Elisabeth Lévy : "Les valeurs du sport, ça n’existe pas"

Sud Radio

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Transcript

00:00Bon réveil à tous sur Sud Radio. Dans un instant, Benjamin Aiglaise se prépare son invité politique ce matin.

00:05Julien Audoux, le député de Lyon et porte-parole du RN.

00:08Nous, nous sommes prêts pour notre instant, notre moment.

00:11Sud Radio, les vies sans interdit. Bonjour Elisabeth.

00:14Bonjour Frédéric, bonjour à tous.

00:16Tiens, tiens, vous voulez me provoquer, moi le passionné de sport.

00:19Vous voulez parler de violence dans le sport, vous avez raison.

00:21Ben oui, parce que vous savez, ça fait longtemps quand même que le sport a quitté les rubriques sportives.

00:26Les performances, les exploits pour défrayer celles des mondanités ou des faits divers.

00:32Les grands matchs sont maintenant des défis sécuritaires.

00:36Après la mort d'un supporter à Nantes en décembre,

00:38il y a beaucoup de supporters maintenant qui sont interdits de déplacement en Ligue 1.

00:43Et le plus triste, c'est que le sport amateur est lui aussi maintenant exposé à tous les maux de la société.

00:49Les séparatismes islamiques, violences, agressions sexuelles ou viols d'ailleurs souvent commis par des entraîneurs.

00:56Alors, on a créé d'ailleurs la plateforme Signal Sport en 2020 pour ça.

01:02En 2023, elle a reçu des signalements sur 69 fédérations et 99 départements,

01:08c'est-à-dire à peu près tous les sports et tout le territoire.

01:12Beaucoup, probablement une moitié, ce sont des violences sexuelles.

01:17Mais c'est d'ailleurs les seules qui intéressent Mme Oudiak.

01:20Le reste, elle n'en parle pas.

01:22Eh bien, moi je vais en parler justement,

01:25parce que la négation même de l'esprit sportif, qui est résumé par la phrase que le meilleur gagne,

01:30eh bien, la négation de cet esprit, ce sont les violences contre les arbitres.

01:35C'était le sujet d'un article du Parisien hier, que je vous recommande.

01:39Donc, ces agressions, ces violences, elles vont des insultes à l'agression physique,

01:44en passant par les menaces de mort, qui se poursuivent souvent sur les réseaux.

01:49Parce qu'en plus, les cyber harcèlent.

01:52Alors, elles sont commises par des joueurs, parfois par leurs parents.

01:55Vous avez des pères qui tabassent, ça arrive plus fréquemment que ce qu'on croit,

01:59par des supporters, par des entraîneurs, c'est vrai à tous les niveaux.

02:02Et ça n'est même pas vrai seulement en France.

02:04Vous vous rappelez que récemment, un arbitre turc a été lynché en plein match, me semble-t-il.

02:11Bon, ben écoutez, c'est pas étonnant qu'on ait du mal à recruter des arbitres dans ces conditions.

02:16Comment s'explique cette violence, Elisabeth Lévy, qui, je vous le confirme, est le contraire des valeurs du sport ?

02:22D'abord, je pourrais vous répondre par le laxisme judiciaire.

02:26Ça n'est pas cinq mois avec sursis pour le père et le fils qui ont vraiment tabassé un arbitre.

02:32C'est pas que juste ils lui ont donné une petite tape, ils l'ont vraiment passé à tabac,

02:36donc ça n'est pas très dissuasif.

02:38Mais ce serait beauté en touche que de s'en tenir là, parce que j'ai aussi envie de vous dire,

02:43pardon Frédéric, pardon Françoise, que les valeurs du sport ça n'existe pas,

02:51ou plutôt que le sport ne peut pas les inculquer aux sportifs.

02:57Parce que si vous mettez une brute, ou un islamiste, ou ce que vous voulez d'ailleurs,

03:01sur un terrain de sport, et bien il restera ce qu'il est.

03:04Ça n'est pas le fait d'être sur un terrain de sport et d'être confronté à des règles, etc.,

03:10qui font que tout d'un coup, ce qui lui faisait défaut jusque-là, va tomber du ciel.

03:16Et d'ailleurs, on a pavé les quartiers difficiles d'équipements sportifs.

03:21Je ne sache pas que ça les ait pacifiés.

03:23Et quand toute la société, en plus école en tête, conspire à entrer dans la tête des enfants et des jeunes,

03:31d'abord que le plus important c'est le respect qu'on leur doit,

03:35et qu'ils sont les égaux des professeurs,

03:37et bien je ne vois pas pourquoi ils respecteraient un entraîneur qu'ils boivent quatre heures par semaine.

03:42Donc la réalité c'est que le sport reméliore les gens qui sont déjà bons,

03:47qui ont déjà l'esprit sportif, c'est-à-dire une colonne vertébrale morale.

03:51Mais chez les autres, ça peut au contraire être le vecteur,

03:55être le truchement, l'allumer, les pires instants.

03:59Ça peut transformer une foule en bande barbare,

04:02ça peut, j'allais dire, flatter, devenir un espèce d'aiguillon d'un nationalisme vraiment bas du front.

04:10Donc il est vraiment naïf de croire que le sport a douci les mœurs,

04:14quand il est parfois, et malheureusement très souvent, une métaphore de la guerre.

04:18Alors il y a question à 8h19 sur Sud Radio.

04:22C'est un peu mon rêve de me retrouver entre vous, Françoise de Gois et Elisabeth Levy,

04:27sur un thème sportif en plus !

04:30Bon, il y a débat sur ce que dit Elisabeth, Françoise,

04:33parce que le sport peut avoir aussi des vertus qui tendraient à en remettre dans le bon chemin également.

