Dans son édito du 26/04/2024, Agnès Verdier-Molinié revient sur l'inflation des dépenses publiques et les menaces de grèves à l'approche des Jeux olympiques de Paris 2024.
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00:00 C'est absolument déroutant comme période.
00:03 On a l'impression que les vannes sont à nouveau ouvertes avec les JO qui arrivent
00:06 et qu'on est plutôt dans une sorte de quoi qu'il en coûte qui redémarre.
00:10 Et puis, alors tous les jours, on entend parler de nouvelles primes à la RATP,
00:13 à la SNCF, dans la police, dans les hôpitaux, de tous les côtés, ça sort.
00:18 Et là, on peut estimer déjà.
00:19 Alors c'est difficile parce qu'on ne nous donne pas trop les chiffres,
00:21 mais peut-être à plus de 500 millions d'euros déjà les nouvelles primes.
00:25 On sait que le coût des JO au niveau du secteur public va déraper.
00:28 La Cour des comptes l'avait déjà dit.
00:30 Et puis, de l'autre côté, on a aussi et ça, c'est assez étonnant.
00:33 Alors, on peut comprendre qu'il y ait des primes spécifiques
00:36 parce qu'il y a des moments exceptionnels avec les JO.
00:38 Et puis, de l'autre côté, on a des négociations sur des augmentations de salaire,
00:42 des aménagements pour partir plutôt à la retraite.
00:44 Et là, ce n'est pas du tout des coûts ponctuels pour les JO,
00:47 mais c'est des coûts qu'on va payer pendant des années, nous, les Français.
00:50 Comme par exemple la retraite spéciale qu'ont réussi à obtenir les syndicats de la SNCF.
00:56 Oui, alors là, cet accord est tout bonnement incroyable.
00:59 Un an après, on s'en souvient, on a supporté des grèves très difficiles
01:02 avec la réforme des retraites, le décalage à 64 ans.
01:05 Et maintenant, les Français, ils voient quoi ?
01:07 Ils voient que les cheminots, au lieu de partir plus tard à la retraite,
01:11 véritablement à 52 ans, qui devaient passer à 54 ans,
01:14 57 ans qui devaient passer à 59 ans,
01:16 finalement, ils vont pouvoir partir à 52 ans et trois mois ou 57 ans et demi
01:21 en touchant encore 75 % de leur dernier salaire,
01:25 sans travailler, un accord beaucoup plus généreux que ce qui existait avant.
01:29 C'est ce qu'ils appellent la possibilité de partir progressivement à la retraite.
01:33 Mais en réalité, ça va nous coûter cher.
01:35 Il va compter combien cet accord ?
01:38 Alors là, justement, c'est ça qui est incroyable.
01:40 C'est qu'on n'a absolument aucun chiffre.
01:43 Alors, on peut se référer à l'ancien accord.
01:46 L'ancien accord, il coûtait entre 30 et 35 millions d'euros par an.
01:49 Et comme il était utilisé que par 10 ou 12 % des agents,
01:52 si on extrapole, si on se dit que 100 % de ceux qui sont concernés
01:56 pourraient utiliser cette possibilité, c'est peut-être 300 millions d'euros.
02:00 Et alors là, justement, Romain, c'est ça qui est intéressant.
02:02 C'est que la réforme des retraites, le décalage d'âge de deux ans,
02:06 ça nous faisait gagner combien ?
02:07 Eh bien, potentiellement autour de 300 millions d'euros.
02:10 Et alors quand Sud Rail dit "nous, on est super fort,
02:13 on a annulé les effets de la réforme des retraites",
02:16 ils ont peut-être raison.
02:19 Vous nous avez parlé de la SNCF.
02:20 Je sais qu'on parle également des aiguilles hors du ciel.
02:23 Ils ont obtenu quelque chose.
02:24 On ne sait pas bien ce qu'ils ont obtenu, mais ils ont obtenu quelque chose.
02:26 Voilà, c'est pareil.
02:27 Ni le gouvernement, ni les syndicats.
02:29 Personne ne dit combien ça va coûter.
02:33 Et là aussi, c'est l'occasion trop belle.
02:36 Ils avaient dit qu'il y aurait une trêve olympique.
02:38 Vous vous en souvenez ?
02:39 Il n'y a pas du tout de trêve olympique.
02:41 On nous met la pression à fond.
02:42 Et puis, on a vu la journée d'hier avec tous ces vols annulés.
02:47 Et alors, ce qu'on pense, c'est qu'ils demandaient 25 % d'augmentation de salaire.
02:50 Ça aussi, ça va être payé pendant des années.
02:53 Peut-être un accord autour de 50 millions d'euros de coûts annuels.
02:57 Mais là aussi, c'est vraiment ce prétexte des JO
03:00 qui permet de déclencher ces dépenses pérennes.
03:05 Alors, nous, on pose la question, mais pourquoi est-ce qu'on n'a pas voté
03:08 cette proposition de loi du Sénat qui avait été adoptée au Sénat,
03:11 qui disait tout simplement, comme en Italie,
03:14 pendant certaines périodes, on décide qu'il n'y peut pas y avoir de grève
03:18 dans les transports publics.
03:20 Si ça avait été adopté, il y aurait eu le feu dans le pays.
03:22 En tout cas, la SNCF aurait été entièrement bloquée.
03:25 Non, c'est pour ça ?
03:26 Non, je crois que c'est surtout qu'il y avait une sorte de deal
03:29 entre le gouvernement et les syndicats pour dire pendant les JO,
03:31 on ne fait pas de grève.
03:32 Et en réalité, personne, personne ne respecte cette espèce de deal.
03:37 Et on est dans une situation où le gouvernement a fait confiance
03:41 aux syndicats et il a eu tort.
03:42 Ben oui, et oui. Et la proposition de loi, elle était là,
03:46 elle était déjà votée.
03:48 Le gouvernement a dit qu'il s'y opposait au lieu de dire qu'il la soutenait.
03:51 Ce n'était pas quelque chose de délirant.
03:53 C'était des périodes de 15 jours maximum,
03:56 à raison de 60 jours par an max, où on ne pouvait pas bloquer le pays.
04:02 Est-ce que c'est trop demandé ?
04:04 C'est compliqué de faire bouger ce pays.
04:06 C'est compliqué, mais c'est vrai que là, aujourd'hui, l'image,
04:08 l'image de la France, et on sait que le taux de réservation dans l'hôtellerie
04:11 n'est pas du tout à l'aune de ce qu'on imaginait,
04:13 l'image de la France est impactée par toutes ces annonces de grève,
04:17 ces préavis.
04:18 Je n'ai même pas parlé des préavis qu'il y a dans les trois fonctions publiques,
04:20 avec des préavis qui courent jusqu'à la fin des paralympiques.
04:24 Donc, à un moment, il faut peut-être se doter, et c'est constitutionnel,
04:27 c'est dans le préambule de la Constitution où on dit que oui,
04:30 le droit de grève doit s'exercer, mais dans le cadre des lois qui l'encadrent.
04:36 [Musique]
04:39 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]