• il y a 7 mois
En ce printemps 1984, tout semblait sourire à Marvin Gaye. Après des années passées au creux de a vague, roi de la soul music, auteur de 200 titres, effectuait un spectaculaire comeback dont il ne profitera pas. A la veille de son 45eme anniversaire, on le retrouve mort. Tué de deux balles dans sa propre maison, à Los Angeles. Un crime qui va susciter tout de suite surprise et interrogations. Car c'est son propre père, Marvin Senior, qui aurait fait feu.

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00:00 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
00:05 Jean-Alphonse Richard.
00:07 Vers 12h30 cet après-midi, le chanteur Marvin Gaye s'est violemment disputé avec son père.
00:16 Marvin Gaye a été blessé à plusieurs reprises par une arme à feu et a été transporté vers l'hôpital le plus proche où il a été déclaré mort à son arrivée.
00:26 Son père a été placé en garde à vue.
00:30 Bonjour, en ce printemps 1984, tout semblait sourire à Marvin Gaye.
00:37 Après des années passées au creux de la vague, le roi de la soul music, auteur de 200 titres, effectuait un spectaculaire comeback dont il ne profitera pas.
00:46 A la veille de son 45e anniversaire, on le retrouve mort, tué de deux balles chez lui à Los Angeles. Un crime ahurissant et incompréhensible car c'est son propre père Marvin Senior qui a fait feu sur son fils.
01:01 L'enquête va alors plonger dans les coulisses d'une histoire familiale qui cache des détestations, des haines recuites, des jalousies.
01:09 On va se demander pourquoi le révérend Gaye, homme de Dieu, a abattu son fils et s'est interrogé sur le véritable scénario de ce félicide, un parent qui tue un enfant qui était devenu un homme.
01:23 Et si le musicien avait mis en scène sa propre mort en armant le bras de son père, que cache vraiment ce drame ? L'enquête est-elle vraiment allée jusqu'au bout ?
01:32 Question posée aujourd'hui à nos invités.
01:34 L'affaire Marvin Gaye, sanglant secret de famille. Mon mari n'a pas dit un mot. Il est remonté avec le revolver, il a tiré sur mon fils deux fois, j'ai hurlé, tout s'est passé si vite.
01:47 L'enquête aujourd'hui de l'heure du crime, la seule émission radio 100% fait d'hiver. A tout de suite sur RTL.
02:00 Dans l'heure du crime, aujourd'hui, le meurtre à huit clots de Marvin Gaye. Au printemps 1984, le musicien et interprète à succès de dizaines de tubes est retrouvé sans vie dans sa maison de Los Angeles.
02:12 Abattu à coup de revolver, son père va aussitôt faire figure de suspect numéro 1.
02:19 Dimanche 1er avril 1984, peu après 12h30, une ambulance est appelée au numéro 2101 South Gramercy Park, dans le quartier de West Adams, à Los Angeles.
02:32 Des coups de feu viennent d'être entendus. Il y aurait un blessé dans cette vaste maison de style vaguement anglo-normand, au bardage peint en vert amande.
02:42 C'est la demeure d'une célébrité, le chanteur et musicien Marvin Gaye. C'est lui qui serait blessé.
02:48 Les secours accèdent à la maison, il monte au premier étage, Marvin Gaye, sur le sol de sa chambre. Couché sur le dos, la poitrine ensanglantée.
02:57 Il a perdu connaissance dans les bras de son frère, accouru après les détonations, Frankie Gaye, vit dans un appartement séparé de l'habitation avec sa femme, Irene.
03:07 La victime, touchée par balle, est aussitôt transportée au California Hospital Medical Center.
03:13 Impossible de ranimer le chanteur qui a perdu trop de sang, il est déclaré mort à 13h01.
03:20 La police de Los Angeles est sur place, le lieutenant Bob Martin et une poignée d'agents se dirigent tout de suite vers un homme assis sous le Porsche,
03:28 vêtu d'un polo et d'un chapeau de toile blanc, prostré, regard absent derrière de petites lunettes de vue. Il s'agit de Marvin Gaye Senior, 69 ans,
03:38 pasteur de l'église Pentecôte, le père de la victime. C'est lui qui a tiré sur son fils, on le menotte dans le dos.
03:46 Marvin Gaye Senior est conduit au commissariat central de Los Angeles. Pour le moment, il paraît incapable d'expliquer son geste.
03:53 Il dit qu'il ne pensait pas avoir tué son fils, tout au plus voulait-il lui faire peur. Le chanteur hébergait sa mère dans sa maison,
04:02 mais son père les avait rejoints il y a quelques mois après avoir vendu son logement à Washington.
04:07 La mère, Alberta, 71 ans, en pleurs, est entendue. Elle était là quand Marvin a été tué, elle a tout vu.
04:15 Elle raconte qu'en fin de matinée, une dispute a éclaté entre le père et le fils.
04:19 Mon mari est monté à l'étage car il ne trouvait pas un document, un papier d'assurance. Il s'est énervé, il a commencé à crier.
04:27 Mon fils a alors fait irruption. Alberta Gaye indique que Marvin était vêtu d'un peignoir.
04:34 Il a empoigné son père et l'a poussé dans le dos jusqu'à sa chambre. Il lui a dit qu'il allait le frapper.
04:40 Je les ai suivis, j'ai vu mon mari sur le sol, il se plaignait d'avoir été frappé. Je les ai séparés.
04:46 Alberta Gaye raconte qu'après cet incident, son époux est descendu dans le salon, puis il est remonté calmement à l'étage.
04:54 Il tenait le revolver que Marvin nous avait offert pour nous défendre en cas de cambriolage, raconte Alberta.
05:01 Il n'a pas dit un mot, il a tiré sur Marvin deux fois, j'ai hurlé mais tout s'est passé si vite.
05:06 La maman dit être sortie en courant pour appeler à l'aide Frankie, son autre fils.
05:11 Selon les légistes, Marvin Gaye a été tué de deux balles de calibre 38.
05:16 La première a été mortelle, elle a transpercé le cœur, le poumon et le foie.
05:21 La deuxième a touché l'épaule gauche, tir tellement rapproché que la poudre recouvre le visage de la victime.
05:28 Jeudi 5 avril, quatre jours après le crime, Marvin Gaye est inhumé au Forest Lawn Memorial Park à Glendale.
05:36 5 000 personnes assistent aux obsèques, parmi lesquelles 75 invités de marque.
05:42 Les chanteurs Barry White, Smokey Robinson, German Jackson, Little Richard sont là.
05:48 Tout comme l'état-major de la Motown, la maison de disques avec qui il a signé ses plus grands succès.
05:54 Marvin Gaye, marié deux fois, père de deux enfants, est décédé la veille de son 45e anniversaire.
06:03 Le monde de la musique et de la chanson, et le monde tout court sans doute, pleure l'une de ses plus grandes stars
06:09 qui revenait depuis quelques mois aux avant-postes.
06:11 Après une longue éclipse, le monde de la justice et de la police s'interrogent sur ce crime.
06:16 Assassinat, meurtre, accident, suicide déguisé, rien n'est vraiment très clair à ce stade des investigations.
06:24 Mais des explications vont venir, des explications vont apparaître.
06:27 On va en parler dans la suite de l'Horreur du Crime. Il faut retourner à ce 1er avril à Los Angeles.
06:33 La mort de Marvin Gaye fait bien sûr tout de suite la une des plus grands journaux.
06:38 Bonjour Frédéric Adriaen.
06:39 Bonjour.
06:40 Merci infiniment d'être avec nous aujourd'hui dans le studio de l'Horreur du Crime.
06:43 Vous êtes journaliste, spécialiste de musique populaire afro-américaine,
06:47 et vous êtes auteur de la première biographie de Marvin Gaye en français.
06:51 Marvin Gaye, tout simplement le titre est tout simple et explicite.
