Kafka, cet inconnu illustre

  • il y a 3 mois
Un portrait inédit de Franz Kafka
Ce documentaire réalisé par Pavel Simak propose une nouvelle interprétation de la vie et de l'œuvre de l'écrivain Franz Kafka, grâce à des recherches récentes et des archives inédites. Prenant comme fil conducteur l'élaboration du roman inachevé "Le Château", le film déconstruit les idées reçues sur Kafka et son univers littéraire. Il montre les multiples facettes de son écriture, mêlant humour, burlesque, jugement politique et philosophique.
Une immersion dans le Prague de Kafka
À travers des images d'archives rares du début du XXe siècle, le documentaire plonge le spectateur dans le Prague de l'époque, berceau de l'écrivain. Ces séquences sont entrecoupées d'extraits du film de Rudolf Noelte (1968) adapté du "Château". Cette immersion visuelle dans le contexte historique et géographique de Kafka permet de mieux saisir les influences et l'environnement qui ont façonné son œuvre.
Un Kafka accessible et humanisé
Loin de l'image d'un auteur torturé et abscons, le documentaire rend Kafka plus abordable et attachant. Il humanise l'écrivain en explorant ses failles, ses doutes et son humour à travers sa correspondance et ses écrits intimes. "Kafka, cet inconnu illustre" lève ainsi le voile sur l'homme derrière les livres, tout en offrant des clés précieuses pour mieux comprendre l'un des auteurs les plus influents du XXe siècle.
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01:05 En réalité, ce ne sont que des clichés bien éloignés de l'homme que fut Kafka.
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03:28 Kafka écrira toute sa vie en allemand.
03:32 Les lectures qu'il fait à ses trois sœurs et le contrôle sévère qu'exercent ses enseignants
03:37 sont les fondements de son rapport à cette langue.
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03:45 Et ce rapport à la langue allemande, ce rapport initial, est resté.
03:50 Dans une stratégie d'écriture qui a toujours évité, avec beaucoup de prudence,
03:58 de s'engager sur des terrains métaphoriques, des terrains ornementaux,
04:05 qu'il aurait fort bien pu imiter, comme l'ont imité tous ses amis écrivains de Prague.
04:12 Mais lui, il a gardé la réserve, il a gardé la prudence,
04:18 comme une espèce d'outil d'écriture.
04:21 Et ça a donné, au bout du compte, cette langue que certains ont estimée pauvre.
04:26 C'est cette langue qui est restée et qui, à certains égards, est parfaitement inimitable.
04:32 Car pour imiter cette langue, il faudrait avoir intériorisé l'espèce de névrose langagière
04:39 que Kafka a développée très jeune et qui l'a rendue extrêmement vigilant.
04:45 L'élève Kafka rêve déjà d'une carrière dans la littérature,
04:48 ce qui va à l'encontre des vues de son père.
04:52 Hermann Kafka attend de son unique héritier masculin qu'il reprenne la mercerie familiale.
05:00 Une boutique de rubans et de boutons.
05:03 Rien n'est plus éloigné de l'image que son fils se fait de son avenir.
05:12 Crié au désir de sa famille, Franz entame des études de droit,
05:15 une concession qui lui permettra de faire une rencontre décisive.
05:20 Le 23 octobre 1902, Kafka fait la connaissance de Max Broth, dans un cercle culturel d'étudiants.
05:28 Plus tard, au mépris des dernières volontés de Kafka,
05:32 Broth ne détruira pas les œuvres de son ami le plus proche, mais les publiera en totalité.
05:39 Il s'appelle "Le Château", un roman inachevé et édité à titre posthume.
05:44 Le personnage principal du roman est l'arpenteur K.
05:49 Il arrive dans un village et apprend que tout est soumis à des règles fixées
05:53 par les fonctionnaires du château surplombant les lieux.
05:57 Il découvre non seulement qu'il n'est pas attendu, mais qu'il n'est pas non plus le bienvenu.
06:08 K se retrouve dans une situation étrange.
06:11 Coupé de la civilisation et enfermé avec des anciens du village,
06:15 il ne fait pas partie des habitants ni des employés du château.
06:19 Il était tard lorsque K arriva.
06:30 Il avait fait un appel à son ami, qui avait été enceint par les fonctionnaires.
06:36 Il était tard lorsque K arriva.
06:38 K resta longtemps sur le pont de bois qui menait de la grande route au village,
06:43 les yeux levés vers ces hauteurs qui semblaient vides.
06:46 Alors que l'intrigue du château commence à se développer,
06:55 Kafka fait une chose inouïe pour un écrivain à ce stade d'élaboration de son manuscrit.
