À l'occasion de l'édition spéciale "Élections législatives", Dimitri Pavlenko reçoit Jean Garrigues, historien, président du Comité d’histoire parlementaire et auteur de "Jours heureux. Quand les Français rêvaient ensemble" chez Payot Histoire. Ensemble, ils font le bilan de cette campagne des élections législatives.
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00:00On va soumettre un cas concret à un spécialiste de ces choses-là, Jean Garrigue.
00:04Je me tourne vers vous. Alors, je vais prendre un cas très concret.
00:07Il est question, en ce moment, que la Corée du Nord envoie l'équivalent d'une division
00:13se battre en Ukraine aux côtés de la Russie. On parle de 15 000 hommes, vous voyez ?
00:16Donc ça, évidemment, ça change un peu la donne peut-être sur le plan strictement militaire.
00:19On sait que Jordan Bardella refuse l'envoi de troupes au sol français,
00:22ce que souhaite le Président de la République, en tout cas qu'il ne l'exclue pas.
00:25Qu'est-ce qui se passe concrètement si, demain,
00:28j'ai un Jordan Bardella à Matignon face à Emmanuel Macron à l'Élysée
00:32et qu'on se retrouve dans cette configuration politique ?
00:35Il se passe que le Président de la République est le chef des armées,
00:39mais que le Premier ministre dispose des forces armées.
00:42Et qu'en dépit de la doctrine du domaine réservé,
00:46qui finalement a beaucoup fonctionné au moment des trois autres cohabitations,
00:51qui ont été des cohabitations plutôt réussies d'ailleurs,
00:55en dépit de cette doctrine-là, en réalité,
00:58le dernier mot revient toujours au Premier ministre en période de cohabitation
01:03parce qu'il peut s'appuyer sur sa majorité parlementaire
01:06et contourner, par le domaine de la loi, la volonté présidentielle.
01:12Je ne vais pas entrer dans les détails.
01:13Ce qui s'est passé dans les précédentes cohabitations,
01:16c'est que sur les enjeux majeurs de politique internationale
01:19ou de politique de défense, ce dont on parle là,
01:22il y avait un accord entre les deux grands partis d'alternance.
01:27On arrivait à avoir une concordance,
01:31notamment par le truchement des secrétaires généraux de l'Elysée
01:36et des directeurs de cabinet du Premier ministre
01:38qui souvent étaient en parfaite harmonie.
01:42Ça s'est produit à plusieurs reprises.
01:44J'ai étudié ça dans un livre.
01:45Et ce qui se passerait là, en revanche, si vous voulez,
01:50c'est qu'on a, mais vous l'avez souligné,
01:52on est en présence avec le Rassemblement national
01:55d'un personnel politique qui n'a jamais été au pouvoir,
01:59qui a des positions a priori assez radicales
02:03sur un certain nombre de questions,
02:05notamment sur les rapports avec la Russie de Vladimir Poutine
02:09et sur la question de l'Ukraine.
02:11Et donc, à mon sens, on risque d'avoir des tensions extrêmes.
02:16Et ces tensions, elles ont été résolues dans la pratique
02:21précisément par cette capacité de convergence, de synthèse
02:25qui s'est faite du temps de Mitterrand, de Chirac, de Jospin
02:30et encore de Chirac.
02:32Mais aujourd'hui, il y aura forcément une crise.
02:36Il y aura une crise, je ne sais pas si ce sera une crise de régime,
02:40mais il y aura des tensions très très fortes
02:42et c'est très compliqué.
02:45Demandez aux constitutionnalistes,
02:47aucun n'est capable de vous dire ce qui pourrait en sortir précisément,
02:51qui finalement pourrait avoir le dernier mot a priori.
02:55Il n'y a pas de notice, il n'y a que des rapports de force.
02:57C'est intéressant.