06:55 Livre qui est publié aux éditions du Castor Astral.
06:59 Alors on va parler de cette étrange mort qui peut-être recèle bien des secrets.
07:05 Mais là tout de suite un mot sur Marvin Gaye, qu'on resitue un petit peu le personnage.
07:10 C'est une star immense qui vient de disparaître.
07:12 C'est une énorme vedette. Il enregistre depuis le tout début des années 60,
07:16 même un petit peu avant mais sans notoriété.
07:18 Il a enchaîné les tubes à partir du milieu des années 60.
07:21 C'est un peu plus compliqué à partir des années 70, le milieu des années 70.
07:25 Il est dans le creux de la vague.
07:27 Personnellement il n'est pas dans un très très bon état.
07:31 Il a une histoire improbable d'exil où il finit par passer un an à Ostende.
07:35 Pour des raisons qui ne le veulent pas tout le monde en Belgique.
07:37 Pour le fisc je crois aussi.
07:39 Enfin bon peu importe.
07:40 Il est très perdu et il va reprendre des forces y compris psychologiquement
07:44 en s'éloignant des entourages un peu compliqués qu'il avait en allant à Ostende.
07:48 Il s'en va de son label historique qui est Motown.
07:51 Il signe avec Columbia et il enregistre un disque
07:55 qui lui permet de faire un retour de popularité absolument invraisemblable.
07:58 Avec un titre qui est...
08:00 Avec "Sexual Healing" qui est un des plus gros tubes des années 80
08:05 et qui lui vaut des prix, des passages de télé et de radio invraisemblables.
08:09 Et juste encore un petit mot Frédéric Hadrien.
08:12 Il est dans cette maison à Los Angeles.
08:14 Ce n'est pas une maison fantastique.
08:16 Elle est presque banale dans ce quartier.
08:18 Il recommence à gagner de l'argent.
08:20 Vous l'avez dit, il est dans quel état d'esprit ?
08:22 Alors qu'il va mourir mais...
08:24 Il a recommencé à gagner de l'argent quelques mois plus tôt
08:26 puisqu'il a eu le disque et puis il a fait une assez grande tournée.
08:29 Mais parce qu'il a beaucoup besoin d'argent.
08:31 Parce qu'il a eu dans les années 70 et jusqu'à cette époque là
08:34 des habitudes on va dire toxicologiques extrêmement coûteuses.
08:38 Et des divorces coûteux.
08:39 Et des divorces également coûteux.
08:41 Donc il a beaucoup besoin d'argent.
08:43 Et puis il est dans un très mauvais état psychologique et psychiatrique à cette époque.
08:47 Bonjour Fabrice Epstein.
08:49 Merci infiniment d'être avec nous dans le studio de l'or du crime.
08:52 Alors vous êtes avocat, auteur du livre "Black Music Justice"
08:57 Une histoire judiciaire des musiques noires aux éditions de la manufacture de livres.
09:02 Alors je pose la question à la fois du connaisseur de cette musique
09:06 mais à la fois aussi à l'avocat.
09:08 Alors il y a cet accrochage, cette dispute.
09:12 Le père et le fils se sont disputés.
09:14 C'est pas la première fois ? Parce qu'ils ne s'entendent pas bien ces deux gens ?
09:17 Oui, les deux ont un rapport très complexe depuis la toute prime jeunesse de Marvin Gaye.
09:24 Et à l'âge adulte forcément il y a des conflits.
09:28 C'est aussi un conflit de génération qui va très mal se finir.
09:30 Mais les deux ont une très mauvaise entente.
09:32 Le père Gaye est quelqu'un de très difficile, d'autoritaire.
09:36 Qui met ses enfants dans des difficultés parfois en ne les alimentant pas,
09:41 en exerçant une violence et physique et psychologique.
09:44 Et forcément avec Marvin Gaye, qui porte le même nom que lui, c'est ce qui est curieux.
09:49 Oui, Marvin Marvin, aux Etats-Unis c'est assez flippant.
09:51 Oui, après il donnera le même prénom à un de ses fils.
09:53 Il y a une relation qui est extrêmement tendue.
09:55 Alors c'est un "philicide" ?
09:57 Oui absolument.
09:58 Moi j'ai appris ce terme, je l'ignorais.
10:00 Je disais "infanticide" mais lorsque les enfants ont grandi on dit "philicide".
10:03 Exactement. Je pensais qu'on pouvait dire "infanticide".
10:06 Mais un infanticide serait peut-être quand Abraham décide de supprimer son fils Isaac.
10:10 Mais là on est dans un "philicide".
10:13 Donc un fils à l'âge adulte qui pose un problème au père, le père le tue.
10:16 Le père il a 69 ans, le fils il va avoir 45 ans.
10:19 C'est assez rare quand même ce genre de crime.
10:22 Oui, absolument. On n'en voit pas tous les jours.
10:24 On trouve dans des exemples historiques ou mythologiques des infanticides.
10:30 On peut aussi se dire qu'Agamemnon a tué sa fille Phygénie pour avoir les vents non contraires.
10:35 Mais c'est vrai que dans notre histoire populaire on le trouve très peu.
10:39 Frédéric Adriaen, on va se poser des questions sur ce crime très brutal et très rapide
10:44 qui surprend évidemment tout le monde.
10:46 Le père il est redescendu, il est allé chercher l'arme qu'il avait.
10:50 D'ailleurs c'est le fils qui l'avait offert.
10:51 C'est le fils qui avait offert l'arme.
10:53 C'est la maison qu'a acheté le fils pour ses parents, où il est revenu vivre en cours de route.
10:56 Mais c'est sa maison, c'est son arme et c'est son père.
11:00 Le fait qu'il aille chercher l'arme, c'est quand même une circonstance qui est aggravante.
11:05 Il a envie de tuer peut-être ?
11:07 Très clairement. En effet la défense du père c'est "je pensais que l'arme était chargée à blanc et je pensais plus faire peur".
11:14 Ça paraît quand même extrêmement douteux.
11:16 Parce que ce n'est pas une réaction sur un moment...
11:19 C'est un moment de tension.
11:21 Tout ce qu'on nous raconte sur l'année 84 et la fin 83, chez Marvin Gay, il y a beaucoup de tensions.
11:28 Parce que Marvin, fils, ne va pas très bien.
11:31 Il a des problèmes de drogue.
11:33 Il a des problèmes de drogue et puis il est dans un état psychiatrique très très dégradé.
11:37 Et donc il y a plusieurs fois des histoires où la police doit intervenir parce qu'il a un peu agressé des gens dans la rue.
11:42 Alors comme il est chez Columbia, qu'on est à Los Angeles, on se débrouille pour que ces choses-là ne sortent pas trop dans la presse, que ce soit étouffé.
11:49 Mais on sait qu'il y a une atmosphère de très très grande tension dans cette maison.
11:53 - Et il y a une existence agitée.
11:55 Fabrice Epstein, un mot quand même encore sur ce papa, cet homme d'église, pasteur pentecôtiste.
12:01 C'est un homme, il faut bien le dire, c'est un homme très autoritaire et d'ailleurs il est porté beaucoup sur l'alcool lui.
12:06 - Oui absolument, il est porté sur l'alcool.
12:08 On lui sait des penchants travestis.
12:10 Il s'habille parfois en femme et ça pose un gros problème à son fils d'ailleurs, qui va changer l'orthographe du nom.
12:16 Il passe de G-A-I à G-A-I-Y.
12:19 - Il change volontairement le nom.
12:21 - Oui, il change absolument volontairement de nom aussi pour se démarquer de son père.
12:25 Et vous disiez que c'était un homme d'église.
12:27 C'est un homme d'église qui a fait partie de certaines sectes religieuses, qui sont un peu à cheval entre christianisme et judaïsme.
12:35 Des gens qui sont pour que le shabbat, pour respecter le jour saint le samedi et non le dimanche.
