L’ancien vice-président américain, prix Nobel de la paix en 2007, défend une nouvelle fois l’importance d’un “plan ambitieux” pour l’environnement, à l’heure où son président Donald Trump se désengage de toute politique écologique.
L'interview complète : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50-du-week-end/l-invite-de-7h50-du-we-du-samedi-29-mars-2025-8078611
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00:00Et notre invité ce matin est un ancien vice-président démocrate des Etats-Unis,
00:04prix Nobel de la paix en 2007, et toujours très grand défenseur de l'environnement.
00:09Bonjour, Al Gore.
00:10Bonjour. Bonjour, Al Gore.
00:12Vous êtes à Paris en ce moment pour l'événement international SOS Océans.
00:16Vous allez même tenir un discours lundi matin.
00:19Quel sera-t-il, ce discours ?
00:21Est-ce que c'est un signal d'alarme, un appel au secours ?
00:25Bien, tout d'abord, j'ai été très honoré de recevoir cette invitation du président Macron
00:30d'être dans la première session dans cette conférence sur l'océan.
00:35Et je le salue pour l'organisation de cette conférence.
00:39Ma partie sera sur le lien entre la crise climatique et l'océan, et les océans.
00:45Et c'est là-dessus que je mettrai l'accent dans ma présentation.
00:49Vous savez, nous mettons toute cette pollution dans l'atmosphère qui entoure le globe,
00:59et ça augmente tellement qu'il y a des pièges.
01:04On piège autant d'énergie que celle qui serait le fait des dizaines de milliers de bombes atomiques,
01:15comme celle d'Hiroshima en même temps.
01:1790 % de cette chaleur va dans l'océan.
01:20Et cela rompt le cycle de l'eau en faisant évaporer beaucoup plus d'eau des océans dans le ciel.
01:29Et la haute atmosphère retient beaucoup de cette vapeur d'eau.
01:35Et quand les conditions font que l'eau descend, l'eau tombe du ciel,
01:42cette quantité d'eau qui tombe du ciel devient une bombe extraordinaire.
01:47En France, vous avez eu cette expérience au cours des dernières années,
01:50et il y a quelques mois, Valence a montré quelle tragédie peut se produire.
01:55Et une autre chose qui se produit, c'est que les eaux plus chaudes de l'océan
01:59font que les tempêtes, les trombes, contiennent beaucoup plus d'humidité, sont beaucoup plus violentes.
02:09Et le taux et l'humidité acidifient l'océan.
02:14Il y a beaucoup plus d'acidité qu'avant l'ère industrielle, la révolution industrielle.
02:19Et donc cela met en danger les barrières de corail.
02:28Vous savez, le corail disparaît dans le monde entier.
02:31On voit le plancton, les toutes petites créatures,
02:36enfin ce sont des plantes en fait, qui sont à la base de la nourriture de l'océan.
02:40Elles ont du mal à s'adapter à ces nouvelles conditions.
02:42Donc le niveau de l'eau monte en raison de cette chaleur supplémentaire qui fait fondre la glace.
02:51Et les océans s'étendent parce que quand les molécules se réchauffent, elles deviennent plus grosses.
02:58Et en combinaison avec la montée de la chaleur, on voit que toutes les régions côtières sont en danger.
03:07Ce sont quelques-unes des menaces posées à l'océan par la crise climatique.
03:12Et encore une que je voudrais mentionner, les trois plus grands marchés pour l'industrie de l'énergie fossile,
03:19c'est l'industrie pétrochimique. 75% c'est de la matière plastique.
03:23Et on voit maintenant du plastique à travers tous les océans et aussi dans les rivières.
03:29Et cette industrie propose de tripler la quantité de plastique créée dans les 30 prochaines années.
03:36C'est complètement fou.
03:38Et comme beaucoup d'autres parties de cette crise climatique, la crise est entre ce qui est le mieux pour l'humanité,
03:44pour la France, les États-Unis, les nations à travers le monde, et ce qui est le mieux pour les pollueurs de l'énergie fossile.
