• il y a 8 mois
Avec Luc Chatel, auteur de "Qui veut la peau des maires de France ?" publié aux éditions du Cherche-Midi.

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Transcription
00:00 *Musique*
00:13 Sud Radio Bercov dans tous ses états.
00:16 Sud Radio 12h28, nous sommes sans jusqu'à 14h.
00:19 Aujourd'hui pour nous parler de les maires, est-ce qu'ils sont en danger André Bercov ?
00:23 Est-ce que nos maires sont en danger ?
00:25 On parle avec Luc Châtel qui vient nous voir pour ce livre qui veut la peau des maires aux éditions du Cherche-Midi.
00:30 *Musique*
00:38 Vous avez reconnu même s'il ne chante pas c'est Léo Ferré, je vous hais.
00:41 Je vous hais, alors lui ça n'a rien à faire effectivement, ce ne sont pas les maires qu'il hait.
00:47 Mais effectivement tous les empêcheurs, tous les gens qui essayent de penser en rond et qui ne sont que dans les passages floutés.
00:54 Mais là il y a quelque chose de passionnant, est-ce que les maires vont disparaître ?
00:59 Vous allez me dire "mais comment les maires, 36 000 communes, 36 000 maires, ça marche très très bien"
01:02 Pas du tout.
01:03 Et Luc Châtel vient de publier, va publier, il sort jeudi, un livre que je vous recommande
01:09 "Qui veut la peau des maires de France"
01:11 Parce qu'on se dit le maire en général ça marche très très bien, ça sort au Cherche-Midi le livre.
01:16 Et puis Luc Châtel, vous le dites vous-même d'ailleurs dans les sondages, dans les écoutes,
01:22 au sein du monde politique les maires se distinguent favorablement en recueillant la confiance de 3 français sur 4.
01:29 3 français sur 4 aiment les maires.
01:31 Et en même temps, vous commencez votre livre, c'est vraiment bourré d'enseignement,
01:35 c'est que le nombre de maires qui veulent s'arrêter, qui n'en peuvent plus, qui veulent partir,
01:42 et effectivement est-ce que franchement le maire, la fonction de maire est une institution qui peut mourir ?
01:49 Alors moi, là clairement elle est en train de dépérir, oui, pour deux types de raisons.
01:56 D'une part il y a la fatigue personnelle des maires et les agressions personnelles des maires.
02:01 Le livre est parti de ça, des deux agressions spectaculaires très médiatisées qu'il y a eu en 2023 à la île-et-rose et à Saint-Brévent-les-Pins.
02:08 Oui, ou une voiture, rappelons en France que c'était une voiture bélier en France, la maison...
02:12 Une voiture bélier et tire au mortier sur la maison où le maire n'était pas là, c'était le début des émeutes,
02:17 il était dans sa mairie, sa femme et leurs deux enfants dormaient et donc sa femme a dû s'enfuir avec les deux enfants,
02:23 et d'ailleurs elle s'est blessée en s'enfuyant par le jardin.
02:26 A Saint-Brévent-les-Pins, sa maison, il dormait avec sa femme dans sa maison, sa maison a été incendiée en pleine nuit.
02:32 Donc je me suis dit, mais qu'est-ce que c'est que ça ? Est-ce que ce n'est que exceptionnel ou est-ce que derrière il y a une réalité ?
02:40 Et vous avez découvert énormément de...
02:42 Oui, oui, et donc j'ai été stupéfait parce que, en plus, moi c'est un sujet que j'ai été journaliste pendant 25 ans,
02:49 c'est un sujet qui m'a toujours intéressé, donc je connais, j'ai rencontré beaucoup de maires,
02:53 et jamais je n'avais entendu ça.
02:55 Et donc là je découvre à la fois un nombre d'agressions incroyables...
03:00 Vous donnez une liste à la fin de votre livre, 53 agressions violentes en 2023.
03:05 Oui, et ce n'est que celles qui sont connues, qui sont rendues publiques, parce que ce que je dis dans le livre...
03:10 Non, là par exemple, je donne le chiffre du ministère de l'Intérieur qui n'a pas encore été rendu public, mais pour 2023,
03:16 2700 plaintes et signalements d'élus, dont la plupart sont des maires.
03:20 2700 ?
03:21 Oui, et en hausse de 15% par rapport à l'année précédente, et entre 2021 et 2022 il y avait déjà une hausse de 30%.