12:41 Et donc avec aussi ce décalage et ce rigorisme à l'égard de la Bible et des principes bibliques.
12:47 Les investigations vont être beaucoup plus précises.
12:50 Le père savait-il vraiment ce qu'il faisait ?
12:53 L'affaire Marvin Gaye, sanglant secret de famille.
12:56 Je croyais que le revolver était chargé à blanc.
12:59 La première balle n'a pas semblé lui faire beaucoup de mal, alors j'ai encore tiré.
13:03 L'enquête de l'heure du crime. On se retrouve dans un instant sur RTL.
13:07 14h30, 15h30, l'heure du crime sur RTL.
13:12 Heure du crime consacrée à la mort brutale du chanteur Marvin Gaye au printemps 1984 dans sa maison de Los Angeles.
13:19 Un scénario aussi rare que dramatique, c'est son propre père qui l'a tué.
13:23 Coup de folie ou vengeance réfléchie, quel rancœur a pu entraîner cette tragédie ?
13:29 Mercredi 4 avril 1984, le juge de Los Angeles, Michael Tynan, ordonne une évaluation psychiatrique de Marvin Gaye senior, meurtrier désigné de son fils.
13:42 L'un de ses avocats, Philip Schreiber, affirme que le pasteur n'a pas toutes ses facultés intellectuelles.
13:49 Il ne comprend pas du tout ce que la justice attend de lui.
13:52 Il n'a aucune idée de la manière dont il peut se défendre, explique-t-il.
13:56 Dans l'attente des expertises médicales, le suspect numéro 1 reste en prison.
14:01 A ce stade, la justice ne dispose que des déclarations succinctes du révérend.
14:06 Il admet qu'il a tué son fils, mais ce n'est pas vraiment un aveu.
14:09 On ignore tout du contexte.
14:11 Il dit avoir été frappé par son fils.
14:13 Il pourrait revendiquer un geste d'autodéfense ou un accident, même si tout cela ne ressemble en rien à un accident, affirme la procureure Donna Braack.
14:24 Dimanche 8 avril, Marvin Gaye Senior, que l'on disait psychologiquement fragile, s'exprime très clairement dans une interview accordée depuis sa prison au Los Angeles Herald Examiner.
14:37 Il raconte être monté à l'étage, irrité de ne pas trouver un document de police d'assurance.
14:43 Son fils a surgi. Il m'a empoigné dans le dos. Il m'a jeté à terre. Il m'a donné des coups de pied, des coups partout.
14:50 Je ne résistais pas, mais je lui criais de s'en aller.
14:53 Il m'a donné un coup de poing dans la figure. Le révérend dit être allé chercher l'arme cachée sous son oreiller.
14:59 J'ai appuyé sur la gâchette, mais je croyais que le revolver était chargé à blanc, affirme-t-il.
15:05 La première balle n'a pas semblé lui faire beaucoup de mal.
15:08 Comme s'il avait touché par une balle à blanc, il a levé la main sur son visage.
15:13 Alors j'ai encore tiré, puis j'ai reculé jusque dans ma chambre et je me suis enfermé.
15:18 Le pasteur ajoute que son fils prenait de la cocaïne. Je l'entendais sniffer en permanence.
15:25 Dans ces moments-là, il pouvait ressembler à une bête.
15:28 De la cocaïne est effectivement découverte dans l'organisme de la victime, mais en petite quantité, consommée 4 à 8 heures avant le décès.
15:37 Les légistes indiquent que le chanteur n'était pas sous emprise de la drogue quand la bagarre a éclaté.
15:43 Quant au coup reçu par le pasteur, le lieutenant fait savoir qu'aucun nématome au visage n'a été relevé.
15:50 Le meurtrier conclut « Je ne voulais pas ça, je crains Dieu, je suis désolé pour ce qui s'est passé ».
15:57 Les enquêteurs se penchent sur les rapports très sombres entre le père et le fils.
16:02 Dans une interview, Marvin Gay, enfant battu par ce pasteur rigoriste et autoritaire, a un jour déclaré
16:08 « À l'âge de 12 ans, il n'y avait pas un centimètre de mon corps que mon père n'avait pas frappé ».
16:14 Il disait encore que « vivre avec ce géniteur était comme vivre avec le tout-puissant ».
16:19 Sa sœur, Jeanne, confirme que son frère était battu à coup de ceinture.
16:23 Marvin Gay avait encore dépeint son père comme un homme instable, déroutant, un alcoolique qui aimait se déguiser en femme.
16:30 Alberta Gay, mère de la victime et témoin principal du crime témoigne
16:35 « Mon mari n'a jamais aimé Marvin, il avait l'habitude de dire qu'il n'était pas son fils, c'était absurde,
16:40 mais il ne l'aimait pas et il ne voulait pas que je l'aime ».
16:44 Alberta confirme encore l'addiction à la cocaïne de son fils, une épreuve qu'il a désolé.
16:49 Elle lui demandait sans cesse d'arrêter. Marvin Gay lui promettait chaque fois que c'était fini, mais il recommençait.
16:55 Dans ce climat délétère, l'installation du père dans la maison de Los Angeles,
17:01 après avoir quitté Washington où il vivait jusque-là, aurait agi comme un détonateur.
17:07 Mercredi 2 mai, un mois après le meurtre, l'avocat du révérend annonce que celui-ci est atteint d'une tumeur au cerveau
17:13 qui risque de l'emporter d'une minute à l'autre. Il est opéré en urgence et avec succès.
17:18 20 juin, il sort de prison après avoir payé une caution de 30 000 dollars.
17:23 Le juge estime qu'il est apte à comparaître devant un tribunal.
17:28 "Apte à comparaître", ça veut dire qu'on va avoir assisté à un procès, on va voir ce que va donner ce procès.
17:34 Mais à l'attendant, y a-t-il autre chose derrière ce scénario et cette histoire familiale chaotique ?
17:40 Marvin Gay qui parlait d'en finir avec la vie, en aurait-il trouvé l'occasion en provoquant son père et en se laissant abattre ?
17:48 On va voir que c'est une thèse qui n'est pas si farfelue que cela, mais on va voir cela dans la suite et dans les prochains chapitres de l'heure du crime.
17:55 On va rester pour l'instant sur cette enquête qui progresse.
18:00 Et on retrouve l'un de nos invités, c'est Fabrice Epstein, avocat et auteur du livre "Black Music Justice" paru aux éditions de la Manufacture de Livres.
18:10 Fabrice Epstein, il y a ces déclarations du père à un journal qui sont très détaillées.
18:16 Quelques jours auparavant, son avocat a dit qu'il était quasiment sénile, qu'il ne comprenait rien à ce qu'on racontait,
18:24 qu'il n'était pas du tout apte à comparaitre. C'est un autre homme qui apparaît.
18:28 Absolument, je crois que les avocats ont une stratégie, puis quand ils voient que ça ne marche pas, ils changent de stratégie.
18:33 C'est à peu près ce qu'il a l'air de se passer. Au début, il tente de plaider une espèce de folie.
18:38 Et puis lui, dans son coin, donne une interview à un journal où il a l'air extrêmement précis sur la façon dont les choses se sont déroulées.
18:45 A savoir qu'il laisse entendre que c'est de la self-défense, comme disent les Américains,
18:50 des égarments et de la peur qu'il pouvait avoir à l'égard de son fils.
18:55 Et qu'il n'a fait que mettre un terme à cette brutalité.
18:59 À cette agression. Parce que ce qu'il décrit, vous dites, effectivement, en légitime défense,
19:03 c'est qu'on pourrait le penser, il a été attaqué, après tout, il avait le droit de se défendre.
19:07 Oui, et il a l'air aussi de s'attacher au fait que son fils était drogué, et que dans le cadre de l'autopsie, on a trouvé de la cocaïne.
