Le député PS de l'Essonne Jérôme Guedj était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
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00:00 [Musique]
00:11 Bienvenue et bonjour Jérôme Guedj.
00:14 Bonjour Sonia Marouk.
00:15 Et merci de votre présence, c'est votre grande interview sur CNews et Europe 1.
00:18 Vous êtes monsieur Guedj, député socialiste de l'Essonne,
00:21 vous êtes secrétaire nationale à la laïcité au Parti Socialiste, on va en parler.
00:25 Et vous avez beaucoup travaillé également sur la question de la vieillesse de nos aînés
00:29 et donc de la fin de vie.
00:31 Mais tout d'abord, l'Assemblée nationale se penche aujourd'hui sur la stratégie française d'aide à l'Ukraine
00:35 lors d'un débat suivi d'un vote symbolique.
00:38 Alors cette aide, je le dis à nos téléspectateurs et auditeurs,
00:41 consiste à reprendre les termes de l'accord bilatéral de sécurité signé entre la France et l'Ukraine.
00:46 Il y a quelques instants, Jordan Bardella vient de réagir,
00:49 annonçant que le RN allait s'abstenir sur ce vote.
00:53 Tout d'abord, votre réaction, une abstention sur ce vote, comment vous l'analysez ?
00:57 On ne s'abstient pas quand il est question d'apporter un soutien qui doit être indéfectible aux Ukrainiens,
01:04 au gouvernement ukrainien, au peuple ukrainien,
01:06 qui depuis deux ans est victime d'une agression qui nous concerne parce qu'elle est sur le sol européen.
01:12 Et donc on ne peut pas dire "Ceux-là ne nous regardent pas".
01:15 L'abstention, c'est une sorte d'indifférence au moment où il faut faire un choix.
01:20 Cet accord de coopération, nous allons l'approuver, nous socialistes, cet après-midi.
01:25 Pour ce qu'il est, un accord qui réaffirme ce soutien
01:28 et notamment qui répond à la demande que Vladimir Zelensky était venue exprimer
01:32 lors de cette rencontre avec Emmanuel Macron, celle d'un soutien militaire.
01:38 Ce faisant, et je le dis tout de suite,
01:41 cela n'est pas un kitus ou un chèque en blanc donné aux paroles hasardeuses
01:47 et probablement maladroites d'Emmanuel Macron
01:49 quand il a mis sur la table la possibilité d'une intervention militaire
01:54 et d'un soutien des troupes françaises à une intervention militaire.
01:57 Vous votez, mais vous demandez des clarifications,
02:01 vous posez des conditions à une aide qui ne serait pas sans limite.
02:05 Appelez ça clarification ou condition, nous nous en tenons au périmètre de l'accord tel qu'il a été...
02:12 Précisons de quoi il s'agit dans cet accord, c'est l'aide de 3 milliards...
02:15 C'est un renforcement d'une aide de 3 milliards, c'est un soutien diplomatique,
02:20 c'est un soutien de formation, notamment aux militaires, à la frontière,
02:26 notamment avec la Biélorussie, c'est la mobilisation de l'appareil de production d'armement,
02:34 puisque pour l'instant, nous utilisons des munitions et des armes
02:38 qui étaient destinées à l'armée française,
02:40 c'est donc une mobilisation de l'appareil de production
02:43 pour pouvoir répondre à la demande des Ukrainiens.
02:46 Sans munitions, sans armement, ils ne peuvent pas résister comme ils le font courageusement à l'Ukraine.
02:51 Mais la ligne rouge, évidemment...
02:53 Pour les socialistes, est-ce que vous pouvez la nommer ?
02:55 La ligne rouge, elle est claire, ce n'est pas la validation de la piste
03:00 qu'Emmanuel Macron a lancée, fidèle, vous savez, à ses coups de sonde.
03:05 Alors on a bien vu depuis Sébastien Lecornu, ce matin dans Le Parisien, rétropédale,
03:09 en expliquant qu'en aucun cas cela ne signifie l'envoi de troupes françaises sur le sol.
03:15 Mais vous avez bien vu la réaction de la communauté internationale,
03:18 les partenaires allemands, les Etats-Unis et Vladimir Zelensky lui-même,
03:21 qui a dit "mais à aucun moment nous n'avons demandé la présence de soldats français sur le sol ukrainien".
03:27 Ce que nous vous demandons, et que la France malheureusement n'a pas, comment dire,
03:31 honoré avec la même intensité que les autres partenaires européens.
