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La religion est de retour en France. Deux indices récents de natures différentes en témoignent.

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00:00 - 7h21 en toute subjectivité aujourd'hui avec le directeur de la Fondation pour l'innovation politique,
00:08 Dominique Reynier, bonjour. - Bonjour Nicolas Demorand.
00:11 - Dominique, vous nous parlez de dogme ce matin.
00:13 - La religion est de retour en France, deux indices récents de nature différente en témoignent.
00:21 D'une part lors de la célébration de Pâques, les baptêmes chrétiens ont été mesurés en augmentation,
00:27 de 31% pour les adultes et de 50% pour les adolescents.
00:31 D'autre part des frictions de plus en plus graves se sont manifestées entre les institutions laïques et l'islam,
00:37 comme on l'a vu récemment avec la dimission d'un proviseur menacé.
00:41 Ce regard religieux a certainement des causes multiples et quelques-unes sont proprement spirituelles,
00:48 mais en France il est aussi et je crois davantage la réaction à une place que nous avons laissée vacante.
00:54 Nos esprits se sont vidés de croyances, pas seulement religieuses mais aussi politiques.
00:58 Posons-nous la question, avons-nous encore une croyance commune ?
01:03 Le christianisme a été notre religion nationale pendant plus de 1000 ans, ce n'est plus le cas depuis longtemps.
01:08 L'idée républicaine ou démocratique a pris la suite, mais elle est déjà en crise,
01:12 ainsi que les croyances politiques qui ont fleuri à ses côtés.
01:15 Le libéralisme, l'individualisme, le socialisme ou le communisme.
01:19 Aucun de ces dogmes ne parvient plus à nous réunir vraiment.
01:23 Quant au sentiment nationaliste, il divise les français plus qu'il ne les rassemble.
01:27 Et l'Union Européenne, Dominique, n'est-elle pas ce qui nous rassemble désormais ?
01:31 Il est vrai Nicolas que l'Union Européenne est à ce jour notre dernière grande idée,
01:35 mais elle a réuni des états et des nations qui s'étant détruits mutuellement dans des guerres atroces,
01:40 n'aspiraient plus qu'à éviter les conflits.
01:42 L'Europe a vu le jour dans un contexte d'effacement des idéologies.
01:45 Et c'est d'abord l'espoir d'un monde sans idéologie, ni confrontation ou clivage qui a motivé cette union.
01:52 L'Union Européenne est une institutionnalisation de la fin des idéologies.
01:57 Si cette absence de dogme commun a une vertu pacificatrice,
02:00 elle nous confronte néanmoins à ce qu'il faut appeler le vide des croyances.
02:04 Or ce vide ne se manifeste pas sous la forme d'une disparition des croyances,
02:08 mais au contraire de leur prolifération.
02:11 Elles sont alors trop nombreuses et instables pour faire autorité.
02:14 Et donc elles échouent toutes à refonder notre communauté.
02:18 Plus encore, loin de favoriser le pluralisme qui féconde l'esprit public,
02:22 cette multiplication des croyances favorise la discorde,
02:25 les conflits politiques, interculturels, religieux.
02:28 Des conflits virulents de plus en plus violents.
02:31 Et l'on s'aperçoit que ce n'est pas parce que l'on est sans croyances communes
02:35 que l'on devient plus tolérant à l'opinion des autres.
02:37 Comme si nous n'étions plus qu'une multitude.
02:40 Une multitude, ce n'est pas une communauté, un peuple, une nation.
02:44 Il est impossible de constituer un peuple, ni même de le perpétuer,
02:48 de faire nation sans un idéal commun.
02:51 Nous ne sommes plus en mesure de le désigner.
02:53 Il n'est que temps pour nous de le définir.

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