19:13 Alors il y a un moment, une discussion pour savoir si on a trouvé que de la cocaïne,
19:16 ou également une autre drogue qui s'appelle le PCP ou l'angel dust, qui rend les gens violents.
19:22 Et ça va être aussi plus tard une des défenses des avocats, qui vont, une fois de plus, évoluer pour dire,
19:26 finalement Marvin Gaye était quelqu'un de violent, et son père s'est défendu, tout simplement.
19:31 Alors les médecins sur la cocaïne, ils disent que ça n'a pas lieu d'être, et qu'on ne peut pas faire le rapport,
19:38 parce qu'il y avait trop peu de quantité de produits retrouvés dans le corps.
19:42 - Encore un mot Fabrice Epstein, il décrit le père, il faut bien le dire, c'est une agression sauvage.
19:47 C'est un vieux monsieur, il a 69 ans, on le pousse dans le dos, il est un peu martyrisé,
19:54 et d'ailleurs la mère de famille va dire "oui j'ai vu mon mari sur le sol".
19:59 - Oui absolument, alors sur le sol, oui, poussé sur le sol, mais pas comme lui a l'air de le laisser entendre,
20:05 avec des blessures, des brûlures, etc.
20:08 Donc il y aura une discussion à ce sujet là.
20:11 Frédéric Adriaen, vous êtes journaliste et avec nous également dans le studio de l'Or du crime,
20:15 vous êtes auteur de la première biographie de Marvin Gaye en français,
20:18 Marvin Gaye qui a été publié aux éditions du Castor Astral,
20:21 donc vous connaissez bien ce personnage et cette star.
20:25 Le père est revenu, on l'a dit récemment, au domicile de Los Angeles,
20:29 c'est là que tout se dégrade finalement entre les deux hommes.
20:32 Il y a quelques mois qui vont se dérouler, où le climat est insupportable dans cette maison.
20:36 - C'est des gens qui ne se supportent pas.
20:39 - Très historiquement, quand sa mère dit que son père n'aimait pas son fils,
20:43 ça correspond vraiment à la réalité.
20:45 Marvin Gaye s'est sauvé de la maison familiale dès qu'il a pu.
20:48 Il a à peine 20 ans quand il commence sa carrière et à partir en tournée,
20:52 à aller s'installer à Detroit, et Detroit, Washington, c'est quand même pas du tout le même coin,
20:55 vraiment avec l'idée de s'éloigner.
20:58 D'ailleurs, à l'origine, la maison de Los Angeles, elle est plus achetée pour sa mère,
21:02 Marvin Gaye habite à Los Angeles depuis un certain temps, il a fait venir sa maman,
21:05 mais au début, son père n'est clairement pas invité.
21:08 En effet, le moment où, probablement pour des raisons financières,
21:11 il décide de venir se rapatrier lui aussi à Los Angeles,
21:15 c'est probablement là que se précipitent des choses qui préexistaient.
21:19 C'est-à-dire des relations tendues, une violence de Marvin Gaye, fils pour le coup,
21:23 qui s'est développée au fil des derniers mois.
21:27 Il fait ses derniers concerts toute fin 83,
21:31 et très clairement, début 84, tout le monde considère qu'il n'est pas en état de travailler
21:35 et qu'il vaut mieux qu'il se repose.
21:37 - Alors Marvin Gaye, on le comprend bien, il détestait son père,
21:40 il va décrire des scènes de violence terrifiante dans son enfance qu'il a vécues.
21:43 - C'est compliqué, parce qu'en effet, il dit ça, mais en même temps,
21:46 quand on écoute ses disques, il y a des chansons, sur la tournée de 83,
21:49 par exemple, qui est sa dernière tournée, tous les soirs, il dédie une chanson à son père.
21:53 Il y a une de ses chansons, un de ses classiques, qui est sur "What's going on",
21:57 qui est son grand album, qui s'appelle "God is love",
21:59 qui commence par "Ne parlez pas de mon père".
22:01 Alors, au début, on se dit que c'est une chanson religieuse,
22:04 sauf qu'après, il mentionne sa mère, ses frères, ses soeurs.
22:08 Donc, je pense que l'autre autobiographie de Marvin Gaye,
22:11 pas la mienne, celle qui a été faite par un auteur qui s'appelle David Ritz,
22:14 elle s'appelle "Divided Soul",
22:16 - C'est en anglais ? - C'est un américain, oui.
22:19 C'est une âme divisée, et je pense que ça reflète bien la situation de Marvin Gaye,
22:24 qui a probablement plusieurs personnalités, et de très très fortes contradictions.
22:29 - Est-ce que, Fabrice Epstein, est-ce que ça pouvait aller jusqu'au meurtre, cette détestation ?
22:34 Alors, c'est allé au meurtre, effectivement.
22:36 - Oui, mais je crois aussi en faisant référence à une chanson très connue de Marvin Gaye,
22:40 qui est "What's going on", où il lui dit "Father, father",
22:42 "Père, père", "We don't need to escalate".
22:44 Il ne faut pas que la violence qui est une escalade,
22:46 qui est un terme qu'on emploie beaucoup en ce moment.
22:48 Donc, il devait peut-être sentir qu'à un moment,
22:50 les choses pouvaient basculer, et aller vers le meurtre.
22:54 Ou l'assassinat, si tant est qu'on considère que ça a été prémédité.
22:58 - Alors, quelques mois auparavant, je crois qu'il avait reçu un Grammy Award.
23:02 Et j'ai regardé ses images, et ses remerciements, parce que c'est très étonnant.
23:06 Il remercie, il y a ses enfants qui sont dans la salle,
23:10 il remercie sa mère, il remercie ses enfants, il n'y a pas un mot sur son père.
23:14 - Mais dans la tournée qu'il fait en même temps, il dédie une chanson à son père tous les soirs.
23:18 Donc, très clairement, c'est des sentiments très très mêlés, très très compliqués.
23:21 Il a eu une enfance atroce, ça les témoignages sont vraiment clairs, des frères, des sœurs, etc.
23:26 - Oui, c'est un enfant battu.
23:27 - C'est un enfant battu, maltraité psychologiquement.
23:31 Son père a totalement désapprouvé ses choix de carrière et ses choix de vie.
23:35 Puisque la musique de Marvin Gaye, c'est comme une musique très sensuelle, très sexuelle.
23:39 Et le papa pasteur, pour lui, on ne chante pas ces choses-là, on chante plutôt Jésus.
23:44 - Le procès est annoncé, mais le crime serait-il un suicide déguisé ?
23:50 L'affaire Marvin Gaye, sanglant secret de famille.
23:53 J'ai eu ce que je voulais, je n'étais pas capable de le faire moi-même, alors j'ai obligé mon père à le faire.
24:00 L'enquête de l'heure du crime, le fils prodige a-t-il armé le bras de ce père qui ne l'aimait pas ?
24:06 Eh bien, c'est à suivre dans un court instant sur RTL.
24:09 - Ces 7 dernières années n'ont pas été très heureuses pour moi.
24:20 J'ai été très déprimé, pas souvent heureux.
24:22 Je suis un peu maniaquo-dépressif.
24:24 La plupart du temps, je mets un masque, je fais comme si tout allait bien,
24:27 mais pour être honnête, je suis toujours déprimé.
24:30 Retour aujourd'hui dans l'heure du crime sur la mort du chanteur Marvin Gaye,
24:36 en avril 1984, dans sa maison de Los Angeles.
24:39 Son père, un pasteur, a avoué l'avoir abattu de deux balles de revolver.
24:44 Dans l'attente de son procès, les enquêteurs continuent à s'interroger sur les circonstances du drame.
24:51 Au moment de sa mort, Marvin Gaye renouait avec le succès.
24:54 Un an auparavant, il avait remporté un Grammy pour la meilleure performance masculine de Rhythm & Blues
25:00 avec son titre "Sexual Healing".