07:02 Il a déjà rédigé les trois premiers chapitres,
07:04 lorsqu'il décide que le roman sera à la troisième personne et non plus à la première.
07:09 Ce changement de point de vue soulève des questions concernant non seulement l'œuvre, mais Kafka lui-même.
07:17 Pourquoi a-t-il fait ce choix ?
07:21 Voulait-il empêcher que les lecteurs confondent le personnage avec l'auteur ?
07:25 Voulait-il empêcher la naissance d'une fausse image de lui-même ?
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07:38 Redécouvrir Kafka au-delà des mythes et des légendes qui l'entourent,
07:42 c'est la tâche que s'est fixée Reiner Starr.
07:45 Écrivain et historien de la littérature,
07:48 il a consacré l'essentiel de sa carrière à étudier la vie de Kafka.
07:53 Pourquoi le personnage s'appelle-t-il K ?
07:59 Ça ne peut signifier que Kafka.
08:01 J'ai souvent entendu cette remarque, qui est un peu facile.
08:05 On ne peut pas l'interpréter de cette façon, parce que Kafka ne fait pas de portrait.
08:10 C'est caractéristique de son écriture. Il ne fait jamais le portrait de son personnage.
08:15 Il décrit plutôt des situations bien particulières auxquelles il est confronté, ou il a été confronté.
08:21 Par exemple, le fait de vouloir appartenir à une communauté, de vouloir s'intégrer,
08:27 comme l'arpenteur qui veut faire partie du village,
08:29 sans pour autant s'y conformer ou s'y soumettre totalement.
08:33 Et il y a là une contradiction qui entraînera des conséquences fatales.
08:38 Bien sûr, c'est Franz Kafka le narrateur.
08:41 Il identifie les erreurs de cet arpenteur.
08:44 Il voit bien que ses attentes ne sont pas raisonnables.
08:47 Autrement dit, il se place bien au-dessus de l'arpenteur.
08:50 Il faut bien distinguer le narrateur et le personnage.
08:55 Sinon, cela revient à sous-estimer grandement Kafka en tant que narrateur.
08:59 Dans ce film de 1968,
09:07 Ka est représenté sous les traits d'un homme de 30 ans, aux cheveux foncés et aux yeux sombres.
09:12 Il arrive malade, baigné de sueur.
09:15 À croire que Kafka et l'arpenteur ne forment qu'une seule et même personne.
09:19 "Ce sont les aides."
09:21 "Quelles aides?"
09:23 "Vos aides."
09:25 "Mes aides?"
09:27 "Vos aides."
09:29 Il avait trouvé Ka, un homme de 30 à 40 ans, tout déguenillé,
09:36 dormant tranquillement sur une paillasse avec son sac pour oreiller et un bâton noueux à portée de la main.
09:42 C'est ainsi que l'un des personnages décrit l'arpenteur.
09:46 Le roman ne nous apprendra rien de plus précis sur son aspect physique.
09:49 "Messieurs, venez avec moi s'il vous plaît."
09:55 "Nous tournons un documentaire sur Franz Kafka."
09:58 "Quand vous arrivez, regardez la caméra et dites seulement 'Bonjour, je suis Franz Kafka'."
10:03 "C'est tout."
10:06 "Bonjour, je suis Franz Kafka."
10:08 "Franz Kafka."
10:10 "Franz Kafka."
10:11 "Franz Kafka."
10:12 "Franz Kafka."
10:13 "Bonjour, je suis Franz Kafka."
10:15 "Qu'est-ce que c'est que ça?"
10:20 "Au fait, cette histoire de la mort de Franz Kafka, c'est quoi?"
10:26 "C'est une histoire de mort."
10:28 "C'est une histoire de mort."
10:30 "C'est une histoire de mort."
10:34 "Mais ces vêtements noirs..."
10:36 "Ce costume sombre, ce chapeau, cette attitude dépressive, et comme sur la défensive,
10:42 que les gens prennent quand ils veulent imiter Kafka, c'est totalement exagéré."
10:47 "Ces caractéristiques n'ont pas grand-chose à voir avec l'homme qui a réellement été Kafka."
10:53 "Merci, c'est tout."
10:59 Même sur la couleur des yeux de Franz Kafka, les témoignages de ses contemporains ne s'accordent pas.
11:04 Parfois, ses yeux sont décrits comme audacieux, d'un gris luisant.
11:10 Son regard est sombre, ses yeux bleus acier, ou bien marron et craintif.
11:16 Le témoignage de son médecin a été conservé.
11:23 "Ces yeux bleus, les yeux de l'homme,
11:29 mais aussi son insolence."
11:33 "Il avait une grande figure et un grand sourire."
11:37 "Il n'a jamais parlé beaucoup."
11:43 "Je ne savais pas qu'il écrivait."
