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Christine Kelly et ses chroniqueurs débattent de l'actualité dans #Facealinfo

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00:00 - C'est presque l'heure.
00:04 - Pourquoi vous éclipsez au moment où vous prenez l'antenne ?
00:08 - Il y a eu un noir à l'antenne.
00:10 La minute off au Simon Guy là.
00:13 - Bonsoir Christine et bonsoir à tous.
00:15 Nous sommes à un moment de bascule de ce conflit.
00:17 Ce sont les mots de Gabriel Attal qui s'est exprimé à l'Assemblée nationale cet après-midi.
00:21 Sur le soutien de la France à l'Ukraine, le Premier ministre a salué la résistance du peuple ukrainien
00:26 qui selon lui a été et reste exceptionnel aujourd'hui.
00:29 Le chef du gouvernement a ajouté qu'une victoire de Moscou aurait des risques concrets sur la vie quotidienne des Français.
00:35 Dans le Gard, le corps d'une fillette de 4 ans a été découvert et les recherches se poursuivent pour retrouver son frère, lui aussi disparu.
00:42 Les deux enfants âgés de 4 et 13 ans avaient été emportés samedi soir avec leurs parents dans la voiture familiale.
00:48 Le corps du père de famille a lui été retrouvé hier et la mère des deux enfants avait pu être sauvée in extremis.
00:54 Et puis la soeur du policier Eric Masson portera la flamme olympique. Fanny Masson qui est elle aussi policière,
01:00 fait partie des 100 personnes qui la porteront en juin prochain lors de son passage dans le Vaucluse.
01:05 C'est un honneur, une manière de rendre hommage à Eric qui était un grand sportif. C'est ce qu'elle a affirmé aujourd'hui.
01:11 Merci beaucoup, très émouvant. Merci cher Simon.
01:14 Et au sommaire ce soir, une victoire de la Russie c'est un danger direct pour notre sécurité alimentaire.
01:20 Cela menacerait notre pouvoir d'achat. C'est le risque de la panne énergétique. Cela menacerait nos agriculteurs.
01:26 Gabriel Attal s'est exprimé à l'Assemblée Nationale en cherchant à défendre l'engagement de la France aux côtés de l'Ukraine.
01:33 Un vote est attendu ce soir. Le RN doit s'abstenir. LFI compte voter contre. Un vote sans valeur contraignante.
01:41 Mais quel est donc le but de cette séquence ? L'édito de Mathieu Bocote.
01:46 La nuit prochaine, les habitants du quartier de Blonne à Rennes seront encore dans l'angoisse, trois jours après les scènes de guerre qu'ils ont vécues.
01:56 Avec des impacts de balles à l'intérieur de certains domiciles, des tirs de Kalachnikov.
02:02 On a peut-être évité un bain de sang avec une fusillade interminable. Il s'agirait de la pire fusillade depuis le Bataclan.
02:08 Après Marseille, combien d'autres villes vivent la même mise du narcotrafic ? Est-ce qu'on s'habitue ?
02:15 L'analyse de Dimitri Pavlenko.
02:18 Notre-Dame a retrouvé la charpente de sa nef. Et les charpentiers ont affiché leur joie après leur travail, ici, sur cette photo.
02:27 Surprise ! Ils ont été victimes de milliers de commentaires anti-blancs.
02:31 « C'est la première fois que je vois autant de blancs sur un chantier », dénoncent certains.
02:35 « Comment la photo ? Ils ont viré tous les Noirs et les Arabes pour faire la photo », hurlent d'autres.
02:40 « Comment est-on passé de la compétence à l'apparence ? Comment est-on arrivé à la forme sans valoriser le fond ?
02:47 La couleur de peau dit-elle tout de chacun de nous ? » Le regard de Marc Menon.
02:52 Alors que les députés débattent de l'engagement de la France aux côtés de l'Ukraine dans la guerre face à la Russie,
02:58 beaucoup, comme Fabien Roussel, ont tenu à évoquer la situation de Gaza.
03:03 Mais nous abordons rarement d'autres conflits, justement, avec des histoires abominables, des situations terribles comme Haïti, le Yémen, le Soudan.
03:11 Pourquoi ce deux poids, deux mesures ? Pourquoi cette succession de séquences mortifères entre l'IVG, la fin de vie, la guerre ?
03:18 Pourquoi cette tyrannie du lugubre ? Est-ce que le mortifère nous gouverne ? Le décryptage de Charlotte Dornelas.
03:25 La chasse aux Juifs est désormais ouverte, ou du moins permise en Occident, ou du moins dans les grandes villes européennes.
03:34 C'est dans Figaro Vox que notre collègue Gilles-William Gönnaden publia hier une tribune saisissante,
03:41 où il constatait que de Paris à Londres, jamais l'antisémitisme islamo-gauchiste le plus violent ne s'était heurté à aussi peu de résistance.
03:51 L'édito de Mathieu Bocouté.
03:55 Une heure avec nos mousquetaires ce soir. Un peu de hauteur, un peu de douceur, mais beaucoup d'analyse. C'est parti !
04:16 D'accord, j'enlève le mot douceur. On n'a pas beaucoup de douceur malheureusement dans l'actualité. Comment allez-vous ce soir ?
04:23 Vous incarnez la douceur.
04:25 Qui ?
04:26 Vous ! Mais si ! Une douceur rayonnante.
04:30 C'est gentil, mais vous ne serez pas augmenté pour autant.
04:32 Bon, très bien.
04:33 C'est gentil mon Marc. Merci à tous. Vous êtes tous adorables et tous doux d'ailleurs.
04:37 Alors on va commencer d'abord par le vote du plan de soutien à l'Ukraine qui doit avoir lieu ce soir à l'Assemblée Nationale.
04:46 Gabriel Attal a défendu l'engagement de la France aux côtés de l'Ukraine. Je vous propose d'écouter ses derniers mots.
04:53 Au nom du gouvernement de la France, à la tribune de l'Assemblée Nationale de la France, je le dis au plus profond de mon cœur,
05:02 qui résonne et qui bat pour la valeur de liberté des peuples, je le dis du plus profond de mes tripes,
05:08 qui se nouent autour de l'intérêt des Français, Slava Ukraini !
05:12 Pas l'imitation de John Friedgerald Kennedy. Berlin 1963. It's been Berlin-er. Je suis berlinois.
05:26 Et on avait peur à l'époque que les soviétiques envahissent Berlin qui était l'enclave occidentale au milieu du monde rouge.
05:34 Le vote d'aujourd'hui peut entrer dans l'histoire, disait Fabien Roussel, Mathieu Beaucoté, car il peut nous précipiter dans la guerre.
05:42 Vous, il disait aux députés, vous êtes majoritairement pour alors que les Français sont majoritairement contre.
05:50 À quoi sert ce vote ?
05:53 Première chose, Fabien Roussel n'a pas tort. Il y a une classe politique qui globalement, bien qu'il y ait plus de fractures,
06:01 qui se reconnaît non pas seulement dans le soutien à l'Ukraine,
06:05 ça je pense que c'est un soutien qui est très majoritaire dans la population,
06:09 mais qui semble prise dans la tentation de l'engrenage.
06:13 La tentation de l'engrenage, c'est toujours un pas de plus tout en prétendant qu'on ne fera pas le dernier pas.
06:18 Et Fabien Roussel marque, et je reviendrai vers la fin de l'édito, le fait qu'il y a un véritable clivage,
06:24 qui n'est peut-être pas le clivage souhaité par la majorité, qui pour l'instant nous dit « il y a le courage et la lâcheté »,
06:28 il se peut que les choses prennent une autre forme.
06:31 Retour de contexte qui nous conduit à cette séance à l'Assemblée et au traité.
06:37 Que s'est-il passé ces dernières semaines ?
06:39 Parce qu'il y a une véritable escalade rhétorique. L'escalade n'est pas militaire pour l'instant pour la France, mais elle est rhétorique.
06:45 Premier élément, on a dit l'évocation des troupes au sol.
06:48 Je pense qu'on a sous-estimé l'importance de cette déclaration, qui, quelle que soit, est-ce que c'était politique intérieure, politique extérieure,
06:55 on a évoqué la possibilité, de manière décomplexée et sous le signe du courage tchertchien,
07:01 la possibilité d'un affrontement entre les armées de l'OTAN et les armées russes en Ukraine.
07:06 Je considère que le fait de parler de ça aussi légèrement, et d'accuser, soit de lâcheté, soit de trahison,
07:13 ceux qui ne suivaient pas le mouvement, il y avait une forme d'audace ou peut-être de témérité là-dedans.
07:19 Deuxième élément, la référence à Munich. Ça, il faut juste comprendre.
07:23 Qui dit qu'on est en 1938, Mme Ayé dit ça, dit que l'an prochain, on est en 1939.
07:27 Donc, on est à un an de la guerre mondiale. On est à 360 quelques jours de la guerre mondiale.
07:32 On est à moins... Il faut comprendre ce qu'on nous dit en ce moment.
07:35 Donc, c'est un discours qui nous dit que le prochain pas est inévitable.
07:38 - Et quand vous dites « on », c'est Valérie Ayé, tête de liste de renaissance.
07:43 - Oui, mais elle n'a pas été désavouée par les siens. Elle n'a pas été désavouée parce qu'elle a parlé ainsi.
07:47 Et on comprend que si la France... Je devine que la France ne menera pas une guerre mondiale seule contre la Russie.
07:53 Donc, c'est l'ensemble de l'OTAN qui est conscrit, qui est mobilisé dans une telle déclaration.
07:59 Et maintenant, ce traité qui... Et alors, c'est assez intéressant comment on nous le présente.
08:04 Je reviendrai sur la question de l'OTAN dans un instant, mais est-ce que l'Ukraine appartient à l'OTAN? Non.
08:09 Comment contourner ce problème? Eh bien, l'Ukraine a multiplié ces derniers temps,
08:14 et multiplie en ce moment, des traités bilatéraux de défense, d'alliance, de coopération militaire,
08:19 qui lui permettent de trouver une forme d'OTAN, de substitution dans les traités de coopération militaire.
08:25 Et ce traité s'inscrit dans cette logique.
08:29 On est dans une volonté très claire d'arriver, la France et l'Ukraine, dans une communauté de destin stratégique,
08:36 au moment, faut-il le dire, où l'Ukraine est en guerre ouverte avec la Russie, suite à l'invasion du pays par la Russie de Poutine.
08:43 Alors, qu'est-ce qu'on trouve là-dedans?
08:45 D'abord et avant tout, la France se dit se porter à la défense de l'intégralité du territoire de l'Ukraine, notamment la Crimée.