25:03 Malgré ce retour sur scène et après avoir été ruiné à l'issue d'un divorce qui lui avait coûté 600 000 dollars,
25:10 le chanteur continuait à être animé par des idées noires.
25:14 Il avait alors tenté de se suicider à deux reprises.
25:18 Une première fois en ingérant plus de 30 grammes de cocaïne, il avait survécu à cette surdose.
25:23 Une autre fois, il était descendu de sa voiture en marche.
25:27 Il n'avait été que légèrement blessé.
25:29 Ces derniers mois, Marvin était rattrapé par des idées paranoïaques.
25:33 Il avait embauché des gardes du corps et se promenait en permanence avec un gilet pare-balles,
25:37 sauf quand il était sur scène.
25:39 En tournée, un garde était toujours devant la porte de sa chambre.
25:43 Il pensait qu'on voulait le tuer et qu'il allait être empoisonné.
25:48 Lors d'un concert à Boston, Marvin Gaye avait même embauché le grand avocat Lee Bailey,
25:53 chargé d'identifier ceux qui auraient voulu l'empoisonner.
25:57 En prévision de cette attaque, il s'était fait prescrire un antidote.
26:01 Alberta Gaye, la maman, témoigne qu'à l'issue de sa dernière tournée,
26:06 quelques semaines avant le drame, elle n'a jamais vu son fils dans un état pareil.
26:10 Il était épuisé. On aurait dû le forcer à faire des examens à l'hôpital,
26:14 mais Marvin n'en faisait qu'à sa tête.
26:17 Personne d'autre ne décidait à sa place.
26:19 Frankie Gaye, son frère, le premier à se pencher sur le corps ensanglanté,
26:25 fait alors une confession surprenante.
26:28 Marvin, dans un dernier souffle, lui aurait chuchoté ses paroles.
26:33 « J'ai eu ce que je voulais, je n'étais pas capable de le faire moi-même,
26:37 alors je l'ai obligé à le faire.
26:41 Je l'aurais obligé à le faire, j'aurais obligé mon père à me tuer. »
26:45 C'est tout simplement ce que dit, dans ce souffle, si ses paroles sont exactes,
26:50 ce que dit Marvin Gaye. Ce serait donc une espèce de suicide altruiste.
26:54 Fabrice Epstein, je poserai la question aussi à Frédéric Adriaen,
26:58 qui est notre autre invité dans cette heure du crime.
27:03 Vous êtes avocat, Fabrice Epstein, et auteur du livre « Black Music Justice »
27:07 aux éditions de la Manufacture de Livres.
27:09 Vous connaissez bien la carrière et la trajectoire de Marvin Gaye.
27:12 Est-ce que ça vous paraît crédible ?
27:14 Marvin Gaye est au bout du rouleau, il est déprimé,
27:18 on a entendu ce qu'il dit dans cette interview, ça ne va pas du tout.
27:21 Finalement, il n'a pas le courage de se suicider lui-même,
27:25 et il va provoquer son père.
27:28 C'est une thèse ou une hypothèse qui apparaît comme étant crédible.
27:32 La paranoïa, c'est le grand classique de beaucoup d'artistes noirs des années 70,
27:36 qui vont porter des gilets pare-balles et auront peur de se faire descendre à tous les coins de rue.
27:41 Peut-être qu'il y a cette volonté où il pousse au crime son père
27:45 pour qu'il l'exécute finalement, parce qu'il est incapable de le faire lui-même.
27:49 C'est quelque chose qui me parle.
27:51 Est-ce que c'est complètement en accord avec la personnalité de Marvin Gaye ?
27:55 Je dirais peut-être, oui, ça a du sens.
27:57 Frédéric Adriaen, journaliste et auteur de la biographie française,
28:01 la seule qui existe, Marvin Gaye,
28:03 publié aux éditions du Castor Astral.
28:06 Effectivement, il est totalement déprimé à ce moment-là.
28:09 On l'a dit, on l'a déjà un petit peu raconté,
28:11 on a entendu ses quelques paroles dans une interview qu'il donne.
28:14 Il le reconnaît lui-même que ça ne va pas du tout.
28:17 Ce suicide par procuration n'est pas du tout inept.
28:20 Ça paraît très rationnel, ça paraît cohérent avec l'ensemble de son histoire.
28:25 C'est son frère Franky qui le raconte dans un livre tardif,
28:28 mais il le raconte à des gens bien avant.
28:31 Moi, je connais des gens à qui il l'a raconté dans une interview en disant
28:34 "Ne le répétez pas, probablement parce que la maman est encore vivante à cette époque-là
28:38 et qu'il ne veut pas obligatoirement qu'on raconte cette histoire-là."
28:41 Mais quand il le raconte dans son livre, ce n'est pas quelque chose d'inédit.
28:44 On le sait, on le sait déjà, il avait déjà eu l'occasion de le raconter avant.
28:48 C'est une histoire qui est constante du côté de Franky Gaye,
28:52 et c'est cohérent par rapport à ce qu'on imagine de Marvin.
28:55 On sait qu'il y a cette histoire où il aurait dit, je crois à Franky justement,
29:00 ou le père aurait dit à Franky "Ça va tant qu'il ne me bouscule pas.
29:05 Ça va tant qu'il y a des tensions entre nous, on se dispute, etc.
29:09 Mais s'il passait à une action physique, je ne pense pas que je le supporterais."
29:13 Donc ça fait un faisceau d'indices à mon avis qui est assez cohérent avec cette hypothèse.
29:18 - Alors Fabrice Epstein, c'est très important ce que dit Frédéric Adrien,
29:21 parce que le père, il a prévenu.
29:24 - Oui, absolument. - Et fatalement le fils le sait.
29:27 - Oui, mais ça vient accréditer cette thèse.
29:29 D'ailleurs, je crois que la sœur de Marvin Gaye, qui ensuite a fait une pièce de théâtre de son livre,
29:33 sur l'aviaire Marvin Gaye, dit que finalement,
29:37 cette façon de provoquer le père et de se faire tuer,
29:39 résout un certain nombre de problèmes.
29:40 C'est la fin des souffrances pour Marvin Gaye,
29:42 mais c'est aussi une sorte de renvoi d'appareil au père
29:45 qui lui a causé des problèmes toute sa vie,
29:47 pour le faire vivre avec cette horreur, c'est-à-dire la mort d'un fils infélicite,
29:50 qui est tout de même quelque chose de pas commun.
29:52 Quelqu'un de très croyant qui va le redire,
29:54 que ce soit dans les journaux ou à l'audience,
29:56 "J'ai peur de Dieu, je crains Dieu", etc.
29:59 De se retrouver sur les bras, dans la conscience,
30:03 le crime de son fils, c'est quelque chose de tout à fait invraisemblable.
30:07 C'est comme une mort dans la mort pour lui.
30:09 - Et il libère sa mère. - Frédéric Adrien, oui.
30:11 - Il libère sa maman, à qui il est très attaché,
30:13 et qui divorce quasiment dans la foulée du procès.
30:16 Donc moi, j'imagine assez bien cette logique de dire,
30:19 "Je me débarrasse de mon problème, de façon tragique,
30:23 je punis mon père et je libère ma mère."
30:25 - Oui, c'est presque un plan concerté.
30:27 J'aime bien ça. - Ça paraît très cohérent.
30:29 - Encore un mot sur cette paranoïa, Frédéric Adrien.
30:32 C'est exact. Fabrice Epstein dit qu'à l'époque,
30:35 c'est assez courant chez les chanteurs, mais lui ça va très loin,
30:37 parce qu'il va notamment prendre attache avec un avocat,
30:40 Lee Bailey, qui est dans toutes les grandes affaires américaines,
30:42 que vous connaissez évidemment, Fabrice Epstein.
30:44 Donc voilà, pour dire, "Trouve-moi les mecs qui veulent m'empoisonner."