11:46 "Je n'ai entendu que ça."
11:55 Pour ses contemporains, même son âge est trompeur, comme Kafka le constate lui-même alors qu'il a 28 ans.
12:01 "Nous avons beaucoup ri tous les deux."
12:06 "Elle avait 17 ans, m'en donnait 15 ou 16, et n'en a pas des mordus de toute notre conversation."
12:22 "Prenons cette photo de Kafka par exemple."
12:25 "C'est sans doute celle qu'on voit le plus."
12:28 "Elle a été prise quelques mois avant sa mort."
12:31 "À ce moment-là, il n'a plus cette air juvénile qu'il a eu quasiment toute sa vie."
12:35 "Alors pourquoi choisit-on toujours cette photo pour les couvertures, les supports de promotion, etc.?"
12:40 "Pourquoi?"
12:43 "Pourquoi n'utilise-t-on pas plutôt celle-là?"
12:48 "Kafka a au moins 35 ans. On voit qu'il a l'air vraiment très jeune."
12:52 "Et il a une attitude typique."
12:55 "Pour moi, c'est vraiment une photo qui lui ressemble."
12:58 "Seulement, elle ne colle pas à la légende."
13:15 Un photo-portrait dans son journal de 1911 peut nous donner une idée de la façon dont il se voyait.
13:20 Ce n'est pas son unique dessin.
13:31 Kafka commente le monde qui l'entoure par des dizaines de croquis et de caricatures.
13:36 À propos de son talent de dessinateur, il écrit à sa fiancée Felice Bauer...
13:43 "Mon dessin te plaît-il?"
13:45 "Tu sais, dans le temps, j'étais un grand dessinateur."
13:48 "Seulement, j'ai fait mon apprentissage chez une mauvaise artiste peintre qui m'a enseigné un dessin académique et a gâché tout mon talent."
13:54 "Mais attends, je t'enverrai sous peu quelques vieux dessins pour que tu aies de quoi rire."
13:59 Chez Kafka, l'humour n'apparaît pas uniquement sous la forme de dizaines de dessins minuscules.
14:12 Les critiques de son oeuvre disent parfois qu'elle est trop austère,
14:15 que les situations décrites sont trop sombres, trop tristes et monotones.
14:20 Mais je crois que ce n'était pas son intention, le plus souvent.
14:24 Il y a même des passages célèbres dans lesquels il s'inspire du cinéma burlesque tel que nous le connaissons aujourd'hui.
14:32 "Je crois que ce qui nous surprend tous dans son oeuvre, c'est tout l'humour qui s'y cache."
14:36 "En Allemagne, Kafka passe par l'humour, mais il y a aussi l'humour dans son dessin."
14:41 "Il y a aussi l'humour dans son dessin, mais il y a aussi l'humour dans son dessin."
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17:46 En 1908, Kafka rejoint une compagnie d'assurance spécialisée dans les accidents du travail.
17:51 D'abord comme auxiliaire.
17:54 Plus tard, il sera promu secrétaire en chef.
17:58 Jamais encore, Ka n'avait vu son existence et son service aussi intimement mêlés.
18:08 Il l'était si bien que parfois Ka pouvait croire que l'existence était devenue service,
18:14 un service-existence.
18:16 "Nous sommes devant l'ancien immeuble de bureau dans lequel Kafka a travaillé."
18:26 "C'est l'endroit idéal pour tordre le coup à une autre fausse rumeur."
18:30 "Beaucoup de personnes pensent que Kafka n'était qu'un tout petit rouage de l'administration austro-hongroise."
18:36 "Mais pas du tout. Il occupait un poste à haute responsabilité."
18:42 Kafka traite les dossiers des ouvriers victimes d'accidents.
18:45 Mais il représente aussi l'assurance pour les défendre en justice contre leurs employeurs.
18:50 Il effectue de fréquentes visites d'inspection,
18:54 qui l'amènent à proposer des solutions techniques concrètes en matière de sécurité.
18:59 S'ajoutent ainsi à ses romans, récits et lettres des descriptions techniques formulées avec précision.
19:07 Les lames de l'arbre carré sont vissées directement sur celui-ci,
19:11 le tranchant complètement à nu et tournent à une vitesse de 3 800 tours/minute.
19:16 Même l'ouvrier le plus prudent ne peut empêcher sa main d'être prise sous les lames.
19:21 Un tel accident signifie souvent la perte de plusieurs phalanges, voire de doigts entiers.
19:32 "Les lames de l'arbre carré"
19:37 Franz Kafka était très aimé, se rappelle un collègue.
19:46 Son dévouement était exemplaire et on faisait grand cas de son travail.
