Réseau €colait
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00:00Nous sommes sur le plateau de la Space Ternet Web TV, pour une émission spéciale du club
00:12Prix du Lait de webagri.fr. Nous sommes en compagnie de Gérard Sido, qui est directeur
00:18du BTPL, le Bureau Technique de la Promotion Laitière, pour évaluer une grande question
00:24sur les conditions de travail pour bien vivre dans son métier de producteur laitier aujourd'hui,
00:32et donc notamment s'appuyer sur les résultats des fermes du réseau écolé.
00:37Alors déjà, bonjour M. Sido, qu'est-ce que c'est que ce réseau écolé ?
00:43Ce réseau écolé a été créé en 1981. C'est pour nous aujourd'hui un fil rouge
00:50pour accompagner les producteurs de lait au pilotage de leur exploitation. C'est un
00:57outil. Derrière cet outil, il y a toute une démarche et une philosophie auxquelles
01:02on tient beaucoup pour accompagner ces agriculteurs. C'est à la base un outil de l'INRA, du
01:10Laboratoire d'économie et de sociologie de Grignion, que nous avons développé au
01:15sein du BDPL.
01:16D'accord. Et donc c'est un réseau de fermes ? Il y a un peu tous les systèmes qui viennent
01:21de la plaine, de la montagne ?
01:23Absolument. Ce réseau est national. Aujourd'hui, il représente à peu près 900 exploitations
01:28de tous les systèmes de production et dans beaucoup de départements, pratiquement 70
01:32départements.
01:33Et donc l'objectif, c'est de voir qu'est-ce qui fait la différence au niveau économie,
01:38quels sont les leviers économiques ? C'est de comparer des systèmes, de comparer plein
01:45de fonctionnalités différentes ?
01:47Tout à fait, au niveau des troupeaux. C'est vraiment un outil de pilotage, un tableau
01:51de bord qui est proposé à l'agriculteur pour bien optimiser le fonctionnement de son
01:57atelier laitier.
01:58D'accord. Et donc quels sont les leviers qu'on distingue ?
02:04Déjà, tout d'une chose, on va parler économie, chiffres, les composantes, en précisant bien
02:11qu'aujourd'hui, dans la promotion du métier, il y a bien évidemment cet aspect revenu,
02:15mais il y a toute la dimension du bien-vivre et du bien-être de l'agriculteur. On pourra
02:19y revenir tout à l'heure, un petit peu à la fin. Sur les chiffres et sur les données,
02:25on parle aussi beaucoup aujourd'hui du prix du lait. C'est une donnée importante, incontournable,
02:31indispensable.
02:32Ça fait le revenu, ça l'explique en partie ?
02:34En partie.
02:35En partie seulement.
02:36C'est quoi le parti ?
02:37Alors, justement, les enseignements qu'on a dans notre réseau, c'est justement, si
02:41vous voulez, de bien montrer aux agriculteurs qu'il y a différents leviers sur lesquels
02:45on peut travailler. Et j'aime bien qu'on parle, nous, nous aimons bien parler revenu, parce
02:51que c'est ça qui est important pour un producteur de lait. Son travail, évidemment, et gagner
02:55sa vie. Donc, dans le revenu, il y a trois composantes importantes. C'est les volumes
03:01produits sur l'exploitation ou par unité de main-d'oeuvre. C'est effectivement les
03:08produits, ce sont les produits, pardon ?
03:09Donc, les produits qu'on vend.
03:11Les produits que l'on vend. Il y a effectivement le prix du litre de lait en études, mais
03:14il n'y a pas que le prix du litre de lait. Il y a les vaches de réforme, il y a les
03:17veaux, il y a les aides, etc. Et puis, ensuite, il y a effectivement les charges. Et dans
03:24les charges, on a effectivement les charges opérationnelles, qui sont un des facteurs
03:28importants, et bien les maîtriser, et les charges dites de structure. Donc, un producteur
03:34de lait peut avoir différentes combinaisons pour avoir un bon revenu. Et le prix du litre
03:40de lait explique une partie, mais seulement une partie du revenu.
03:44Et sur les volumes, il y a des choses qu'on peut comparer ?
03:46Alors, comparable, je crois que c'est plutôt observer les écarts que l'on a à travers
03:53ce réseau. Alors, c'est selon les régions. Est-ce qu'on est en zone de montagne ? Est-ce
03:57qu'il y a une densité forte des exploitations ? Est-ce qu'il y a eu du lait libéré ? L'envie
04:01du producteur d'être dynamique, de vouloir accentuer sur les volumes. D'autres, au contraire,
04:06qui préfèrent ne pas augmenter les volumes parce qu'ils ont un équilibre sur leur exploitation,
04:11qui remettraient tout en cause. Mais on a aujourd'hui des unités de production qui
04:16peuvent aller de 150 000 litres de lait par unité de main d'oeuvre à 450 000 litres
04:21de lait par unité de main d'oeuvre. Donc, des écarts très importants.
