• il y a 6 mois
Jean-Philippe Tanguy (RN), Éric Coquerel (LFI) et le ministre Roland Lescure débattent de la situation économique de la France, à 13 jours de la fin de campagne des législatives dans le Live Switek.

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Transcription
00:00Roland Lescure, tout le monde autour de cette table, je pense, promet de rapprocher le salaire net du salaire brut. Comment vous faites ?
00:06– Bon d'abord, la première manière d'augmenter les revenus des gens, c'est quand même qu'ils aient un boulot.
00:12La baisse du chômage qu'on a enregistrée depuis 7 ans, elle est historique.
00:15Moi j'ai grandi pendant des décennies de chômage de masse,
00:18on est aujourd'hui avec le plus de Français qui travaillent à jamais.
00:24On n'a jamais eu autant de Français qui travaillent en France grâce à notre politique.
00:28Ensuite, évidemment, il faut que les salaires augmentent.
00:32Plus l'emploi est fort, plus les salaires augmentent,
00:35plus l'activité est forte, plus les salaires augmentent.
00:37Il faut qu'on aille au-delà.
00:39Ce qui est vrai, c'est qu'aujourd'hui, si je décide, moi employeur,
00:43d'augmenter la rémunération de mes salariés de 100 euros,
00:47il y en aura 30 ou 40 seulement qui rentreront dans la poche de mes salariés.
00:51Donc ça, c'est ce qu'on appelle l'écart entre le salaire brut et le salaire net.
00:54Et pour ça, il faut pouvoir baisser les cotisations sociales.
00:57Ce qu'on a commencé à faire, il va falloir continuer à le faire,
01:00mais à une condition, c'est qu'on tienne les dépenses publiques.
01:03Parce que si vous baissez les recettes d'un côté pour donner du pouvoir d'achat,
01:07mais que vous augmentez les dépenses comme l'un et l'autre envisagent de le faire,
01:10soit via de la baisse de la TVA qui ne servira à rien,
01:12soit des hausses de dépenses exceptionnelles qu'il faudra bien financer,
01:17vous perdez à gauche ce que vous gagnez à droite.
01:19Donc oui, il faut baisser l'écart entre salaire brut et salaire net,
01:23mais il faut aussi être extrêmement rigoureux sur la dépense publique
01:26et c'est ce qu'on fera.
01:27– Baisser les cotisations.
01:28Vous, votre réponse, Eric Coquerel, c'est d'augmenter le SMIC.
01:30– Ce n'est déjà pas de baisser les cotisations,
01:32parce que ça, baisser les cotisations, c'est mettre dans la poche de quelqu'un
01:37en lui prenant dans l'autre.
01:38Parce que je rappelle que les cotisations, nous, nous appelons ça un salaire différé.
01:41C'est-à-dire que c'est la part de salaire que les travailleurs,
01:46notamment au moment de l'invention de la Sécurité sociale,
01:48ou autres, ont décidé de collectiviser pour assurer les gens
01:52au niveau de la vieillesse, du chômage, de la sécurité.
01:54Donc on ne touche pas à la question des cotisations.
01:56On y reviendra certainement tout à l'heure.
01:57– Oui, vous les augmentez les cotisations de vieillesse.
01:59– On y reviendra tout à l'heure dans le financement.
02:00– On verra tout à l'heure, on parlera des impôts.
02:02– Moi, je crois qu'il faut regarder globalement ce qui se passe
02:04depuis quelques années, depuis trentaine d'années,
02:05et plus encore depuis que M. Macron a été élu.
02:08C'est que le partage des richesses, la manière dont on utilise la plus-value
02:12dans ce pays, a considérablement migré des revenus du travail
02:16vers les revenus du capital.
02:17Et le pire de ça, c'est que ça a migré vers les revenus du capital non investi,
02:21c'est-à-dire les dividendes et les rachats d'action.
02:22Rendez-vous compte que depuis 2017, on a multiplié par deux
02:26le montant des dividendes et des rachats d'action.
02:28– Mais sur le SMIC, il y a 1 600 euros d'actualité.
02:30– Oui, mais j'y viens, chacun a sa logique.
02:34Moi, ma logique est totalement inverse de M. Lescure.
02:36Donc, si vous ne me laissez pas expliquer…
02:37– Allez-y, allez-y.
02:39– Donc, on est passé, pour les entreprises du CAC 40, de 50 à 98 milliards.
02:43Ça, ça coûte de l'argent collectivement, parce que ça a été des cadeaux fiscaux,
02:46parce que c'est de l'argent qui ne rejaillit pas dans l'économie.
02:48Il y a toutes les études là-dessus qui sont d'accord,
02:51y compris France Stratégique, directement à Matignon.