19:50 On soulignait aussi une certaine naïveté dans ses allures.
19:54 Kafka était l'enfant gâté du service.
19:58 "Les lames de l'arbre carré"
20:03 En vérité, cet employé modèle souffre des règles bureaucratiques dictées par sa compagnie d'assurance.
20:09 Ses sympathies vont nettement à ses solliciteurs démunis.
20:24 Comme ces hommes-là sont humbles, au lieu de prendre la maison d'assaut et de la mettre à sac, ils viennent nous solliciter.
20:30 Il est fort probable que l'écriture soit devenue pour lui un exutoire.
20:46 Certaines affaires survenues justement dans le domaine des assurances pouvaient aussi à leur façon paraître assez bizarres.
20:53 "C'est assez bizarre"
20:55 Si Kafka a accepté un emploi dans les assurances, c'est surtout pour ses horaires avantageux.
21:04 Il peut consacrer l'essentiel de son temps libre à sa passion, l'écriture.
21:09 Il se rend à des séances de lecture publique, où retrouve d'autres écrivains dans des cafés de la ville.
21:16 On y parle d'auteurs prestigieux issus de la scène littéraire praguase, tels que Meyrink, Rilke ou Kisch.
21:23 Mais curieusement, c'est hors du monde des lettres allemandes qu'il trouvera un modèle.
21:31 C'est sur Gustav Flaubert que se portera son admiration et dont il partage la ferveur pour la création littéraire.
21:38 Kafka note dans son journal cet aveu de Flaubert.
21:45 "Mon roman est le rocher qui m'attache, et je ne sais rien de ce qui se passe dans le monde."
21:53 Flaubert et Kafka, c'est une longue histoire.
22:02 Une histoire qui a commencé très tôt, puisque Kafka considérait que Flaubert était un de ses amis de cœur.
22:11 Il s'appelait "ein blutfavanter", c'est-à-dire qu'il était très proche, à la fois sentimentalement et intellectuellement.
22:20 Il se reconnaît totalement dans la création de Flaubert, dans sa dévotion absolue à la littérature, à la création, à l'étude du style.
22:31 Il travaille jour et nuit, lui-même dans ses carnets, dans ses journaux.
22:37 Si Flaubert est célèbre pour les dizaines de versions de ses manuscrits, Kafka, lui, procède différemment.
22:44 À la différence de Flaubert, qui va écrire un premier G, puis un deuxième, puis un troisième, puis un quatrième,
22:54 puis une dizaine de G avant que le texte soit considéré comme publiable, Kafka n'y revient presque jamais.
23:04 C'est parti comme une espèce de proposition mi-orale, mi-écrite, et ça ne bouge pratiquement plus.
23:11 [François-Marie se fait couper]
23:16 [François-Marie se fait couper] "Rida!"
23:18 [François-Marie se fait couper]
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23:37 Furieuse et grimaçante, elle incrustait la tête dans la poitrine de son partenaire,
23:42 comme des chiens qui grattent désespérément le sol.
23:45 C'était ainsi qu'ils s'acharnaient l'un contre l'autre.
23:48 Kafka et gender, la question du genre, c'est une vaste question,
23:58 parce qu'on sait que Kafka, à la fois, était un grand admirateur des femmes,
24:03 et qu'en même temps, il voit dans les femmes des créatures qui sont extrêmement ambiguës,
24:08 extrêmement inquiétantes, et qui incarnent l'altérité absolue.
24:12 Dans "Le château", par exemple, on voit le personnage de Kafka
24:17 qui arrive dans un univers qui est très étranger pour lui.
24:20 Il ne connaît personne, il essaie d'obtenir l'autorisation de se rendre au château,
24:26 et c'est une femme qui va l'aider, Frida, à l'hôtel des messieurs,
24:32 qui lui annonce par de multiples détours qu'elle est la maîtresse de Klam, le seigneur du château,
24:39 et qui va avoir avec Kafka une relation d'amour, véritablement.
24:44 Une relation qui commence d'abord par une relation sexuelle assez bestiale,
24:48 puisqu'ils font l'amour derrière le bar, au milieu des saletés, au milieu de flaques de bière.
24:54 Donc la scène peut paraître assez choquante, assez répugnante,
24:58 mais elle est liée aussi au fait que Kafka voit dans l'acte charnel
25:02 un acte aussi assez répugnant, assez problématique.
25:06 S'approcher trop de la peau de l'autre, c'est compliqué.
25:09 Le petit corps brûlait dans les mains de K.
25:14 Dans une sorte de pamoison, ils roulèrent quelques pas plus loin
25:18 et restèrent finalement étendus dans les flaques de bière
25:21 et les autres saletés dont le sol était couvert.