03:29 Donc on est clairement sur une augmentation, et derrière ça, ce que je raconte aussi avec beaucoup de témoignages,
03:35 c'est que des maires disent, d'une part, qu'ils ne veulent pas porter plainte, alors pour deux types de raisons...
03:40 Pourquoi ?
03:41 D'abord parce que parfois ils ont peur en fait, et souvent le problème se pose dans les petites communes.
03:48 Et moi le livre est vraiment très axé sur les petites communes.
03:51 Et je rappelle, parenthèse, qu'en France nous avons la moitié des communes, donc plus de 18 300 communes à peu près,
03:59 sont des communes de moins de 500 habitants.
04:01 Et vous avez 97% des communes de France qui font moins de 10 000 habitants.
04:05 Les communes françaises, c'est des petites et des moyennes communes.
04:09 Et quand vous êtes élu d'une petite commune, de quelques centaines d'habitants, vous connaissez tout le monde.
04:14 Donc à partir du moment où vous êtes pris à partie, alors déjà vous êtes plus souvent pris à partie,
04:18 puisque tout le monde vous connaît, tout le monde s'arroge le droit de venir vous interpeller, voire de vous insulter.
04:24 Et par ailleurs, beaucoup me disent, mais quand on est pris à partie, c'est très compliqué,
04:28 parce que par une des raisons les plus fréquentes, c'est les conflits de voisinage.
04:32 Moi je vais devoir prendre partie entre deux personnes que je connais.
04:36 Comment prendre partie ?
04:38 Les maires ont cette pression constante, donc pression physique, et je donne beaucoup de descriptions,
04:45 parce qu'il y en a à la fois beaucoup plus que ce que je pensais, d'agression, et elles sont hyper violentes.
04:52 - Est-ce que cette violence, alors Luc Châtel, ce qu'ils vous ont dit, les personnes que vous avez enquêtées, les maires, etc.
04:57 ça a augmenté depuis quelques années ? Est-ce qu'ils sentent un accroissement de la violence ?
05:02 - Alors eux, ils ressentent. Il y a un critère qu'on peut prendre aussi.
05:08 Il y a deux types de critères. Il y a déjà des critères très concrets de type d'attaque,
05:13 et donc il y a vraiment des tentatives de meurtre, quand des personnes vont couper les freins d'une voiture,
05:18 ou trafiquer des voitures, c'est arrivé plusieurs fois.
05:22 Les maires ne sont pas morts, mais ils auraient pu mourir si ils ne s'étaient pas rendus compte.
05:27 Et il y a un autre critère, dont je parle pas mal, qui est plus un critère d'agressivité,
05:36 qui se mesure très précisément, je cite beaucoup d'études, pour vraiment m'appuyer le plus possible sur des faits,
05:45 à partir de l'étape un peu décisive, ça a été la période du Covid, le confinement.
05:51 - Où les gens sont enfermés au confinement. - Le repli sur soi.
05:54 Ce dont parle beaucoup d'élus et de personnes citées dans d'autres études, qui concernent d'autres domaines,
06:00 c'est la coupure du lien social. J'ai un maire de la Nièvre, que je cite pas mal dans le bouquin,
06:06 parce que je trouve que sa situation est exemplaire. Le maire de Brassy, village de 600 habitants dans la Nièvre,
06:11 c'est vraiment une commune assez symptomatique, parce que la ville la plus proche est à 80 km, c'est Nevers,
06:17 c'est une ville un peu coupée de tout. Lui, c'était un jeune maire, je l'avais rencontré il y a 15 ans,
06:21 il venait d'être élu pour son premier mandat, il avait une trentaine d'années, il avait la pêche,
06:25 et là il se trouve que pendant que je faisais le livre, à un moment, il m'écrit, il me dit "je vais démissionner, c'est fini, j'en peux plus".
