• il y a 5 mois
Les pèlerinages de Tradition à Chartres connaissent un succès qui laisse de nombreux observateurs sans voix. Rémi Fontaine a été l’un des fondateurs, il y a plus de 40 ans, du très populaire Pèlerinage de Notre-Dame de Chrétienté qui a accueilli plus de 18 000 "marcheurs de Dieu" à la Pentecôte 2024.
Dans un livre témoignage "Chartres t’appelle", Rémi Fontaine évoque l’histoire de ce "Czestochowa national", des portes closes de la Cathédrale en 1983 à l’accueil chaleureux d’évêques ou de cardinaux au fur et à mesure des années. L’auteur explique aussi les raisons profondes de la réussite de cette aventure extraordinaire au cœur de l’Eglise qui travers une grande crise. Comme le rappelle, dans sa postface, le président de Notre-Dame de Chrétienté, Jean de Tauriers : "Notre époque est difficile, mais le Bon Dieu n’abandonne pas son Eglise et nous sommes coriaces". Le livre de Rémi Fontaine le montre et en apporte la preuve.

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00:00Dans les semaines et les mois à venir, TVL va avoir un rôle prépondérant, indispensable.
00:06Alors, nous comptons sur votre engagement. Libérons-nous des chaînes.
00:10Merci de votre soutien, maintenant.
00:30Il est journaliste. Il est l'un des fondateurs du pèlerinage de Chrétienté,
00:42plus connu sous le nom du dorénavant très médiatisé pèlerinage de Chartres.
00:46Et il vient de publier Chartres t'appelle, préfacé par l'abbé Jean de Macia
00:52et postfacé par le président du pèlerinage de Chrétienté, Jean de Taurier.
00:56Rémi Fontaine, bonjour.
00:58Bonjour, Martial.
00:59Vous avez le bronzage du pèlerin de cette année.
01:01Exactement, qui a beaucoup chanté aussi.
01:03Qui a beaucoup chanté. Vous, vous.
01:05Vous titrez, ou sous-titrez plutôt l'ouvrage,
01:07Une Pentecôte de Chrétienté.
01:09Mais qu'est-ce que cela veut dire concrètement ?
01:12La Pentecôte, c'est la fête du Saint-Esprit.
01:15C'est l'ascenseur du Saint-Esprit sur les apôtres.
01:17Et donc, c'est fêté le week-end de Pentecôte,
01:20où il y a trois jours qui nous permettent d'aller de Paris à Chartres.
01:23Et une Pentecôte de Chrétienté, parce que la Chrétienté, on en parlera peut-être davantage,
01:27c'est le caractère propre du pèlerinage.
01:29Un pèlerinage de Chrétienté, c'est-à-dire qui veut rayonner dans la cité,
01:33selon la fameuse parole de Charles Péguy,
01:36il faut que France, il faut que Chrétienté continue.
01:39Et aujourd'hui, je dirais même ressuscite,
01:41parce que la Chrétienté n'existe plus vraiment.
01:43Dites-moi, avant de revenir sur ce pèlerinage,
01:46j'ai omis de vous indiquer que cet ouvrage est publié aux excellentes éditions via Romana,
01:51et qu'il est donc dorénavant en vente sur le site TVL.fr.
01:55Vous allez dans la boutique de TVL, sur le site TVL.fr, mais vous en avez l'habitude.
02:00Alors, l'esprit d'origine du pèlerinage, qui en 2024, en était à sa 42e édition.
02:07C'est quoi l'esprit d'origine ?
02:09Eh bien, je donne en exergue la citation du père Sevin, le fondateur des Scouts de France,
02:16qui dit, il est bon, pour ne pas vieillir, de se retremper dans l'esprit de ses origines.
02:22Et il ajoute, je ne le cite pas, mais il ajoute,
02:24hors notre esprit, au présent, c'est un esprit de croisade, ou bien nous n'y sommes plus.