25:25 Au cours de sa vie, Franz Kafka a souvent satisfait sa sexualité dans les maisons closes.
25:32 Mais l'éros qui s'accomplit par le biais de l'amour ou encore du rapprochement des corps
25:38 était une chose dont il avait peur.
25:40 Il avait peur de se sentir comme un homme,
25:43 de se sentir comme un homme qui ne peut pas être un homme.
25:46 Il avait peur de se sentir comme un homme,
25:49 de se sentir comme un homme qui ne peut pas être un homme.
25:54 Il a d'ailleurs écrit que le koït était le châtiment du bonheur de vivre ensemble.
25:59 Le 13 août 1913, Kafka note dans son journal
26:06 "Vivre dans le plus grand ascétisme possible, plus ascétiquement qu'un célibataire,
26:12 c'est pour moi l'unique possibilité de supporter le mariage.
26:16 Mais elle..."
26:19 Son rapport compliqué à l'intimité et aux femmes est confirmé par les faits.
26:24 Il rompt à deux reprises ses fiançailles avec Felice Bauer.
26:28 Il abandonne avec Fraka Juliet Worizek pour une jeune journaliste Milena Yesenska
26:34 avec laquelle il vit une relation passionnée, mais à distance bien sûr.
26:38 Milena est mariée et Kafka ne la rencontrera que deux fois.
26:43 Dans le château, pour ce qui est des femmes,
26:48 il est évident que Frida a certaines qualités que possèdent également Milena Yesenska,
26:54 dont sa capacité à avoir une vie sexuelle justement, mais exclusivement sexuelle.
27:00 Outre la sexualité, le château aborde un espace de l'intimité,
27:06 et il est donc important de s'assurer des avantages personnels et professionnels.
27:12 "Bonjour"
27:15 L'arpenteur ravit Frida à un haut fonctionnaire du nom de Klam,
27:25 tout comme Kafka à son nom de Klam.
27:29 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie,
27:34 vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
27:40 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
27:46 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
27:52 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
27:58 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:03 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:08 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:13 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:18 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:24 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:30 "Vous êtes un homme de la vie, vous êtes un homme de la vie."
28:36 Le 11 août 1917, pour la première fois, Kafka se met à cracher une grande quantité de sang.
28:43 Le diagnostic tombe, il est atteint de tuberculose.
28:47 Il a sans doute été contaminé au bureau par l'un de ses clients,
28:51 ceci étant souvent des soldats malades rapatriés du front.
28:55 Kafka réagit de façon surprenante à l'annonce de cette maladie mortelle.
29:02 Tout comme l'arpenteur K, il délaisse pour 8 mois son existence d'alors
29:08 et se choisit un environnement nouveau, bien différent de celui de Prague.
29:13 Le 12 septembre 1917, il part pour Sirgem, un petit village du nord de la Bohême,
29:23 dont il va s'inspirer pour la rédaction du château.
29:27 "Au premier regard, il a l'air de dire que le petit village de Sirgem possède une grande maison de maître,
29:33 une bâtisse un peu sévère et inhospitalière.
29:37 Mais quand on approche, on se rend compte que ce n'est pas un bâtiment d'habitation.
29:43 C'est un grenier ou un entrepôt conçu pour faire sécher des feuilles de houblon.
29:49 Mais ça note rien à son aspect sinistre, bien au contraire."
29:55 "Cette bâtisse est très connue, surtout parmi les lecteurs de Kafka.
30:05 Pour beaucoup d'entre eux, c'est l'origine du château. C'est le château de Kafka."
30:14 "Certains ont même fait des comparaisons avec d'autres bâtiments et concluent que celui-ci était le plus ressemblant.
30:20 Tout cela illustre le fait que la plupart des légendes qui entourent Kafka possèdent un fond de vérité,
30:27 sans pour autant être conformes à la réalité.
30:31 J'imagine que Kafka a remarqué cette bâtisse un peu effrayante.
30:35 Elle semble flotter au-dessus du village, surtout quand on la voit de loin.
30:40 Ça lui a sans doute rappelé Prague, où on a la même configuration.
30:45 Depuis de nombreux endroits de la ville, on aperçoit un édifice en surplomb dont l'accès est défendu.
30:52 On sait que c'est le siège du pouvoir et que les dirigeants nous observent.
30:57 On a l'impression qu'ils scrutent la ville par les fenêtres.
31:01 Et ici, on a une construction du même genre.
31:04 Ça a donné l'idée à Kafka de transposer cette construction dans le village.
31:09 À Sirgem, sa sœur, Hotla, s'attache à diriger une petite ferme pour ne plus dépendre de ses parents.
31:23 Tout comme l'arpenteur K, il rencontre des gens du coin qui vont peupler le village de son roman.
