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00:00 Bonjour Stéphanie, une image que vous commentez aujourd'hui, il est toujours question de cette gauche qui se mobilise, c'était le cas notamment dimanche soir au moment de l'annonce de la dissolution par Emmanuel Macron.
00:12 Oui alors j'ai choisi une photo qui a été prise au lendemain de l'annonce de la dissolution, c'est une photo qui a été prise le 10 juin lors d'une manifestation à Lille.
00:20 Donc très vite après l'annonce de la dissolution et la poussée de l'extrême droite lors des élections européennes, il y a eu des appels à un rassemblement de gauche, notamment par le député de la France Insoumise François Ruffin,
00:31 qui a été le premier à utiliser ce terme de front populaire, d'autres membres de parti de gauche ont aussi invoqué ce passé.
00:38 Donc on a vu ce slogan fleurir un peu partout dans les manifestations comme sur ce panneau juste derrière moi.
00:44 Et finalement ce même 10 juin, cet appel a abouti à la constitution d'un nouveau front populaire pour faire barrage à l'extrême droite.
00:51 Et dans un communiqué commun, les différents partis de gauche se sont engagés à soutenir des candidatures uniques dès le premier tour des prochaines élections législatives.
01:00 Voilà ce front populaire dont on parle beaucoup finalement ces derniers jours, il fait référence évidemment au passé, nous fait remonter une centaine d'années en arrière,
01:07 il nous fait penser à cette coalition qui avait permis justement de prendre le pouvoir, c'était en 1936, pouvez-vous nous rappeler peut-être comment elle s'était constituée à l'époque ?
01:16 Oui donc en garde en tête l'année 1936, mais il faut revenir quelques années en arrière, au début des années 30.
01:23 Alors à l'époque l'union de la gauche était vraiment improbable, les partis de gauche étaient particulièrement divisés, d'un côté on avait les socialistes de la SFIO,
01:32 et de l'autre le parti communiste, c'était vraiment des frères ennemis. Au début des années 30, on était dans la période de classe contre classe de l'international communiste,
01:41 qui parlait des sociotraites en parlant des socialistes, et de l'autre côté les socialistes dénonçaient les moscoutaires,
01:47 donc qui voulaient dire que les communistes étaient aux ordres des soviétiques à Moscou.
01:52 Mais il y a plusieurs événements qui vont finalement changer un peu la donne, à partir de 1931, la France est touchée à son tour par la grande dépression,
02:00 la crise de 1929, il a fallu quelque temps pour qu'elle arrive jusqu'en France, et là, à ce moment là, il y a une grave crise économique,
02:06 la production industrielle chute, il y a beaucoup de faillite en France, le chômage grimpe, et dans ce contexte d'incertitude sociale,
02:14 c'est alors qu'il y a d'autres acteurs qui rentrent en jeu, c'est les ligues d'extrême droite qui s'en prennent alors au régime parlementaire,
02:20 et finalement il y a un événement qui fait basculer les choses, c'est le 6 février 1934, c'est une grande manifestation de ces ligues d'extrême droite,
02:27 devant la chambre des députés, on voit les images derrière moi, et cette manifestation tourne à l'émeute, il y a une quinzaine de morts et des milliers de blessés,
02:35 et là, les parties de gauche perçoivent cette manifestation comme un coup de force fasciste, et comme les suites de ce qui s'est passé en Allemagne,
02:43 avec l'arrivée au pouvoir d'Hitler, en Italie avec Mussolini, et là la gauche décide de s'unir pour faire fond commun contre ce risque fasciste,
02:53 face à l'urgence de la patrie en danger, c'était les termes qui étaient employés à l'époque, et donc, après tous ces différents,
02:59 les communistes et les socialistes décident alors de s'unir, ils commencent à défiler ensemble, il y a rapidement des manifestations,
03:05 quelques jours après le 6 février 1934, et à partir du mois de juillet, les deux parties, l'SFIO et l'EPC, signent un pacte d'unité d'action antifasciste,
03:15 et ils sont rejoints, à ce moment-là, par le parti radical, qui lui était plutôt positionné centre-droit à l'époque,
03:21 et ils décident de se rassembler finalement, tous ces trois parties, sous la même bannière, et c'est là que le Front Populaire se crée,
03:28 et se structure autour d'un slogan devenu célèbre, qui est "Pain, Paix et Liberté".
03:33 Voilà pour les origines de ce Front Populaire, qui finalement sont à recouper avec ce qui se passe aujourd'hui, des divisions au départ,
03:40 et une unité par la suite, une coalition qui va remporter une nette victoire aux élections législatives, là on est en 1936, 386 députés sur 608 sièges à la Chambre des députés.
03:53 Oui, alors c'est alors que Léon Blum, qui était le chef de file de ce Front Populaire, forme un gouvernement de coalition,
03:59 mais dans le même temps, il y a des grèves qui éclatent un peu partout en France, alors ça peut paraître un peu paradoxal,
04:04 mais finalement, les ouvriers ont été un peu exaltés par cette victoire de la gauche, tout en se méfiant des politiques,
04:10 et ils décident de mener des actions de grève, alors ça touche 2 millions de personnes un peu partout en France, c'est énorme, les usines sont bloquées,
04:17 on voit ça sur ces images incroyables de ces usines, de ces mouvements de grève, et finalement il y a des négociations entre les syndicats et le gouvernement,
04:26 et là ça débouche sur les fameux accords de Matignon, avec des grandes avancées sociales,
04:30 en moins de 2 mois, on vote la semaine de 40 heures, les congés payés, les conventions collectives,
04:35 ça a été vraiment un élan et beaucoup d'enthousiasme, et c'est pour ça qu'aujourd'hui, on utilise encore ce terme de Front Populaire,
04:42 c'est à cause de l'enthousiasme suscité à l'époque, et ça reste un exemple pour la gauche 88 ans après.
