Dans son édito du 03/05/2024, Agnès Verdier-Molinié revient sur la grève des cliniques privées le 3 juin prochain.
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00:00Écoutez, c'est assez grave parce que dans le secteur hospitalier, clairement, l'État maltraite les cliniques et les hôpitaux privés par rapport aux hôpitaux publics.
00:09Alors la revalorisation des tarifs qui a été annoncée, c'est incroyable l'écart qu'il y a entre public et privé.
00:15C'est 4,4% pour les hôpitaux publics et c'est 0,4% pour les cliniques privées.
00:21Plus 4,4% accordé par l'État au public, plus 0,4% pour le privé.
00:27Ils disent que c'est assez équitable, on ne comprend pas trop.
00:30En plus, les cliniques sont déjà dans une situation financière extrêmement compliquée parce que la moitié d'entre elles serait déjà en déficit.
00:40Et il y aurait un déficit total de l'ensemble des cliniques de 800 millions d'euros.
00:44Pour comparer avec les hôpitaux, les derniers chiffres qu'on a, en 2021, selon la Cour des comptes, c'était 400 millions d'euros sur beaucoup plus de milliards pour les hôpitaux que pour les cliniques.
00:54Donc ça veut dire que vraiment, les cliniques sont aujourd'hui dans le rouge.
00:59Comment se fait-il que les revalorisations de tarifs ne soient pas les mêmes alors que les missions de soins sont les mêmes entre les hôpitaux et les cliniques ?
01:06Alors là, ça fait des années que ce n'est pas équitable.
01:08Là, on atteint le summum avec cet écart de cette année.
01:12Et puis, c'est vrai que les écarts de tarifs, au départ, sont déjà très importants.
01:16Par exemple, prenez Romain une prothèse de genoux.
01:19Le tarif payé à l'hôpital public par l'assurance maladie, c'est 6 250 euros pour la prothèse de genoux, alors que dans le privé, c'est 4 796.
01:28Pour une prothèse de hanches, c'est 7 400 pour le public et 6 035 pour le privé.
01:34Et donc là, il y a des écarts, au départ, qui sont énormes.
01:36La Cour des comptes avait chiffré que c'était à peu près 22 % d'écart.
01:39Et de son côté, la Fédération hospitalière privée dit qu'ils font, avec 18 % des crédits alloués aux cliniques, 35 % de l'activité hospitalière totale.
01:49Ah oui, on comprend tout avec vos chiffres.
01:52Alors, étrangement, la CGT, par exemple, dans les Pyrénées-Orientales, appelle les salariés des cliniques privées à boycotter cette grève,
02:00à ne pas faire grève au prétexte que ce ne serait pas dans le sens de la solidarité ouvrière.
02:06Pour sauver le public, quoi.
02:07C'est un peu le monde à l'envers.
02:09C'est assez incroyable.
02:12Et alors, ce qui est très incroyable aussi, c'est d'entendre à mi-mot certains du ministère de la Santé ou de la CNAM qui disent
02:17finalement, si on a moins de cliniques, c'est super parce que ça fera plus d'activité pour les hôpitaux.
02:23Alors, évidemment, ils ne vont pas officiellement le dire, mais c'est un peu la petite musique qu'on entend.
02:28C'est un peu la petite musique qu'on entend aussi sur les écoles privées, les écoles publiques, où on se dit finalement,
02:34si on en a moins, on récupérera les fonds.
02:36Mais ce serait en fait une catastrophe pour les patients, pour nous tous, parce qu'évidemment,
02:41si on se fait traiter pour le cancer dans une clinique, demain, on n'aura pas si facilement que ça une place à l'hôpital.
02:48Et en plus, ça coûterait beaucoup, beaucoup plus cher.
02:51Ça coûterait combien en plus ?
02:52On a fait un petit calcul.
02:54Si toutes les cliniques privées, les hôpitaux privés disparaissaient de France, ce serait 3 à 4 milliards d'euros de plus,
03:02plus cher pour l'ensemble des Français.
03:05Et donc, on se pose la question.
03:07Mais enfin, mais pourquoi ?
03:08Quelle mouche a piqué finalement les autorités pour faire une revalorisation qui est 11 fois plus importante pour le public que pour le privé ?
03:17C'est absolument incompréhensible.
03:19Et là, on se demande s'il n'y a pas derrière une guerre larvée, en fait, entre hôpitaux publics et cliniques.
03:24Le ministre de la Santé est l'ancien représentant de l'hôpital public.
03:27Absolument, absolument, oui.
03:29Et là, on voit quand même qu'on est toujours hospitalo-centré, mais toujours sur le public et que là, on maltraite vraiment financièrement nos cliniques.
03:38Attention, ça peut nous coûter très cher et aussi en termes de santé.