06:32 Dans sa commune, il m'a dit qu'avant le confinement, il y avait la cérémonie des voeux, comme ça se fait dans toutes les communes,
06:39 et c'est vrai que dans les petites communes, la cérémonie des voeux, c'est le moment où tout le monde peut venir voir le maire,
06:44 se sentir volontiers accessible, se rendre volontiers accessible, pour rencontrer les nouveaux habitants,
06:50 parler des problèmes, moment de convivialité, de lien social par excellence, et il m'a dit qu'à partir du Covid,
06:55 il y a deux fois moins de personnes qui viennent, parce que les gens ont eu l'habitude de faire du présentiel,
07:00 mais c'est vrai qu'il y a eu aussi des comportements, et c'est pour ça que j'ai cité une des parties des citoyens consommateurs,
07:08 c'est que le Covid a aussi renforcé, et là je cite une étude très intéressante de la Fondation Jean Jaurès,
07:12 qui dit que ça a renforcé vraiment le poids de la consommation dans les habitudes sociales des Français,
07:19 c'est-à-dire qu'on était chez soi, et puis on a pris l'habitude notamment de commander des livraisons,
07:24 donc forcément quand on commande par livraison, on a envie que le livreur arrive à l'heure, on est un peu plus anxieux.
07:31 Vous voulez dire que l'anxiété a quand même augmenté la violence quelque part ?
07:36 Oui, l'agressivité, et parce que les maires disent tous que désormais ils sont confrontés à des personnes qui veulent tout de suite.
07:47 Et là c'est quand même assez étonnant, on en vient à des actes de violence, ou même des injures, mais parfois pour rien,
07:56 et la plupart des enjeux ce n'est vraiment pas grand-chose, c'est des feux sauvages dans un jardin,
08:01 c'est des décharges publiques, c'est "je veux construire mon cabanon dans mon sans-permis de construire",
08:06 donc des choses comme ça, ou des conflits de voisinage qui dégénèrent de façon très violente.
08:11 Alors ça c'est le premier aspect où on peut dire que les maires sont en danger,
08:14 oui parce qu'ils ont une pression, donc à la fois physique, très clair, mais morale aussi quand on se fait insulter, menacer.
08:19 Et puis des corbeaux qui harcèlent du matin au soir pour raconter sa vraie vie.
08:25 Alors le second truc c'est l'État, si j'ai bien compris.
08:28 Oui c'est ça tout à fait, le second, je dis qu'ils sont pris entre une violence d'en bas,
08:34 qui est la violence physique et verbale des habitants, et une violence morale d'en haut.
08:41 Moi je suis parti dans mon enquête sur ces histoires d'agressions physiques,
08:45 et eux me disent "c'est même pire en fait, c'est horrible comment vous faites pour tenir le coup".
08:52 D'ailleurs certains disent "ça fait partie du job", c'est aussi pour ça que beaucoup ne portent pas plainte,
08:57 parce qu'ils ont intégré ça, ce qui peut paraître quand même assez anormal de notre point de vue,
09:02 mais bon, ça fait partie du job.
09:05 Mais ils nous disent en fait, si vous voulez, le pire, ce qui nous bloque, ce qui nous démoralise,
09:10 et ce qui nous pousse à démissionner, c'est vraiment en grande partie l'attitude de l'État.
09:16 Et là en fait, moi je suis parti dans une autre enquête, j'ai fait un peu un bilan des 20 dernières années,
09:23 à la fois de politique de décentralisation, et c'est vrai que quand on fait le constat,
09:29 je suis parti il y a 20 ans, parce que c'est quand il y a eu le début des gèles des dotations.
09:32 Parce qu'ils disent "on nous a retiré des moyens, gèles des dotations, baisse des dotations,
09:36 on nous a retiré des compétences", ça c'est vraiment quelque chose dont ils parlent beaucoup avec la loi NOTRe de 2015,
09:42 où les communes ont été obligées à partir de...
09:44 La nouvelle organisation territoriale de la République.
09:47 Voilà, c'était sous Hollande, et les maires ont été obligés d'intégrer un EPCI,
09:54 donc un établissement public de coopération intercommunale.
09:58 En gros, une collectivité de communes.
10:00 La communauté de communes, la GLO, la GLObération.
10:02 Ils ont été obligés de l'intégrer, et surtout ils ont été obligés, avec des délais imposés,
10:08 de déléguer des compétences, et des compétences qui sont très importantes.
10:12 La compétence de l'eau, dont je cite un politologue qui explique que la compétence de l'eau,
10:18 ça date de la Révolution quand même, c'est des choses qui ne sont pas anodines.
10:21 Ils ont perdu leur pouvoir sur beaucoup de choses.
10:24 Alors ce que disent certains, c'est que...
10:27 Vous voyez, on est dans une situation où on est confronté à des habitants
10:31 qui viennent protester, voire nous agresser, parce qu'on a pris telle ou telle décision,
10:35 et parfois on est obligé de leur expliquer, mais c'est pas nous en fait.
