• il y a 7 mois
Mardi 30 avril 2024, le rapport d'inspection de l'affaire Samara ne relevait "aucun manquement fautif de la part du personnel de l'établissement". L'adolescente avait été rouée de coups près de son collège début avril. Un rapport qui révolte les associations qui luttent contre le harcèlement. Nora Tirane-Fraisse, fondatrice et déléguée générale de l'association "Marion la main tendue", est l'invitée de Jérôme Florin.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau du 01 mai 2024

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Transcription
00:00 *Générique*
00:04 Samara, 13 ans, agressée par un groupe d'élèves devant son collège de Montpellier le 2 avril dernier,
00:09 n'a pas été victime de harcèlement scolaire.
00:12 Il n'y a pas eu de défaillance de la part du personnel de l'éducation dans l'agression de cette jeune fille.
00:17 C'est ce qu'a conclu l'enquête administrative lancée par le ministère de l'Éducation nationale.
00:22 On entendait hier sur RTL l'émotion de la maman de l'adolescente qui s'était dit choquée par ses conclusions.
00:28 Et c'est aussi, je crois, votre sentiment, Nora Thyrène Frest, bonjour.
00:32 - Bonjour.
00:33 - Vous êtes écrivaine, fondatrice et déléguée générale de l'association Marion la Main Tendue.
00:38 Marion, c'est le prénom de votre fille qui s'est donné la mort en février 2013 parce qu'elle était harcelée.
00:44 Ce rapport, cette conclusion vous met hors de vous.
00:47 Pourquoi elle n'a pas été faite sérieusement, selon vous, cette enquête administrative ?
00:52 - Je ne dis pas qu'elle n'a pas été faite. Bonjour d'abord. Je ne dis pas qu'elle n'a pas été faite de manière sérieuse.
00:58 Je dis juste que j'ai lu la synthèse, je l'ai relue et j'ai noté tous les faits constitutifs d'un harcèlement,
01:05 c'est-à-dire qui correspond à la définition officielle, c'est-à-dire une personne qui est victime de faits de violence répétés par un groupe, une meute.
01:13 Et cette personne n'a pas les ressources personnelles pour s'en sortir.
01:17 Donc moi, j'ai lu plutôt un phénomène de harcèlement dont cette jeune fille et sans doute d'autres ont été victimes.
01:23 Donc c'est pour ça que quand j'ai lu les conclusions et je l'ai lu de manière très objective, je n'ai pas compris, j'étais abasourdie.
01:30 Je me suis dit alors nous n'avons pas la même définition du harcèlement en milieu scolaire.
01:35 C'est ça qui m'a choqué, ce n'est pas la mission et c'est très bien, il faut en mettre en place.
01:39 Mais les conclusions n'ont aucun rapport.
01:40 - Mais cette mission dit, je cite et vous l'avez lu aussi, qu'on ne peut établir objectivement une situation de harcèlement scolaire à l'encontre de Samara.
01:48 - Et pourtant quand vous lisez, j'invite tout le monde à lire.
01:51 Moi j'ai lu la synthèse, donc c'est ce qui est mis à disposition du grand public.
01:54 Il est quand même indiqué des signaux faibles, une chute des notes, de l'insolence, des retards, des absences,
02:01 qu'elle était souvent, et c'est ça qui m'a surprise, et pas tant que ça en même temps, dans des conflits.
02:08 Et il ne s'agit pas de conflits quand il s'agit de violences répétées.
02:12 Il n'y a pas de relations asymétriques quand on est dans des conflits.
02:14 Et justement, si la personne est souvent dans des conflits, c'est souvent le signe également qu'elle subit des violences.
02:21 Donc j'étais très étonnée par ce qui a été écrit.
02:25 Je ne dis pas que le programme clair de prévention du harcèlement à l'école est mis en place.
02:29 Je suis étonnée qu'il ait été informé, je crois depuis fin 2023, que cette jeune fille avait subi du cyberharcèlement.
02:39 Pourquoi l'article 40 n'a pas été levé ? Pourquoi il n'y a pas eu un signalement auprès du procureur ?
02:45 Parce que c'est une obligation de tout fonctionnaire quand il a connaissance de faits délictuels.
02:49 Et je rappelle, depuis mars 2022, le harcèlement est un délit.
02:53 Donc voilà, il y a vraiment beaucoup d'indices.
02:56 - Votre conclusion, c'est quoi ? C'est qu'on fait semblant de ne pas voir ?