02:54Et évidemment, comme le partage des richesses se fait d'un autre quelqu'un,
02:57on a pris sur les salaires.
02:58Donc, nous, ce que nous disons, c'est qu'il faut reprendre une partie de cet argent
03:02qui, quelque part, est dilapidé au profit de quelques-uns.
03:05Notamment, par exemple, savez-vous qu'aujourd'hui,
03:08on a 150 milliardaires dans ce pays qui payent moins de 2% d'impôt sur le revenu ?
03:11– Mais sur les 1 600 euros net.
03:12– Eh bien, donc, je vous explique, il faut remigrer vers les revenus du travail.
03:16Et les revenus du travail, c'est par exemple, effectivement,
03:18monter le SMIC de 1 600 euros net.
03:191 600 euros net, c'est par exemple, 8% d'augmentation du SMIC cette année, d'accord ?
03:25Et par rapport à 2017, je vous ai fait un rapport avec les dividendes,
03:27c'est une augmentation d'environ 35%.
03:29Eh bien, moi, je préfère augmenter le SMIC de 35%
03:32que d'augmenter les dividendes de fois deux
03:34et de permettre, avec ce partage des richesses, ce mécanisme,
03:37par la fiscalité et le partage de la plus-value,
03:39de contribuer à revaloriser les salaires.
03:42Et vous savez une chose, ça va être bon pour la consommation populaire,
03:45ça va être bon pour l'activité économique.
03:47Jean-Philippe Tanguy, augmenter le SMIC pour le mettre à 1 600 euros net ?
03:50On aimerait tous pouvoir augmenter le SMIC,
03:52les Français méritent un de ces meilleurs salaires,
03:55mais ce n'est pas possible pour les entreprises aujourd'hui.
03:57Alors d'ailleurs, dans le programme, et si j'ai bien compris,
04:00du Nouveau Front Populaire, il y a une espèce de caisse de répartition
04:02où les hausses pour les petites entreprises seraient compensées par les très grosses.
04:05Enfin, ça me paraît, les multinationales, ça me paraît extrêmement compliqué
04:08et je pense que ce n'est pas adapté à la situation.
04:10Moi, je pense qu'il faut d'urgence donner un coup d'air aux salariés
04:15en permettant aux entreprises de faire des accords salarials dans une entreprise,
04:19une hausse de salaire de 10% d'un coup,
04:21sans charge sur la hausse de salaire seulement,
04:23pour 5 ans, le temps qu'elles gagnent les marchés
04:25et qu'elles accélèrent leur activité pour pouvoir payer les cotisations.
04:28Le problème, c'est 6 accords dans une entreprise, plus 10% de salaire, sans charge.
04:32Voilà, tous les mêmes salariés d'une entreprise,
04:35pour ne pas qu'il y ait d'effet d'aubaine,
04:36qu'on augmente quelqu'un qu'on voulait augmenter avant,
04:37pour qu'il y ait aussi de la solidarité évidemment dans l'entreprise,
04:39pour que ça concerne jusqu'à 3 SMIC,
04:41aussi bien les salariés au SMIC que les classes moyennes
04:43qui se sentent toujours écartés de ce genre de mesures.
04:45Et dans un deuxième temps, il faut évidemment,
04:47lors d'une grande conférence sociale,
04:49aussi avec les autres partis politiques s'ils le souhaitent,
04:51mettre à plat effectivement l'échelle des cotisations sociales.
04:53Vous avez deux trappes à basse salaire aujourd'hui,
04:56une trappe autour du SMIC,
04:57qui fait qu'effectivement si vous augmentez quelqu'un qui est au SMIC de 100 euros,
05:00ça coûte entre 300 et 500 euros de pouvoir d'achat pour l'entreprise,
05:04et donc il n'y arrive pas à le faire.
05:06Et de l'autre côté, autour de 2 SMIC et demi,
05:08vous avez aussi une nouvelle trappe
05:09qui ne permet pas de passer aux classes moyennes supérieures.
05:12Mais ça, on ne peut pas le faire tout seul.
05:14C'est-à-dire qu'il y a un moment,
05:15les coups de baguette magique au moment des élections,
05:17où on dit on va baisser les charges,
05:18oui mais ça ne veut rien dire.
05:19– Vous voulez le faire avec qui ?
05:20– C'est là où il faut faire une grande conférence sociale
05:21avec les acteurs économiques, avec les syndicats,
05:24avec les forces du travail et de l'entreprise,
05:26pour comprendre comment on peut sortir de ces trappes à basse salaire.