03:36 La France est le 15ème partenaire en termes de fourniture d'armement aux Ukrainiens.
03:42 Il faut donc intensifier, c'est la demande des Ukrainiens.
03:45 Ils ne demandent pas d'intervention militaire.
03:47 Et il ne faut pas qu'Emmanuel Macron joue à cette ambiguïté stratégique
03:54 qui est de toute façon toujours contre-productive quand on est dans un rapport de dissuasion.
03:58 Face à nous, on a un dictateur, Vladimir Poutine,
04:02 qui entre deux guerres en Europe depuis 15 ans, cherche des pauses diplomatiques.
04:07 Il y a eu la Tchétchénie, il y a eu la Géorgie, il y a eu d'abord la Crimée,
04:12 le Donbass et l'ensemble de l'Ukraine aujourd'hui.
04:16 On ne peut pas le laisser faire.
04:18 Mais qu'est-ce que ça veut dire le laisser faire ?
04:20 Parce que là, nous sommes dans un entre-deux.
04:22 Jérôme Gage, vous avez dit par exemple sur l'abstention du RN,
04:25 c'est une indifférence.
04:26 Certains estiment, dans la majorité, qu'aujourd'hui,
04:29 ne pas aller plus loin, c'est même être pro-Poutine.
04:34 Mais vous avez raison, cette indifférence, elle est coupable
04:37 parce qu'elle masque une complaisance avec le régime de Vladimir Poutine.
04:42 C'est le cas pour une partie de vos amis à gauche aussi.
04:44 Je n'imagine pas tout à l'heure, on va voir leur position,
04:47 que la France Insoumise ou encore les communistes, Fabien Roussel ce dimanche,
04:50 nous disaient "en l'État, je ne voterai pas cet accord comme ça".
04:53 Il est pro-Poutine ?
04:54 Je ne suis pas d'accord avec eux,
04:56 parce que dans des moments aussi paroxystiques, aussi essentiels,
05:01 vous avez dit que c'est un vote certes symbolique,
05:04 mais c'est aussi une affirmation de principe.
05:07 Et dans ces moments-là, on ne peut pas être dans l'ambiguïté.
05:10 Moi, je ne suis pas favorable à fournir des garanties de sécurité à Vladimir Poutine.
05:15 C'est lui l'agresseur et l'Ukraine est l'agressée.
05:18 Et toute formulation, toute expression qui entretiendrait une ambiguïté,
05:23 même qui dirait qu'il faut se mettre autour de la table et négocier la paix.
05:27 Mais négocier la paix, qu'est-ce que ça veut dire ?
05:29 Ça veut dire organiser un partage du territoire ukrainien.
05:31 Donc être pacifiste aujourd'hui, c'est être poutiniste.
05:34 Dans ce moment-là, on a l'aspiration de la paix.
05:37 Mais la paix, dans ce cas particulier,
05:39 elle est immédiate dès l'instant où Vladimir Poutine
05:42 respecte l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
05:45 Nous ne pouvons pas accepter une remise en question des frontières en Europe,
05:50 parce que sinon c'est un précédent, dont je le redis, qui nous menace directement.
05:54 Nous, nous avons l'impression d'être à distance.
05:56 Mais nos partenaires, nos amis suédois, nos amis...
05:59 Vous vous dites que la guerre est sur notre sol ?
06:00 La guerre est sur le sol européen.
06:01 Parce que géographiquement, elle est au confins de l'Europe.
06:03 Oui, mais...
06:04 Si on connaît sa géographie comme vous la connaissez.
06:05 Oui, mais nous sommes sur le territoire européen.
06:08 Et surtout, nous sommes sur un test qui est fait par Vladimir Poutine
06:12 pour mesurer le degré de résistance des Européens.
06:15 Et c'est d'autant plus important dans un moment,
06:18 dans quelques mois, il y a les élections présidentielles aux États-Unis.
06:22 Et ce qui se joue là, c'est la capacité des Européens
06:25 à construire ce que nous appelons de nos voeux depuis des années,
06:27 à savoir la construction d'un pôle européen de défense...
06:29 Serpent de mer !
06:30 Qui puisse...
06:31 Vous le savez vous-même, Jérôme Ketch.
06:33 Est-ce que vous croyez vraiment à une Europe de la défense aujourd'hui ?
06:35 Mais nous n'aurons pas le choix.
06:36 Parce que...
