• il y a 8 mois
Avec Emmanuelle Soler.

Retrouvez "La question qui" sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/burne-out

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😹
Amusant
Transcription
00:00 -Bonjour, M. le metteur en scène. Je ne vous avais pas vu.
00:03 Je m'appelle Edmond de Charnassé.
00:05 Je suis comédien professionnel.
00:08 Mon curriculum vitae.
00:13 J'ai fait 3 ans de conservatoire,
00:16 1 mois d'expression corporelle,
00:19 1 an pour m'en remettre,
00:22 2 ans de diction
00:24 et 11 ans de chômage.
00:28 -Un théâtre bien loin de celui que vous pratiquez,
00:31 Emmanuelle Solao, que vous avez pratiqué chez vous.
00:35 Baba Karr, Shafik, Nadia,
00:37 ce sont les noms de certains habitants de Nanterre
00:40 qui ont accepté de faire rentrer des inconnus chez eux
00:44 dans l'espace le plus intime qui soit
00:47 pour leur raconter une histoire dans le cadre du festival
00:50 "Dans ma maison, vous viendrez".
00:52 C'est un projet de Philippe Jammet
00:55 avec la troupe du théâtre Nanterre-Amandier.
00:58 Ils ont eu l'espoir de rester anonymes,
01:00 leur match inoubliable,
01:02 histoire de découvrir l'étranger de la porte d'à côté.
01:06 Qu'est-ce qui vous a pris de participer à cette expérience ?
01:09 Quelle histoire avez-vous choisi de raconter ?
01:13 -Merci de m'accueillir dans votre maison.
01:16 Je veux rajouter quelques noms.
01:18 On était 8 habitants de Nanterre à participer.
01:22 Il y avait aussi Hassan, Hamza, Hadjar et Martia.
01:25 Alors, pourquoi j'ai fait ce projet ?
01:28 Les Amandiers m'ont proposé de faire ce projet en novembre.
01:32 J'avais hyper peur, en fait,
01:35 parce que c'est un peu notre rêve.
01:37 Je travaille aussi avec des théâtres.
01:40 C'est notre rêve de faire en sorte que le théâtre aille partout,
01:44 notamment dans les maisons.
01:46 Ça se fait beaucoup à Sevran,
01:48 dans plein d'endroits, à Saint-Denis.
01:51 Mais la particularité du projet, la force du projet,
01:55 c'est que c'est les habitants qui reçoivent et qui font du théâtre.
01:58 Ils se transforment en "artistes".
02:01 La maison est transformée, la cuisine devient un plateau de théâtre.
02:05 On pousse les meubles...
02:07 -Pas les murs, c'est plus difficile.
02:09 -On fait le ménage.
02:11 J'allais dire...
02:13 Peut-être pour économiser 50 psychanalyses.
02:16 C'est vrai que c'est génial d'avoir...
02:19 C'est un cadeau des Amandiers.
02:21 J'avais très peur au départ.
02:24 Je me suis enfermée deux jours pour écrire
02:26 sur une période de ma vie un peu difficile.
02:29 J'ai fait un texte.
02:31 C'est juste hallucinant, ce qui se passe.
02:34 -Comment ça ?
02:35 "Aidez-nous, dites-nous ce qui est hallucinant."
02:39 -Faire récit de sa vie, c'est une forme de résilience.
02:42 C'est ce que disent beaucoup de gens, surtout des artistes.
02:46 C'est aussi une traversée.
02:48 Après, dans le cas des Olympiades culturelles,
02:52 il y avait ce thème du sport.
02:54 Il fallait le raccrocher au sport.
02:56 Là où c'était intéressant,
02:58 c'est que j'ai eu un discours un peu décalé.
03:02 Je ne suis pas sportive, mais mes enfants ont fait du basket à Nanterre.
03:06 Gros club, immense club, incroyable.
03:09 Mon aîné a été formé au Centre de formation des sports
03:13 avec Victor Mbanyama.
03:14 Il a vécu un truc de fou.
03:16 Je raconte les coulisses.
03:18 Pour moi, c'était chaotique.
03:21 Le basket explosait ma vie.
03:23 Tout foutu en l'air.
03:24 J'écris ce récit.
03:26 Alors que les autres ne sont pas dans la même démarche.
03:30 Il y a des champions, une championne paralympique,
03:34 des gens extraordinaires.
03:36 C'est un projet fabuleux.
03:38 -Julie Deliquet, si quelqu'un raconte sa propre histoire,
03:42 c'est du théâtre ?
03:44 -Oui, bien sûr.
03:45 C'est aussi...
03:47 C'est toute une pensée de se dire des fois
03:50 comment le théâtre se déplace, comment il est en expérience.
03:54 Rentrer dans les foyers, on a fait un grand projet l'année dernière
03:59 sur la question des langues et la non-transmission.
04:03 On a eu besoin d'aller enquêter chez les gens.
04:06 Des fois, juste de manger, de parler,
04:09 pour constituer, avec les artistes qui ont mené le projet,
04:13 des groupes d'habitants, d'enfants et d'adultes
04:17 qui sont venus écrire sur cette question-là
04:20 pour en faire un projet participatif amateur.
04:23 Donc, évidemment que la question s'interroge.
04:26 La question de la place, même, comment le théâtre vient à l'autre,
04:31 doit être sans cesse en questionnement, sinon c'est stérile.
04:34 -Il y a eu un projet similaire dans ma ville à Saint-Brieuc,
04:38 qui s'appelait "Safari intime".