08:55 Est-ce qu'on comprend bien que si la France dit « la guerre ne se termine pas tant que la Crimée n'est pas reconquise,
09:02 et qu'on sait l'importance de la Crimée pour les Russes », on accepte déjà l'idée d'un conflit qui peut s'embraser,
09:08 ou alors qui ne se finira jamais. Il faut comprendre ça.
09:11 Parce que si l'Ukraine reprenait la Crimée, la Russie ferait tout pour reprendre la Crimée,
09:15 et on peut voir, donc on consent à la possibilité d'une guerre qui ne se termine pas.
09:19 Deuxième élément, et je crois que c'est important, on voit l'ampleur des fonds qui sont mobilisés pour soutenir l'Ukraine.
09:26 En 2024, 3 milliards. 3 milliards.
09:29 Donc nos pays, et je ne dis pas ça pour faire le pingre, mais nos pays qui manquent d'argent,
09:36 souvent pour leur propre population, trouvent les moyens de mobiliser des milliards pour soutenir une guerre
09:42 que l'on peut trouver fort légitime, qui est certainement importante,
09:45 mais pour un pays qui n'était pas, à ce que j'en sais, membre de l'OTAN.
09:48 Donc on trouve des ressources immenses pour s'engager indirectement dans un conflit,
09:53 alors qu'une bonne partie de la population française, on lui dit "on n'a pas d'argent pour vous".
09:57 Alors il y a une forme de dissonance cognitive.
09:59 Ça choque beaucoup les Français, ça.
10:01 Et je ne suis pas en train de dire que la politique étrangère, il ne faut pas y mettre un sou, mais pas du tout.
10:05 Je dis simplement que si vous dites aux Français "j'ai pas d'argent pour vous, mais j'ai 3 milliards pour l'Ukraine",
10:10 et qu'on dit aux Français "vous devez multiplier les sacrifices pour ça",
10:13 ça ne peut que créer un sentiment d'exaspération.
10:16 Allons plus loin, la France va engager des forces en Ukraine, non pas dans ce traité pour se battre contre les Russes,
10:23 mais par exemple pour protéger la frontière avec la Biélorussie,
10:26 pour que les troupes ukrainiennes puissent s'occuper d'autres choses, par exemple des Russes.
10:30 On comprend donc que dans cette logique, on n'est pas dans la co-belligérance,
10:34 mais on s'en rapproche, on crée les conditions possibles de la co-belligérance.
10:39 Très important, de quelle manière soutenir sur le plan des armements l'Ukraine?
10:44 Ce qu'on nous dit, c'est qu'on doit cesser de prendre dans le stock des armées et de l'envoyer en Ukraine.
10:49 Ce qu'on peut comprendre, il serait bien que la France ait quand même des armes pour se défendre elle-même.
10:53 Ça peut servir à ça de temps en temps, l'armée, se défendre soi-même.
10:56 Mais on veut réorienter l'industrie militaire pour faire une forme de co-production stratégique
11:02 en fonction des intérêts ukrainiens et pour renforcer l'effort de guerre possible des Ukrainiens.
11:08 La capacité militaire, dis-je.
11:10 Donc, l'industrie militaire stratégique française doit désormais se penser en fonction d'une convergence stratégique franco-ukrainienne.
11:19 C'est un changement de doctrine significatif pour l'industrie militaire française.
11:23 Je ne dis pas que c'est bien, je ne dis pas que c'est mal.
11:25 Je dis que c'est un changement de doctrine significatif.
11:28 Ça va plus loin. On nous dit, bon, la lutte contre la désinformation, on peut entendre.
11:32 Il y a aussi la volonté de reconstruire le pays ensuite.
11:36 Je pense que tous les pays occidentaux, le jour où cette guerre va se terminer,
11:40 mais est-ce que c'est dans 6 mois, dans 5 ans, dans 10 ans, dans 15 ans,
11:42 tous les pays occidentaux vont vouloir participer à la reconstruction ukrainienne.
11:46 Ça, on peut s'entendre très bien.
11:48 Là, il y a un élément qui me semble assez problématique.
11:51 On dit que la vocation de l'Ukraine est de rejoindre l'OTAN.
11:55 Alors, qu'il y ait guerre ou non en Ukraine aujourd'hui, et accessoirement, il y en a une,
11:59 qu'il y ait guerre ou non, est-ce que c'est vraiment la vocation,
12:02 dans un monde multipolaire, fait d'États civilisationnels,
12:05 qui sont de plus en plus soucieux, non seulement de leur souveraineté,
12:08 mais de leur glacis protecteur, pour reprendre la formule des soviétiques et des russes,
12:12 est-ce que c'est vraiment la vocation de l'Ukraine de rejoindre l'OTAN?
12:15 Est-ce qu'aujourd'hui, la France envoie comme signal, plus de 2 ans après le début de cette guerre,
12:19 la vocation de l'Ukraine est de rejoindre l'OTAN?
12:22 Est-ce que, disant cela, c'est une position où les Américains disent oui une journée, non l'autre,
12:26 mais est-ce qu'on se rend compte que, disant cela, on annonce la volonté aux Russes
12:30 avec qui il faudra négocier la paix?
12:32 Moi, je ne suis pas du tout dans la tendance, oh, je comprends les Russes,
12:35 j'ai de la sympathie pour eux, pas du tout.
12:37 Moi, je suis tendance en ces matières, je comprends et je soutiens l'Ukraine,
12:40 mais j'espère que ce soutien ne veut pas dire qu'on doit repousser la frontière de l'OTAN
12:44 jusqu'à la frontière russe, si tel est le cas, c'est quelque peu original.
12:49 Donc, et là, la question que je me pose, c'est, est-ce qu'on peut, par rapport à ce traité,
12:53 la majorité va le soutenir, l'URN va s'adoutenir, LFI va s'y opposer, on verra les autres,
12:59 est-ce qu'il est possible d'exprimer des réserves sur ce traité sans se faire traiter de pro-russes?
13:04 Mais l'accord est très explicitement, vous l'avez dit,
13:09 il n'engage pas la France à entrer en guerre aux côtés de l'Ukraine, si jamais on l'attaque.
13:13 Est-ce que ce n'est pas là l'essentiel?
13:15 Et j'ai envie de vous demander, effectivement, pour rebondir sur ce que vous disiez,
13:18 est-ce que les politiques, l'Assemblée nationale, ce soir, ne sont pas les idiots utiles
13:22 de la volonté d'Emmanuel Macron, si vous permettez l'expression?
13:25 Il y a un théâtre, et on pourrait y revenir, effectivement, il y a un théâtre très clair,
13:29 où on décide de faire de la question ukrainienne et du soutien à l'Ukraine version Extrême-centre,
13:34 version Macronie, la question des élections européennes.
13:38 Les élections européennes ne seront pas un référendum sur l'immigration,
13:41 elles ne seront pas un référendum sur le pouvoir abusif de la technostructure bruxelloise,
13:45 ça ne sera pas un référendum sur la reconquête de la souveraineté des peuples,
13:49 en fait la reconquête du droit national contre le droit européen,
13:52 ça devient, pour la Macronie, un référendum sur l'Ukraine.
13:56 Vous avez raison de le mentionner, effectivement, ce n'est pas un traité qui oblige,
14:01 ce n'est pas l'OTAN, donc il n'y a pas de coopération militaire immédiate,
14:03 donc si l'Ukraine est attaquée, la France n'est pas obligée de se dire « nous sommes attaquées, nous aussi ».
14:07 Mais il faut avoir, dans le texte, c'est ça, mais il faut avoir une vision un peu moins
14:11 strictement juridico-juridique du texte pour comprendre ce dont il est question.
14:16 Ce texte s'inscrit dans une logique d'engrenage.
14:19 Une logique d'engrenage, c'est-à-dire qu'on crée les conditions pour que tous ceux qui suivront
14:24 seront obligés de situer leur engagement pour que l'Ukraine à cette limite,
14:28 qu'on est au seuil non seulement de la coopération militaire, mais de la co-belligérance.
14:32 On n'a pas franchi le pas, mais on fait les comptes, on crée toutes les conditions
14:36 pour que demain ou après-demain, si la situation se dégrade, la France ne puisse plus,
14:40 et la France, donc l'OTAN, à un moment donné, ça vient ensemble tout ça,
14:43 ne puisse plus faire autrement que d'assumer une situation de co-belligérance
14:47 qui deviendra peut-être d'implicite à explicite demain ou après-demain.
14:51 Donc le texte est clair, il faut le redire, ce n'est pas un texte de style OTAN
14:56 où on est dans une alliance militaire obligatoire, mais on est dans une alliance
15:00 qui crée les conditions de ce mouvement, cet engrenage,
15:03 du fait qu'il ne sera pas possible de revenir en arrière.
15:06 Et j'évoquais le recours à l'histoire, les obsédés de 1938,
15:10 ceux qui voient des municois partout, ces gens-là manquent franchement de culture historique,
15:14 parce que si ça pouvait les intéresser un peu, moi je leur dirais,
15:18 on en a parlé à quelques reprises, 1914, l'engrenage, un jeu d'alliance
15:22 qui embrase le monde à l'ère nucléaire, c'est un peu plus compliqué.
15:25 On est passé du fusil de belle au nucléaire, il se peut que ça change la nature du conflit.
15:29 - Finalement, ne sommes-nous pas devant un débat qui relève, Mathieu,
15:33 d'un côté aussi de la politique intérieure?
15:35 - Aussi, et peut-être d'abord, je ne dis pas exclusivement,
15:38 c'est fondamental ce qui se passe là-bas.
15:40 Nous ne sommes pas des isolationnistes un peu bizarres,
15:43 disons ce qui se passe à l'extérieur de nos frontières ne nous intéresse pas.
15:46 Mais là, il y a une instrumentalisation claire, consciente,
15:50 de l'enjeu ukrainien pour créer une nouvelle ligne de fracture à l'intérieur du pays.
15:54 On nous dit, c'est le discours de l'extrême-centre,
15:56 c'est le discours de renaissance de la Macronie,
15:59 il y a le parti du courage, le parti tchurchilien,
16:02 le parti de ceux qui osent se tenir debout devant la Russie de Poutine.
16:05 Et de l'autre côté, il y a le parti de Munich, le parti de 1938,
16:08 le parti d'Aladier, le parti de Chamberlain,
16:11 le parti poutinien, implicitement, explicitement.
16:14 Parce que regardez, ça c'est l'élément central dans tout ça.
16:17 La question est de savoir ce que veut dire soutenir l'Ukraine en ce moment.
16:20 Le gouvernement nous dit, si vous n'acceptez pas notre mode de soutien,
16:25 se traiter, la possibilité de l'affrontement sur le terrestre,
16:29 la possibilité, la dissuasion active, c'est le concept du jour.