02:29Eh bien, je pense que l'esprit d'origine, c'est un peu un esprit de croisade,
02:35à l'appel du pape Jean-Paul II, du tout nouveau pape Jean-Paul II,
02:40qui avait été élu en 78 avec ses mots fameux, n'ayez pas peur.
02:44Et son premier voyage apostolique, il l'avait consacré à la France,
02:49en interpellant notre nation,
02:52France, fille aînée de l'Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ?
02:56Il avait également interpellé notre jeunesse, vous devez vous en souvenir,
03:00Martial, au Parc des Princes, en disant, jeune homme, lève-toi, jeune fille, lève-toi,
03:05les paroles de l'Évangile, et surtout, il avait dit, la permissivité morale ne rend pas heureux.
03:10Et dans le même temps, la même année, le centre Henri et André Charlier était fondé,
03:16du nom de deux grands convertis au catholicisme, Henri Charlier, le sculpteur,
03:21Abide Rodin, mais aussi de Péguy, et André Charlier, l'éducateur, le directeur de l'École des Roches.
03:27Et dans l'esprit de Bernard Antoni, qui avait fondé ce centre Charlier,
03:32c'était un esprit de reconquête culturelle et d'amitié française.
03:39On évoque quasiment les caractéristiques du pèlerinage, est-ce qu'elles sont les mêmes dans la durée ?
03:44Là, vous parlez de la création, j'ai bien compris,
03:47est-ce que les intuitions qui étaient au départ fixées par les organisateurs,
03:51et vous, les fondateurs de ce pèlerinage, est-ce qu'elles ont perduré, est-ce qu'elles ont duré dans le temps ?
03:56Oui, alors, on connaît maintenant très bien les trois piliers du pèlerinage,
04:01chrétienté justement, tradition et mission, mais je voudrais insister sur une caractéristique
04:06qui est là depuis le début, c'est que c'est un pèlerinage qui a été conçu, organisé et dirigé par des laïcs.
04:14Et donc, ça a permis d'éviter ce que le pape François appelle aujourd'hui un certain cléricalisme,
04:20un mauvais cléricalisme, car il y a un bon cléricalisme, heureusement.
04:23C'était pour se préserver du cléricalisme ?
04:25Oui, parce qu'en externe, déjà, parce qu'il y avait quand même une pression assez forte,
04:29vu que nous nous situons dans un courant traditionnel,
04:32et même en interne, ça nous a permis d'une certaine concorde, d'une certaine longétivité,
04:37parce que nous pensons qu'il y a une grâce d'État liée aux laïcas,
04:42pas seulement à la jeunesse, comme le disait André Charlier,
04:44mais aux familles, et particulièrement aux parents,
04:47qui ont le devoir de transmettre à leurs enfants la foi qu'ils ont eux-mêmes reçue de leurs parents.
04:53Alors, chrétienté, on comprend bien le terme, mission, on le voit bien,
04:56parce qu'on a des marcheurs de Dieu qui partent donc en mission.
04:59La notion de tradition, qu'est-ce qu'elle recouvre exactement ?
05:02Et là, ceux qui, bien évidemment, sont de tradition vont vous expliquer facilement cela,
05:07ceux qui ne connaissent pas vont vous dire, sont des gens attachés à la messe en latin.
05:10Est-ce que c'est suffisant comme expression de ce qu'est la tradition ?
05:13C'est déjà une première approche, mais qui n'est peut-être pas suffisante, effectivement.
05:16Vous savez qu'après le Concile, il y a eu un vent de révolution culturelle, on peut dire,
05:25après 68 également, il y a eu une conjonction de causes,
05:28et qu'il y a eu un chamboulement des abus liturgiques.
05:31Et à l'époque, nous inscrivions dans la demande de Mgr Lefebvre,
05:37qui disait, laissez-nous faire l'expérience de la tradition.
05:41Et donc, ça comprenait ce qu'on appelle aujourd'hui les pédagogies traditionnelles de la foi,
05:46à savoir le bon catéchisme, la messe en latin, la messe traditionnelle, la messe de Saint-Pycinque,
05:53et puis des traductions correctes aussi, parce que les traductions étaient pas mal aussi abîmées après le Concile.