31:30 Quatre ans plus tard, le 27 janvier 1922,
31:39 quand Kafka arrive au sanatorium de Spindlerville,
31:42 il découvre que la ville est en pleine guerre.
31:45 Quatre ans plus tard, le 27 janvier 1922,
31:49 quand Kafka arrive au sanatorium de Spindlermülle, au cœur des montagnes,
31:54 trois sources d'inspiration vont nourrir son esprit.
31:58 Sirgem pour sa campagne et sa bâtisse, le château de Prague et les sommets enneigés.
32:04 Il entreprend d'écrire son dernier grand roman.
32:09 [Musique]
32:13 Maintenant, il voyait le château qui se détachait nettement là-haut dans l'air lumineux.
32:22 La neige qui s'est allée partout en couches minces en accusait nettement le contour.
32:27 [Musique]
32:32 [Musique]
32:36 Kafka n'achèvera jamais son roman.
32:43 La maladie progressera plus vite que son écriture.
32:47 Quelques années avant sa mort, il laissera ce message prémonitoire.
32:54 « Ma dernière volonté, tout ce qui se trouve dans ce que je laisse derrière moi,
32:58 qu'il s'agisse de journaux intimes, de manuscrits, de lettres,
33:01 écrites par moi ou par d'autres, de dessins, etc., doit être totalement brûlé sans être lu.
33:07 De tout ce que j'ai écrit, seuls les livres Verdict, Soutier, Métamorphose,
33:13 Colonie pénitentiaire, Médecin de campagne et le récit Un artiste de la faim sont valables. »
33:19 Cette demande s'adresse à son ami Max Broth, qui ne la respectera pas.
33:26 C'est grâce à cette désobéissance que Le Château survivra à son auteur.
33:32 L'interprétation de ce roman et de toute l'œuvre de Kafka
33:40 sera foncièrement influencée par l'histoire du XXe siècle.
33:44 « Comme son œuvre n'a été réellement édité qu'après la Seconde Guerre mondiale,
33:54 on serait tenté d'y trouver certains épisodes du conflit,
33:58 avant tout un chapitre tragique que l'on a coutume d'appeler l'Holocauste.
34:02 Mais cette interprétation ne date que de l'après-guerre, peut-être des années 60.
34:09 Et je crois que Kafka lui-même s'en serait souvent étonné,
34:13 car il considérait plutôt ses écrits comme exagérés, voire burlesques à leur manière. »
34:20 « Je ne crois pas que c'est un avantage de ne pas connaître Kafka.
34:24 C'est certainement un attitude de 22 ans, comme je l'ai eu avec lui,
34:30 avec qui nous avons vu le jour et la nuit,
34:35 une brèche, qui est aussi mystérieuse,
34:40 qui est restée dans Kafka,
34:44 qui est restée dans le mystère,
34:49 qui est un mystère inévitable,
34:53 qui est dans l'individu d'un homme,
34:56 mais un homme très développé, qui est très particulier. »
34:59 « Si on en croit Max Broth, nous serions obligés de le croire sur parole.
35:05 Nous n'aurions pas d'autre choix.
35:08 Nous pourrions évidemment nous baser sur les écrits autobiographiques de Kafka,
35:12 mais pour l'essentiel, nous ne pourrions que nous fier à Broth.
35:16 Il serait en quelque sorte le grand prêtre des études kafkaïennes,
35:20 et ce, pour l'éternité. »
35:22 « Il est assez intéressant de voir comment Max Broth a interprété l'œuvre par la suite, après la guerre.
35:32 C'est peut-être là que se trouve l'origine de ce qui prévaut largement au sein de la société concernant Kafka,
35:38 celle d'un homme qui prédisait l'avenir à son insu.
35:42 Mais dans l'ensemble, cela paraît logique. »
35:45 Bien des années plus tard, un autre château offrira un lien particulier
35:52 entre la fiction du roman et la réalité de la vie.
35:55 L'Iblitze, 1963.
35:58 La Tchécoslovaquie et toute l'Europe de l'Est sont sous l'emprise de la dictature communiste
36:04 qui a succédé à la dictature nazie.
36:07 Kafka continue d'être un auteur interdit.
36:10 Toutefois, pour le 80e anniversaire de sa naissance,
36:14 un congrès international de littérature se tient au château de l'Iblitze.
36:19 [ Applaudissements ]
36:24 [ Interprétation en allemand ]
36:50 À l'Ouest, Kafka est célébré, à l'Est, ses œuvres sont censurées.
37:16 Pourtant, des deux côtés du rideau de fer,
37:19 les chercheurs en littérature s'efforcent de réhabiliter l'auteur en s'intéressant à sa vie.