16:32 Si vous n'acceptez pas de soutenir l'Ukraine comme on veut la soutenir,
16:35 alors vous êtes pro-poutinien,
16:37 alors vous êtes un pacifiste démissionnaire au service de l'ennemi.
16:40 Et là, autrement dit, on réduit la possibilité,
16:43 le registre d'appui possible à l'Ukraine.
16:45 Il n'y en a qu'un seul, c'est celui du gouvernement, et il n'y en a pas d'autres.
16:47 Les autres sont, dans les faits, des cryptos-collabos.
16:50 Il y a une originalité au patriotisme, on pourrait dire gouvernemental, là-dessus.
16:54 C'est un patriotisme qui tient exclusivement dans la capacité
16:57 à mener une guerre sous un autre drapeau que le sien.
16:59 Donc la submersion migratoire en Europe, c'est une sous-question.
17:01 La soumission de la souveraineté française à la souveraineté européenne,
17:04 c'est une sous-question. En fait, ce n'est même pas une question.
17:06 Mais la capacité de tenir une autre frontière que la sienne,
17:09 avec un autre drapeau que le sien, là, c'est le vrai patriotisme.
17:12 Dans cette logique, on pourrait croire, et c'est de l'attitude que je terminerai,
17:16 qu'il serait possible de retourner, et puis on l'entendra probablement
17:20 dans les prochains jours, l'alternative gouvernementale.
17:22 Est-ce que c'est vraiment Churchill contre Deladier ?
17:24 Certains diront que c'est le parti des vingt ans de guerre
17:26 contre le parti de la prudence.
17:28 C'est le parti de la guerre à tout prix, contre le parti de ceux
17:30 qui cherchent à trouver une paix d'équilibre, une paix de compromis.
17:33 Il est possible que le clivage proposé par le gouvernement
17:36 se retourne contre lui.
17:38 Quel est votre regard, Dimitri, sur cette séquence,
17:42 qui ne sert à rien, on va dire, dans le sens où l'accord,
17:46 le soutien est déjà accordé, on va dire.
17:49 Le vote ne sert pas à grand-chose, mais politiquement, à quoi ça sert ?
17:53 On a un accord, quand même, qui est très engageant,
17:56 il faut bien le dire, quand même.
17:57 C'est la vision d'une Ukraine européenne qui adhérera à l'Union européenne
18:01 et qui devrait adhérer à l'OTAN, qui devra, elle aussi, nous soutenir
18:05 si la France se retrouve en situation d'être attaquée.
18:08 C'est ça qu'il y a écrit dans l'accord du 16 février.
18:11 C'est quand même extrêmement engageant, accord bilatéral,
18:13 que les Ukrainiens ont répliqué, d'ailleurs, avec les Allemands,
18:15 avec tout un tas de pays.
18:17 Mais c'est un piège, pour nos politiques.
18:19 C'est une séquence, on prend beaucoup de temps, mais oui.
18:22 Qu'est-ce qui va en sortir ?
18:23 Clairement, je pense, dans la campagne des Européennes,
18:25 et je trouve quand même extrêmement ironique que Renaissance,
18:27 qui se présente comme le grand parti européen, le grand parti européiste en France,
18:33 finalement résume la question à un sujet de politique nationale.
18:37 Parce qu'on l'a bien compris, il y avait ce piège-là.
18:39 À un moment où l'opinion publique française, il y a une érosion très nette
18:43 du soutien à l'Ukraine, et je pense que c'est la conséquence
18:46 des déclarations d'Emmanuel Macron sur les fameuses troupes au sol.
18:49 Et donc, quelque part, le président de la République
18:52 veut un peu tendre le bras à son opinion publique aussi,
18:54 au-delà du rapport de France avec l'ORN.
18:56 J'avais envie de vous entendre là-dessus. Charlotte et Marc.
18:58 Non, mais simplement pour ajouter, sans redire,
19:01 le seul fait d'organiser, au moment où on constate cette érosion
19:04 dans la population, d'organiser un vote qui n'est que consultatif,
19:07 après deux ans d'engagement, sans aucune question posée au Parlement,
19:12 donc à la représentation nationale très directement.
19:16 La simple mise en scène, on va dire, de ce vote,
19:19 qui n'est que consultatif sur un accord qui a déjà été voté,
19:22 je pense que ça peut se retourner, non pas contre les Ukrainiens,
19:26 mais contre Emmanuel Macron.
19:27 Et en même temps, Marc Menand, tout le monde demandait justement
19:30 ce débat à l'Assemblée nationale.
19:32 Mais là, il n'y a plus de débat.
19:34 Parce que le seuil où se trouvent aujourd'hui le président
19:37 et le gouvernement, parce qu'ils ne font qu'un,
19:40 c'est le seuil de l'engagement total.
19:42 On ne voit même pas comment aujourd'hui,
19:44 ils peuvent amoindrir leurs propos.
19:46 Moi, ce qui me terrifie, c'est de se dire que Poutine
19:49 ne peut pas rester comme ça.
19:51 Et que Poutine peut agir en sous-main.
19:53 C'est-à-dire qu'on va avoir de grands événements
19:55 qui se dérouleront chez nous.
19:57 Est-ce qu'il ne va pas favoriser le soutien à des groupes
20:01 qui cherchent aujourd'hui à monter des opérations contre nous ?
20:05 Quelle sera la meilleure façon ?
20:07 C'est l'attaque, une attaque souterraine,
20:09 une attaque clandestine, pour marionnettes,
20:13 des groupes terroristes.
20:15 - Alors, il y a un tweet qui a beaucoup fait parler aujourd'hui,
20:17 il est odieux.
20:19 C'est l'ancien président russe Dmitry Medvedev
20:21 qui s'en est pris à Emmanuel Macron
20:23 au sujet de la visite du président français en Ukraine.
20:25 Pardon, je vous laisse lire.
20:27 Moi, je n'arrive pas à le lire.
20:29 C'est un peu odieux, mais c'est important de savoir quand même
20:32 quelles sont les réponses.
20:35 - Oui, si je peux permettre un mot.
20:37 Moi, je comprends la prudence dans ce conflit.
20:39 Je comprends le souci de ne pas se laisser entraîner
20:41 dans une guerre globale.
20:43 Mais ceux qui ont le réflexe pro-russe vraiment très développé
20:45 et qui ont le réflexe que les Russes disent
20:47 dans les circonstances.
20:49 À un moment donné, quand l'autre nous déclare qu'il est l'ennemi,
20:51 il faut au moins le prendre au sérieux minimalement.
20:53 Il y a quand même des limites à se tromper de patrie.
20:55 Il ne faut pas se tromper de drapeau.
20:57 Le drapeau français, c'est ni celui de l'Ukraine
20:59 ni celui de la Russie.
21:01 - Merci beaucoup pour votre regard.
21:03 Dmitry, retour en France.
21:05 À Rennes, on a peut-être évité le pire, mon cher Dmitry,
21:07 un bain de sang.
21:09 On va en parler trois jours après,
21:11 mais c'est très important
21:13 parce que ce soir, des habitants sont dans la crainte,
21:15 sont dans l'angoisse, sont dans la peur.
21:17 - Ils ont des policiers en bas de chez eux ce soir,
21:19 pour une petite semaine.
21:21 - Oui, mais il n'empêche qu'ils ont peur.
21:23 Et ils le disent devant les caméras qu'ils ont peur.
21:25 Trois jours après la fusillade interminable
21:27 qui a eu lieu dans le quartier Dublone,
21:29 au sud de la ville de Rennes,
21:31 il s'agirait d'une tentative de prise de contrôle
21:33 d'un point de deal.
21:35 Et selon...
21:37 On discutait ce matin, Dmitry, vous et moi,
21:39 et vous me disiez, quand tout le monde dit
21:41 "la pire des fusillades depuis le Bataclan".
21:43 - Oui, c'est ce que disent les policiers.
21:45 La fusillade la plus longue,
21:47 exception faite du Bataclan,
21:49 de mémoire de policiers.
21:51 Je trouve que, symboliquement,
21:53 c'est extrêmement fort.
21:55 Et ça a voulu s'y arrêter
21:57 parce que si on se cantonne
21:59 à la présentation rapide des faits que vous faites,
22:01 une fusillade, lors de la tentative
22:03 de prise de contrôle d'un point de deal,
22:05 on se dit "encore une fusillade,
22:07 encore un point de deal".
22:09 C'est une banalisation, vous voyez.
22:11 Ça s'inscrit dans la chronique habituelle de la délinquance
22:13 en France en 2024, et c'est alarmant
22:15 en soi de se dire qu'on s'habitue
22:17 à la violence des armes, des armes de guerre,
22:19 des fusils d'assaut, des kalachnikovs.
22:21 Alors quand on regarde dans le détail cette affaire
22:23 Rennaise, on se dit qu'on ne s'est pas habitué
22:25 à tout, parce que les détails sont
22:27 absolument ahurissants. Les faits, les voici.
22:29 Il est samedi soir,
22:31 il est 1h56 du matin,
22:33 les premiers appels commencent à arriver au 17,
22:35 donc le numéro d'appel d'urgence
22:37 de la police. On signale des coups de feu
22:39 au pied du 4 Place du Bannat,
22:41 donc dans le quartier du Blône, à Rennes.
22:43 C'est une cité, comme il y en a partout
22:45 en France, dans toutes les grandes villes,
22:47 des immeubles HLM, et sur cette place
22:49 vous avez des immeubles, et ça va être la scène
22:51 de notre fusillade, je vous la raconte dans un instant.
22:53 On marque une pause,
22:55 et c'est très intéressant de s'attarder
22:57 sur ce qui se passe sur place,
22:59 parce qu'on commence par une ville, ensuite
23:01 une autre ville, un quartier, et ensuite ça s'étend.
23:03 On parlera
23:05 de Sciences Po, on fera un tour de table
23:07 si on a le temps, Sciences Po, on parlera aussi peut-être...
23:09 J'ai un petit tweet d'œil à la Camorra,
23:11 quand même, pour...
23:13 - Le sponsor de la camorra !
23:15 - Allez, on marque une pause, à tout à l'heure !
23:17 Il faut le suivre, feuille tour, à tout de suite !
23:19 Retour sur Face à l'Info,
23:25 beaucoup de sujets ce soir,
23:27 beaucoup de boules, beaucoup de réactions
23:29 à vous proposer. Dimitri, on parlait
23:31 de Rennes et du quartier du Blône.
23:33 On est samedi soir,
23:35 il est 2h du matin, vous nous plantiez
23:37 le décor. - Voilà, et une fusillade éclate,
23:39 alors, la durée
23:41 de la fusillade, elle est marquée
23:43 par les appels qui sont passés
23:45 par les habitants du quartier à la police. Premier appel
23:47 à 1h56 du matin, le dernier
23:49 ce sera à 3h03. Rendez-vous
23:51 compte, ça dure 67 minutes. Vous vivez
23:53 pendant une heure avec des
23:55 tirs d'armes à feu en bas de
23:57 chez vous. Alors, vaut mieux vous planquer, parce que
23:59 on a vu, moi je repensais évidemment
24:01 au destin tragique de Sokhaina, vous vous rappelez ?