06:01On comprend tradition, on comprend mission, on va quand même parler de chrétienté,
06:04et on voit qu'il y a des caractéristiques qui restent aussi dans ce pèlerinage,
06:07par exemple, même si le terme est devenu un peu désuet, la piété filiale.
06:12Oui, parce que tout de suite, nous sommes inscrits dans une continuité historique,
06:18il y a le préambule historique de Yves Chiron qui rappelle un peu tout ça,
06:22il y a une préhistoire, entre guillemets, du pèlerinage ancienne et récente,
06:27ancienne, ça remonte aux Druides, parce qu'ils vénéraient la Vierge qui allait en fonter,
06:31et puis il y a Saint-Louis, qui était un grand pèlerin de Chartres,
06:34et puis plus récemment, il y a eu évidemment Péguy, qui a ressuscité le pèlerinage de Chartres,
06:40et qui a donné naissance aussi au pèlerinage étudiant, qui a eu aussi une grande importance en son temps,
06:47mais à la suite de cette révolution post-conciliaire,
06:52le pèlerinage, l'esprit du pèlerinage est un peu tombé en désuétude, est devenu obsolète,
06:57et il restait quelques sentinelles, individuelles ou collectives,
07:02qui gardaient, transmettaient le flambeau, je pense notamment aux Scouts,
07:06par exemple aux Scouts d'Europe qui continuaient à aller à Chartres,
07:08aux MJCF, le mouvement de la jeunesse catholique de France,
07:11ou certaines paroisses, comme en se disant Charles, à Montmartre,
07:14qui continuaient à entretenir l'esprit du pèlerinage étudiant.
07:18Et nous, nous avons voulu reprendre cette tradition en l'appliquant à tous,
07:24d'où l'esprit de chrétienté, pas un pèlerinage corporatiste, entre guillemets,
07:29de jeunes ou d'étudiants, mais ouvert à tous, les jeunes, les anciens, les paysans,
07:34les ouvriers, les étudiants, d'où l'expression d'un de nos aumôniers,
07:40le pèlerinage pour tous, comme la manège pour tous.
07:44Est-ce qu'il n'y a pas aussi des inspirations qui viennent peut-être de l'étranger,
07:47par exemple de l'Est de l'Europe, dont Gérard, qui est le fondateur
07:51du grand monastère du Barou, a parlé lui d'un Gestorova national.
07:56Donc il y avait quand même l'idée d'aller copier Rémy Fontaine ?
08:00Copier, non, mais s'inspirer effectivement du pèlerinage.
08:04Moi-même, avec quelques amis, je suis allé au fameux pèlerinage de Jasnagora,
08:08Jastochowa, donc en Pologne, en 82, c'était l'état de siège décrété
08:12par le général Jaruzelski, et avec ses amis, nous avons été subjugués,
08:17nous avons été émerveillés par une chrétienté en marche,
08:20par un peuple religieux qui était en plein pays communiste,
08:23mais qui n'avait pas peur d'aller vers son sanctuaire national.
08:26Et Jastochowa a été vraiment une source d'inspiration, comme d'autres.
08:32Je parlais de Péguy, bien sûr des charliers, les scouts aussi ont beaucoup compté
08:36dans l'inspiration du pèlerinage, et puis le menu de Saint-Loup,
08:41où est née l'idée du pèlerinage.
08:43Il y a aussi encore un pèlerinage étudiant, organisé au départ de Paris.
08:46Alors le pèlerinage d'étudiant a toujours continué,
08:50mais s'est pas mal étiolé à une certaine époque,
08:52et a remis pas mal en cause de certains fondamentaux,
08:56d'où effectivement notre initiative pour répondre à un besoin certain.
09:02Dans la préparation de cette émission, vous m'avez dit,
09:05ce pèlerinage a aussi un rôle social et politique.
09:08Alors je me suis dit, la politique dans un pèlerinage,
09:12ça ne colle pas, si vous me permettez l'expression,
09:14et il m'a dit, ben oui, parce que moi je revendique l'importance du Christ-Roi.