30:48 - La dernière épouse de Marvin, qui s'appelle Yann,
30:51 qui a publié un livre très tardivement, raconte que même...
30:55 Donc là, ils se sont divorcés au moment de la fin de la vie de Marvin,
30:59 mais elle raconte que leur mariage a été hanté
31:02 tout le parcours par les scénarios qu'imaginait Marvin.
31:06 Sa jalousie par rapport à d'autres artistes dont il supposait que sa femme les trompait avec.
31:10 - Il vivait avec sa mort, finalement.
31:13 - Il vit avec des inquiétudes permanentes de tout...
31:15 Le seul moment d'apaisement, c'est les quelques années qui passent en Belgique,
31:19 éloignées des tentations...
31:21 - Et des États-Unis. - Et des impôts.
31:23 - Mais aussi des tentations,
31:25 parce que les dealers sont beaucoup moins bons à Austan que à Los Angeles.
31:29 - Fabrice Epstein, juste une petite question.
31:33 Il aurait pu s'arrêter après avoir tiré une seule fois, le père ?
31:36 - Oui, oui, d'autant que... - S'enfilsser, rouler,
31:38 et la première balle, elle est morte.
31:40 - Bien sûr, on a presque envie de se dire, il ne croyait pas à sa mort,
31:42 donc il réessaie, il lui s'offre erreur, la deuxième fois c'est à bout portant.
31:47 - Et ça, effectivement, c'est étonnant de mettre une deuxième balle alors que la première a déjà...
31:52 - Tout en clamant qu'à priori, le revolver n'est pas chargé.
31:56 - Le père meurtrier va être jugé, mais quel verdict pour cet homme ?
32:00 L'affaire Marvin Gaye est sanglant secret de famille.
32:03 Je porterai toute cette histoire avec moi jusqu'à ma mort, j'en m'accepte le prix.
32:08 L'enquête de l'art du crime, on se retrouve dans un instant sur RTL.
32:11 14h30, 15h30, L'art du crime sur RTL.
32:15 Jean-Alphonse Richard.
32:17 - Au programme aujourd'hui de l'art du crime, l'affaire Marvin Gaye,
32:20 le roi du R&B et de la soul a été tué par son père de deux coups de revolver le 1er avril 1984.
32:28 Plus de six mois plus tard, le meurtrier est comparé pour être jugé,
32:32 il risque de nombreuses années de prison.
32:35 Vendredi 21 septembre 1984, Marvin Gaye senior, 70 ans dans quelques jours,
32:42 apparaît devant la cour supérieure de Los Angeles.
32:45 Lui qui se disait innocent, fait désormais savoir qu'il ne se pose pas une accusation d'homicide volontaire.
32:52 Un plaidé coupable qui devrait lui éviter un long procès et probablement de longues années de prison.
32:59 Le juge hésite à accepter cet accord.
33:02 Le procureur demande alors à l'accusé s'il reconnaît un quelconque degré de culpabilité dans la mort de son fils.
33:08 Le pasteur ne sait pas quoi répondre.
33:11 L'un de ses avocats, Arnold Gold, répond à sa place en disant que son client ne reconnaît rien du tout.
33:18 27 septembre, l'officier de probation, Alexander Peace, qui a interrogé le pasteur,
33:25 transmet son rapport à la cour.
33:27 M. Gaye exprime des remords pour ses actions et la mort de son fils.
33:32 Il répète qu'il rêve de voir rentrer son fils dans la maison, comme si tout cela n'avait été qu'un mauvais rêve.
33:38 Selon le rapport, le père explique qu'il était dans un état de peur et de désespoir quand il a tiré.
33:46 Vendredi 2 novembre, Marvin Gaye senior, qui risquait jusqu'à 13 ans de prison pour meurtre simple,
33:52 est condamné à 6 ans de prison avec sursis et 5 ans de probation pour les coups de feu.
33:58 Le juge indique qu'imposer des années de prison ferme à cet homme âgé et en mauvaise santé
34:03 équivaudrait à le condamner à mort.
34:05 « Tout cela me tue, j'aimais mon fils », déclare Marvin Gaye senior.
34:10 « Je porterai toute cette histoire avec moi jusqu'à ma mort, j'en accepte le prix ».
34:17 - Et le prix c'est donc 6 ans de prison avec sursis, 5 ans de probation pour les coups de feu.
34:22 Fabrice Epstein, vous êtes l'un de nos invités aujourd'hui dans l'heure du crime.
34:26 Avocat, auteur du livre « Black Music Justice » paru aux éditions de la manufacture de livres,
34:31 ce n'est pas cher payé pour cet histoire ?
34:34 - Non, pas du tout. - Il s'en sort bien le papa ?
34:36 - Il s'en sort très bien. Les avocats ont bien négocié.
34:39 C'est en deux temps, d'abord il y a un juge qui avalise ce plai des coupables
34:42 et ensuite il y a un juge qui donne la sentence, donc le sursis.
34:46 Mais c'est étrange de se dire que finalement, il est vieux le père Gaye,
34:53 il a plus de 70 ans, donc à quoi ça sert qu'il fasse de la prison ?
34:57 Est-ce qu'il y a un danger pour la société ?
34:59 - Vous connaissez mieux la justice américaine que moi, en général ils ne prennent pas de gamme avec les personnes.
35:05 - Mais je pense qu'effectivement, une des raisons pour ne pas avoir un procès
35:09 qui pourrait donner lieu à un acquittement, finalement, si il dit que c'est de la self-défense,
35:13 c'est que la presse ne s'en empare pas et que ça reste...
35:16 Alors, c'est public, les audiences sont publiques, on peut trouver sur internet aujourd'hui,
35:20 en tout cas le moment où le juge, le deuxième juge, qui s'appelle Gordon Ringer,
35:24 qui est celui qui fera citer à comparente dans les années 70,
35:27 le président Nixon dans l'affaire du Watergate, donc c'est le premier,
35:32 c'est lui qui, à la fin, va expliquer que la prison ne sert à rien,
35:36 va demander si on peut le condamner à une amende,
35:39 et les avocats, Arnold Gold notamment, va dire "il est insolvable".
35:42 Est-ce qu'il peut faire du community service, donc en gros,
35:45 est-ce qu'il peut rendre des travaux d'intérêt généraux en français ?
35:48 Eh bien non, parce qu'il est fatigué, qu'il est quasiment sénile
35:51 et qu'il n'a pas de permis de conduire, et le juge conclut en disant
35:55 "c'est très triste qu'un jeune homme meure et nous quitte,
35:58 et qui a priori était doué dans le monde de la musique,
36:00 donc il ne connaît pas bien la musique de Marvin Gaye,
36:02 mais c'est de sa faute, c'est de la faute de Marvin Gaye,
36:05 il en est le responsable", ça s'arrête comme ça, l'audience.
36:08 C'est quand même incroyable.
36:10 Parce qu'effectivement, Marvin Gaye, sa faute, je veux bien,
36:14 mais c'est quand même la victime.
36:16 - Absolument, mais c'est tout à fait incroyable.
36:18 - C'est quand même la victime.
36:19 Frédéric Adriaen, journaliste et auteur de la biographie française
36:22 de Marvin Gaye, publié aux éditions du Castor Astral,
36:26 alors c'est raté pour les journaux et pour la presse,
36:29 parce qu'on s'attendait à un grand déballage,
36:31 ces espèces de procès-fleuve qu'on a aux Etats-Unis,
36:34 avec des dizaines de questions, des témoins qui arrivent,
36:37 des rebondissements, là il n'y en a pas, il a plaidé coupable.
36:39 - Je pense qu'il y a un intérêt, au niveau de la famille Gaye,
36:42 sans faire de théorie du complot ou de quoi que ce soit de cet ordre-là,
36:45 il y a un intérêt de la famille Gaye de ne pas aller creuser
36:48 dans la vie de Marvin Gaye et de sortir des choses
36:51 a priori pas très présentables, qu'on a réussi à étouffer jusqu'ici.