24:03 C'est une femme à Marseille qui s'était
24:05 retrouvée... - De 22 ans. - Voilà, qui était
24:07 morte d'une balle perdue qui avait traversé le mur
24:09 de son appartement, et elle
24:11 était morte comme ça d'une balle en pleine tête.
24:13 Voilà, donc le cas de Place Banat,
24:15 pour vous figurer les lieux, vous avez 3 bâtiments
24:17 autour de cette place, avec un
24:19 accès piéton, donc c'est pas facile d'accès pour les
24:21 forces de l'ordre, comme tous les
24:23 points de deal en France. Vous en avez 4 000 en France,
24:25 des points de deal. Donc l'histoire que je vais raconter,
24:27 il y a des gens qui vivent dans ces quartiers, qui disent "Ah bah, c'est ce qui se passe
24:29 en bas de chez moi". Vous avez un chouffe, là,
24:31 un observateur, un getter, qui est là, qui
24:33 tient la porte de votre immeuble, qui est censée fermer
24:35 avec un digicode, qui la tient ouverte pour que
24:37 les clients puissent entrer, sortir.
24:39 Le four, c'est-à-dire l'endroit où on stocke la drogue
24:41 et où on la vend, c'est dans un des
24:43 appartements du bâtiment, on sait pas trop lequel.
24:45 On laisse entrer comme ça les "yanklis",
24:47 comme on dit dans le langage du deal,
24:49 les clients. Voilà. Et donc, samedi,
24:51 2h du matin, vous avez un commando
24:53 qui tente un assaut, j'emploie volontairement
24:55 ces termes militaires parce que c'est vraiment à ça
24:57 que ça ressemble. Un assaut du point de deal,
24:59 une dizaine d'hommes qui sont donc
25:01 encagoulés, ils arrivent
25:03 gilets pare-balles lourds,
25:05 au moins 3 kalachnikovs, 3 armes, donc 3 fusils
25:07 d'assaut, des armes de poing pour les autres,
25:09 visiblement en face, vous avez de quoi se défendre
25:11 et comme ça, ça va pétarader,
25:13 échange de coups de feu pendant près d'une heure.
25:15 Le dernier appel à la police au 17,
25:17 il a lieu à 3h03, et sur place,
25:19 on a retrouvé quand même plus d'une centaine de douilles.
25:21 Plus d'une centaine de douilles, calipsètes 62
25:23 et 9mm. - Quel bilan ?
25:25 - Deux blessés.
25:27 Alors, visiblement, ce sont des protagonistes de la fusillade,
25:29 ou en tout cas, on ne sait pas
25:31 exactement où des gens
25:33 du point de deal qui se faisaient attaquer. Vous en avez un
25:35 qui a 30 ans, l'autre qui a 24 ans,
25:37 une balle dans le bras, l'autre une balle dans le tronc.
25:39 Alors, leur pronostic vital n'est pas engagé,
25:41 mais on a des tirs
25:43 qui ont traversé quand même les murs des habitations
25:45 de deux appartements.
25:47 Il y avait un de ses habitants qui a témoigné sur CNews,
25:49 il lui a retrouvé une balle dans son micro-ondes,
25:51 dans sa cuisine.
25:53 Ça aurait pu le tuer, ça aurait pu tuer quelqu'un
25:55 de sa famille. Donc, voyez un petit peu
25:57 la situation. La police renaise
25:59 pense, comme vous l'avez dit, Christine, que c'est la fusillade
26:01 la plus longue jamais constatée
26:03 en France, bataclant, mis à part.
26:05 Fusillade la plus longue, un échange de feu
26:07 non interrompu qui dure
26:09 plus d'une heure. Et alors, d'après le journal
26:11 Le Télégramme, l'histoire qui se cache derrière
26:13 cette attaque, c'est que le commando
26:15 qui a attaqué samedi soir
26:17 serait venu en fait tenter de reprendre
26:19 le contrôle du point de deal dont il serait fait
26:21 dégagé par une autre équipe.
26:23 Les attaquants se seraient en fait alliés à des
26:25 parisiens. Et il se trouve qu'en fait, ce point
26:27 de deal, c'est une excellente affaire.
26:29 Il rapporterait plus de 10 000 euros par jour. Il aurait
26:31 une spécialité sur l'héroïne
26:33 et son avantage commercial,
26:35 si je puis dire, c'est qu'il serait très bien situé,
26:37 le métro étant à deux pas.
26:39 Ça rappelle un peu l'histoire
26:41 du fameux
26:43 gang Yoda, vous savez, à Marseille.
26:45 Le point de deal qui a fait la fortune
26:47 de Félix Binguy, le chef
26:49 du clan Yoda qui s'est fait arrêter.
26:51 - Il connaît tout le monde, Dimitri.
26:53 - Voilà, le chat, exactement,
26:55 Charlotte les connaît bien aussi.
26:57 Son point de deal s'est mis à devenir extrêmement rentable
26:59 le jour où une bretelle
27:01 d'autoroute s'est ouverte juste à côté de la cité.
27:03 Et là, le chiffre d'affaires est monté à 50-80 000 euros
27:05 par jour, dans le cas marseillais. Vous voyez
27:07 l'importance de la situation.
27:09 Et ce qui est intéressant, c'est que ces points de deal
27:11 n'appartiennent pas à un gang.
27:13 Ils sont disputés.
27:15 Et on ne les rachète pas. On les attaque.
27:17 On mène l'assaut. Alors on comprend
27:19 aussi dans l'histoire qu'il y a aussi un autre facteur
27:21 qui expliquerait la fusillade.
27:23 C'est la police elle-même. Je m'explique.
27:25 Depuis le mois de novembre, à Rennes,
27:27 on applique ce que j'appellerais
27:29 la doctrine d'Armanin, ce que Gérald
27:31 d'Armanin a théorisé en disant qu'il faut pilonner
27:33 les points de deal. On appelle ça un coup
27:35 des opérations de reconquête. En ce moment,
27:37 on appelle ça les opérations place nette. Mais vous voyez,
27:39 c'est toujours la même philosophie, c'est-à-dire
27:41 un débarquement massif de
27:43 force de l'ordre. Alors à Rennes, c'est une dizaine
27:45 d'opérations depuis le mois de novembre. 70 policiers
27:47 rennais avec le soutien d'une unité qui s'appelle
27:49 la CRS 82, qui vient
27:51 elle de Nantes. Et donc on investit
27:53 le point de deal, on contrôle tout le monde, on interpelle,
27:55 on verbalise, on casse les barricades
27:57 qui sont érigées, vous savez, pour ralentir
27:59 les canapés, les bras zéro, les montages
28:01 de palettes, etc. On dégage
28:03 les halls d'immeubles.
28:05 Et on rend ça aux habitants qui, eux,
28:07 ne demandent qu'une chose, c'est de pouvoir vivre en paix.
28:09 Alors évidemment, ça déstabilise les réseaux,
28:11 mais ça les déstabilise le temps que la police
28:13 reste sur place. Sitôt que les policiers s'en vont,
28:15 eh bien ça recommence. Or,
28:17 ce que vous disent aussi les policiers, c'est que quand on
28:19 affaiblit comme ça une équipe qui tient un point
28:21 de deal, qu'est-ce qui se passe ? Ben c'est qu'elle devient
28:23 comme un genou à terre, c'est la loi
28:25 du plus fort, elle se fait attaquer
28:27 par ses rivales, et qui viennent
28:29 essayer de prendre le contrôle à leur tour du fameux point
28:31 de deal. Et donc c'est ce qui se serait passé
28:33 à Rennes ce week-end,
28:35 mais c'est ce qui se passe aussi un peu partout.
28:37 Regardez l'histoire de hier, dont on a parlé
28:39 la semaine dernière, cet arrêté
28:41 préfectoral, donc pour interdire
28:43 l'accès aux résidents des Bouches-du-Rhône
28:45 condamnés pour trafic du stup, donc qu'on comprenait
28:47 les trafics en Marseillais,
28:49 de se rendre à hier. Pourquoi ?
28:51 Parce qu'une opération place nette
28:53 dans le quartier populaire de la ville
28:55 de hier, où il y avait un important deal,
28:57 était convoitée par des
28:59 dealers marseillais. L'intervention de la
29:01 police avait finalement provoqué l'affaiblissement
29:03 de ce réseau, qui se retrouve donc
29:05 victime des attaques des autres.
29:07 Vous voyez, donc il y a une espèce comme ça de dilemme
29:09 sécuritaire, qui se manifeste
29:11 clairement dans notre affaire Rennaise.
29:13 - Alors on voit bien en effet, Dimitri,
29:15 le dilemme en termes de sécurité publique.
29:17 Vous avez parlé de la police. Dimitri, est-ce qu'elle n'est
29:19 pas intervenue samedi soir ?
29:21 On en a beaucoup parlé déjà sur CNews,
29:23 quand les narcotrafiquants se tiraient dessus.
29:25 Et c'est là qu'on ne comprend pas. - Alors, c'est pas
29:27 tout à fait vrai en réalité si elle est intervenue,
29:29 mais il y a eu un délai d'intervention extrêmement
29:31 long, explique les 67 minutes.
29:33 Alors, la police, elle était où ? À Rennes.
29:35 Vous avez une antenne raide. Vous savez, depuis
29:37 Bataclan, depuis 2015, on s'est rendu
29:39 compte qu'une antenne GIGN raide
29:41 basée à Paris, si vous avez un attentat
29:43 terroriste qui nécessite une intervention rapide,
29:45 vous ne pouvez pas traverser le pays comme ça.
29:47 Si, vous pouvez, mais il faut penser à faire
29:49 le plein de l'hélicoptère. Et visiblement, c'est pas
29:51 toujours le cas. Bon. Alors, donc on a
29:53 créé des antennes raides au niveau régional.
29:55 Là, en l'occurrence, le raid, l'unité d'élite de la
29:57 police, donc, elle a été déclenchée.
30:00 Mais il a fallu 20 minutes aux opérateurs
30:02 de la police pour comprendre qu'on avait
30:04 affaire à des échanges d'armes de guerre, qui demandaient une intervention
30:06 non pas d'une BAC, non pas d'une patrouille
30:08 de police classique, mais vraiment
30:10 de policiers, de l'élite de la police.
30:12 Et donc, à 2h18,
30:14 le raid est déclenché.