09:18Alors on n'est pas véritablement dans l'aspect social et politique
09:21que je comprenais au départ.
09:23Alors c'est une bonne question, effectivement, parce que c'est souvent mal compris.
09:27C'est pas un pèlerinage politique au sens politicien,
09:31nous ne sommes pas des partisans,
09:33nous suivons la doctrine sociale de l'Église,
09:36et particulièrement la doctrine du Christ-Roi.
09:40Nous allons fêter l'an prochain le centenaire de l'encyclique
09:44Quas Primas de Pionze,
09:47et nous sommes conscients, comme Lepa-François le rappelle souvent,
09:50du reste que la chrétienté n'existe plus,
09:52que nous sommes minoritaires, comme disait aussi Benoît XVI,
09:55une minorité active, mais justement notre théologie politique,
10:01pour reprendre l'expression de Mgr Demoulin-Beaufort,
10:04notre théologie politique, elle est en fait très évangélique et très simple,
10:09c'est la parabole du terrain et de la semence.
10:12C'est-à-dire que pour que la semence, la bonne nouvelle puisse prendre,
10:15il faut qu'elle trouve un terrain favorable, une culture favorable.
10:19Et si elle ne trouve pas cette culture propice,
10:22eh bien il faut faire ce que Benoît XVI appelait une contre-culture,
10:26qu'il appelait également des îlots de chrétienté, des oasis de chrétienté,
10:30où les chrétiens puissent respirer et rayonner leur foi.
10:35Benoît XVI, ça nous amène aussi directement à deux premières questions.
10:40La première question, c'est comment se déroule ce pèlerinage
10:45qui a connu en quelques années deux discours venant du Vatican différents,
10:52celui de Benoît XVI et aujourd'hui, celui peut-être moins charitable,
10:56c'est le moins qu'on puisse dire, du pape François.
10:58Comment vous vivez cela ?
11:00Ça nous laisse très perplexes.
11:03Effectivement, le pèlerinage est né dans des conditions difficiles.
11:07Il y avait une hostilité manifeste qui s'est transformée en tolérance aux signés,
11:13mais quelques fois aussi par une bienveillance fraternelle
11:15de certains évêques et de certains cardinaux.
11:17Et même, je dois dire que les deux papes précédents,
11:21Jean-Paul II et Benoît XVI,
11:23manifestaient quand même une bienveillance fraternelle, paternelle vis-à-vis du pèlerinage.
11:29On a eu la bénédiction apostolique de Jean-Paul II dès la première année.
11:33Benoît XVI suivait attentivement ce pèlerinage.
11:35Et pour nous, le mutu proprio de Benoît XVI
11:40qui rendait la liberté et le droit de citer de la messe traditionnelle aux catholiques
11:45c'était effectivement une grâce, une bénédiction.
11:48Mais pas seulement pour nous les catholiques traditionnels,
11:50je pense pour l'Église, c'était pour le bien commun de l'Église.
11:53Et c'est pour ça qu'on a difficilement compris le nouveau mutu proprio
11:58qui, heureusement, n'est pas appliqué de manière caporaliste ou cléricaliste
12:04par un certain nombre d'évêques.
12:06Beaucoup d'évêques continuent à nous accueillir favorablement.
12:12Mais il y a quand même un certain retour en arrière,
12:17un comeback, comme on dit en anglais,
12:19qui nous chagrine pas mal.
12:22Mais qui mobilise.
12:24Ce qui est surprenant, c'est qu'on pourrait se dire
12:27que dès lors qu'il y a une volonté de récession de la tradition,
12:30ça pourrait se répercuter sur les troupes, entre guillemets.
12:32Or, c'est tout le contraire.
12:35J'allais même dire, le pape François a tellement fait de pubs
12:38que vous êtes à 20 000 participants
12:41parce que vous ne pouvez pas en mettre 40 000.
12:43Et sinon, il y en aurait 40 000 quasiment.
12:44Exactement, c'est ça qui est assez paradoxal.
