Mort du président iranien : "Il a fait massacrer bon nombre d'opposants, c'était sa marque de fabrique"

  • il y a 4 mois

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00:00 Il y a des centaines, peut-être des milliers d'hommes et de femmes iraniens à venir rendre hommage à Téhéran,
00:08 au président Raisi, Bernard Hourkad est avec nous. Bonjour, vous êtes cher cher émérite au CNRS.
00:15 L'Iran perd un président qui a participé, peut-être rappelons-le, à tous les dossiers de violation des droits humains depuis la révolution en 1979.
00:23 C'était sa marque de fabrique, ça la répression ?
00:25 Pas uniquement, c'est évidemment quelqu'un qui était un apparatchik, un idéologue, mais quand on lui a demandé de massacrer, il massacrait,
00:33 de faire autre chose, il faisait autre chose. Il a effectivement été un des acteurs de toute la politique de la République islamique depuis 40 ans,
00:41 depuis que Jeanne procurait la République à la prison de Karaj et celle d'Evin, il a fait massacrer beaucoup d'opposants,
00:47 et ceci est effectivement sa marque de fabrique, mais il y a aussi le fait que c'est la deuxième partie de sa carrière,
00:53 cette norme pragmatique qui fait ce qu'on lui dit de faire, et s'il faut ouvrir l'Iran, il l'ouvrait, et il l'a montré récemment encore,
00:59 en essayant de renouer les discussions avec les Etats-Unis. Donc sa mort, de ce point de vue-là, ne change pas grand-chose.
01:06 Donc il était très obéissant, et c'est pour ça qu'on disait qu'il n'a jamais déplu en quelque sorte au guide suprême ?
01:11 Tout à fait. On pouvait le considérer un peu comme le secrétaire général, l'homme à tout faire du guide.
01:16 C'était un ayatollah, même pas d'ayatollah, il a à peine ses études théologiques, c'est pas un leader religieux,
01:22 mais il était un excellent apparatchik, on peut utiliser ce terme, et qui connaissait bien les rouages administratifs,
01:28 donc le guide est dirigé, les instances politiques dirigées, et lui exécutait avec beaucoup de fidélité et d'application
01:35 les directives qu'on lui donnait d'appliquer.
01:38 On le disait même potentiel successeur de l'ayatollah Khomeinei, la course à la succession est ouverte aujourd'hui ?
01:47 Elle a toujours été ouverte, mais on exagère un peu sur cette course. En effet, le guide Ali Rahmenei est au pouvoir depuis 1989,
01:55 et en fait depuis 1980 il est ministre et membre du gouvernement. C'est quelqu'un d'expérimenté, de plus sage qu'on le dit,
02:02 il était capable de faire des concessions dans sa vie politique. Son objectif aujourd'hui, c'est de sauver la République islamique,
02:09 qui est en danger à cause des répressions à l'intérieur, des protestations à l'intérieur, vous avez signalé à l'instant,
02:15 à cause de la guerre de Gaza, à cause de l'offensive d'Israël, à cause des présidents des Etats-Unis, de l'Arabie Saoudite, bref,
02:22 la République islamique est en danger, et le guide doit effectivement être capable, le futur guide ou le guide actuel,
02:28 de trouver des solutions pour sauver le régime s'il veut le sauver. C'est ça l'enjeu actuel.
02:32 Et ça passera donc par une transition qui devrait durer 50 jours. Elle est assurée cette transition par le premier vice-président Mohamed Mokhber,
02:42 qui est-il et peut-il s'imposer pour la suite ?
02:46 Du tout. M. Mokhber est un homme de l'ombre, en quelque sorte, un homme de l'appareil, qui a eu des responsabilités politiques secondaires,
02:54 et ce n'est pas du tout un leader politique. On peut toujours imaginer le contraire, mais c'est peu probable.
02:59 Par contre, la question qui se pose aujourd'hui, c'est, un, la continuité stratégique de l'Iran est incontestable, ça ne changera pas,
03:06 mais il y aura peut-être des changements. Et le courage, on peut espérer que le guide de l'humour du système aura le courage de proposer une certaine ouverture.