30:16 Il arrive sur place à 2h45,
30:18 mais il faut quand même prendre, appréhender
30:20 la situation, mesurer ce qui se passe,
30:22 observer. 3h03, les tirs
30:24 cessent. Sans doute que les attaquants sont
30:26 en train de se replier ou sont déjà partis.
30:28 Et donc, à 3h30, le raid
30:30 est maître de la zone. Les tireurs sont partis.
30:32 Donc, vous voyez, face à une escouade
30:34 de dix trafiquants qui sont lourdement
30:36 armés, le commando, paraît-il, avait même
30:38 siglé son matériel
30:40 pour pouvoir se reconnaître entre eux, de manière à
30:42 éviter les tirs fratricides. C'est dire
30:44 le niveau de militarisation
30:46 des narco-trafiquants.
30:48 Et bien, comme je vous le disais, on n'en voit pas une simple
30:50 patrouille de police. Il faut des boucliers, il faut des casques,
30:52 il faut des gilets pare-balles lourds, il faut des armes
30:54 de guerre, il faut des véhicules blindés.
30:56 Ça nous montre quoi, cette fusillade de Rennes ?
30:58 C'est l'arsenalisation du
31:00 narco-trafiquant en France.
31:02 C'est pas qu'à Marseille, aussi,
31:04 ça on le voit. Les armes,
31:06 mais aussi les pratiques. Il y a une diffusion
31:08 de la narco-culture qui s'inspire
31:10 de ce qui se fait de plus violent dans le monde, et c'est la fameuse
31:12 mexicanisation du trafic de drogue.
31:14 Aujourd'hui, le terme est entré un petit peu comme ça dans le débat public.
31:16 Je vous donne un exemple. Début janvier à
31:18 Rennes, enfin dans le Val d'Oise,
31:20 vous avez un gamin de 15 ans
31:22 qui se fait enlever chez ses parents, de manière
31:24 extrêmement brutale. Imaginez un commando qui
31:26 rentre chez vous, qui défonce votre porte,
31:28 qui vous met sur le canapé et pointe une arme sur la tête,
31:30 qui vous dit "tu bouges pas", et qui prend
31:32 votre gamin et qui vous l'enlève. Voilà, ça s'est passé.
31:34 Ce gamin de 15 ans,
31:36 il était allé "jobber", comme on dit aussi
31:38 dans le langage du deal, aller travailler en intérimaire
31:40 du deal à Rennes, et lui
31:42 s'était déjà fait enlever en octobre dernier.
31:44 Non mais je vais vous raconter ce qu'on lui avait
31:46 fait à l'époque. On l'a emmené
31:48 dans un champ dans la périphérie de Rennes,
31:50 on l'a mis à nu, on l'a battu,
31:52 on l'a contraint à creuser une tombe
31:54 à côté de laquelle on l'a allongé,
31:56 on l'a pris en photo, et on a diffusé
31:58 la photo sur les réseaux sociaux. Voyez ?
32:00 Donc c'était une intimidation. Il est vivant
32:02 toujours le gamin, mais vous imaginez
32:04 la scène à 15 ans. Ce qui est ahurissant,
32:06 c'est que même à ça,
32:08 finalement, on s'habitue.
32:10 Parce que ça, on le voit aujourd'hui dans des séries.
32:12 C'est devenu les codes de base du
32:14 narcotrafic, la répétition
32:16 des événements nous désensibilise.
32:18 Dans le Télégramme, vous avez une habitante
32:20 du quartier de Rennes qui disait "Oh, avant, on avait
32:22 un gentil petit dealer, il s'appelait Nono,
32:24 il était sympa, il tenait la porte aux vieilles dames."
32:26 Voilà. Aujourd'hui, on a ça.
32:28 On est passé de Nono à
32:30 ce qui se fait de pire, quand on a un film comme
32:32 Sicarius, dans la dernière fiction
32:34 d'Olivier Marshall, où l'on voit exactement ça.
32:36 Et le drame, c'est que
32:38 Rennes, il a fallu trois jours pour qu'on percute ce qui s'est passé.
32:40 Pourquoi ? Parce qu'on a eu la séquence
32:42 marseillaise la semaine dernière. Voyez, cette espèce
32:44 d'empilement fait que, des fois, on détend
32:46 la tête, on fait pas attention, et après coup, on réalise
32:48 la gravité de ce qui s'est produit.
32:50 - Merci beaucoup, Dimitri.
32:52 Et on a décidé d'en parler
32:54 parce qu'on refuse de s'y habituer.
32:56 - Absolument. - Merci beaucoup,
32:58 Dimitri. Beaucoup de sujets.
33:00 On parlera dans un instant de
33:02 Sciences Po, après vous, Marc Menand,
33:04 mais Marc Notre-Dame a retrouvé
33:06 la charpente de Saenèf.
33:08 Magnifique. On va voir l'image.
33:10 On voit les charpentiers qui ont affiché leur joie
33:12 après leur travail. Tout le monde
33:14 attendait, justement, cette charpente. Et surprise,
33:16 ils ont été victimes de milliers de commentaires
33:18 anti-blancs. Exemple, "C'est la première fois
33:20 que je vois autant de blancs sur un chantier",
33:22 "C'est des non-certains". Mais comment la photo...
33:24 Regardez la photo, comment ils ont viré
33:26 tous les Noirs et les Arabes pour faire la photo.
33:28 Fin de citation. - Oui, j'en ai encore
33:30 quelque chose, si vous voulez.
33:32 - Non, mais c'est vrai. Et comment est-on passé,
33:34 ma question, de la compétence
33:36 à l'apparence ? - Non, mais ce qui
33:38 est terrifiant, à travers
33:40 cette haine, cette haine
33:42 anti-blanc, on voit
33:44 quoi ? Eh bien, fleurir
33:46 ce wokisme, fleurir
33:48 cette victimisation,
33:50 ce syndrome
33:52 caliméro. Nous, on est
33:54 toujours les victimes, c'est dégueulasse, etc.
33:56 Mais on oublie la réalité,
33:58 c'est-à-dire qu'on ignore complètement
34:00 l'histoire. On ne sait pas qui sont
34:02 ces gens qui se retrouvent
34:04 à lutter pour
34:06 redresser
34:08 un monument
34:10 qui symbolise quelque chose de très
34:12 important pour la France. Et ça, ça ne
34:14 s'improvise pas. C'est-à-dire qu'on n'est
34:16 pas dans l'immigration habituelle,
34:18 telle qu'elle peut être exploitée et
34:20 souhaitée par un certain patronat.
34:22 C'est pas simplement, on
34:24 vous demande d'être
34:26 mobilisé au quotidien, vous tartiner,
34:28 vous faites ce que vous voulez, vous n'avez pas de formation.
34:30 Non. C'est là
34:32 l'élite du
34:34 savoir-faire. Ce sont les
34:36 artistes du travail.
34:38 Ce sont des gens
34:40 qui sont les compagnons
34:42 du devoir. Et ça, c'est formidable.
34:44 Il faut savoir qui ils sont.
34:46 Et ça, tout un chacun peut
34:48 essayer de s'y inscrire dès lors qu'il a
34:50 l'ambition d'une vie sortant de l'ordinaire.
34:52 Alors c'est vrai que
34:54 le mieux, c'est d'avoir été sensibilisé.
34:56 Et que certains dans
34:58 des quartiers n'ont pas spécialement
35:00 l'information. Mais ce qui est extraordinaire,
35:02 c'est comment on entre dans
35:04 ces compagnons du devoir. C'est le
35:06 fameux Tour de France, les compagnons.
35:08 Dès l'âge de 15 ans,
35:10 vous pouvez prétendre, en
35:12 ayant eu un cheminement scolaire
35:14 qui ne soit pas éclatant sur le plan intellectuel,
35:16 mais néanmoins, qui vous
35:18 veuille de détenir
35:20 le brevet. Vous avez 15 ans,
35:22 vous devenez apprenti. Et là,
35:24 pendant 3 ans, les
35:26 premières notions d'un
35:28 métier vous seront données. En gros, il y a
35:30 une vingtaine de métiers. Là, il faut savoir
35:32 aussi, c'est pas n'importe quoi.
35:34 C'est-à-dire que, j'ai noté,
35:36 alors vous avez déjà, même les
35:38 échafaudiers.
35:40 Quand on voit les échafaudages
35:42 de Notre-Dame, c'est pas simplement
35:44 monter 3 bouts de zing
35:46 avec les clés à molette.
35:48 Ça demande un savoir-faire inouï.
35:50 Vous avez également
35:52 les cordeliers. Alors les cordeliers,
35:54 c'est les trapézistes,
35:56 je dirais, des échafaudages.
35:58 Eux, ils sont sur leur
36:00 petite nacelle, accrochés
36:02 à des filins, on tire avec les bras
36:04 et on est là pour sécuriser
36:06 l'ensemble du travail des camarades.
36:08 Et puis, vous avez ces professions
36:10 qui sont les tailleurs
36:12 de pierre, les vitraillistes.
36:14 Personne ne connaissait ce mot,
36:16 les vitraillistes, ce sont ceux qui réparent
36:18 les vitraux. Et là, ça demande
36:20 ces années de travail. Alors d'abord,
36:22 vous êtes apprenti. Au bout de 3 ans,
36:24 vous avez une formation,
36:26 les notions qui vous sont données,
36:28 quelques petits stages en entreprise
36:30 et si vous montrez un certain don,
36:32 une volonté, que vous avez
36:34 l'esprit du compagnonnage,
36:36 eh bien, vous pourrez vous inscrire
36:38 dans le deuxième étage
36:40 qui est aspirant.
36:42 Là, pendant 3 ans,
36:44 vous courez de ville en ville,
36:46 2 villes par an, et à chaque fois
36:48 sur des chantiers qui sortent
36:50 de l'ordinaire, en rencontrant des gens
36:52 qui sont galvanisés
36:54 par leur savoir-faire et qui sont
36:56 là, qui vous montrent comment.
36:58 Le quotidien n'est pas l'habitude, non.
37:00 Le quotidien,
37:02 c'est la création.
37:04 Ça nécessite un état d'esprit,
37:06 cette mobilisation,
37:08 ce désir d'une excellence,
37:10 donc de donner
37:12 le meilleur de soi,
37:14 et une vie de communauté,
37:16 mais pas la communauté où on se détériore,
37:18 non, la communauté de la fraternité.
37:20 Vous avez, dans chaque
37:22 de ces villes où vous apprenez
37:24 le métier, en quelque sorte,
37:26 où vous allez ciseler,
37:28 vous avez des foyers. Alors, à l'époque,
37:30 au Moyen-Âge, à Nourmande, au Moyen-Âge,
37:32 c'était les aubergistes.