12:46Providentiel, parce que ça dépend pas de nous.
12:48Mais il y a un principe qu'aime bien citer justement le pape François
12:52qui dit que la réalité est supérieure à l'idée.
12:56Or là, on a un principe de réalité,
12:58on a une résilience, une résurgence même de la messe traditionnelle
13:02qui attire non seulement beaucoup de familles, mais les jeunes
13:06qui sont attirés par cette transcendance, ce sens du sacré.
13:11Et là, je pense que devant cette réalité, on devrait s'incliner
13:15et au moins permettre, comme disait Jean-Paul II
13:22au début de son pontifica à propos des traditionnalistes,
13:25je pense notamment aux catholiques qui avaient occupé
13:28l'église de Saint-Nicolas du Chardonnay,
13:30il disait, laissez-les prier.
13:32Pourquoi empêcher de prier selon ce mode qu'ont connus nos ancêtres,
13:38ce rite qui a sanctifié nos ancêtres,
13:41et c'est ce problème de l'interdiction ou de la restriction
13:44qui nous pose problème.
13:46On demande simplement de vivre avec ce charisme
13:50qui attire manifestement beaucoup de jeunes aujourd'hui.
13:52Qui attire, et ce qui est intéressant aussi,
13:54c'est que ce pèlerinage est resté un vrai pèlerinage,
13:56c'est-à-dire qu'on y marche, qu'on y reçoit le soleil,
14:00beaucoup de pluie souvent,
14:02et que ce soit dans des conditions quand même assez difficiles,
14:05même les plus jeunes sortent au bout de trois jours
14:07aguerris mais aussi fatigués.
14:09Oui, et c'est ça aussi la grâce de ce pèlerinage
14:13et le succès providentiel qui doit sans doute
14:18un soutien de Notre-Dame, de Chartres,
14:23et de la Saint-Spérance.
14:25Le père Emmanuel qui était le curé du milieu de Saint-Loup,
14:28là où est née l'idée, qui était une sorte de saint curé d'Ars
14:31et qui a transformé son village en village de chrétienté,
14:36en le plaçant sous le vocable de Notre-Dame,
14:39de la Saint-Espérance, disait
14:41vous avez une montagne de péchés,
14:43faites une montagne de prières et de pénitences.
14:46Et donc c'est le principe du pèlerinage.
14:48Et cette pénitence, ces jeunes qui marchent,
14:51vous savez ce que c'est que de marcher pendant trois jours
14:54dans des conditions difficiles,
14:56les scouts connaissent cela aussi,
14:58c'est quand même difficile,
15:02mais j'aime comparer le pèlerinage à un vaisseau marial
15:07dans le temps qui a ses ancres dans le ciel
15:10par la pénitence et la prière.
15:12Et vous connaissez la fameuse chanson du Goffret,
15:15c'est un fameux trois mâts.
15:17Donc il y a trois grandes voiles,
15:20la chrétienté, la tradition et la mission.
15:24Et on est fiers, non pas d'y être matolos,
15:27dans ce vaisseau, mais d'y être pèlerins
15:29et d'arriver, non pas jusqu'à San Francisco,
15:32mais jusqu'à Chartres et au-delà de Chartres,
15:34jusqu'à la communion des saints,
15:36parce que finalement le symbole du pèlerinage,
15:39c'est de pouvoir rejoindre le paradis.
15:41Et c'est pour ça que nous ne prétendons pas
15:44être des pèlerins d'hier, ni non plus de demain.
15:47Nous sommes vraiment des pèlerins d'aujourd'hui.
15:49Pèlerin, ça veut dire en latin étranger,
15:52peregrini, étranger, étranger au monde,
15:56dans l'exacte mesure où l'esprit du monde
15:58est étranger à Dieu.
16:00Donc nous nous inscrivons tout à fait
16:02dans le thème de l'année sainte qui aura lieu en 2025
16:05et qui a pour thème pèlerin de l'espérance,
16:07parce que l'espérance, elle se situe
16:09au niveau surnaturel, bien sûr.
16:11L'espérance, parlons-en quand même.