03:01 - J'essaie d'être objective parce que ça m'a quand même rappelé malheureusement notre drame avec Marion.
03:07 Lors de l'enquête administrative, il était indiqué à peu près la même chose.
03:11 C'est qu'on ne pouvait pas conclure un harcèlement, un mal-être, parce que là la jeune fille souffre de mal-être,
03:16 fait souvent des allers-retours à l'infirmerie.
03:18 Et pourtant, nous avons continué, poursuivi. Il n'y avait pas de délit de harcèlement.
03:23 Et nous avions fait condamner l'État partiellement pour harcèlement et défaut de mise en place de protocole et de prise en charge pour notre fille.
03:31 Donc c'est pour ça que moi je m'interroge et il est souvent dit, également dans cette enquête,
03:36 qu'il y aura un éclairage de l'enquête judiciaire.
03:38 Donc moi je souhaite qu'il y ait des éléments, mais de conclure qu'objectivement il n'y a pas de harcèlement.
03:42 Et autre chose qui m'a surprise, c'est l'absence de sanctions.
03:46 C'est-à-dire que les faits sont relatés, des violences, des agressions, et pourtant on n'entend pas, on ne lit pas.
03:54 Les élèves concernés ont fait l'objet de sanctions.
03:57 Et puis je trouve, je trouve à titre personnel, que la jeune fille est quand même souvent accablée
04:03 en indiquant qu'elle n'a pas voulu donner le nom de ses agresseurs, elle n'a voulu rien dire.
04:06 Mais quand on connaît ce phénomène, on sait qu'il y a la peur des représailles, la honte, la culpabilité,
04:11 la volonté de ne pas être isolée, et puis dire que ce sont les réseaux sociaux, pas seulement,
04:17 ils sont réalisés par des élèves.
04:19 Donc ces élèves auraient dû faire l'objet, un, de sanctions et d'un signalement auprès du procureur.
04:23 Mais vous avez raison de rappeler que l'enquête judiciaire, elle, se poursuit.
04:27 Nora Tiranfresque, on entendait dans un reportage ce matin, les choses bougent quand même,
04:32 il y a des référents anti-harcèlement qui travaillent dans les collèges,
04:37 on entendait ça dans un reportage tout à l'heure à Amiens.
04:40 Donc depuis le drame de votre fille Marion, il y a eu des progrès, on avance, la parole se libère.
04:47 - Ah mais je ne le nis pas, j'ai participé pendant trois ans bénévolement à l'élaboration du programme PHAR,
04:54 notamment la communication avec les familles, le volet sanctions, la formation des élèves ambassadeurs,
05:00 c'est ce que je vous ai dit en préambule.
05:02 - Qu'est-ce qui manque alors aujourd'hui ?
05:04 - Moi je pense qu'il y a une méconnaissance du phénomène de harcèlement,
05:08 que les mots ne sont pas posés, c'est pas un gros mot de dire qu'il y a du harcèlement,
05:13 de toujours se cacher derrière l'idée de conflit, quand c'est du harcèlement, c'est du harcèlement,
05:17 la personne est en souffrance, que peut-être, et c'est indiqué dans ce rapport d'ailleurs,
05:21 un manque de moyens humains préconise un assistant de prévention et de sécurité supplémentaire,
05:26 donc ça veut dire qu'il y a quand même l'effet de violence.
05:28 Voilà, donc bien sûr que les choses sont faites, mais vous savez, pour les personnes victimes
05:33 de cet établissement ou d'autres, de violences en général,
05:36 ils ont un sentiment d'impunité et d'injustice,
05:39 ce qui renforce les violences dans l'établissement, en dehors de l'établissement,
05:42 et je trouve que là, ce rapport, parfois, comme vous lisez,
05:47 dit parfois tout et son contraire dans le même paragraphe.
05:50 - Bref, il y a encore du boulot si on vous suit Nora Thyrène Fresse.
05:53 - J'espère que la petite va bien.
05:54 - Merci, oui, il faudra qu'elle soit suivie évidemment, cette jeune Samara.
05:58 - Merci beaucoup Nora Thyrène Fresse, fondatrice et déléguée générale de l'association
06:03 "Marien la main tendue".
06:04 Merci beaucoup à vous, bonne journée.
06:05 - Merci, au revoir.
06:06 Cette interview est à retrouver sur l'appli RTL.

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