04:24Donc, pour un même éleveur, il y en a qui produisent 150 000 litres et d'autres 450 000 litres.
04:28Le même éleveur, c'est-à-dire la diversité que l'on observe aujourd'hui dans ce réseau, oui.
04:32Donc, ça veut dire qu'ils travaillent jour et nuit, ces éleveurs-là ?
04:34Non, absolument pas. Non, non, absolument pas.
04:36C'est quoi le secret, alors ?
04:37Il y a effectivement la rationalisation d'un certain nombre de tâches. Et il y a des tâches
04:41qui sont confiées à d'autres, qui peuvent être effectivement des CUMA, des entreprises,
04:48de l'entraide, etc., etc.
04:50Externaliser un certain nombre...
04:51Externaliser, voilà.
04:52Pour se concentrer sur le troupeau.
04:53Absolument.
04:54Absolument.
04:55D'accord.
04:56Donc, il y a vraiment différentes façons. Mais c'est un des leviers. Mais ça, c'est du choix personnel
05:00de chaque agriculteur. Mais c'est un levier important.
05:03Et sur le prix des produits, notamment du lait, puisque c'est le thème de l'émission,
05:06qu'est-ce qui fait la différence ?
05:09Alors, les produits. Donc, dans les produits, il y a le prix du lait, évidemment.
05:12Et en ce moment, on en parle beaucoup et on en parlera de plus en plus.
05:16Ce que l'on peut dire, c'est que les écarts sont toujours très importants au sein même
05:21de la même laiterie. On sait qu'aujourd'hui, pour les problèmes liés à la qualité du lait,
05:27à la saisonnalité, régularité du lait, on a des écarts du prix du litre de lait
05:32qui peuvent être aujourd'hui, en moyenne, entre les 10% des éleveurs les plus élevés
05:37au sein de la coopérative ou les 10% les moins élevés, de l'ordre de 50 centimes sur un an.
05:44Donc, c'est non négligeable.
05:47Il y a la qualité, les cellules, les butyriques, la lipolyse, la matière grasse, la protéine, etc.
05:54Donc, c'est non négligeable.
05:56Et donc, sur la saisonnalité aussi.
05:58Et sur la saisonnalité aussi, avec des grilles qui sont en train de se réécrire pour répondre
06:02à la demande des laiteries, puisqu'on veut aujourd'hui une production de plus en plus régulière
06:09tout du long de l'année.
06:11Alors, ça c'est un des facteurs.
06:12Il y a aussi les autres éléments qui sont les vaches de réforme, qui sont la vente des veaux, etc.
06:17Alors, un chiffre...
06:18La valorisation du produit viande.
06:19Voilà, le produit viande de l'atelier laitier.
06:22Juste un chiffre pour dire aujourd'hui, la mortalité, par exemple, des veaux.
06:26On ne parle pas souvent de ces facteurs-là.
06:28Aujourd'hui, nous, dans le réseau, on est presque de 12%.
06:3112% de mortalité.
06:32En moyenne.
06:33Ça veut dire qu'on a des gens à 5%, 5-6%.
06:35Il y a toujours un peu de mortalité, mais vous avez des gens à 16, 17, 18%.
06:40Si ça arrive une année, personne n'est à l'abri de maladies, de problèmes, etc.
06:45Mais il y a des gens où c'est des fois un petit peu récurrent.
06:47Donc, il y a des marges de ce côté-là.
06:49Et les vaches de réforme, c'est pareil.
06:51Vous avez des vaches de réforme, il y a des écarts de plus de 200€ de valorisation sur des vaches de réforme.
06:55De moyenne, par troupeau.
06:57Et qu'est-ce qui est observé au niveau des différents niveaux de charges dans les réseaux écolés ?
07:01Notamment, charges opérationnelles, charges de structure.
07:03Quelles sont les grandes observations ?
07:07Au niveau des charges opérationnelles, là, effectivement, il y a des écarts.
07:10Donc, les charges opérationnelles, en deux mots, c'est tout ce qui concerne l'alimentation.
07:14Donc, les achats d'aliments, les concentrés, etc.
07:17La production des fourrages, tous les frais généraux, l'insémination, contrôle laitier, etc.
07:22La cotisation écolée, puisque ce n'est pas gratuit, il faut le dire, etc.
07:26Donc, tous ces charges-là sont de l'ordre, si vous voulez, aujourd'hui, entre 35-36% en moyenne sur les troupeaux.