04:40 On regardait la pièce, les choses qui se jouaient,
04:43 mais aussi la pièce, le lieu.
04:46 On est curieux de regarder comment c'est chez les gens.
04:50 Vous avez dit "un gros ménage", c'est cool,
04:52 mais vous n'avez pas été tentée de modifier l'image de vous
04:56 ou de ce que vous alliez projeter en changeant de décor ?
05:00 -Non, pas du tout.
05:01 Non, pas du tout, mais justement,
05:04 je trouve que c'est ça qui est intéressant dans ces projets.
05:08 Je pense que c'est le graal de tout comédien ou comédienne,
05:12 c'est vraiment d'atteindre cette sincérité.
05:15 Là, je parle en termes de...
05:17 J'ai vu tous les autres récits,
05:19 et j'en ai même presque oublié le mien.
05:22 Hier, j'en ai vu deux qui m'ont bouleversée.
05:25 C'est hallucinant,
05:27 comme les gens sont vraiment bouleversés, en fait.
05:31 Je dis ça parce que j'étais aidée,
05:33 parce que je fais de la radio, du théâtre, j'écris.
05:37 Les autres, c'est des sportifs,
05:39 ils avaient peut-être moins...
05:41 Ils avaient plus le trac et étaient moins à l'aise avec le récit.
05:46 Mais c'était énorme, c'était immense.
05:50 Ils sont dans une honnêteté.
05:54 Et puis, accueillir chez soi,
05:56 c'est comme accueillir dans un théâtre, pour moi.
05:59 La mission du théâtre, c'est vraiment...
06:01 On va accueillir des spectateurs, on ne sait pas d'où ils viennent.
06:05 D'ailleurs, Chafik, par exemple,
06:08 un des habitants qui n'a pas pu nous accueillir chez lui,
06:11 parce qu'il vit dans 10m2, il est afghan, il est là depuis 3 ans.
06:16 Il a tout quitté à cause des talibans.
06:18 Il s'est retrouvé en France,
06:20 sa troupe de théâtre était disloquée.
06:22 Ils se sont retrouvés grâce au théâtre de Nanterre, de Montreuil et de Malakoff.
06:26 Pour moi, la fonction du théâtre, c'est de rassembler les gens
06:29 et de ne pas savoir d'où on vient, on y va ensemble.
06:33 - Les gens restent après ?
06:35 Ou on raconte l'histoire et les gens sont partis ?
06:37 - Pas du tout, les gens restent.
06:39 C'est bouleversant, parce qu'il y a énormément d'émotions.
06:43 Pour la dernière phrase, j'ai failli pleurer,
06:46 parce que je savais aussi que c'était la dernière.
06:48 Les gens restent, parce que les amendiers nous accueillent superbement aussi,
06:52 avec une équipe incroyable.
06:54 Pareil, j'avais le directeur du théâtre des amendiers sur mon canapé.
06:58 - Il vous accueille chez vous, en fait.
07:01 - Il nous accueille chez nous, mais il nous accueille en amenant à boire,
07:04 en amenant à manger.
07:06 C'était une association de Nanterre qui avait fait à manger,
07:09 donc on a mangé pendant 3 jours, ils ne s'arrêtaient pas de nous donner à manger.
07:12 Donc on reste, oui, oui.
07:14 Il y a des dames qui m'ont demandé des photos des enfants, c'était dingue.
07:18 - Est-ce qu'il n'y a pas le risque de recruter des gens toujours partants,
07:21 comme vous, Emmanuelle, Julie Deliquet,
07:24 quand on fait ce genre de projet avec les autres,
07:26 à ceux à qui ça ne parle pas vraiment, on reste sur le côté ?
07:28 - Il s'agit en tout cas de ne pas rester dans un système,
07:32 et de se réinterroger à nous, ce qu'on essaye de faire à notre échelle.
07:36 En tout cas, chaque saison, c'est de pouvoir co-penser
07:39 un grand projet participatif,
07:42 qui, là c'était la question des langues,
07:44 ça peut être la question de la place de la femme,
07:46 ça peut être la question de la place des jeunes,
07:49 l'année prochaine c'est la question des quartiers,
07:51 donc en fait, ça nous permet aussi de nous mettre aussi en expérience,
07:55 et pas du tout rester sur un modèle qui marche, par exemple,
07:58 et qui évidemment, mettrait aussi sur le côté,
08:04 ou sur le bas-côté des gens à qui on a pour vocation
08:10 de s'adresser à eux, et de s'interroger sur comment.
08:14 - Emmanuelle Solaire, pour se quitter, trois mots pour nous donner envie
08:17 d'aller vivre à Nanterre, puisque vous êtes extrêmement investie dans votre ville.
08:20 - C'est une ville incroyable, qui fait énormément pour les enfants et les jeunes,
08:23 il y a la Maison de la Musique, le Nanterre à Mandier, le Théâtre,
08:28 c'est le plus grand Cédennes de France...
08:30 - Juste un mot Emmanuelle ! - Oui, pardon !
08:32 - Non mais, voilà, c'est... - On sent votre passion.
08:37 - Merci beaucoup Emmanuelle Solaire de nous avoir raconté votre expérience du festival
08:41 chez les habitants et habitantes de Nanterre.
08:44 Ça revient l'année prochaine, au printemps, pour de nouvelles histoires et de nouveaux paillassons.
08:47 Bienvenue de sortie !

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