06:37 C'est pas la même chose que d'y croire que d'y espérer.
06:39 Imaginez l'hypothèse, malheureusement envisageable,
06:41 d'une victoire de Donald Trump en novembre prochain aux États-Unis.
06:44 Ses amis, récemment, au Congrès américain,
06:46 ont bloqué le versement d'aides financières à l'Ukraine.
06:50 Ça veut dire, et il le dit de discours en discours,
06:53 dans une sorte d'isolationnisme américain
06:56 qui tourne le dos, justement, au partenariat stratégique
07:00 qui a toujours fait de l'Europe le prolongement de la sécurité des États-Unis.
07:05 À ce moment-là, il nous faudra, et il nous faut dès à présent,
07:08 et c'est malheureusement un test fondateur pour nous,
07:11 la situation que nous vivons là,
07:13 la construction de cette autonomie de la défense européenne
07:16 distingue du bouclier stratégique des États-Unis,
07:19 et donc un renouveau des alliances militaires sur le territoire européen.
07:24 Jérôme Gage, autre actualité, il y a eu beaucoup de réactions
07:27 après l'annonce d'Emmanuel Macron sur le projet de loi de la fin de vie.
07:30 Une partie des soignants, importante,
07:32 évoquent un projet qui va à l'encontre des valeurs de soins.
07:35 Très important ce qu'ils disent.
07:36 L'Église dénonce une tromperie.
07:38 Pas seulement, d'ailleurs, les religions sont contre.
07:41 Vous, vous le réclamiez depuis longtemps,
07:43 mais ce matin, est-ce que vous pouvez nous dire
07:45 ce que veut dire l'aide à mourir d'Emmanuel Macron ?
07:47 Beaucoup y voient l'euthanasie, le suicide assisté.
07:50 Est-ce qu'il n'y a pas une duperie sur les mots ?
07:52 Alors, je vais vous parler franchement.
07:54 Emmanuel Macron aime la sémantique.
07:56 D'abord, il y a une bonne nouvelle.
07:58 C'est que nous aurons enfin un débat parlementaire sur ce sujet.
08:01 Il est réclamé par 80 à 90 % des Français.
08:04 Sera-t-il serein ?
08:06 Alors, vous savez qu'on laisse les clés du camion,
08:08 pardonnez-moi l'expression, aux parlementaires.
08:11 La bonne nouvelle, c'est qu'après avoir tergiversé,
08:15 repoussé de six mois en six mois,
08:17 l'arrivée de ce débat au Parlement, il aura lieu.
08:21 Le président Macron a donné des lignes directrices.
08:24 À la lecture de son interview dans La Croix et Libération,
08:26 cela pose plus de questions que cela n'apporte de réponses
08:29 et c'est donc aux parlementaires d'apporter ces réponses.
08:32 Et aux parlementaires seuls, que chacun participe au débat,
08:36 les soignants doivent avoir leur parole qui est entendue,
08:39 les courants philosophiques ou religieux
08:41 doivent avoir leur parole qui est entendue,
08:42 mais vous l'avez rappelé, je suis secrétaire national à la laïcité,
08:44 et donc cette voix peut s'exprimer dans le débat,
08:47 mais ce ne sont pas les courants religieux
08:50 qui font la loi dans notre pays.
08:52 Les questions auxquelles nous allons être confrontés,
08:54 les choses se nichent dans les détails.
08:57 L'aide à mourir suppose d'abord le renforcement des soins palliatifs,
09:01 tout le monde est d'accord, ce sera consensuel.
09:04 - Mais M. Jérôme Gallet,
09:05 est-ce que ce n'était pas l'urgence avant le projet de loi ?
09:07 Pardonnez-moi juste de vous donner quelques détails que vous connaissez.
09:09 Il y a tous les jours, disent nos soignants,
09:11 500 Français qui n'ont pas accès aux soins palliatifs dont ils auraient besoin.
09:14 - 60% des Français qui pourraient prétendre aux soins palliatifs n'y ont pas accès.
09:18 - Là, en ce moment, il y a trois patients qui meurent en France là, maintenant,
09:21 sans avoir eu accès aux soins palliatifs.