03:16 Il y a eu 7% de participation aux élections à Téhéran la semaine dernière. Et donc, si le régime veut continuer à vivre, il lui faut un soutien populaire.
03:25 Pour cela, il faudrait une ouverture radicale. Et donc, les candidats aux prochaines élections présidentielles qui auront lieu dans moins de 50 jours,
03:32 soient effectivement des candidats d'ouverture qui soient crédibles pour la population iranienne.
03:36 Qui ne devraient pas forcément voter en masse, mais qui pourraient au moins soutenir partiellement le régime.
03:41 On va juger maintenant les successeurs de Raisi, le gouvernement iranien, à trouver un successeur de Raisi qui soit effectivement apte à sauver la République islamique d'Iran,
03:54 qui est loin d'être sauvable, parce qu'effectivement, à l'intérieur comme à l'extérieur, il y a de très graves problèmes.
03:58 Et quel est votre avis sur cette possible ouverture lors de cette présidentielle ? Est-ce que les réformistes seront autorisés à présenter un candidat ?
04:06 C'est la grande question. Aujourd'hui, on voit très bien qu'il y a chez les conservateurs qui ont tous les pouvoirs en main des divisions internes.
04:13 Ils se détestent entre eux, ils se connaissent trop bien. Mais actuellement, on l'a vu aux élections présidentielles, aux élections législatives,
04:19 il y a s'opposant d'un côté des gens qui veulent résister, ne pas bouger, être plus radicaux que les radicaux, qui sont nombreux.
04:26 Ils ont gagné les élections plus ou moins. Mais il y a aussi le président du Parlement, Mohamed Ralibaf, un ancien général,
04:31 ancien maire de Téhéran, plus pragmatique, qui est partisan de certaines ouvertures, tout en restant dans le système.
04:37 Il y a aussi une possibilité, mais c'est une hypothèse à 1% peut-être, que le gouvernement iranien autorise finalement,
04:44 que le conseil des gardiens de la Révolution accepte finalement qu'il y ait des réformateurs véritables.
04:48 On pense en particulier à Mohamed Zarif, l'ancien ministre d'affaires étrangères qui avait négocié l'accord sur le nucléaire.
04:54 Si Zarif était autorisé à se présenter, ce serait peut-être une possibilité pour lui d'être président.
04:58 Mais la situation est tellement difficile en Iran, il n'est pas sûr qu'une majorité de la population vote pour lui.
05:03 Et donc on peut s'attendre à ce que les conservateurs, plus ou moins modérés, gardent le pouvoir en Iran.
05:09 On a bien compris qu'il y aura donc, après cette disparition, des effets sur le plan intérieur,
05:15 quid des répercussions régionales en pleine guerre entre Israël et le Hamas ?
05:20 C'est une question tellement importante. Je vais me le dire tout à l'heure,
05:23 l'Iran a montré en envoyant 350 drones et missiles sur Israël, tout en prévenant les Américains et Israéliens qu'ils attaquaient,
05:31 montré qu'ils étaient à la fois capables de montrer la force de leur dissuasion, mais aussi prêts à négocier.
05:37 Et actuellement, l'Iran est pris au sérieux. Les Américains renégocient aujourd'hui même à Oman la question du nucléaire.
05:46 Donc il y a des chances que ça bouge, parce qu'effectivement, bouger d'un côté ou de l'autre,
05:51 ça peut changer beaucoup de choses en Palestine ou à Gaza.
05:54 On vient de le voir avec votre premier sujet sur la Copénale internationale, il faut peu de choses pour que ça bouge.
05:59 Et si l'Iran avait la bonne idée de bouger un petit peu, et la mort de Raisi offre une opportunité de bouger assez rapidement,
06:06 ça pourrait effectivement changer des choses au Moyen-Orient.
06:09 Voilà, les semaines qui seront donc déterminantes à venir.
06:11 Merci beaucoup Bernard Ourkad d'avoir été notre invité.

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