à la tête de la FNSEA ?
00:12Je vais solliciter une candidature pour le conseil d'administration. Après, on verra si le conseil me fait confiance ou pas.
00:19A priori, oui, je pense que j'annoncerai à ce congrès ma candidature pour un nouveau mandat. J'ai fait un peu plus de 3 ans.
00:27Bon, 3 ans, c'est à la fois déjà pas mal, mais c'est un peu court peut-être pour porter les ambitions et les objectifs qui sont les miens.
00:34Justement, pour y faire quoi, un nouveau mandat ?
00:36Un nouveau mandat parce qu'on a lancé pas mal de choses depuis plusieurs mois, en particulier la volonté de réinscrire l'agriculture dans une perspective dynamique, volontariste,
00:48une marche en avant, comme je dis souvent. C'est un secteur qui est très porteur aujourd'hui à la fois sur la scène internationale.
00:54La demande alimentaire est considérable. On a des problèmes à régler en interne, problèmes de compétitivité, des problèmes de normes, de simplification.
01:02Mais on a aussi, je pense, la capacité à relever ces défis pour peu qu'on libère un peu les énergies, pour peu aussi qu'on quitte finalement un état d'esprit qui est un peu pessimiste dans ce pays.
01:13Il y a d'ailleurs une phrase que j'emprunte à Hubert Védrine qui a dit récemment que les Français étaient pessimistes,
01:20non pas à cause de leur handicap, mais ils étaient souvent handicapés par leur pessimisme.
01:26Ça veut bien dire ce que ça veut dire. Donc on a besoin là-dessus, sans doute, de redonner des perspectives.
01:30Et de ce point de vue-là, à la fois le congrès qui va se tenir, les états généraux qui ont été quand même un marqueur fort et qui vont durer,
01:37et puis le Centre d'agriculture qui a redonné, je pense, une vraie perspective, en tout cas, où l'accueil par nos concitoyens était d'une nature différente de ce qu'il fut les années précédentes,
01:48en particulier dans cette relation d'une agriculture qui génère aussi du progrès, de la modernité, qui génère des valeurs ajoutées,
01:55qui se rapproche aussi peut-être du citoyen et du consommateur. En tout cas, ce sont des belles ambitions, je trouve.
02:01Quel bilan vous faites plus globalement de vos 3 ans à la FNSA ?
02:06C'est un bilan forcément contrasté. On a vécu, et ça a été accentué au cours de ces 3-4 dernières années, de fortes volatilités sur les marchés agricoles, de fortes perturbations.
02:18On a aussi des difficultés quand même aujourd'hui à remettre la France, et j'insiste beaucoup sur cette dimension plutôt transversale, à remettre la France sur de bons rails.
02:27Autrement dit, une France qui doit retrouver confiance en elle-même, qui doit régler ses problèmes internes.
02:33Moi, je suis surpris et parfois stupéfait de faire des constats aussi simples que le fait que nos concurrents aujourd'hui ne soient plus des concurrents transatlantiques ou océaniens, par exemple,
02:44et qu'ils soient à nos portes. Ça montre bien qu'on a des faiblesses chez nous à régler, mais ces faiblesses, il ne faut pas les traiter comme une fatalité.
02:51On peut agir. Le pacte de responsabilité qui a été annoncé par le chef de l'État, nous allons y prendre notre part.
02:58Mais là aussi, quand on parle d'investissement, quand on parle de recherche et d'innovation, quand on parle d'un effort sur les charges, en particulier sur les charges sociales,
03:08qui pèsent aujourd'hui sur la compétitivité, notamment des filières animales ou des filières spécialisées, fruits et légumes plus particulièrement,
03:14on voit bien que sur ces sujets-là, on a quelques leviers sur lesquels on peut agir.
03:18Je note quand même que nous avons mené une bataille très forte et constante pour garder une PAC en Europe avec un budget,
03:25avec capacité aussi de redonner du sens à cette PAC, notamment sur la notion de recouplage.
03:31Tout ça, c'est plutôt à mettre au crédit quand même de notre action professionnelle.
03:35Le gouvernement a changé. Est-ce que c'est plus facile que prévu de travailler avec des socialistes qui connaissent les questions agricoles, qui maîtrisent leurs sujets ?
03:46J'ai envie de dire qu'il y a trois niveaux. Il y a d'abord le président de la République qui donne un cap.
03:51Si on a senti pendant les premiers mois de sa mandature pas mal d'hésitations et sans doute aussi des gâches qu'il fallait donner à celles et ceux qui l'ont élu,
04:01on voit bien aujourd'hui qu'il y a un virage important qui est pris. Moi, ça me satisfait de ce point de vue-là.