09:22 - Nous avons tous malheureusement connu des situations
09:25 dans lesquelles on a vu la faiblesse de l'engagement sur les soins palliatifs,
09:29 qui d'ailleurs renvoient à des problématiques plus globales,
09:31 qui sont celles des déserts médicaux,
09:32 qui sont celles des moyens qui sont donnés à l'hôpital,
09:35 qui sont celles, notamment, parce qu'on oublie,
09:37 mais 150 000 résidents d'Ehpad meurent chaque année,
09:40 et l'incurie, l'indigence des soins palliatifs dans les Ehpad,
09:44 aujourd'hui, est un problème qui devrait largement nous questionner.
09:47 Donc oui, on parle toujours des 21 départements
09:50 qui sont dépourvus d'unités de soins palliatifs.
09:52 Là, c'est une politique de santé publique,
09:54 c'est une politique d'hôpital public.
09:55 - Elle est où ? Où est-elle ?
09:57 - Ah ben, c'est pas moi qui vais vous dire le contraire.
09:59 Elle n'est pas dans les projets de loi de financement de la Sécurité sociale,
10:02 qui sont adoptés à coup de 49.3, année après année,
10:06 et dans lesquels il n'y a pas un changement de braquet
10:08 dans le renforcement de ces moyens.
10:09 Et donc, si cette loi constitue une sorte de droit opposable aux soins palliatifs,
10:14 sur ce volet-là, nous la soutiendrons, évidemment.
10:17 Mais il y a aussi cette demande.
10:19 Alors, le président Macron dit,
10:21 "Je ne définis ni une liberté ni un droit."
10:23 J'ai une différence sémantique avec lui.
10:25 C'est cette liberté ultime, ce droit à choisir sa mort
10:29 dans les conditions qui doivent être très définies.
10:31 Et là, moi, je suis d'accord avec les lignes rouges qui ont été mises.
10:34 Il faut être majeur, il ne faut pas que ça concerne
10:37 une maladie psychiatrique, une maladie neurodégénérative.
10:40 Est-ce que vous pouvez confirmer ce matin que ces lignes rouges
10:42 resteront des gardes-fous absolus ?
10:44 Malheureusement, on a vu que dans d'autres pays,
10:46 à chaque fois, c'est repoussé, repoussé.
10:48 Et on est arrivé à des cas où des jeunes gens
10:50 ont des situations d'extrême, comment dire, solitude.
10:54 On a cette situation de cette jeune fille en Belgique,
10:56 victime des attentats.
10:57 Alors, vous pouvez être sûr qu'en France, ça n'arrivera pas ?
10:59 En tous les cas, moi, à aucun moment, je ne voterai un texte
11:01 dans lequel il y a la possibilité de recourir à quelque forme,
11:04 que ce soit d'aide active à mourir, dans des situations
11:07 de détresse psychologique, psychiatrique,
11:09 ou de maladie neurodégénérative, typiquement,
11:13 une personne touchée par la maladie d'Alzheimer.
11:15 La question du consentement de la personne est cruciale.
11:17 Par contre, il y a un point inédit qui a été posé
11:19 dans l'interview d'Emmanuel Macron,
11:21 qui potentiellement peut constituer pour moi une ligne rouge,
11:25 c'est qui procède à l'injection létale.
11:28 C'est un suicide assisté si on donne à la personne
11:32 la possibilité elle-même de prendre le cachet létal.
11:37 La possibilité pour les médecins, mais il introduit,
11:40 et c'est totalement nouveau, moi, j'ai participé
11:42 au groupe de travail transpartisan autour d'Agnès Firmin-Lebaudot
11:45 pour justement essayer de fabriquer du consensus,
11:47 et ce sujet-là n'a quasiment jamais été abordé,
11:50 la possibilité pour un tiers, pour un proche, pour un volontaire.
11:54 Et ça, cette question, pour moi, elle est très problématique,
11:56 parce que ça signifierait qu'on inverse, comment dire,
12:00 qu'on met une pression terrible sur un proche, mon meilleur ami,
12:04 mon fils, mon conjoint.
12:06 Comme la pression sur les soignants, mais il est vrai que pour cette tierce personne
12:08 qui ne serait pas dans le domaine médical, c'est troublant.
12:11 Elle n'a pas d'accompagnement psychologique, psychiatrique.
12:14 Mais ça doit vous troubler.
12:15 C'est pour ça que je vous dis, c'est pour ça que le débat parlementaire,
12:18 il va être intéressant. Vous dites, est-ce qu'il sera apaisé ?
12:21 Je le souhaite. Moi, j'ai fait le pari de l'intelligence collective.
12:24 C'est comme ça que je conçois mon mandat de parlementaire.