36:55 Il y a une musique à exploiter, il y a des disques d'inédit
36:58 qui sortent quasiment dans la foule, personne n'a de complexe
37:01 dans l'industrie à cette époque-là, de toute façon,
37:03 il a de telles dettes qu'il faut vendre de la musique,
37:06 et l'intérêt de la famille Gaye, à mon sens,
37:09 et de Columbia qui est derrière, puisque c'est la maison de disques,
37:12 et encore de Motown, parce qu'ils ont aussi leur stock d'inédits,
37:15 c'est de ne pas détériorer l'image de Marvin,
37:19 l'image du séducteur, l'image de ce chanteur
37:23 avec ce charisme invraisemblable, le décrire comme une espèce
37:26 de paranoïaque qui est en peignoir dans sa maison
37:29 de Los Angeles avec ses parents toute la journée,
37:32 est probablement pas conforme à ce que ces maisons de disques
37:35 ont intérêt à vendre. - Et puis je pense qu'il y a aussi
37:37 cette façon de voir, de faire ce lien,
37:40 finalement ce sont tous des hommes d'église, le père le premier,
37:43 donc Marvin Gaye, qui a été élevé dans cette spiritualité
37:46 mais qui est aussi emplie de sexualité, lui-même aurait compris
37:49 qu'on n'envoie pas son père en prison à plus de 70 ans,
37:52 donc il y a aussi cette construction, et qui rejoint, je pense,
37:55 ce que dit Frédéric, derrière il y a une exploitation financière
37:59 avec des tubes et des tubes, des copyrights, des royalties,
38:02 et il va falloir se nourrir sur la bête, comme ils l'ont fait
38:05 jusqu'à présent d'ailleurs. - Il y a un intérêt commercial,
38:08 pour la famille en tout cas. - Bien sûr, alors Fabrice Epstein,
38:11 c'est important, aux Etats-Unis on sait que les regrets,
38:14 les larmes sont toujours bien perçues devant les tribunaux,
38:16 il faut s'excuser, et il faut regretter, et c'est ce que fait
38:19 d'ailleurs le père de Marvin Gaye. - Mais il le fait
38:22 après la sentence, en fait quand le juge dit
38:25 finalement c'est de la faute de Marvin Gaye,
38:28 le père prend la parole et dit "je voudrais dire quelque chose",
38:31 et il s'exprime un certain nombre de regrets, alors est-ce que
38:34 ces regrets sont pensés ? Moi j'en sais rien,
38:37 je crois pas, quand on regarde les images, on a le sentiment
38:40 d'un vieux monsieur, certes, qui ne comprend pas réellement
38:43 ce qui s'est passé, et d'ailleurs quand on regarde... - Ou qui fait mine de ne pas comprendre.
38:46 - On ne sait pas s'il était sous l'emprise de l'alcool ou pas, le père.
38:49 On s'est posé la question de savoir si Marvin Gaye était
38:52 rempli de drogue ou pas, mais pas de savoir si le père était
38:55 sous l'emprise de l'alcool. - Alors, a priori il n'y a pas eu d'expertise,
38:58 à l'époque je pense que ça se fait pas systématiquement,
39:01 mais le fait est que je pense qu'il n'y a pas eu de prise
39:04 d'alcoolémie de fait sur le père, alors il pouvait être, effectivement,
39:07 son jugement pouvait être un petit peu annihilé au moment
39:10 des faits. Alors vous disiez, Frédéric Adrien, quand vous ne voulez pas
39:13 déballer le linge sale, comme ça, devant la presse et tout,
39:16 pourtant l'épouse, Alberta, qui va quitter son mari
39:19 après toute cette histoire, elle, elle va le décrire
39:22 comme un monstre. - Elle a beaucoup de rancœur, elle a beaucoup de rancune
39:25 et très probablement à juste titre,
39:28 elle a été, elle aussi, très très maltraitée par
39:31 Marvin, père, et elle voit
39:34 assez évidemment cette catastrophe, cet incident,
39:37 je ne sais même pas comment le décrire, comme une opportunité
39:40 de changer de vie. La chose qui pour moi sauve
39:43 les deux parents de Marvin, c'est qu'aucun des deux n'a fait
39:46 de livres après. Aucun des deux n'a essayé de monétiser
39:49 cette affaire, ce qui n'est pas le cas des frères et sœurs qui ont
39:52 bien exploité le filon. Aucun des deux n'a été
39:55 se raconter, il n'y a pas de très très longue interview, il n'y a pas de documentaire
39:58 sur la situation, je ne crois pas que le père
40:01 ait répondu à des interviews après l'audience.
40:04 - Il disparaît, a priori. - Voilà, il y a le choix d'une forme de discrétion
40:07 que je trouve assez digne finalement chez les deux parents
40:10 qui auraient pu aller cultiver cette histoire-là,
40:13 qui est quand même une histoire tellement rendue commune. - Est-ce que
40:16 ce procès avait été suivi par les journaux ? - Alors oui, bien sûr.
40:19 - Vous espérez peut-être qu'il y en a plus ? - Oui, oui. Et alors quand on sort
40:22 des audiences de plea bargaining, donc de plaidés coupables,
40:25 les avocats sont interrogés. Évidemment, les avocats qui aiment prendre la lumière,
40:28 ça on le sait, répondent aux questions des journalistes
40:31 qui disent presque... - Qui aiment prendre la lumière aussi.
40:34 - Qui aiment prendre la lumière aussi, bien vu. Et également le procureur,
40:37 puisqu'aux Etats-Unis, le procureur se bat contre les avocats
40:40 de la défense, mais qui dit "oui, oui, finalement,
40:43 bon, il a plaidé coupable, il a
40:46 reconnu les faits, et ça n'est pas de la self-défense".
40:49 Les acteurs de la tragédie vont tous disparaître
40:52 avec leur vérité respective.
40:55 L'affaire Marvin Gaye, sanglant secret de famille.
40:58 La colère détruit votre âme, seul l'amour peut vaincre la haine.
41:01 L'enquête aujourd'hui de L'Heure du Crime, je vous retrouve tout de suite sur RTL.
41:04 L'Heure du Crime, présentée par
41:07 Jean-Alphonse Richard sur RTL.
41:10 Dans L'Heure du Crime aujourd'hui, nous revenons sur l'affaire Marvin Gaye.
41:13 Musicien et chanteur, auteur de dizaines de tubes
41:16 immortels, a été tué à coups de revolver par son père
41:19 en avril 1984. Le meurtrier,
41:22 âgé, avait été condamné à six ans de prison avec sursis.
41:25 40 ans après, la vérité est-elle
41:28 faite ? Après le procès,
41:31 Alberta Gaye a demandé le divorce avec son
41:34 mari Pasteur, avec qui elle était mariée,
41:37 depuis 49 ans. Elle s'éteint trois ans
41:40 après le meurtre. Le révérend Marvin Gaye Senior,
41:43 résident d'une maison de retraite, est
41:46 décédé lui d'une pneumonie en 1998,
41:49 à l'âge de 84 ans. Frankie,
41:52 le frère adoré de Marvin, mourra en
41:55 2001 d'une crise cardiaque.
41:58 Marvin Gaye aura écrit
42:01 et enregistré plus de 200 chansons.
42:04 66 avaient été en tête des hits parades.
42:07 En 1987, trois ans après sa mort,
42:10 il entrait au Rock'n Roll Hall of Fame, où sont recensés
42:13 les plus grands musiciens et chanteurs de tous les temps.
42:16 "La colère détruit
42:19 votre âme, seul l'amour peut vaincre la haine",
42:22 disait Marvin Gaye.
42:25 "I heard it through the grapevine", de Marvin Gaye, c'était une chanson de 1968 et à coup sûr, un de ses plus grands tubes. On retrouve dans cette "Heure du crime", évidemment, nos invités. Désolé de couper cette chanson merveilleuse, mais l'heure du crime reprend son rythme.