37:34 Alors, vous aviez la mer,
37:36 la mer, c'était où le père
37:38 aubergiste, et le soir, on entrait
37:40 là, il fallait enlever
37:42 son chapeau, mettre des vêtements
37:44 propres, pas question d'arriver
37:46 avec les souillures qui ont
37:48 taché votre tenue,
37:50 et puis vous attendez qu'on vous demande
37:52 de vous installer, et également
37:54 on vous donne un nom. Le nom, c'est en fonction
37:56 de votre région. Alors,
37:58 vous allez vous appeler le Languedocien
38:00 la Vertue.
38:02 Vous allez vous appeler
38:04 l'Auvergne, l'Auvergnat,
38:06 le Résolu. C'est comme ça qu'on vous interpelle
38:08 autour de la table. Et puis, il y a
38:10 le chansonnier. C'est-à-dire qu'on dit
38:12 l'Auvergnat,
38:14 l'Auvergnat,
38:16 le Résolu, à toi
38:18 de chanter. Mais là, vous n'allez pas y aller de la
38:20 petite chanson de Cahillard,
38:22 la petite chanson qui se retirait
38:24 de la gorge tenitruante de
38:26 Mathieu. Non, non. Vous allez prendre le chansonnier
38:28 et là, il faut
38:30 versifier en quelque sorte. C'est
38:32 un état d'esprit. C'est quelque chose
38:34 d'éclatant. Et puis après, vous
38:36 devenez carrément compagnon.
38:38 C'est encore trois endérences
38:40 complètes. Voilà ce qu'est
38:42 le métier
38:44 qui peut vous permettre de briller
38:46 dans les monuments historiques,
38:48 qui est une mobilisation en soi,
38:50 une façon d'embrasser son destin.
38:52 - Très intéressant. Je vous embête quand même parce que
38:54 vous êtes passé à côté de ma question. - Pourquoi ?
38:56 - Pourquoi il n'y a pas, les gens
38:58 disent, pourquoi il n'y a pas de Noir et d'Arabe, par exemple ?
39:00 - Je viens de vous le dire. - Alors, mais pourquoi ?
39:02 - Eh bien parce que, apparemment...
39:04 - Je comprends les compagnons du devant. Je comprends tout ça.
39:06 - Eh bien, mais il faut avoir envie de s'engager. C'est ouvert
39:08 à tout le monde. Tout un chacun peut y aller.
39:10 C'est pour ça que je l'ai dit. En petit
39:12 aparté, j'ai dit que malheureusement,
39:14 dans certains quartiers, on vous donne peut-être pas l'information.
39:16 Que vous avez les tentations, malheureusement,
39:18 d'être dans la dérive
39:20 des points de dîle. Que vous avez la religion
39:22 qui vous absorbe, etc.
39:24 Et puis, la victimisation, c'est pas pour moi,
39:26 c'est pas pour moi. Et à la fin,
39:28 eh bien, ce parcours d'excellence, ou en plus,
39:30 là, il n'y a pas d'excuse de l'argent,
39:32 car vous touchez un demi-smic
39:34 dès le titre
39:36 d'apprenti, donc dès les premiers mois
39:38 où vous entrez dans cette longue
39:40 ligne. Sachez quand même
39:42 que bien que déterminés, il n'y en a que
39:44 10 sur 100 qui finiront
39:46 vaillants compagnons.
39:48 - Formidable éloge de ces
39:50 compagnons du devant. Et c'est vrai que c'est dommage d'avoir réduit
39:52 tout ce travail à des critiques
39:54 racistes. Un petit tour de table,
39:56 peut-être, sur des étudiants qui ont bloqué Sciences Po.
39:58 Paris en soutien
40:00 à Gaza. Alors, une soixantaine
40:02 d'étudiants ont bloqué un amphithéâtre
40:04 de Sciences Po à Paris.
40:06 On a quelques images entre 8h et
40:08 midi, ce mardi matin.
40:10 Une étiquette
40:12 a renommé d'ailleurs la salle
40:14 Gaza. Et des képhis palestiniens
40:16 ont été accrochés aux portes
40:18 à l'intérieur de la salle des drapeaux palestiniens,
40:20 sur les murs et les écrans.
40:22 La ministre Sylvie Retailleau, la ministre déléguée
40:24 à l'enseignement supérieur, s'est rendue
40:26 sur place et elle a tweeté
40:28 "Nos établissements sont des lieux d'études
40:30 et de débats. Le droit doit
40:32 y être strictement respecté. Il est
40:34 intolérable et choquant d'y subir la moindre
40:36 discrimination, la moindre incitation
40:38 à la haine." Tiens, le mot est lâché.
40:40 Je viens de me rendre
40:42 à Sciences Po pour faire
40:44 un point avec la direction. Notre fermeté
40:46 ne faiblira pas. - Elle a faibli
40:48 depuis longtemps, il faut être sérieux.
40:50 - Je trouve quand même
40:52 que vous êtes peut-être un peu dur, parce que c'est rare
40:54 que justement...
40:56 - Non mais qu'une ministre alliée à Sciences Po
40:58 dira "Attention, là, précitation
41:00 à la haine." - J'entends bien, mais ce que je vois par là,
41:02 c'est que ce qui se passe à Sciences Po,
41:04 c'est le point d'aboutissement pratique
41:06 de la culture idéologique qui s'est établie
41:08 dans les universités, dans l'enseignement supérieur
41:10 plus largement, depuis un bon moment.
41:12 C'est l'idéologie dominante
41:14 qu'on voit là, qui se concrétise aujourd'hui
41:16 dans une forme d'antisémitisme
41:18 qui ne dit pas toujours son nom, ou qui de temps en temps
41:20 le dit. On dit "Les sionistes, vous ne pouvez pas
41:22 entrer." Qu'on se comprenne, soyez honnêtes.
41:24 "Les juifs, vous ne pouvez pas entrer." Donc on est sur une logique
41:26 discriminatoire revendiquée. Mais c'est pas surprenant.
41:28 - Après, sur la
41:30 venue de la ministre
41:32 de l'enseignement supérieur, on a eu
41:34 la même séquence la semaine dernière avec
41:36 Nicole Belloubet, qui s'est rendue au lycée Maurice Ravel,
41:38 en disant, voilà,
41:40 le laxisme,
41:42 détourner les yeux, on sait où ça
41:44 conduit. Là, c'était dans le cas...
41:46 C'était différent. C'était de menaces
41:48 qui visaient un proviseur. Mais là, c'est un petit peu
41:50 la même chose. C'est quand même effarant.
41:52 - Oui, on a l'impression que c'est trop tard, mais
41:54 il faut saluer quand même,
41:56 je trouve. Moi, je trouve qu'il y a eu
41:58 beaucoup d'absence, justement, à Sciences Po. Il y a eu
42:00 beaucoup de cas comme ça, où le gouvernement
42:02 n'est pas allé sur place. - Mais c'est assez nouveau.
42:04 Et c'est à saluer qu'il y a enfin une réaction
42:06 politique. Mais c'est... Moi, je n'ai pas envie de dire que c'est
42:08 trop tard, mais enfin, je veux dire, cette mentalité-là,
42:10 elle est ancrée, elle est installée
42:12 dans tous les lieux de production de la future
42:14 réalité française. C'est ça qu'on est en train de voir.
42:16 - Charlotte et Marc. - Mais c'est surtout que
42:18 le déplacement... Il faudra
42:20 suivre les décisions après le déplacement
42:22 parce qu'il y a rencontré la direction.
42:24 OK, formidable, mais la direction
42:26 a-t-elle même le pouvoir de dire
42:28 quelque chose à ses étudiants ? Franchement, parfois, on se demande.
42:30 C'est-à-dire qu'on a vu,
42:32 d'ailleurs, à Sciences Po, comme dans d'autres universités,
42:34 des directions absolument débordées,
42:36 incapables même d'instaurer le minimum
42:38 d'ordre dans leur université.
42:40 - Elle est complice, la direction, le plus
42:42 souvent. Ça fait des années maintenant,
42:44 vous pouvez pas tenir une conférence
42:46 sur tel sujet parce que
42:48 ça ne correspond pas à la
42:50 mentalité wokiste, etc.
42:52 Et c'est la direction qui instille
42:54 ça. Les professeurs
42:56 sont dans cette réflexion-là.
42:58 C'est-à-dire que l'élève,
43:00 moi j'en connais une qui se trouve
43:02 actuellement à Sciences Po,
43:04 si elle prend position contre
43:06 les camarades, elle devient une facho
43:08 simplement pour être dans l'idée
43:10 de l'échange
43:12 qui est la base même
43:14 de l'intellectuel échanger
43:16 des arguments. - En tout cas, j'ai bien noté un
43:18 citation à la haine, je ne sais pas si elle a porté plainte,
43:20 mais c'est intéressant de souligner ça.
43:22 Charlotte, on voit
43:24 qu'on parle de Gaza, on parle
43:26 de l'Ukraine. Aujourd'hui,
43:28 on attend le vote, ce soir,
43:30 d'un instant à l'autre, à l'Assemblée nationale,
43:32 du plan de soutien de la France
43:34 à l'Ukraine.
43:36 Et très régulièrement, Charlotte Dornelas,
43:38 des artistes, des politiques, des journalistes évoquent
43:40 cette situation à Gaza qu'on vient de voir
43:42 à Sciences Po. Mais nous abandonnons
43:44 rarement d'autres conflits,
43:46 avec des histoires abominables,
43:48 des histoires terribles, des morts
43:50 non moins injustes.
43:52 Haïti, le Yémen,
43:54 le Soudan,
43:56 le Mali, comment
43:58 expliquer ces deux poids, deux mesures ?
44:00 - Il y a forcément
44:02 plusieurs facteurs, évidemment, mais il y en a un
44:04 premier qui m'apparaît être le plus évident,
44:06 c'est la question de la proximité que nous avons
44:08 ou non, d'abord avec les pays qui sont concernés
44:10 et avec les conflits eux-mêmes.
