LIVRE - Faire intrusion dans la chambre d’une adolescente la nuit et la regarder dormir (Twilight), s’accrocher à la nacelle d’une grande roue et menacer de tomber pour inviter une femme à sortir (N’oublie jamais), cacher son sexe dans un paquet de pop-corn en plein rendez-vous au cinéma (La Boum)... Les scènes de cinéma qui dédramatisent et romantisent des comportements problématiques sont nombreuses.
Et elles ne sont pas sans incidence dans la vraie vie. Les films et séries nous poussent inconsciemment à désirer des hommes toxiques, voire violents. C’est ce que Chloé Thibaud appelle la « pop culture du viol ». Dans son livre Désirer la violence, publié aux éditions Les Insolentes ce mercredi 24 avril, la journaliste et autrice analyse ce concept à travers des exemples bien connus du grand public.
Et elles ne sont pas sans incidence dans la vraie vie. Les films et séries nous poussent inconsciemment à désirer des hommes toxiques, voire violents. C’est ce que Chloé Thibaud appelle la « pop culture du viol ». Dans son livre Désirer la violence, publié aux éditions Les Insolentes ce mercredi 24 avril, la journaliste et autrice analyse ce concept à travers des exemples bien connus du grand public.
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00:00 Ce qu'on voit à la télévision ou au cinéma,
00:02 et qui est complètement normalisé, banalisé à l'écran,
00:06 on finit par le banaliser dans la vraie vie.
00:09 La violence, elle est très présente dans les films,
00:26 mais surtout là où on ne l'attend pas,
00:27 par exemple dans les comédies romantiques.
00:29 Il serait complètement illusoire de croire
00:31 que ces films-là n'ont pas d'incidence sur nos constructions
00:35 quand on est enfant, quand on est ado,
00:37 et puis ensuite en tant qu'adulte.
00:38 Et je me suis rendu compte que les modèles
00:40 qu'on m'avait donnés dans la fiction
00:42 étaient la plupart du temps très toxiques.
00:44 Le syndrome Chuck Bass, finalement, on pourrait l'appeler autrement.
00:54 On pourrait par exemple l'appeler le syndrome Darcy,
00:56 le syndrome Daniel Cleaver,
00:58 mais je trouve que Chuck Bass, il est particulièrement intéressant
01:01 parce que c'est vraiment l'archétype de la masculinité toxique.
01:05 C'est typiquement cet homme de fiction
01:08 qui n'est jamais tombé amoureux,
01:09 qu'aucune femme n'a réussi à conquérir.
01:11 Dès le premier épisode de la première saison,
01:14 il commet déjà deux tentatives de viol.
01:17 Malgré ça, alors qu'on devrait se dire
01:18 "ce personnage est complètement infâme",
01:20 Chuck Bass devient très rapidement l'obsession
01:23 des jeunes spectatrices qui regardent la série.
01:26 Et au fil des six saisons,
01:28 ce qu'on voit c'est que la relation entre Chuck et Blair
01:31 correspond complètement au cycle des violences conjugales,
01:34 donc les violences dans la vraie vie.
01:35 Ce que j'appelle le syndrome Chuck Bass
01:37 est directement lié à quelque chose de décrit en psychologie
01:40 qui est le syndrome de la sauveuse.
01:42 Les bad boys sont présentés comme des petits animaux blessés
01:47 qui manquent cruellement d'amour.
01:49 Et ça vient susciter chez nous
01:51 l'envie évidemment de leur fournir cet amour dont ils ont manqué
01:54 et d'être celles pour qui il va changer.
01:57 Le problème c'est qu'à Hollywood, ça finit par marcher.
02:01 Dans la vraie vie, les violences conjugales finissent mal.
02:05 Les hommes ne changent pas.
02:08 Assez systématiquement dans les fictions,
02:10 on oppose la figure du bad boy à celle du nice guy,
02:13 donc le mec sympa.
02:14 Cette figure-là, il faut s'en méfier.
02:16 Très souvent, le nice guy, s'il est sympa avec l'héroïne,
02:20 c'est quand même parce qu'il a une idée en tête
02:22 et quand même parce qu'il a envie de la séduire.
02:24 Il y a un exemple français qui est issu de l'Auberge espagnole.
02:27 Xavier, on se dit normalement qu'il est vraiment un mec sympa.
02:32 Mais dans l'Auberge espagnole, il y a une scène d'agression sexuelle pourtant
02:35 entre Xavier et Anne-Sophie.
02:38 Ils lui forcent un baiser alors qu'elle lui dit non.
02:42 Et elle lui dit non à sept reprises.
02:45 Pour autant, Xavier y va et ça finit par être quelque chose de romantique.
02:49 Quand Xavier raconte cette aventure au parc, il dit
02:53 "Putain, je te jure, c'était trop bon, c'était comme dans les films".
02:56 Ça inscrit que comme dans les films, et donc comme dans l'Auberge espagnole,
03:00 et donc comme dans la vraie vie,
03:02 eh bien non, non, non, ça veut finalement dire oui, oui, oui.
03:06 Il existe quand même des vrais nice guys dans la fiction.
03:09 Mais le souci, c'est qu'on n'a pas, en tout cas jusqu'à très récemment,
03:13 appris à érotiser la gentillesse.
03:16 Par exemple, Mike, le mari de Phoebe dans Friends,
03:19 si on pense à Charmed, l'être de lumière, Léo,
03:23 c'est le mari de Piper Alliwell, l'une des sorcières.
03:25 Il ne leur arrive jamais rien de croustillant.
03:27 Les vrais nice guys, finalement, sont soit relégués au rang du mec ennuyeux,
03:33 soit aux meilleurs amis complètement friendzonnés,
03:35 ou encore aux meilleurs amis gays.
03:37 Sous-titrage Société Radio-Canada
03:39 [Musique]
03:46 [SILENCE]