16:13Là aussi, il y a l'attitude de l'Église de France.
16:15On a parlé du Vatican et des papes successifs
16:18et à venir, mais l'Église de France,
16:21elle a aussi modifié son point de vue
16:23à l'égard de ce pèlerinage.
16:24Est-ce que cette puissance des marcheurs de Dieu
16:26a ouvert les yeux ?
16:27Toujours est-il qu'on apprend dans votre ouvrage,
16:29on l'oubliait, qu'en 1983, les milliers de pèlerins
16:31qui arrivent devant la cathédrale de Chartres
16:34trouvent porte close.
16:36L'évêque a fait fermer les portes.
16:38Oui, oui, mystère, mystère d'iniquité.
16:41Effectivement, alors que nous réclamions
16:44en fidèle du rang, du banc simplement,
16:48de pouvoir prier comme nos pères avaient prié.
16:51À la suite, il reste pas mal d'abus liturgiques
16:54et de scandales dans l'Église
16:56avec la crise du catéchisme, etc.
16:58Mais ça nous était refusé par une espèce
17:02de ce que Jean Madiran appelait un caporalisme
17:06et ce que le pape François appelle un caricalisme.
17:08Mais vous voyez qu'il y a une certaine...
17:12Enfin, les deux mots sont synonymes.
17:16Non, je ne comprends pas pourquoi...
17:20Qu'il y ait d'autres demeures dans la maison du Père,
17:23pourquoi pas, mais pourquoi empêcher cette demeure-là ?
17:26Alors, il y a des évêques qui continuent aujourd'hui.
17:28On le voit en Bretagne, par exemple,
17:30à empêcher, j'allais dire de manière caporaliste même,
17:33des mestes de tradition,
17:35évasant les prêtres de la Fraternité Saint-Pierre,
17:38je crois, si je ne me trompe pas.
17:40Est-ce que vous, vous bénéficiez aujourd'hui,
17:43donc, alors, de quoi ?
17:44D'une bienveillance, d'une mensuétude,
17:46d'une complicité ?
17:48Les portes de Saint-Sulpice,
17:50en attendant Notre-Dame de Paris,
17:52vous sont ouvertes.
17:53Les portes de la cathédrale sont ouvertes.
17:55Les évêques, l'évêque de Chartres
17:57est présent parmi vous.
17:59Quel est son comportement ?
18:00Quel est le comportement général ?
18:01Le comportement est varié et divers,
18:03selon les évêques.
18:04Il y a beaucoup d'évêques
18:05qui ont une bienveillance fraternelle,
18:07il faut le reconnaître,
18:08mais d'autres qui sont encore
18:10dans une oscillité incompréhensible.
18:12Et quels sont les rapports de force ?
18:14Le rapport de force, Rémi Fontaine,
18:16c'est quoi ?
18:17Le rapport de force joue, évidemment,
18:19je vous parlais du principe de réalité,
18:21devant ce pèlerinage
18:22qui est en croissance permanente,
18:23avec des jeunes de plus en plus nouveaux
18:25qu'on découvre.
18:26Ce ne sont pas uniquement des catholiques
18:28qui sont nés dans la marmite,
18:29comme on dit,
18:30ce sont des catholiques
18:31qui découvrent l'Ancien Rite,
18:35qui pratiquent le Nouveau Rite,
18:37qui découvrent l'Ancien Rite,
18:38soit c'est même des convertis qui viennent,
18:41et même des gens d'autres religions qui viennent
18:43et qui découvrent quelque chose
18:45de ce que Péguy avait découvert à Chartres finalement,
18:49ce sens du sacré,
18:51et via un esprit filial,
18:54via un sens de la tradition,
18:57via un respect des pères,
18:58via un respect du magistère,
19:00et avec des laïcs
19:03qui ne prétendent pas être des clercs
19:06et des clercs
19:07qui ne prétendent pas être des laïcs.
19:09Donc chacun a sa fonction.