07:34Mais vous avez des gens qui sont bien inférieurs à ça,
07:37et puis des gens qui sont nettement supérieurs en pourcentage de charges opérationnelles
07:41par rapport à le produit de l'atelier laitier.
07:43Donc, ça représente un peu plus d'un tiers, quoi.
07:45Oui, absolument.
07:46Mais avec, là aussi, des écarts importants dans la valorisation, dans le coût de l'alimentation,
07:51les frais sanitaires, etc.
07:53C'est le professionnalisme du producteur.
07:56D'accord. Et sur les charges de structure, il y a des grosses différences.
07:58Notamment, je pense à la mécanisation.
08:00Structure, également, de très gros écarts qui sont liés, effectivement, à la mécanisation,
08:05à la stratégie et à la politique de chaque agriculteur,
08:08avec, pour certains, de l'exagération, on peut le dire,
08:12mais il y a des gens qui se réalisent à travers ça.
08:15C'est leur droit, c'est leur choix, il faut assumer.
08:18Quand ça va bien, pas de problème.
08:20Quand c'est plus difficile, il faut l'assumer.
08:22C'est aux gens de faire.
08:23Et dans les bâtiments, aussi.
08:25Pour certains, un choix d'investir un peu plus pour avoir des possibilités d'agrandir demain.
08:30D'accord. Et alors, comment l'éleveur peut, à partir de tout ça,
08:33identifier un peu son équilibre à lui, son propre équilibre ?
08:37C'est à chacun de choisir quelles sont ses priorités, quelle est sa stratégie.
08:41Et pour ça, on s'appuie beaucoup sur la dynamique de groupe.
08:44C'est-à-dire qu'on souhaite que les...
08:46Enfin, c'est la base de la démarche écolée,
08:48c'est que les agriculteurs viennent échanger entre eux en réunion.
08:53Et nous, nous apportons de la méthodologie, de la réflexion, de l'animation,
08:57mais c'est surtout un échange entre les agriculteurs.
09:00Apprendre avec les autres.
09:02Ça, c'est très important.
09:04Et ça permet aux agriculteurs de ne pas rester isolés chez eux.
09:10Et quelque chose qu'on dit souvent, un éleveur isolé est un éleveur en danger.
09:16Donc aujourd'hui, avec la charge de travail, etc.,
09:20il faut tout faire pour que l'agriculteur sorte de chez lui, aille voir ce qu'il se passe.
09:24Donc créer des petits groupes de discussion entre éleveurs.
09:27Au niveau de la région et en dehors de la France.
09:29S'entourer, quoi.
09:30Absolument.
09:31Et si on parle à une échelle plus européenne,
09:33notamment je pense au réseau européen EDF,
09:37donc le European Dairy Farmer,
09:39comment les éleveurs européens de différents pays perçoivent notre filière laitière française ?
09:47Ça, c'est un réseau qui est formidable.
09:49On parlait d'ouverture avant.
09:50Que les gens sortent de chez eux.
09:51Il faut aller voir ce qu'il se passe en dehors de nos frontières.
09:53Mais ça, on est un peu trop franco-français.
09:55Pas que les agriculteurs.
09:57Ce qui est important, c'est d'aller voir que chez eux, ils ont aussi des difficultés.
10:01L'herbe n'est pas toujours plus verte chez eux.
10:03Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent.
10:05Et les étrangers nous envient pour un certain nombre de points.
10:09Il faut le dire.
10:10Oui, absolument.
10:11La première, c'est la valeur ajoutée de notre filière laitière.
10:14On a beaucoup de valeur ajoutée, de bons produits, une diversification.
10:18C'est quand même une richesse.
10:19On oublie de le souligner.
10:20Grâce à nos fromages, c'est ça ?
10:22Exactement.
10:23La deuxième chose, c'est l'espace.
10:27On est en Europe, les terres les moins chères d'Europe.
10:31On est moins contraints avec l'environnement, etc.
10:34Et ils nous envient par rapport à ça.
10:36Je pense qu'ils ont des atouts, nous en avons.
10:40Mais on n'a aucun complexe à faire.
10:44La filière laitière française a encore de l'avenir ?
10:46Absolument.
10:47Je suis passionné par ça depuis longtemps.
10:50Ce qui est dans nos métiers de conseiller, c'est d'accompagner les personnes.
10:55Je pense qu'aujourd'hui, il y a des fois un mal-vivre, un manque de perspective, etc.
11:02Mais je pense qu'il faut travailler beaucoup cette dimension humaine.
11:05Elle est essentielle demain.
11:07Et il y a plein de perspectives positives.
11:09Super.
11:10Merci Gérard Sidot.
11:11Merci.
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