37:25 « Aujourd'hui, on a du mal à le concevoir,
37:37 mais à l'époque, dans ces pays, on mettait en avant le plus sérieusement du monde
37:41 que Kafka était issu d'une famille de la petite bourgeoisie capitaliste juive.
37:45 Et on s'indignait de l'absence d'engagement politique dans ses textes.
37:49 On disait que c'était une attitude typique de son milieu d'origine.
37:53 Mais je crois, et c'est l'opinion la plus répandue de nos jours,
37:57 je crois qu'il y a autre chose derrière ce discours.
38:00 Parce qu'à l'époque, on donnait aussi une interprétation très politique de Kafka. »
38:05 Le régime communiste craignait que les lecteurs n'identifient le château ou le procès
38:14 à la réalité de la vie derrière le rideau de fer.
38:17 En effet, on peut facilement voir dans le personnage de l'arpenteur
38:22 un héros qui ne s'intègre pas dans les rouages du système ni du pouvoir.
38:27 Il s'entendait déjà à jouer de cet instrument administratif,
38:36 de cet instrument si délicat, toujours soucieux de quelques compensations.
38:41 Le secret consistait surtout à ne rien faire, à le laisser travailler tout seul,
38:46 à ne l'y forcer que par sa présence, en restant là, inexpugnable dans sa terrestre pesanteur.
38:52 On a dit que Kafka avait prédit certaines structures totalitaires
39:02 qui sont apparues longtemps après sa mort.
39:05 Et le régime communiste trouvait cela suspect.
39:08 C'est la raison pour laquelle Kafka n'était pas publié dans ces pays.
39:11 Jamais on ne mentionnait son nom dans les écoles.
39:15 C'est aussi pour cela que la conférence de Liblitzé en 1963 a été si importante.
39:20 C'est la toute première tentative de faire évoluer le regard qu'on portait sur Kafka dans ces pays.
39:26 Je ne suis pas capable de l'appeler un homme d'un pays capitaliste.
39:31 A tous mes amis dans la société socialiste,
39:35 Kafka, enfin, donne le visa !
39:38 Mais un visa d'éternité ! Pour toujours !
39:41 Kafka et tout le bloc de l'Est finissent par obtenir ce visa en 1989.
39:51 Le Château est de nouveau publié dans la ville natale de son auteur.
39:56 Alors que le destin du Château est de gagner de nouveaux lecteurs dans le monde entier,
40:09 ni son héros, ni son auteur ne se seraient attendus à un tel dénouement.
40:14 Le Château de Liblitzé
40:19 Il contient vraiment des passages d'une poésie incroyable, presque lyrique.
40:28 C'est un récit où il neige en permanence.
40:31 Moi, ce qui me fascine et que je n'ai pas perçu la première fois que je l'ai lu,
40:35 c'est qu'il se déroule sur une période très brève, quelques jours seulement,
40:39 mais pendant lesquelles vous vivez toute la vie de Kafka.
40:42 Et souvent, il a encore de l'énergie, et à la fin, c'est un homme totalement détruit.
40:46 Ka ne parviendra jamais au Château.
40:56 Jamais il ne sera reçu par ses hauts fonctionnaires.
40:59 Jamais il n'aura confirmation de sa mission d'arpenteur.
41:11 Ka reste au village sans avoir la possibilité ni la force de le quitter.
41:16 Au dernier chapitre, on l'invite à se cacher tout l'hiver
41:20 dans la modeste chambre des filles de l'auberge.
41:38 Ka n'aura pas le temps de laisser l'arpenteur répondre à cette proposition.
41:42 Le témoignage de Max Broth fournit de possibles indications sur la fin du roman.
41:49 Kafka n'a pas écrit de chapitre final,
41:56 mais il m'a expliqué une fois sur ma demande comment le roman se terminerait.
42:04 L'arpenteur ne lâche pas d'une semelle, mais meurt d'épuisement.
42:08 Max Broth a collaboré à l'adaptation cinématographique du Château.
42:32 On ne s'étonnera donc pas d'y trouver cette variante de la fin.
42:36 C'est seulement après sa mort que la décision du château parvient à l'arpenteur,
42:41 l'autorisant à rester au village à certaines conditions et même y travailler.
42:46 Ka meurt sans avoir atteint son but.
42:54 Le sort de Kafka sera presque identique.
42:59 1921. Il lui reste trois années à vivre.
43:03 La maladie progresse.
43:05 Au bout de 13 ans passé à exercer un métier qu'il déteste,
43:09 il trouve enfin le courage de démissionner.
43:12 Mais sa liberté a le goût du sang.
43:16 Kafka parvient à s'affranchir de l'emprise de sa famille
43:25 et d'un emploi qu'il n'avait pas choisi.