03:53Ils ont tellement de pouvoirs politiques, ils ont tellement de politiciens dans leur poche.
03:59Et quand ils disent « saute », les élus disent « Ah bah oui, monsieur, comment vous voulez que je saute ? »
04:06Donc là, l'objectif, c'est d'avoir un plan ambitieux avant la conférence des Nations Unies qui sera à Nice en juin prochain.
04:13Quelles sont les urgences selon vous pour résoudre cette crise climatique qui a tant de conséquences ?
04:19Vous venez de les décrire sur l'océan.
04:21Nous avons beaucoup de choses qui fonctionnent en notre faveur.
04:26Le coût de l'énergie non fossile, c'est-à-dire le soleil et l'éolien et ces nouvelles batteries,
04:34ils sont tellement incroyables.
04:37Ils nous donnent la capacité de remplacer de l'énergie beaucoup moins chère et plus propre à la place de l'énergie fossile sur laquelle nous sommes basés pendant des années.
04:47Chaque euro investi dans l'énergie propre produit trois fois plus d'emplois qu'un euro investi dans les industries polluantes fossiles.
04:59C'est ce qui nous rend possible de passer à travers cette transition énergétique.
05:04Mais on a beaucoup plus besoin d'actions de base.
05:07C'est la raison pour laquelle je suis ici à Paris, à la tête de cette formation pour 11 000 personnes à travers le monde, cette réunion qui est basée ici à Paris.
05:15Je le dis en souriant, vous dites golfe du Mexique ou golfe des Amériques ?
05:20Golfe du Mexique.
05:24Écoutez, c'est simplement un des marqueurs de l'assaut d'un prétendu dictateur qui veut contrôler la langue.
05:34Non, il pourra faire certaines des choses qu'il veut faire, mais beaucoup d'autres, les gens vont résister.
05:40Mais puisque nous parlons des océans, le golfe du Mexique, c'est 14% de la production de gaz et de pétrole américain.
05:49Est-ce qu'il faut aujourd'hui absolument interdire toute nouvelle exploration, exploitation de gaz et de pétrole offshore ?
05:58L'un des grands slogans de Donald Trump pendant sa campagne, c'était « Drill, baby, drill ».
06:04Qu'est-ce que ça vous a inspiré ?
06:06Et est-ce que c'est tout simplement possible d'arrêter d'exploiter les océans et d'avoir des plateformes en mer ?
06:13Moi, je serais en faveur de bannir toute nouvelle exploration dans l'océan.
06:21Mais il y aura de l'exploration qui se poursuivra.
06:25Ce n'est pas seulement moi.
06:27L'Agence internationale de l'énergie, qui est responsable de ce bureau, a dit qu'on n'a pas besoin de nouveaux développements d'énergies fossiles.
06:39L'Europe est en danger.
06:42Si elle se soumet au lobby de l'énergie fossile, l'Europe est en danger d'être obligée de faire payer les actifs prisonniers.
06:58On pousse en ce moment pour plus de terminaux de gaz liquide et d'oléoduc, mais il y en a déjà deux fois plus que la demande du marché.
07:08Et ils veulent en construire quatre fois plus que la demande du marché.
07:12Donc, il doit y avoir un équilibre au pouvoir de cette industrie.
07:18Et c'est la raison pour laquelle il faut y avoir des conférences comme celle-ci et un leadership politique à travers le monde.
07:26C'est un combat que vous pouvez gagner.
07:28Il y a 30 ans, Al Gore, vous parliez aux étudiants de Georgetown, des étudiants.
07:32Pour la première fois, vous leur parliez de réchauffement climatique.
07:35En 2006, il y a eu votre film qui a eu un retentissement mondial.
07:392007, le prix Nobel.
07:41C'était il y a 20 ans.
07:43Et aujourd'hui, dans votre pays, les États-Unis, vous avez le roi des climatosceptiques qui est au pouvoir.
07:50Comment est-ce que c'est possible ?
