Depuis les premières élections européennes, en 1979, l’abstention, à l’échelle de l’Union, a toujours augmenté. Une seule exception à cette évolution : les élections européennes de 2019.
Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dominique-reynie-en-toute-subjectivite
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00:00 En toute subjectivité avec le directeur de la Fondation pour l'innovation politique,
00:05 Dominique Reynier, bonjour !
00:06 Bonjour Nicolas Demorand.
00:07 Vers une forte abstention aux européennes, Dominique ?
00:10 Il faut le craindre Nicolas, depuis les premières élections européennes en 1979, l'abstention
00:16 à l'échelle de l'Union a toujours augmenté.
00:18 D'élection européenne à élection européenne, jusqu'en 2014, l'abstention avait passé,
00:25 comprenez-vous bien, de 38% à plus de 57% en 2014.
00:30 Une seule exception à cette évolution, les élections européennes de 2019, donc les
00:34 dernières qui ont eu lieu.
00:36 Là, pour la première fois, l'abstention a reculé et c'est la participation qui est
00:40 redevenue majoritaire, 51%.
00:42 Et cela ne s'était pas vu depuis les élections de 1994.
00:46 Mais à ce jour, les sondages réalisés dans la perspective du 9 juin 2024 annoncent le
00:52 retour d'une abstention massive.
00:54 Elle pourrait atteindre 56% des 370 millions d'électeurs appelés par ce scrutin.
00:59 Pourtant, les défis politiques de portée globale ne manquent pas, tandis que le Parlement
01:04 européen offre un moyen exceptionnel pour y répondre.
01:07 Ce Parlement est, dans l'histoire, la première assemblée démocratique transnationale et
01:12 il demeure sans équivalent dans le monde.
01:15 Mais quel peut être le sens de cette abstention ?
01:17 En tout cas, Nicolas, elle n'exprime pas un rejet de l'Europe, puisqu'au contraire,
01:22 les Européens la soutiennent largement, comme il le montre au sein des Etats membres, dans
01:27 presque tous les pays et la plupart du temps, en désignant des majorités pré-européennes.
01:32 Des majorités de droite, de gauche ou en coalition droite-gauche, mais toujours pré-européennes.
01:38 Le Brexit n'a pas convaincu les populations d'abandonner ou d'abattre les défis européens.
01:44 Même les électeurs des partis populistes ne le souhaitent plus.
01:47 Ce que les citoyens montrent avec constance depuis plus de 60 ans, c'est leur attachement
01:52 à la construction européenne.
01:53 Et ils le font désormais au nom d'une époque saturée de défis existentiels.
01:58 Financiers, énergétiques, migratoires, démographiques, géopolitiques, terroristes,
02:02 pandémiques, technologiques, etc.
02:04 Je propose plutôt de voir dans l'abstention l'expression d'une incompréhension.
02:09 Celle de citoyens qui approuvent le principe de l'Union, qui en attendent logiquement
02:14 la formation d'une puissance européenne, laquelle ne vient toujours pas.
02:18 Ainsi, une partie de l'abstention procède du désarroi que suscite une Europe capable
02:24 de réformer, à marche forcée, la vie des Européens qui ne le demandent pas, mais qui
02:29 demeurent sourdes à leurs attentes fondamentales.
02:31 Défendre les frontières de l'Europe, définir et revendiquer l'identité européenne, affirmer
02:37 la puissance de l'Union, le faire aux yeux du monde et au profit des peuples dont elle
02:42 est l'émanation historique et politique.
02:44 Des peuples qui attendent cela et c'est en les décevant qu'elle les pousse vers l'abstention
02:49 ou le vote populiste.
02:50 Dominique Régnier, merci et à mardi prochain !