10:37 C'est l'EPCI, la collectivité de communes.
10:40 Combien d'habitants, et là ça pose un vrai problème de démocratie, de représentativité,
10:45 combien d'habitants connaît le nom du président de son intercommunalité,
10:52 et combien connaissent les compétences partagées entre la mairie et l'EPCI, l'intercommunalité.
11:00 Et donc il se dit, on a l'État qui nous retire des moyens avec le gel des dotations,
11:05 baisse des dotations, suppression de la taxe d'habitation de Macron.
11:09 Alors au niveau des moyens, ça a été compensé par d'autres dotations,
11:12 mais sauf que la suppression de la taxe d'habitation, les maires disent,
11:16 en fait c'était nous un moyen qu'on avait d'avoir une politique fiscale.
11:21 Or c'est un droit constitutionnel.
11:23 - Ils méprisent leur politique fiscale.
11:25 - Ils disent c'est même une atteinte pour nous au droit constitutionnel
11:28 de la libre administration des collectivités locales.
11:30 On nous a retiré ce moyen-là, et donc ils ont quasiment plus de moyens d'avoir une politique fiscale.
11:37 - Il leur reste quoi pour pouvoir en fait ?
11:39 - Pas grand chose, c'est pour ça.
11:41 Je disais qu'on pourrait quasiment citer De Gaulle,
11:43 qui disait qu'il ne reste quasiment qu'une inauguration des chrysanthèmes.
11:47 - Et aussi, Luc Chatel, vous en parlez, il y a aussi les normes.
11:52 Toute la satire hallucinante des normes qu'on leur impose.
11:55 - Alors là aussi c'est absurde.
11:57 Moi ce qui m'a intéressé, c'est que finalement j'ai réalisé en faisant cette enquête,
12:00 qu'un des aspects intéressants c'est que les maires finalement étaient les révélateurs,
12:07 en dehors de ce qui leur arrive personnellement,
12:09 et puis en tant qu'institution qui pose pas mal de problèmes,
12:11 ils étaient aussi les révélateurs de certains dysfonctionnements en fait,
12:14 de la façon dont fonctionnent nos institutions.
12:17 - C'est le fil de la pelote, on le tire et on voit ce qui se passe.
12:19 - Et puis ça fait une sorte de portrait en fait de l'époque.
12:23 Et c'est vrai qu'on voit avec certaines lois,
12:27 alors on appelle ça normes parce qu'on comprend mieux,
12:30 mais c'est vrai que c'est plus certaines lois,
12:32 qui d'une part, là aussi par rapport vraiment notamment aux petites communes,
12:36 sont absolument inapplicables.
12:38 Alors moi j'en cite deux, je cite la loi Handicap et la loi ZAN,
12:41 Zéro Artificialisation Net, loi Handicap de 2005, sous Chirac,
12:44 la loi Zéro Artificialisation Net de 2023.
12:48 J'y cite toutes les deux parce que là on touche à une forme d'absurdité,
12:51 de quelque chose qui mérite vraiment, qui mériterait qu'on s'y intéresse,
12:54 et que tous les élus, les maires que j'ai rencontrés,
12:57 et dont j'ai recueilli les témoignages disent, et ça pareil,
13:00 évidemment la loi Handicap, évidemment qu'on est pour ces objectifs,
13:03 rendre accessible notamment les lieux publics, évidemment,
13:05 et la loi Zéro Artificialisation Net, qui notamment lutte contre la bétonisation,
13:09 les maires des communes rurales, évidemment on vit dans la nature,
13:12 la nature on est les premiers à vouloir la préserver,
13:14 mais la façon dont elles ont été faites, nous les ont rendues totalement inapplicables.
13:20 - Pourquoi ?
13:21 - Parce que par exemple, si vous prenez un exemple très concret,
13:24 la loi 2005, l'exemple qu'on cite souvent sur le handicap,
13:28 elle oblige toutes les communes à avoir des trottoirs d'une largeur d'1m40.
13:33 Vous allez dans des petites communes,
13:36 notamment les communes n'ont pas les moyens techniques,
13:43 n'ont pas les agents, ni parfois la qualification,
13:46 ni les moyens évidemment pour transformer tous les trottoirs.