19:11Vous dites dans l'ouvrage
19:12que le pèlerinage a connu une histoire providentielle
19:14avec différents mystères,
19:16les mystères douloureux,
19:17les mystères joyeux
19:18et les mystères glorieux.
19:19Moi je vais rester sur ceux qui sont joyeux
19:21et aussi glorieux.
19:22C'est quand même le fait
19:23qu'on a du mal à comprendre,
19:27mais vous allez me dire que c'est très simple,
19:30le retentissement actuel
19:32de ce pèlerinage de chrétienté,
19:33c'est-à-dire un retentissement en nombre,
19:36mais aussi d'ailleurs dans le regard
19:38que les médias portent sur ce pèlerinage
19:40qui est un regard, disons-le aujourd'hui,
19:43de plus en plus bienveillant,
19:44même s'il n'est pas encore celui qu'il faudrait,
19:47mais au moins une curiosité médiatique,
19:49on va dire cela,
19:50et tout cela dans une France qui se déchristianise,
19:53je ne vous l'apprends pas,
19:54dans laquelle les pertes des valeurs
19:56et des repères sont très importantes,
19:59dans une France macronisée
20:01et donc déréglée.
20:04Ça veut dire effectivement
20:05que ce pèlerinage répond à un besoin
20:08de notre jeunesse en recherche de transcendance,
20:12mais aussi de notre population
20:15qui a besoin d'une vraie religion transcendante
20:19et aussi qui a besoin d'identité,
20:23et par sa résurgence, comme je le disais,
20:29ou par sa résilience,
20:30ce pèlerinage est un peu un reproche vivant
20:34de notre comportement.
20:38D'ailleurs, c'est un verset du livre de la Sagesse
20:42qui parle d'un comportement
20:45qui insupporte, d'un comportement des croyants
20:48qui insupporte certains adversaires.
20:51Et c'est mystérieux,
20:53mais je ne comprends pas pourquoi,
20:55encore une fois,
20:56il ne s'agit pas de faire du triomphalisme,
20:57nous sommes tous des pauvres pécheurs,
20:59nous avons certainement des imperfections,
21:01mais devant cette montagne de prières
21:05et de sacrifices qui durent depuis plus de 42 ans,
21:08pourquoi toujours cette espèce de méfiance,
21:12cette espèce, alors qu'il y a une joie manifeste,
21:14il y a des grâces immenses,
21:15les aumôniers pourraient en parler davantage que moi,
21:18mais il y a une grâce qui recouvre ce pèlerinage
21:20depuis le début.
21:22Pourquoi empêcher ce…
21:29J'ai même eu vent par un article
21:31dans la presse catholique d'un évêque
21:33qui avait parlé d'interdire le pèlerinage.
21:35Mais pourquoi interdire le pèlerinage ?
21:37Que ce soit sous un mode ou sous un autre,
21:39c'est quand même un pèlerinage
21:41qui réunit autant de monde,
21:42il vient pour toucher la frange de la bille de Jésus,
21:46c'est des sacrements, c'est toucher Jésus.
21:48Et que ce soit par ce côté justement traditionnel,
21:52c'est quand même admirable.
21:54Et pourquoi vouloir l'interdire ?
21:56En 42 ans,
21:58vous avez été un des fondateurs de ce pèlerinage,
22:0042 ans plus tard, vous regardez cela
22:02en se disant que cela continue à progresser,
22:05que la relève était là,
22:06mais Jean de Taurier doit se dire aussi de son côté,
22:09puisqu'il est l'actuel président,
22:10et quand est-ce que la relève sera là ?
22:13Est-ce que cette relève, elle existe ?
22:15Déjà ?
22:16Oui, oui, la relève…
22:17Ce n'est pas une inquiétude ça ?
22:18La relève, elle existe, évidemment.
22:21D'ailleurs, nous avons beaucoup d'attachements
22:24à certaines figures,
22:26comme Guy de la Rigaudie ou le père Doncker.
22:28Et vous savez peut-être que le père Doncker
22:30était aumônier militaire,
22:32et il avait été marqué par la mort tragique
22:35d'un petit lieutenant qui avait été envoyé au front.