04:39Absolument, moi je ne suis pas du tout d'accord.

04:41Alors, je suis d'accord avec ce qu'elle dit vraiment sur la violence des arbitres.

04:44J'ai ce souvenir, mais vous en souvenez certainement tous,

04:47A mort l'arbitre, ce film incroyable.

04:49Je suis d'accord avec ce que dit Elisabeth,

04:52mais je ne suis pas d'accord sur l'idée que le sport rendrait meilleurs les gens qui le sont déjà.

04:56Je pense que le sport a sauvé bien des vies et a changé bien des chemins.

05:00Alors, le football c'est sûr, la boxe, on voit ça aussi, notamment aux Etats-Unis.

05:06Voilà, vous avez la capacité de transformer votre vie,

05:09de sortir d'un mauvais chemin en faisant du sport.

05:12Donc je ne suis pas du tout d'accord avec vous.

05:14Par ailleurs, il y a un point que je lisais à un sociologue du sport, dont j'ai oublié le nom, il me pardonnera,

05:19qui disait qu'il y a aussi, et là ça va rejoindre ce que vous dites Elisabeth,

05:23il y a aussi le fantasme, si vous voulez, des milliardaires.

05:26C'est-à-dire que tout le monde pense à un moment donné qu'il est le père ou la mère de Kylian Mbappé.

05:30Ça c'est quelque chose d'extrêmement prégnant.

05:33Le fameux problème des parents.

05:34En France, le problème des parents que vous avez évoqué.

05:37C'est vrai à l'école aussi.

05:38Oui, oui, je suis d'accord.

05:39Mais là, d'un seul coup, l'enfant de Bondy qui devient la superstar, un des meilleurs joueurs du monde,

05:45il y a quelque chose en tout cas sur Kylian Mbappé qui ne s'est pas passé,

05:50par exemple sur Zidane qui est un génie, qui ne s'est pas passé sur Thierry Henry,

05:54mais sur Kylian Mbappé, ça se passe, c'est quelque chose qui est très prégnant.

05:58Il y a beaucoup de parents d'enfants de banlieue.

06:00Mais pourquoi ça ne se passe pas, si vous voulez, surtout les gens issus de ces quartiers

06:04qui sont devenus de grands chercheurs, qui sont devenus de grands journalistes.

06:08Si vous voulez, pourquoi ?

06:09Si vous voulez, ce qui m'énerve, c'est l'idolâtrie.

06:11En fait, votre premier argument me touche, c'est vrai.

06:15Si vous voulez, il ne faut pas méconnaître les parcours individuels.

06:18On parle de tendance, de phénomène, si vous voulez.

06:21Ce que je voulais dire, c'est qu'en fait, c'est un peu banal,

06:24c'est que le sport en soi, si vous voulez, exalter les capacités...

06:28Je suis d'accord.

06:29C'est Sparte aussi.

06:30Sparte, ce n'était pas non plus...

06:31Ce n'est pas Fort-Barnon, ce n'est pas génial, Sparte.

06:34C'est les nazis aussi.

06:35Donc, si vous voulez, en fait, le sport en soi peut être le vecteur de choses extrêmement contradictoires.

06:40Je suis d'accord.

06:41Donc, qu'il puisse sauver des vies, c'est possible.

06:43Ce que je vois, moi, aujourd'hui, si vous voulez, c'est que d'un côté,

06:45il y a un discours un peu sur les valeurs du sport.

06:48J'en ai marre qu'on me bassine avec les valeurs du sport.

06:50Et que de l'autre côté, on entend toute la journée des histoires de fric, de voyage...

06:54Non, mais c'est intéressant que vous parliez de ça,

06:56parce que c'est super, parce que ça nous amène aux Jeux Olympiques de 1936.

07:01Ça nous amène à Adolf Hitler et à Jesse Owen sur la piste.

07:06Et je lisais dans les mémoires de Jesse Owen,

07:08il raconte qu'il sent toute la haine de la foule.

07:12Il sent même le regard d'Adolf Hitler sur lui.

07:14Et le journaliste lui demande, mais qu'est-ce que vous avez fait à ce moment-là ?

07:17Est-ce que vous étiez tétanisé ?

07:19Tout un stade entier, qui le est parce qu'il est noir.

07:22Eh bien, lui, il a répondu, je n'ai pensé qu'à une chose,

07:25courir dans mon cours noir et arriver jusqu'à l'île d'Arrivée.

07:28Donc, les Jeux Olympiques, je suis d'accord avec vous,

07:30Isabeth, par exemple, de Berlin, c'est les deux.

07:32C'est la haine, le mal absolu nazi,

07:34et la libération d'un athlète qui vient d'un quartier pauvre.

07:37Et il y a 1992, sur la piste d'athlétisme à Barcelone,

07:40ou Dérarté-Toulouse, la jeune athlète noire

07:43qui main dans la main avec l'athlète sud-africaine blanche.

07:46Voilà, tous ces symboles.

07:47Hier, j'animais à Nanterre un débat,

07:50le sport contre la violence.

07:51Je peux vous dire, vous en avez parlé,

07:53la Planète signale sport pour le ministère,

07:55les directions départementales jeunesse et sport,

07:57les procureurs, les forces de l'ordre,

07:59tout le monde s'organise pour préserver le sport.

08:01C'est heureux, et ainsi on pourra convaincre Elisabeth Lévy.

08:04Vous restez là, mesdames, toutes les deux, 8h22.

08:08Je ne vais pas m'assautir.

08:11Je vous le dis, allez, dans un instant, je repousse.

08:13A tout de suite.

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