43:28 Il quitte Prague et s'installe à Berlin
43:31 où pour la première fois il vit en ménage avec une femme,
43:35 Dora Dumant.
43:37 Kafka a atteint son objectif.
43:55 Être uniquement écrivain et quitter Prague et son milieu.
43:59 Mais ses jours sont comptés pour jouir de sa liberté.
44:05 Au milieu de l'année 1924, son état s'aggrave.
44:18 Une laryngite tuberculeuse se déclare.
44:22 Accompagné de son ami Klopstock et de Dora,
44:25 il part pour le sanatorium de Kirling en Autriche.
44:30 ...
44:59 -Nous avons ici l'un des documents autobiographiques
45:03 les plus importants de Franz Kafka.
45:06 Il s'agit d'une lettre qu'il a écrite à ses parents
45:10 la veille de sa mort.
45:12 Il s'efforce de les convaincre qu'il vaut mieux pour tout le monde
45:16 qu'ils remettent leur visite à plus tard.
45:19 -Très chers parents, parlons donc des visites.
45:23 Ce serait tellement bien.
45:25 Il y a déjà si longtemps que nous n'avons pas été ensemble.
45:29 Cela parle, ainsi que bien d'autres choses, en faveur de la visite.
45:33 Mais il y en a trop qui parlent contre elle.
45:36 Si vous ajoutez le fait que je n'ai le droit de parler
45:39 qu'en chuchotant, et même ainsi pas trop souvent,
45:42 vous repousserez bien volontiers votre visite.
45:52 -C'est incroyable que Kafka trouve encore la force
45:56 de rédiger cette lettre.
45:58 Si le lecteur ignore dans quel état il se trouve alors,
46:02 il ne peut pas le deviner.
46:04 Tout ce qu'il peut voir, c'est que la lettre s'interrompt brusquement
46:09 à la dernière page.
46:11 Il est fort possible que Kafka se soit endormi
46:14 sous l'effet des puissances sédatives qu'il prend.
46:18 La ligne suivante est écrite par Dora.
46:21 "Je lui prends la lettre des mains", c'était déjà une prouesse.
46:25 La suite sera rédigée par la mère de Kafka.
46:29 "Lettre écrite le lundi 2 juin 1924.
46:33 "Mort le 3 juin 1924."
46:37 On sait par conséquent que ces lignes, sur cette dernière page,
46:42 sont les toutes dernières lignes que Kafka a écrites de son vivant.
46:47 ...
46:53 À sa mort, Franz Kafka est âgé de 40 ans et 11 mois.
46:58 ...
47:12 "Je rêve d'une fosse étroite et profonde.
47:15 "Nous nous y tenons embrassés.
47:17 "Je cache mon visage contre toi, tu caches le tien contre moi
47:21 "et personne ne nous voit plus."
47:24 ...
47:42 Kafka plaçait la poésie et l'esthétique au centre du processus de création
47:47 et, dans une certaine mesure, au cœur même de son existence.
47:51 Il faut prendre Kafka au sérieux en tant qu'écrivain.
47:55 Il a révolutionné la littérature de son époque.
47:58 De quelle manière ? C'est ce que nous devons examiner.
48:02 En quoi dépasse-t-il la littérature classique ?
48:05 C'est cette question qui rend les études kafkaïennes si enrichissantes aujourd'hui.
48:09 ...
48:12 -Si Kafka parle encore aujourd'hui autant à de jeunes générations,
48:16 on sait que de nombreux Youtubers, de nombreux jeunes sur Internet surfent sur Kafka,
48:22 s'échangent des vidéos sur Kafka parce qu'ils parlent de thèmes universels.
48:27 La peur, la solitude, la recherche de sens, la recherche du bonheur, la mélancolie,
48:35 la peur d'être incompris dans un monde de plus en plus opaque, de plus en plus complexe.
48:42 ...
48:50 -C'est très étonnant de voir toutes les adaptations de l'œuvre de Kafka
48:55 qui ont été faites dans d'autres formes d'art, au cinéma, au théâtre,
48:59 en romans graphiques et même en musique.
49:02 On cherche encore l'explication de ce phénomène.
49:06 C'est un fait unique dans l'histoire de la littérature du XXe siècle.
49:10 ...
49:39 ...
49:47 -Au cours de la suite, il a été réveillé.
49:53 ...
50:00 -Il faut prendre les gens tels qu'ils sont ou les laisser tels qu'ils sont.
50:05 L'échanger est impossible. On peut tout au plus contrarier leur naturel.
50:10 ...
50:24 ...
50:52 ...
51:07 -Le vent est lent.
51:09 ...
51:23 -Le vent est lent.
51:26 ...

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