07:52Eh bien, on a vu un certain nombre de changements dans les États-Unis au cours des dernières décennies,
08:00avec un changement radical dans nos façons de communiquer les uns avec les autres.
08:05Moi, je crois personnellement que c'est une partie du problème auquel vous avez fait référence.
08:11On se reposait surtout en France, en Europe, aux États-Unis, sur le mot imprimé, le mot écrit.
08:19Et ça avait créé une certaine façon de réfléchir et de communiquer les uns avec les autres,
08:26pour prendre des décisions collectivement.
08:28On passait par la radio, la télévision, et on est passé à l'Internet.
08:33J'avais un grand espoir que ça créerait un renouveau de la démocratie représentative.
08:39Mais il apparaît que les réseaux sociaux sont en fait un moyen de contrôle par ces lobbies des affaires,
08:50par les autocrates et par les oligarques, si vous acceptez ce terme.
08:55Qui cherchent à acheter ces moyens de communication.
09:01Et ces algorithmes qui dirigent les gens vers des sources d'informations sur l'Internet,
09:11certaines sont vraiment de la prédation.
09:15Et tout à fait au fond du trou du lapin, c'est là que se trouve la chambre d'écho.
09:22Oui, vous savez cette phrase, le terrier du lapin,
09:27utilisée pour décrire un phénomène que l'on rencontre sur l'Internet, dans les réseaux sociaux,
09:32où ces algorithmes, vous cliquez sur quelque chose et l'algorithme en fait dit
09:38« Ah, t'aimes ça ? On en a plus dans le magasin. Tu veux une petite variation ? On en a aussi. »
09:45Et donc les gens descendent dans le terrier comme Alice au Pays des Merveilles.
09:50Mais dans ce cas, ce que l'on découvre au fond du terrier, c'est qu'il y a une chambre d'écho.
09:57Je ne sais pas si c'est quelque chose dont on parle en France,
10:00mais quand vous passez trop de temps dans la chambre d'écho,
10:04vous devenez vulnérable à une nouvelle forme d'intelligence artificielle.
10:09Mais pas d'intelligence artificielle, mais de folie artificielle.
10:13C'est de là que vient la négation du changement climatique.
10:17C'est de là d'où vient la société de la Terre plate qui trouve de nouveaux adhérents.
10:22C'est très dangereux. Ces algorithmes devraient être réglementés.
10:26Si c'est des abus, s'ils font du mal, ils devraient être interdits.
10:31Al Gore, on entend que malgré le fait que votre pays quitte la Terre,
10:35est sorti de l'accord de Paris, qu'on efface les données scientifiques qui concernent l'environnement,
10:41vous n'avez pas envie de baisser les bras.
10:43Est-ce que vous seriez prêt à vous relancer en politique pour porter ce combat ?
10:48Moi ? Écoutez, peut-être qu'il y a une demande.
10:53Vous êtes plus jeune que Donald Trump.
10:55Je pense qu'il y a une nouvelle demande pour un politicien de 80 ans.
11:00Aussi longtemps que je vais à me guérir, il n'y aura pas de problème.
11:05C'est un non, alors.
11:07Moi, je travaille aussi dur que je peux pour mobiliser les gens pour trouver une solution face à la crise climatique.
11:15Et c'est un privilège pour nous tous de travailler pour une solution.
11:21Aussi longtemps que je vais sans rechute, ce sera une bonne chose.
11:26L'ex-vice-président des États-Unis et prix Nobel, Al Gore, merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous parler.
11:32Je vous remercie.
11:33Merci.
11:34Merci.
11:35Merci.
11:36Merci.
11:37Merci.
11:38Merci.
11:39Merci.
11:40Merci.
11:41Merci.
11:42Merci.
11:43Merci.
11:44Merci.
11:45Merci.
11:46Merci.
11:47Merci.
11:48Merci.
11:49Al Gore, merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous répondre sur France Inter.
11:53Merci infiniment.
11:54Merci à vous.
11:55Et merci à Michel Zolotowski pour la traduction.