05:29Mais moi j'alerte les Françaises et les Français,
05:30sur ceux qui vous promettent qu'un problème aussi structurel
05:33de la vie politique française qui dure depuis 50 ans,
05:35que les trappes à basse salaire,
05:36peut être résolu à 50 ans, c'est mauvais signe à mon avis.
05:43– 1600 euros l'un d'un côté, plus 10% sans cotisation de l'autre.
05:45– 1600 euros.
05:47Évidemment, ce sont des petites entreprises qui vont payer ça,
05:50puisque vous savez que beaucoup de salariés au SMIC
05:51sont dans les petites entreprises.
05:52Dans les grandes entreprises industrielles,
05:54les salaires sont en fait au-delà du SMIC.
05:56Puis par ailleurs, passer sa vie,
05:58ce que vous faites depuis des décennies,
06:00on n'est pas d'accord idéologiquement là-dessus,
06:02à diviser les entreprises des salariés,
06:07revient évidemment à réinventer la lutte des classes en France,
06:10en utilisant des données qui ne sont pas tout à fait justes,
06:12sur longue période, le rapport des profits entre travail et capital,
06:17il est à peu près constant en France.
06:18Et il l'est notamment depuis 2017.
06:20Il y a des années où ça va mieux pour les uns,
06:22il y a des années où ça va mieux pour les autres.
06:23Le SMIC a augmenté plus en France que nulle part ailleurs en Europe
06:27depuis 3 ans, parce qu'il est indexé sur l'inflation d'ailleurs.
06:31C'est ce qui produit une hausse du SMIC,
06:33et la fameuse trappe à basse salaire dont parlait effectivement M. Tanguy,
06:37qui fait que la hausse du SMIC ne se traduit pas pour tous les autres salaires.
06:41Nous, on a une mesure très simple à court terme.
06:44La prime Macron, qui a fonctionné très bien,
06:47on la porte à 10 000 euros.
06:48Ça veut dire que dès cette année, les entreprises qui le peuvent,
06:52parce qu'évidemment, les entreprises qui ne peuvent pas,
06:55si vous faites la hausse du SMIC, elles mettront la clé sous la porte,
06:58elles n'augmenteront pas les salaires.
06:59Les entreprises qui le peuvent, 10 000 euros net de charge pour leurs salariés,
07:03ça a très bien fonctionné depuis 4 ans, on va continuer à le faire.
07:07– Eric Coquerel, pour répondre sur les 1 600 euros net,
07:09on veut dire que c'est les entreprises qui ont payé.
07:11À la fois Jean-Philippe Tanguy et Roland Lessure sont d'accord là-dessus,
07:13mais les entreprises paieraient avec les 1 600 euros net.
07:14– Oui, 1 600 euros net et aussi les salaires indexés sur l'inflation
07:17pour que les salariés perdent moins.
07:19– Vous avez 40 secondes pour répondre.
07:20– Je vous explique, non pas 40 secondes, M. Lessure.
07:22– Il y a une petite pause derrière.
07:24– Aujourd'hui, il y a, en 2019, donc ça a dû augmenter depuis,
07:28il y a 223 milliards d'aides aux entreprises,
07:30soit par exonération, soit d'aides directes, d'accord ?
07:33Sans condition, ce qui veut dire que par exemple,
07:36les entreprises de CAC 40 qui utilisent ces aides,
07:38notamment pour verser des dividendes, comme je vous l'ai versé,
07:40sont traitées du même niveau que des entreprises qui sont verteuses,
07:44qui créent de l'emploi, qui créent des salaires.
07:46Nous, ce que nous proposons, c'est de revisiter ça, de remettre ça à plat
07:49et de faire en sorte que les entreprises qui, dans un premier temps,
07:52en attendant le choc de la demande, parce que vous avez compris
07:55que la politique que nous entendons mener, ça va créer de la consommation,
07:59ça va créer de l'activité économique et on y reviendra tout à l'heure également
08:02sur les budgets nécessaires pour la transition écologique
08:05qui font vivre aussi des entreprises.
08:07En attendant ça, c'est ces entreprises qu'on aidera.
08:10Alors ça peut se prendre par deux formes, soit effectivement
08:12une caisse de péréquation comme nous l'avons mis sur la table,
08:14mais ça peut se mettre aussi sur des choix ciblés d'aides aux entreprises
08:17dans des secteurs très concurrentiels pour aider à passer ce choc.
08:20Voilà comment on compte le faire.
08:22Mais aujourd'hui, le gouvernement est champion depuis quelques années
08:25de l'argent versé à des entreprises sans aucune condition,
08:28dont une partie est dilapidée dans des dividendes.
08:30Et ça, notre économie n'a plus d'égalité.

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