04:47 Il y a eu de nombreuses photos prises au cours de cette période, ce printemps 1936, vous en avez choisi une en particulier ?
04:55 Oui, il y a de nombreux photographes qui ont pris des clichés de cette période,
05:00 Willy Ronis, Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, et moi j'ai choisi cette photo qui a été prise en mai 1936 dans une usine,
05:07 et qui vraiment montre l'allégresse, ça a été des grèves joyeuses si on peut dire,
05:11 parce que dans les années auparavant elles étaient violemment réprimées,
05:14 mais là il y a eu cette espèce de mouvement de camaraderie, il n'y a pas eu de violence particulière lors de ce Front Populaire,
05:20 et cette photo où on voit ces ouvriers danser dans la cour de leur usine, reflète bien cette époque.
05:25 Vous avez retrouvé des images et aussi des témoignages de cette époque, qui témoignent de cette incroyable atmosphère,
05:31 c'était il y a 88 ans, donc on va écouter.
05:34 Il y a un copain qui réparait les machines, qui est passé dans l'atelier,
05:39 et qui nous a dit "tout le monde s'arrête à une heure, chez Renault, ça je m'en rappellerai toujours,
05:45 chez Renault ils sont déjà arrêtés, il va y avoir la grève générale".
05:49 Et ça a duré au moins un mois, on voyait les femmes qui arrivaient,
05:53 avec leurs petits paquets, qui passaient la nourriture par-dessus le grillage.
05:58 Le climat n'était plus le même dans les entreprises, entre le patron et les ouvriers,
06:02 l'espèce de schlag, même si elle n'était que morale ou verbale, c'était fini.
06:08 Bon l'histoire ce n'est pas totalement bien terminée, il y a un bilan assez contrasté, mitigé pour ce Front Populaire,
06:14 malgré tout il y a une figure importante qui reste dans les mémoires, elle est d'ailleurs citée pas mal en ce moment,
06:19 c'est Léon Blum, il a connu un regain de popularité ces derniers temps.
06:22 Oui, il y a eu de nombreux ouvrages, des expositions, un podcast qui a eu un grand succès sur France Inter,
06:28 c'est vraiment la personne qui incarne aujourd'hui le Front Populaire,
06:33 et j'ai retrouvé une archive sonore de Léon Blum, qui date de mars 1938,
06:38 où il a été rappelé au pouvoir finalement, en fait il n'est resté qu'un an à la tête du Front Populaire jusqu'en 1937,
06:43 et il a été rappelé au pouvoir en mars 1938, et c'est à ce moment-là, dans cette archive sonore,
06:48 où il explique finalement l'essence du Front Populaire.
06:52 Alors on n'a pas le sonore, mais c'est pas grave, Léon Blum qui était évoqué par le chef de l'État hier,
06:58 le président Emmanuel Macron, qui déclarait qu'il devait sûrement se retourner dans sa tombe
07:01 en pensant à ce nouveau Front Populaire auquel fait partie la France Insoumise,
07:05 accusée on le rappelle d'antisémitisme en raison de ses prises de position controversées après les attaques du 7 octobre en Israël.
07:11 Oui, c'est pas le seul à avoir évoqué la figure de Léon Blum au cours des derniers jours.
07:16 Alors on le rappelle, Léon Blum était ici d'une famille juive d'origine alsacienne,
07:19 et il avait suivi des attaques antisémites depuis le début de sa carrière.
07:23 La plus violente a eu lieu lors de son investiture finalement,
07:26 lorsque un député, Xavier Valla, qui s'occupera par la suite des questions juives à Vichy,
07:31 avait déclaré que la France, vieux pays galoromain, allait être gouvernée par la première fois par un juif.
07:36 Donc voilà, beaucoup de personnes ont évoqué ces derniers jours la figure de Léon Blum
07:41 pour critiquer la présence de la France Insoumise dans ce Front Populaire.
07:46 Mais son arrière-petit-fils, qui s'appelle Antoine Malamou, a répondu à ces critiques
07:50 dans un article publié il y a quelques jours sur Mediapart.
07:54 Il a rappelé qu'à l'époque, en 1936, les divisions étaient déjà très fortes au sein du Front Populaire
07:59 entre communistes, radicaux et socialistes, mais que c'était vraiment, pour Léon Blum,
08:03 l'idée c'était de lutter contre les menaces fascistes.
08:06 Et donc il dit qu'il faut vraiment, finalement, passer outre ces divergences
08:10 et se mettre de côté les polémiques pour se réunir.
08:13 Et puis, pour lui, il rappelle que c'est au cœur de la pensée de l'extrême droite
08:18 que l'antisémitisme est structurellement présent.
08:21 Il est au cœur de l'idéologie identitaire.
08:24 Donc il met bien en avant le combat, surtout de Léon Blum, contre le fascisme.
08:27 Voilà, objectif commun qui permet, là aussi, on verra si ça fonctionne cet après-midi,
08:32 de rassembler autour du projet.
08:34 Merci beaucoup Stéphanie Trouillard qui nous fait revivre l'histoire
08:37 et qui recoupe tout cela avec l'actualité.
08:39 On peut évidemment retrouver votre article sur France24.com
08:42 et toute l'actualité en vue de ces élections législatives anticipées.
08:46 Merci beaucoup, c'était Derrière l'image.

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