44:12 C'est certainement pas,
44:14 alors évidemment, précisons, c'est pas une question
44:16 de proximité humaine, c'est-à-dire que
44:18 vous pouvez raconter les atrocités
44:20 de la guerre au Yémen, au Mali
44:22 ou à Haïti, ce qui est en train de se passer
44:24 en ce moment, il y aura la même
44:26 comment dire, la même
44:28 émotion devant le récit même
44:30 de la guerre d'une famille décimée, d'enfants qui meurent,
44:32 que ce soit
44:34 à peu près partout dans le monde, simplement les récits
44:36 ne nous parviennent pas de la même manière
44:38 non pas parce qu'on
44:40 veut les empêcher ou quoi, mais parce qu'ils ne se
44:42 s'offrent pas de la même manière à la population
44:44 française, tout simplement. Sur la
44:46 question de l'Ukraine, déjà on
44:48 l'entend assez régulièrement, même
44:50 si l'Ukraine n'est pas au cœur de l'Europe, comme nous disait
44:52 Gabriel Attal, c'est aux confins de l'Europe, évidemment
44:54 on l'avait vu avec le seul
44:56 les sondages, vous savez, au moment
44:58 du début de la guerre, sur l'accueil
45:00 des réfugiés, il y a de manière très claire
45:02 et on le dit souvent ici, une opposition
45:04 à l'immigration en France, et au
45:06 moment où la guerre était de l'autre côté
45:08 de quelques frontières, on va dire pour ce qui concerne
45:10 la France, vraiment très proche
45:12 de chez nous, il y avait une volonté d'accueil
45:14 en tout cas une acceptation de cet
45:16 accueil de véritables réfugiés de guerre
45:18 qui était immense en France
45:20 et bien c'est exactement la même chose que dans la proximité
45:22 avec le conflit, c'est évidemment
45:24 la reconnaissance, c'est des gens qui sont
45:26 plus proches de nous, qui ne nous ressemblent plus
45:28 et donc on se sent naturellement plus
45:30 concernés, ensuite c'est évidemment
45:32 un conflit dans lequel nous sommes territorialement
45:34 à portée de guerre, c'est pas rien
45:36 quand même évidemment, et là je renvoie aux
45:38 analyses régulières de Mathieu
45:40 évidemment, et par ailleurs
45:42 sont en scène dans ce conflit là
45:44 des blocs qui historiquement que nous
45:46 comprenons par rapport à d'autres conflits
45:48 où franchement, il faudrait rentrer dans un détail
45:50 qui échappe à peu près à tous les français
45:52 et nous y compris. Sur
45:54 Gaza,
45:56 il y a plusieurs facteurs de proximité, c'est
45:58 pas exactement la même chose. - Fabien Roussel à l'Assemblée
46:00 nationale par exemple, il a tout de suite fait le lien
46:02 vous parlez de l'Ukraine et Gaza, je veux dire on fait tout de suite le lien
46:04 - C'est ça, alors la question
46:06 de Gaza, c'est la question
46:08 plus largement évidemment du conflit entre
46:10 Israël et le Hamas, on l'a vu le
46:12 7 octobre aussi, sur
46:14 l'attaque du Hamas sur
46:16 les Israéliens, il y a eu une
46:18 implication, un traitement
46:20 médiatique en France, infiniment supérieur
46:22 à d'autres attaques aussi dans le monde
46:24 Pourquoi ? Parce que d'abord Israël et la région
46:26 de manière générale n'est pas un pays
46:28 comme les autres dans le monde, certainement pas pour des occidentaux
46:30 c'est pas pour rien qu'on appelle ça la Terre
46:32 Sainte, c'est la Terre Sainte pour tout le monde
46:34 quasiment, donc c'est un lieu
46:36 chargé à la fois d'histoire
46:38 et particulièrement évidemment pour des
46:40 occidentaux. Ensuite, il y a
46:42 la raison du 7 octobre
46:44 du terrorisme islamiste
46:46 là très directement qui frappe
46:48 un pays qui est conçu
46:50 pensé comme occidentalisé
46:52 donc évidemment que là il y a une proximité
46:54 par rapport à des histoires que nous connaissons
46:56 déjà, une menace que nous
46:58 partageons en l'occurrence.
47:00 Et enfin il y a la question de cette
47:02 importation du conflit
47:04 non pas tellement parce qu'on importe ce conflit
47:06 plutôt qu'un autre, mais simplement par
47:08 les personnes qui charnellement portent
47:10 ce conflit, qui sont directement
47:12 concernées par ce conflit, qui ont directement
47:14 de la famille, qui sont directement même
47:16 culturellement
47:18 impliquées dans ce que
47:20 revêt ce conflit qui est le conflit
47:22 par ailleurs dans le monde.
47:24 Et enfin la deuxième, après la question de la proximité
47:26 je pense que la deuxième lecture
47:28 qui est beaucoup moins noble que la première
47:30 c'est la question politique, la lecture
47:32 politique utilisée dans ces conflits
47:34 sur l'Ukraine. C'est assez
47:36 évident ces derniers jours et je renvoie
47:38 à l'édito de Mathieu
47:40 il n'y a pas simplement la question d'ailleurs
47:42 les récits de ce que vivent ou de ce que subissent
47:44 ou de ce que souffrent les Ukrainiens
47:46 nous parviennent assez peu, soyons clairs.
47:48 Ce n'est pas du tout la guerre dans l'horreur qu'elle a pour les habitants
47:50 dont nous parlons quotidiennement.
47:52 Donc évidemment on comprend, on voit
47:54 se dessiner des clans
47:56 certains renvoyés à des clans d'ailleurs qu'ils ne revendiquent pas
47:58 on voit la question de l'UE
48:00 la question de l'élargissement de l'UE
48:02 la question de l'OTAN, donc c'est des questions évidement
48:04 politiques qui ne se posent pas
48:06 évidemment aux soldats ukrainiens qui sont en train
48:08 de risquer leur peau sur le terrain là aujourd'hui
48:10 donc on a deux lectures différentes. Sur Gaza
48:12 c'est encore plus frappant et peut-être encore plus
48:14 ancien évidemment. Alors là il y a une lecture
48:16 d'affrontements, mais même d'affrontements
48:18 politiques qu'on retrouve sur d'autres sujets. On a
48:20 d'un côté ceux qui décrivent comme une guerre de civilisation
48:22 on a ceux qui décrivent
48:24 comme la grande révolte des dominés sur
48:26 les dominants à travers le monde et que
48:28 l'on retrouverait à Gaza
48:30 et s'invitent des questions bassement électorales
48:32 mais là extrêmement locales.
48:34 Personne ne s'adresse évidemment
48:36 électoralement aux habitants de Gaza
48:38 mais on s'adresse électoralement
48:40 à un monde musulman pour qui la question palestinienne
48:42 est intrinsèque
48:44 on va dire à la pensée
48:46 de ce monde musulman
48:48 et d'ailleurs on le voit à travers le monde
48:50 et évidemment que les autres conflits
48:52 ne sont pas moins terribles et c'est pour ça que la lecture
48:54 moralisante a ses limites parce qu'en effet
48:56 il y a beaucoup de gens dans le monde qui souffrent
48:58 et dont personne ne se soucie
49:00 en France, mais ces conflits nous interpellent
49:02 moins sur les terrains historiques et culturels
49:04 qui évidemment génèrent
49:06 la proximité. - Et je pense aussi à
49:08 l'Arménie, on pourrait en citer beaucoup.
49:10 - L'Arménie d'ailleurs c'est très intéressant parce que certains se sentent
49:12 très concernés parce que précisément c'est un berceau
49:14 chrétien, donc ça rappelle quelque chose qui nous ressemble.
49:16 - Il y a une paix.
49:18 - Est-ce que cette omniprésence
49:20 du sujet de la guerre
49:22 ne joue pas considérablement,
49:24 Charlotte Dornelas, sur le moral des français
49:26 que l'on décrit comme très mauvais assez régulièrement ?
49:28 - On parle énormément de la politique
49:30 de la peur et de la politique de l'angoisse
49:32 et de ce ressort-là, c'est souvent dénoncé
49:34 d'ailleurs et évidemment que
49:36 quand vous
49:38 usez et abusez de ce ressort-là
49:40 vous avez un peuple en face de vous
49:42 qui est craintif, déprimé
49:44 et angoissé surtout par l'avenir
49:46 et là en l'occurrence, les sujets dont on est en train
49:48 de parler c'est légitimement angoissant
49:50 mais c'est un peuple qui ne s'interroge plus
49:52 sur sa liberté, même plus
49:54 sur son rapport à l'État mais qui n'exige de l'État
49:56 que sa protection et qu'une question de sécurité.
49:58 La période du Covid pour ça
50:00 a été absolument stupéfiante parce qu'en plus
50:02 il y avait la rapidité des décisions
50:04 et la disparition
50:06 on va dire même de la possibilité de poser
50:08 une question mais de manière générale la question
50:10 de l'insécurité mondiale
50:12 de l'insécurité internationale nous offre
50:14 le même spectacle. C'est-à-dire qu'on finit
50:16 par collectivement se satisfaire
50:18 de l'idée d'une mainmise absolue
50:20 de la disparition même du processus
50:22 démocratique dans des sujets qui sont quand même
50:24 extrêmement importants, surtout
50:26 quand on nous présente la guerre
50:28 non pas comme, et c'est exactement
50:30 l'édito de Mathieu encore une fois
50:32 c'est pas plusieurs options politiques
50:34 qui répondent à une situation sur laquelle d'ailleurs
50:36 on peut être d'accord sur la question de l'agression
50:38 de la Russie sur l'Ukraine, l'intégralité du spectre politique
50:40 la décrit comme ça
50:42 donc ensuite il y a des réponses politiques
50:44 mais quand vous réduisez ça
50:46 au bien contre le mal, la situation
50:48 vous échappe. Politiquement il n'y a plus de réponse
50:50 c'est une guerre totale, c'est une guerre religieuse
50:52 c'est une guerre spirituelle finalement
50:54 et l'autre
50:56 exemple c'est évidemment l'angoisse de la fin
50:58 du monde, l'angoisse climatique de la fin
51:00 du monde et là pareil
51:02 vous ne reculez devant plus rien
51:04 quand l'enjeu
51:06 c'est la fin du monde
51:08 donc vous pouvez compter, surveiller
51:10 dénoncer, restreindre absolument
51:12 toutes vos libertés et même votre liberté
51:14 de penser, de dire différemment
51:16 vous restreignez tout ça parce que si c'est le monde
51:18 qui est en jeu, là encore une fois ça vous échappe
51:20 ça échappe aux idées, ça échappe
51:22 aux ressorts politiques. Le point commun
51:24 de ces différents sujets c'est qu'ils dessinent
51:26 très concrètement une société
51:28 qui n'a plus d'élan vital
51:30 et je pense que c'est ça qui se
51:32 dessine de plus en plus parce que l'élan vital
51:34 il comporte le risque
51:36 l'imperfection et l'altérité
51:38 le fait qu'il y ait une autre personne
51:40 qui ne soit pas comme moi
51:42 et si on veut vivre, il y a le risque aussi
51:44 que l'autre soit différent, pense différemment
51:46 et qu'on puisse s'y affronter
51:48 donc en amont, on renonce
51:50 politiquement à la prudence
51:52 sur beaucoup de sujets, l'insécurité notamment
51:54 et en aval, on renonce donc à la liberté
51:56 pourvu que nous ayons des droits
51:58 à revendiquer, mais un droit
52:00 ne définit pas sa propre liberté
52:02 et il ne définit pas non plus sa propre
52:04 sécurité, donc vous voyez que
52:06 on finit par revendiquer des droits si possible
52:08 sur le terrain matériel
52:10 parce que nous n'avons plus rien, et j'ai trouvé
52:12 une phrase de Boilem Sansalle qui à mon avis
52:14 résume parfaitement le sujet
52:16 "notre monde ultra mécanisé, standardisé est devenu
52:18 trop triste, trop pauvre et ne propose
52:20 rien d'autre que du normatif et de l'abrutissement
52:22 pour mourir sans douleur"
52:24 alors elle est
52:26 arde la phrase
52:28 mais je pense qu'elle dessine
52:30 en tout cas jusqu'au bout cette
52:32 tendance. Même lorsque nous parlons
52:34 de notre société et des sujets
52:36 sociétaux, nous nous cantonnons à des sujets
52:38 lourds, quoi qu'on en pense
52:40 sur le fond, nous passons par exemple de la
52:42 constitutionnalisation de l'IVG
52:44 à une loi sur la fin de vie
52:46 en passant par la guerre, est-ce que le
52:48 mortifère nous gouverne, est-ce que c'est la tyrannie
52:50 du lugubre, comme dit Marc Menoir ?