13:49 Et vous avez même parfois des normes qui se contredisent,
13:52 puisque l'un explique par exemple que pour des normes environnementales,
13:55 il avait dû refaire un gymnase,
13:57 pour refaire le gymnase il fallait qu'il l'empiète sur le trottoir,
14:00 et donc il se trouvait confronté entre normes environnementales,
14:02 refaire le gymnase, ou refaire le trottoir.
14:06 Le résultat c'est que la loi de 2005,
14:08 pour l'accessibilité aux personnes handicapées, notamment des bâtiments publics,
14:12 tous les bâtiments devaient être accessibles en 2015,
14:14 on est donc 10 ans plus tard, on est quasiment 20 ans plus tard,
14:18 c'est même pas la moitié qui sont réalisés.
14:20 Et la loisanne, zéro artificialisation nette,
14:23 là ils nous disent, ils me disent, les maires des communes rurales,
14:26 ils me disent "mais en fait pourquoi cette loi a été faite ?"
14:28 "C'est pour pénaliser et freiner la bétonisation."
14:32 Qui a bétonné en France ? Est-ce que c'est les petites communes rurales ?
14:35 Bien sûr que non, c'est les grandes communes, c'est les métropoles.
14:38 Et donc nous on se retrouve avec, là aussi, une conséquence très concrète,
14:41 c'est que les communes ont un nombre limite de permis de construire
14:47 qu'ils peuvent attribuer par année.
14:49 Et donc moi j'ai le maire de Brassy, là dans l'Anièvre,
14:51 qui me dit "mais moi, si, enfin nous, nos petites communes,
14:55 on cherche à tout prix à attirer des gens,
14:57 donc si moi une année j'ai 4 foyers qui veulent venir s'installer dans ma commune,
15:02 et bien je suis limité à 3, et donc je vais devoir dire à un des foyers
15:04 "ah bah non, vous venez pas vous installer",
15:06 ce qui est complètement absurde, alors qu'on a besoin de ça.
15:08 Et par exemple, ils ont besoin de ça, par exemple, pour maintenir des classes aussi,
15:11 enfin pour maintenir du lien social.
15:14 Donc alors qu'ils sont vraiment tous pour le...
15:17 - L'absurdité de la bureaucratie qui impose effectivement...
15:20 - Et puis en plus, inefficacité totale des lois,
15:23 en tout cas si on prend la loi sur le handicap,
15:25 et puis la loi ZAN, elle a été retoquée d'ailleurs par le Conseil d'État sur certains aspects,
15:30 et ça va encore traîner très très longtemps.
15:32 Et donc c'est vrai qu'à ce titre-là, les maires, les communes,
15:35 sont révélateurs, révélatrices de dysfonctionnement.
15:39 Là c'est vraiment la fabrication de la loi qui pose vraiment problème.
15:43 - Le tsunami du jacobinisme, on n'a pas été très jurondins dans toute cette histoire.
15:48 - Oui, oui, mais à la limite, un jacobinisme, pourquoi pas,
15:51 mais il faudrait qu'il y ait des analyses,
15:54 qu'on puisse étudier plusieurs pistes,
15:57 mais qu'on consulte les élus.
15:59 Les élus n'ont pas été consultés,
16:01 et ils auraient peut-être pu alerter justement sur certains problèmes, certaines limites.
16:04 - C'est clair.
16:05 Et c'est ça qui fait, juste une dernière question, Luc Châtel.
16:09 En tout cas je renvoie à votre livre, vraiment,
16:11 c'est un portrait de la France très intéressant,
16:14 et assez préoccupant, c'est le moins que l'on puisse dire.
16:16 C'est pour ça qu'en fait, parce que vous donnez au début,
16:20 le chiffre des démissions est quand même très impressionnant.
16:22 - Oui, alors les démissions, elles sont estimées à peu près à 450 par an,
16:27 depuis 2020, c'est des études menées par l'AMF, l'Association des maires de France,
16:32 et sur la mandature précédente, 2014-2020,
16:35 elles étaient de, on en comptait 350 par an.
16:38 - Donc ça a augmenté.
16:39 - Oui, ça a augmenté, c'est 100 par an,
16:41 et toutes les semaines, dans mon département, la Loire,
16:43 récemment, il y a eu au moins un maire qui a démissionné,
16:46 j'ai entendu qu'à Villers-sur-Mer, en Normandie, le maire avait démissionné.