42:54 Fabrice Epstein, avocat, auteur de livres "Black Music Justice", vous êtes avec nous, paru aux éditions de la Manufacture de Livres, et vous êtes avec nous depuis le début de cette émission. Est-ce qu'on est parvenu aujourd'hui à la vérité dans cette affaire Marvin Gaye ?
43:10 Je vais vous répondre non. Non, parce qu'il y a eu un marchandage, un pli bargaining, on a trouvé une solution. Alors la justice est passée, peut-être.
43:18 Mais on n'est pas parvenu à la vérité, c'est un huis clos, et dans l'huis clos, l'enfer c'est les autres. Donc, que s'est-il exactement passé, on ne le saura jamais.
43:26 Frédéric Adriaen, vous, vous êtes l'auteur de la biographie en français de Marvin Gaye, qui s'appelle Marvin Gaye d'ailleurs, publiée aux éditions du Casteur Astral, vous êtes d'accord avec ça ? On n'a pas la clé aujourd'hui de cette mort ?
43:38 On n'a pas la vérité des cœurs, c'est clair. On ne saura jamais, en particulier, au-delà du témoignage de Franky Gaye, ce que voulait vraiment Marvin, ce qu'il a vraiment fait. L'histoire telle qu'on l'a racontée aujourd'hui, elle me paraît raisonnable et rationnelle, mais on ne saura jamais ce qui peut pousser, probablement, un enfant à encourager son père à lui tirer dessus.
43:58 Ça, ça dépasse, je pense, nos capacités d'imagination, nos capacités de conceptualisation. Oui, c'est ça, on ne peut pas accéder à cette... C'est le mystère de la vie. Elle est intime, c'est ça ?
44:10 Oui, elle est intime, mais c'est son père qui l'a mis au monde et c'est son père qui le reprend. C'est aussi, peut-être, ce dieu tout puissant avec qui il a vécu depuis les toutes premières années jusqu'au dernier, c'est-à-dire un peu avant 45 ans. Le 1er avril, et ce n'était pas un poisson d'avril, puisque ce truc s'est passé et est venu mettre un coup de toit terrible dans le monde de la musique.
44:32 Les acteurs de la tragédie, je l'ai dit, ils sont tous morts aujourd'hui. Il n'y a plus de témoins directs, il y a sans doute des descendants de la famille Gay, mais il n'y a plus de témoins directs de cette affaire. Ils ne sont plus exprimés par la suite ?
44:44 Non, non. La mère a parlé, mais le père ne s'est plus exprimé. Il n'y a plus de témoignages qui ont relancé l'affaire.
44:50 Frédéric Adrien, qui a sorti son livre relativement tardivement, peu de temps avant sa mort, peut-être même pas à titre posthume, qui a raconté l'histoire dans les grandes lignes qu'on a repris aujourd'hui, mais en effet, il n'y a pas eu d'autres analyses. Je n'ai pas connaissance de livres, des avocats sur cette histoire-là.
45:09 Il a fallu éponger les dettes, et ensuite faire tourner la machine gay ?
45:13 Je vous pose la question à tous les deux. Je commence par Frédéric Adrien. Est-ce que sa carrière allait continuer ? Il était en proie à une profonde détresse, à la paranoïa. Ça n'allait pas du tout bien. Mais est-ce qu'il allait encore produire des pépites ?
45:29 Le dernier disque est un disque pour lequel il a eu beaucoup besoin d'aide de collaborateurs extérieurs pour finaliser le disque. Il y a encore des bandes qui ont été publiées à titre posthume, mais qui ne laissent pas penser à une grande inspiration. Après, les miracles des désintoxications, les miracles de la psychiatrie l'auraient peut-être sauvé. Il aurait fait un magnifique artiste renaissant, un magnifique phénix.
45:53 Oui, un rebound Christian.
45:55 On l'aurait très bien imaginé, avoir une carrière à la Hal Green, qui quitte la musique séculaire pour les barbitosphères.
46:01 Ou à la Johnny Cash, à reprendre des chansons un peu classiques à sa manière. Il aurait pu effectivement continuer. Ce que je trouve terrible, c'est cette fin, cet espèce de triangle presque amoureux entre le père, la mère et le fils, terminé comme ça, comme un enfant, dans cette maison. On restera là-dessus, c'est ce qui est dommage. Heureusement, sa musique est éternelle.
46:19 Mais cette mort, elle fait partie de la légende Marvin Gaye, tout simplement.
46:23 Oui, absolument.
46:25 Elle construit aussi le personnage.
46:27 Quand j'ai fait le livre, quand on écrit les biographies, souvent les gens sont décédés, ceux dont je parle, mais lui, très clairement, la grande difficulté d'écrire la biographie, c'est de ne pas la faire converger vers ça, de se souvenir qu'il y a eu des choses avant, qu'il y a eu des grandes beautés, des grandes inspirations, et de ne pas tout relire sous cet angle-là.
46:44 Mais c'est difficile, quand on raconte son histoire, de ne pas se dire, on sait quand même que ça finit par cette tragédie quasiment biblique, en effet, avec le père qui a le même nom que le fils. On est vraiment dans des histoires, c'est de la mythologie.
46:55 C'est étonnant que...
46:57 Il manque le film.
46:59 J'allais vous poser la question, parce que vous en parliez tout à l'heure hors micro, mais qu'il n'y ait pas de film, Netflix pourrait s'en parler, au sein de cette histoire.
47:06 Il y a eu plusieurs projets, et il semblerait que la famille Gaye ait des exigences très très fortes, y compris financières, pour l'utilisation de la musique, et que, évidemment, si on fait un film sur Marvin Gaye, sans mettre la musique de Marvin Gaye, c'est compliqué.
47:19 C'est un peu compliqué.
47:20 Je sais qu'il y a eu plusieurs fois des projets, mais ça n'est jamais abouti.
47:23 Question à tous les deux aussi, qu'est-ce qu'il reste aujourd'hui de Marvin Gaye ?
47:26 Alors il reste cette histoire, parce que sa mort, encore une fois, tout le monde parle, dès qu'on parle de Marvin Gaye, aujourd'hui on parle aussi de la mort tout de suite, et de ce crime qui est inexpliqué.
47:34 Il reste un chanteur avec une voix absolument exceptionnelle, et aussi un artiste qui a contribué au grand combat de l'Amérique des années 70, avec "What's going on", ce pays très critiqué,
47:44 et un disque d'ailleurs qui va amener une certaine rupture dans sa carrière, où il devient un artiste sociétal et qui porte des combats.
47:51 C'est quelqu'un dont on pourra se rappeler comme portant des combats très très forts, et qui malheureusement vient s'abîmer dans sa vie personnelle à la fin.
47:57 Sa musique, on l'entend encore, là on a entendu tout à l'heure quelques extraits, sa musique on l'entend régulièrement sur les radios, on l'entend régulièrement dans les pubs.
48:06 Il n'y a pas un reportage ou une émission, une série, qui ne passe pas un moment "Sexually Ling" ou "What's going on" pour situer une époque.
48:14 C'est une musique qui a fortement marqué son époque, des années 60 aux années 80, et qui est toujours moderne, qui fait partie de la bande originale, et qui a extrêmement influencé les chanteurs qui sont venus après lui.
48:24 Et qui fait aujourd'hui partie de la bande originale de l'heure du crime, on va le dire comme ça.
48:29 Merci beaucoup Frédéric Adriaen et Fabrice Epstein d'avoir été tous les deux les invités de l'heure du crime.
48:35 Merci à l'équipe de l'émission, rédactrice en chef Justine Vignaud, préparation Marie Bossard, Marie-Lou Goyer. La réalisation est de Nicolas Godet.
48:45 Jean-Alphonse Richard sur RTL, l'heure du crime.

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