52:52 Ça a l'air de n'avoir rien à voir
52:54 et en même temps on voit que
52:56 le mot "progrès" ces dernières
52:58 semaines et ces derniers mois sur les deux sujets
53:00 que vous citez, la constitutionnalisation de l'IVG
53:02 et la question de
53:04 la fin de vie, le progrès se
53:06 bat lui-même sur le terrain de la mort
53:08 et alors du fait de la
53:10 dominer,
53:12 se bat sur ce terrain.
53:14 Mais en réalité c'est le fruit de la révolution moderne.
53:16 On pourrait mettre aussi
53:18 dans ce sujet-là la question de la redéfinition
53:20 de chacun d'entre nous. C'est-à-dire
53:22 si je résumais, je mettrais Dieu
53:24 alors Dieu, la création
53:26 c'est-à-dire ce que nous recevons, ce que
53:28 nous subissons d'une certaine manière,
53:30 Dieu est définitivement mort. Donc l'homme
53:32 moderne veut le remplacer. Mais pourquoi
53:34 ça a à voir ? Parce que ça installe
53:36 une insécurité intérieure
53:38 immense. Quand plus rien ne vous est donné
53:40 et donc vous n'avez même plus le repère de ce que
53:42 vous êtes physiquement,
53:44 de ce que vous êtes biologiquement,
53:46 de la vie et la mort qui étaient les deux dernières choses
53:48 qui ne nous appartenaient pas, ça crée
53:50 une insécurité, ça crée des questions
53:52 en tout cas vertigineuses.
53:54 Et par ailleurs, la maîtrise
53:56 de ces sujets-là repose sur une illusion.
53:58 On en parlait hier, on n'arrive
54:00 pas à l'assumer. On ne dit pas "suicide
54:02 assisté" parce que c'est trop lourd, donc on dit
54:04 "aide à mourir". On ne voit plus
54:06 l'avortement que comme un droit. On ne veut plus
54:08 savoir ce que c'est. Et on parle
54:10 de la transidentité pour cacher
54:12 la réalité. On dit que les hommes peuvent accoucher
54:14 parce que la réalité est trop
54:16 dure à assumer, parce qu'on ne veut pas l'assumer
54:18 donc on la cache derrière un voile
54:20 on va dire de pudeur. Mais on
54:22 parle souvent de civilisation. Mais une civilisation,
54:24 la base d'une civilisation, c'est de s'entendre
54:26 sur ce qui est possible de faire
54:28 ou de ne pas faire, sur ce qui est bien et mal
54:30 de manière évidente. C'est évidemment
54:32 là aussi, sur ces questions-là
54:34 que se situe un basculement
54:36 civilisationnel, beaucoup plus même que
54:38 de société. Et je pense qu'on n'appréhende
54:40 pas la mesure des questions
54:42 que l'on se pose, tout simplement.
54:44 Qu'on peut se poser, mais on n'appréhende pas
54:46 la lourdeur de ces questions.
54:48 Très intéressant ce voile
54:50 de pudeur ou de peur qu'assure
54:52 la société en ce moment. Merci beaucoup Charlotte.
54:54 Un petit tweet quand même, juste avant
54:56 de passer à vous Mathieu
54:58 parce que c'est notre épisode régulier.
55:00 Ayanna Camorra qui a
55:02 tweeté "Merci pour le soutien à toute
55:04 ma commu. J'ai l'impression
55:06 de vous avoir fait découvrir Edith Piaf
55:08 et qu'elle s'est réincarnée en moi.
55:10 Le reste,
55:12 qu'ils nous aiment ou pas, c'est
55:14 leur dos."
55:16 Voilà. Je voulais quand même...
55:18 - Faire jaillir un nom qu'on avait oublié, Edith Piaf.
55:20 - Oui, voilà.
55:22 - Je ne reconnaissais pas.
55:24 - Ne vous inquiétez pas Mathieu.
55:26 Je vous sens stressé parce qu'on n'a pas beaucoup de temps.
55:28 - Pas du tout, pas du tout.
55:30 - Notre collègue Gilles-William Gollnadel
55:32 publia hier une tribune saisissante Mathieu
55:34 où il constatait, ce sont
55:36 ces mots, que la chasse
55:38 aux juifs est désormais
55:40 ouverte, ou du moins permise
55:42 en Occident, ou du moins dans les grandes
55:44 villes européennes. C'est choquant non ?
55:46 - C'est le moins qu'on puisse dire.
55:48 Et pourtant, c'est un constat qu'on fait depuis
55:50 20 ans. Mais on l'a fait d'abord
55:52 en un lieu. On disait que c'était un fait divers. Ça comptait pas vraiment.
55:54 Rappelez-vous, on l'a souvent mentionné sur les travaux
55:56 de Georges Ben Soussan, qui avait noté qu'en
55:58 certains territoires de la
56:00 nation, les juifs n'étaient plus
56:02 les bienvenus et fuyaient.
56:04 Donc c'était soit l'Aliyah en Israël
56:06 ou alors c'était l'Aliyah dans d'autres parties du territoire
56:08 national où ils ne devaient plus vivre en rasant
56:10 les murs, en ayant peur pour leur vie.
56:12 Goldman, on a dit, c'était
56:14 limité. Ne vous inquiétez pas, il ne faut pas en rajouter.
56:16 D'ailleurs c'est l'extrême droite qui instrumentalise
56:18 cette peur. Ensuite,
56:20 Golnadel nous dit, un discours
56:22 antisémite s'est
56:24 normalisé dans les
56:26 universités. Il s'est normalisé, on en a
56:28 parlé il y a un instant, dans la société
56:30 en général. Et là, il y a une étape
56:32 de plus qui a été franchie. C'est que c'est plus simplement
56:34 certains territoires où les juifs
56:36 étaient condamnés finalement à vivre
56:38 dissimulés. Ce qui s'est passé
56:40 à Londres ces derniers temps, Marc en a déjà parlé,
56:42 c'est les manifestations massives
56:44 où les islamistes sont emparés de la ville
56:46 et disent "mort aux juifs".
56:48 On n'est pas dans l'ambiguïté là,
56:50 on n'est pas dans la volonté de dissimuler de mauvaises
56:52 intentions. On les revendique.
56:54 Dire "mort aux juifs" sans gêne
56:56 dans la rue, à Londres, comme on le voit
56:58 aujourd'hui, lorsqu'une journaliste
57:00 britannique avait surnommé il y a un temps
57:02 "Londonistan", eh bien Londres est une ville
57:04 conquise. Si vous
57:06 pouvez vous promener comme ça dans la ville,
57:08 vous comprenez, si vous êtes juif, que vous n'êtes plus
57:10 le bienvenu dans cette ville.
57:12 D'ailleurs,
57:14 le Daily Télégraph, le 8 mars,
57:16 l'a présenté, Londres, une ville aujourd'hui
57:18 interdite aux juifs. Et à Paris,
57:20 au moment de la journée dédiée aux droits des femmes,
57:22 les manifestantes qui voulaient témoigner
57:24 de leur soutien aux femmes
57:26 violées ou exécutées au moment
57:28 de l'agression du Hamas en Israël,
57:30 elles ont été chassées au crime,
57:32 nous dit Golnadel, de "sales juives".
57:34 Sales juives, c'est quand même... Là, on ne se force même pas.
57:36 Ils n'ont même pas la pudeur de dire "salissionnistes".
57:38 C'était leur manière de dire qu'ils ne pensaient pas vraiment
57:40 ce qu'ils pensaient. Là, on bascule dans le
57:42 "sales juifs". Donc, voyons tout cela.
57:44 C'est une idée... En fait,
57:46 les juifs sont-ils condamnés à la marronnisation
57:48 en Europe ? Sont-ils condamnés à devenir
57:50 de nouveau marrânes, à vivre dans la clandestinité,
57:52 à vivre dans le voilement de leur propre conviction ?
57:54 À tout moment, c'est le portrait que nous fait
57:56 Golnadel. - Cette séparation
57:58 territoriale est appelée à durer,
58:00 selon vous ? - On n'est pas dans le provisoire.
58:02 On n'est pas dans le provisoire. Qu'est-ce qui se passe, en fait ?
58:04 Parce que Golnadel nous dit, le sort des juifs
58:06 annonce celui des populations historiques
58:08 européennes. C'est le Canary, dans les circonstances.
58:10 Et qu'est-ce qu'on voit ?
58:12 L'Europe, ça se poursuit.
58:14 Rien n'est fatal. Mais on a
58:16 une forme de fédéralisation ethnique de l'Europe,
58:18 où il y aura des communautés ici et là
58:20 dont il n'y aura plus de nation. C'est terminé.
58:22 Il y aura des replis communautaires des populations
58:24 dites de souche. Il y aura des replis communautaires
58:26 des populations
58:28 nouvellement installées. Il y a l'islamisme
58:30 qui va radicaliser la situation.
58:32 Il y a les juifs qui ne sauront plus exactement
58:34 où se loger, qui n'auront plus
58:36 de maison. Libanisation,
58:38 brésilianisation, américanisation,
58:40 les concepts se sont multipliés
58:42 ces dernières années pour décrire cette
58:44 fragmentation totale.
58:46 Golnadel, écrivant, ne semble pas particulièrement
58:48 optimiste et nous sommes obligés de lui donner raison.
58:50 Quelle tristesse, en tout cas.
58:52 Merci beaucoup, Mathieu Beaucotter.
58:54 Dimitri, on se voit lundi prochain.
58:56 Charlotte, Marc, excellent étude de programme.
58:58 Tout de suite, Pascal, pour l'heure des pro 2.
59:00 [Bruit de la carte qui se ferme]