04:07Ensuite, vous avez le niveau gouvernemental. Plus difficile. Pourquoi ? Parce qu'on ne sent pas dans ce gouvernement une solidarité ou en tout cas une connivence interministérielle.
04:18On a besoin de ça aujourd'hui. Nous, nous travaillons avec plusieurs ministères.
04:21L'agriculture et l'environnement, par exemple ?
04:23L'agriculture et l'environnement, mais pas seulement. Les ministres de Bercy nous concernent aussi. Le ministre du commerce extérieur, évidemment.
04:32Les deux, celui du budget et celui de l'économie et des finances. Mais au-delà de ça, on sent parfois quelques difficultés à harmoniser les positions.
04:41Et du coup, ça fait peser sur l'environnement politique ou politique et administratif des lenteurs, parfois des retards dans l'exécution des décisions.
04:52Tout ça n'est pas très bon. Ce que nous demandons aujourd'hui, notamment quand nous attaquons la simplification administrative ou les normes,
04:58c'est de prendre en compte des orientations politiques qui sont décidées au plus haut niveau et qui doivent trouver leur traduction sur le terrain.
05:05Il n'est pas normal aujourd'hui que sur beaucoup de sujets, on allonge les délais, on complique, on tracasse de plus en plus les acteurs.
05:13Enfin, tout ça n'est pas tout à fait normal.
05:15Et puis ensuite, vous avez un troisième niveau, c'est la relation entre ce qu'on appelle la société civile et la société civile organisée, dont nous faisons partie, et puis les pouvoirs publics.
05:24Et parmi les pouvoirs publics, bien sûr le gouvernement, mais les collectivités territoriales, qui sont aussi pour nous des interlocuteurs de plus en plus importants.
05:32Je rappelle quand même que la future PAC, pour partie, va être régionalisée, ce qui nous renvoie de fait à notre propre organisation.
05:39Comment faire en sorte qu'avec les jeunes agriculteurs, avec les chambres d'agriculture, avec la coopération, nous nous organisions aussi de manière plus formelle encore, plus efficace, au niveau régional,
05:50pour justement pouvoir être en situation de discussion et de négociation sans doute meilleure qu'elles ne le sont aujourd'hui.
05:58Selon un sondage réalisé en ligne sur Ternet, 67% des agriculteurs veulent le départ de Stéphane Le Foll à la suite du remaniement.
06:06Vous, vous souhaitez voir Stéphane Le Foll rester au ministère ?
06:13Moi, je souhaite surtout que nous ayons des interlocuteurs avec qui nous puissions échanger de manière équitable, que nos revendications soient prises en compte, que nous soyons entendus.
06:24J'attends aussi qu'on ait un ministère qui fasse le lien, et ce n'est pas toujours facile, je l'admets, mais de manière verticale, c'est-à-dire de l'amont à l'aval de l'agriculture.
06:35Ça, c'était une demande que j'avais exprimée au premier ministre dès qu'il a été nommé, M. Hérault, à savoir un ministère de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
06:42Ça me semblait essentiel. La deuxième dimension très importante aussi pour nous, c'est évidemment la dimension territoriale.
06:49Et de ce point de vue-là, ce que nous attendons, nous, d'un ministre de l'agriculture, c'est qu'il soit porteur de la grande diversité d'agriculture française.
06:56La caractéristique dans notre pays, ce n'est pas d'avoir un type d'agriculture, mais c'est d'avoir des agricultures qui répondent à une demande elle-même très diversifiée, très variée,
07:05qui va du produit de proximité avec une relation directe producteur-consommateur à des filières très longues, très internationalisées,
07:14qui va de l'agriculture biologique jusqu'au conventionnel, qui passe par tous les spectres des grandes cultures, de l'élevage, des productions spécialisées,
07:24et qui a quand même cette caractéristique que n'ont aucun autre secteur, c'est-à-dire la capacité aussi de jouer un rôle d'aménageur, notamment dans nos territoires ruraux.
07:35On voit bien que là où il n'y a plus d'agriculture, au sens de la production agricole, très souvent, le territoire se meurt.
07:42Donc ça reste quand même un socle, un pilier pour la France, et de ce point de vue-là, il nous faut des ministres qui comprennent tout ça, qui jouent le jeu,
07:50qui soient certes dans une dimension politique, on ne peut pas leur en vouloir, mais qui sachent aussi appréhender les sujets techniques,
07:58parce que nous avons beaucoup de questions techniques à régler aussi en agriculture.

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