16:49 Chaque semaine, vous avez des démissions de maires,
16:53 et vous avez des maires qui ne veulent plus se représenter.
16:55 En 2020, il y avait à peu près, je crois, 60% des maires qui ne voulaient plus se représenter.
16:59 - C'est énorme.
17:00 - Oui, alors finalement, il y en a 50% qui se sont représentés,
17:02 parce qu'il n'y a pas de candidats qui veulent se représenter.
17:05 - Oui, c'est ça, il n'y a pas de candidats.
17:06 - C'est pour ça que si vous voulez, quand vous prenez tous les critères,
17:09 si vous prenez ces critères-là sur le long terme,
17:10 entre les maires qui ne veulent plus se représenter,
17:12 et puis ils se sont représentés une fois, un peu, contraint et forcé,
17:15 une deuxième fois, ils n'ont peut-être pas retenté le coup.
17:17 Donc vous risquez d'avoir, soit des mairies sous tutelle,
17:20 en tout cas, de fait, le maire en tant que personne physique,
17:23 mais la mairie, le maire en tant qu'institution,
17:25 ils sont clairement en danger, oui, c'est sûr.
17:28 - C'est ça, et en danger de mort, c'est vrai.
17:30 On se dit, on parlait des déserts médicaux,
17:32 il peut y avoir des déserts municipaux.
17:34 - Alors c'est vrai que le problème qu'il y a derrière ça,
17:36 c'est un peu une France à deux vitesses qui se dessine,
17:39 c'est-à-dire une France des métropolisations,
17:41 et où là, il y a une responsabilité des politiques,
17:43 c'est-à-dire vraiment d'avoir, et tout président confondu ces dernières années,
17:46 d'avoir absolument forcé la métropolisation,
17:49 au détriment de zones rurales.
17:51 Voilà, je cite la phrase d'un président qui disait,
17:53 si vous voulez des TGV dans toutes les grandes villes,
17:55 il n'y aura plus de bureau de poste pour tous.
17:57 Mais le bureau de poste pour tous, c'est la définition du service public.
18:01 En nous disant ça, on assume de sacrifier les services publics,
18:04 et les mairies dans certaines zones rurales,
18:07 c'est le dernier service public qui reste,
18:09 il n'y a plus de bureau de poste,
18:11 donc la disparition de mairies, à ce titre-là,
18:14 peut, oui, en effet, ça devient inquiétant.
18:16 - Et puis s'il n'y a plus d'interlocuteurs, ça devient très grave,
18:18 parce que des millions de Français vivent dans ces zones rurales.
18:20 - C'est l'isolement, quand on dit qu'il n'y a plus de service public,
18:22 c'est aussi qu'il n'y a plus de lien social,
18:24 c'est évident que le maire, le conseiller municipal, dans les petits villages,
18:26 c'est du lien social pour les personnes âgées, pour les personnes isolées,
18:28 c'est souvent le dernier lien social qui reste,
18:30 et donc on se dirige vers une France qui serait...
18:32 - Une France confinée.
18:34 - Oui, avec des zones fantomatiques,
18:36 et d'autres hyper-denses et ultra-riches.
18:39 - Luc Châtel, c'est ça, et cette discrimination,
18:43 il faut vraiment faire attention, c'est la fin.
18:45 Qui veut la peau des maires de France, malheureusement,
18:48 vous dites "il y a la racaille d'en haut",
18:50 et je ne sais pas comment on peut appeler la racaille d'en bas,
18:52 ou la racaille d'en haut...
18:54 - Je ne sais pas si c'est des termes que tu utiliserais.
18:56 - Je ne sais pas si c'est des termes que tu utilises,
18:58 parce que quelque part, il y a une irresponsabilité des gens
19:00 qui exécutent tout ça, et qui légifèrent quelque part.
19:02 Pas tous, bien sûr.
19:04 Merci. - Merci à vous.
19:06 - Merci Luc Châtel, on rappelle ce livre qui sort jeudi en librairie,
19:08 "Qui veut la peau des maires ?"
19:10 C'est aux éditions du Cherche Midi.
19:12 On va marquer une courte pause dans un instant,
19:14 et on revient pour les perles, les huées, et les bravos d'André Bercoff.
19:16 A tout de suite sur Sud Radio.
19:18 - Sud Radio Bercoff, dans tous ses états.
19:20 Appelez maintenant pour réagir. 0826 300 300.

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