22:38Et dans son agonie, il l'accompagnait,
22:43et le petit lieutenant disait
22:44« Est-ce que ça suit, monsieur l'aumônier ?
22:46Est-ce que ça suit ? Est-ce que ma section suit ? »
22:48Il en avait fait une question muette
22:50à l'adresse de toutes les générations,
22:52en posant « Est-ce que ça suit ?
22:54Est-ce qu'on sera fidèles ?
22:56Est-ce qu'on sera dignes des sacrifices de nos aînés ? »
22:59Je peux dire, et d'ailleurs c'est ce que dit
23:01l'abbé Jean de Massia dans sa préface, gentiment,
23:04« Ça suit, monsieur l'aumônier, ça suit. »
23:06J'ai une dernière question.
23:08Elle est aussi importante.
23:09Est-ce qu'un jour, le pèlerinage qui va de Chartres à Paris,
23:12et qui est aussi un pèlerinage de tradition,
23:14et qui aussi regroupe des milliers de personnes,
23:17est-ce que ça pourrait être un seul et même pèlerinage ?
23:20On est encore 20 ans plus tard dans la difficulté.
23:23Eh bien, nous l'espérons.
23:24Et figurez-vous que cette année, j'étais justement
23:27à la messe de rencontres, parce qu'il y a une rencontre,
23:29ce qu'on appelle une rencontre entre les deux pèlerinages.
23:32Il y a un chapitre des martyrs de septembre,
23:36dont le chef du chapitre était notre ami Jacques Arnoux,
23:39chef du chœur monjoie à Saint-Denis.
23:42Et après les sacres, il a instauré cette rencontre
23:46avec deux parties du chapitre, qui s'étaient scindées en deux.
23:50Et cette année, la messe était dite par le père Argouache.
23:52Et donc, chaque année, il y a une rencontre amicale, ponctuelle,
23:58mais dans l'espérance d'une réconciliation prochaine.
24:00Donc, nous y croyons.
24:02C'est bien d'y croire, surtout chez vous.
24:04Deuxième dernière chose importante.
24:06Est-ce qu'en 2025, le pèlerinage partira de Notre-Dame de Paris,
24:10et non pas de Saint-Sulpice, pour les raisons que l'on sait,
24:12bien évidemment ?
24:13Est-ce que ça, c'est quelque chose qui est programmé
24:15dans une cathédrale Notre-Dame de Paris,
24:17qui aura été entièrement restaurée,
24:20comme l'est la cathédrale de Chartres,
24:22qui elle aussi a subi ou a connu une très belle restauration,
24:26somptueuse restauration intérieure ?
24:28Est-ce que ça aussi, ce ne sont pas des signes d'un renouveau ?
24:32Alors, je ne suis plus organisateur,
24:34donc je ne peux pas répondre à cette question,
24:36mais je le souhaite ardemment, effectivement,
24:38qu'on puisse partir de Notre-Dame de Paris
24:40pour arriver à Notre-Dame de Chartres.
24:42C'est le but de ce pèlerinage,
24:44mais voilà, après, il faut faire avec les nécessités du temps,
24:49et aussi la hiérarchie, donc on verra bien,
24:51mais j'espère que ça pourra se faire, oui.
24:54Et qu'après les terribles incendies,
24:57ou l'épreuve des années,
24:58ces cathédrales existent et brillent de mille feux,
25:01ou brilleront de mille feux, on l'espère.
25:03Ça aussi, c'est un signe qui n'est pas anodin,
25:06pas anecdotique.
25:08Bon, alors, merci beaucoup Rémy Pincette.
25:10Je vous remercie.
25:11Chartres t'appelle,
25:12un pentecôte, une pentecôte, bien sûr, pardon,
25:14de Chrétienté, ses auditions via Romana.
25:17Et puis, ce que l'on peut dire,
25:19c'est que si on n'a pas fait le pèlerinage de Chartres,
25:21il faut le faire.
25:22Voilà, merci beaucoup Rémy Fontaine.
25:23Merci.

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