12:27 C'est évidemment des textes sur lesquels nous avons tous,
12:29 les uns et les autres, une sorte de liberté de conscience
12:31 et de liberté de vote.
12:32 Il y a des positions disparates au sein de mon groupe socialiste.
12:35 Il y a des gens qui sont plus ou moins opposés au principe même
12:39 de l'aide active à mourir, même si très largement, majoritairement,
12:42 nous y sommes favorables.
12:44 C'est donc le cadre qui va être déterminant.
12:46 L'autre élément qui est important, c'est la définition
12:49 de ce qu'est un pronostic vital engagé.
12:51 Est-ce que c'est à court ou à moyen terme ?
12:53 Tous ces sujets-là, il faut qu'on les aborde,
12:55 qu'on entende la parole des soignants, mais qu'on entende aussi
12:58 cette aspiration dans le pays.
13:00 Je vous le disais, on a tous vécu ces moments de situation
13:02 avec des proches, avec des amis.
13:04 Et je souhaite qu'on puisse consacrer cette liberté ultime.
13:08 Vous voyez que ça arrive juste avant les élections européennes.
13:12 Est-ce que toutes ces réformes sociétales, certains parlent,
13:15 certains d'une chevauchée sociétale, est-ce qu'elle est aujourd'hui
13:18 à des fins, j'allais dire, pour donner parfois de nouveaux droits
13:22 ou est-ce que vous y voyez une diversion politique ?
13:25 Moi, j'ai l'optimisme de la volonté.
13:27 Je pense qu'on a besoin de conquérir de nouveaux droits
13:29 dès l'instant en plus où ils ne portent pas atteinte
13:32 aux droits des autres.
13:33 Vous savez, c'est le même débat que celui qu'on a eu
13:35 au moment du mariage pour tous.
13:36 Ce sont des données, c'est un débat anthropologique,
13:38 c'est pas rien.
13:39 Oui, mais justement, des gens qui pensaient que c'était
13:41 une remise en question civilisationnelle.
13:43 Le fait d'élargir et de conquérir de nouveaux droits
13:45 ne remet pas en question les droits de ceux
13:47 qui ne veulent pas y recourir.
13:49 On touche à quelque chose de très intime,
13:51 sur lequel vous travaillez, la vieillesse, nos aînés, la fin de vie.
13:55 Est-ce qu'il ne faut pas y aller plus qu'une main tremblante
13:57 avec le corps tremblant pour en parler ?
13:59 Il faut y aller justement avec cette aspiration à l'humanité,
14:04 une forme d'humanisme, de respect de la liberté.
14:06 Mais puisque vous évoquez la question de la vieillesse,
14:08 je saisis la balle au bon.
14:10 D'abord en disant qu'il faut qu'on évite de lier les deux termes,
14:14 même si on pourrait s'inquiéter de cette situation paradoxale
14:18 dans laquelle nous sommes.
14:19 On va légiférer, et j'y suis favorable,
14:21 vous l'avez compris, sur la fin de vie,
14:24 sur ce que certains appellent, je n'aime pas moi l'expression,
14:26 le droit à mourir dans la dignité.
14:28 Je n'aime pas cette expression.
14:29 Nous sommes d'accord.
14:30 Que voudrait dire la dignité dans cette expression ?
14:32 Exactement.
14:33 Mais par contre, je fais un parallèle peut-être en jouant sur les mots,
14:36 je m'insurge du fait que dans le même temps,
14:38 on ne soit pas capable de légiférer et de dégager des moyens suffisants
14:41 pour le droit à vieillir dans la dignité.
14:44 La situation aujourd'hui, dans les EHPAD,
14:46 dans les services à domicile, avec une insuffisance de personnel,
14:49 avec des familles qui sont désemparées,
14:52 qu'en survient la perte d'autonomie,
14:54 qu'en survient la maladie d'Alzheimer,
14:56 la maladie de Parkinson,
14:57 des sujets qui posent la question des vulnérabilités
15:00 et de la place des fragilités dans la société.
15:02 Depuis des années, tout gouvernement confondu,
15:05 pour être tout à fait honnête,
15:06 il y a une sorte de déni de la réalité
15:08 de cette transition démographique,
15:09 de cette révolution de la longévité.
15:11 Et si on veut éviter une crise de vieillissement,
15:13 alors il faut légiférer.
15:14 Emmanuel Macron avait promis, rendez-vous compte,
15:16 en 2018, une loi pour la fin 2019.
15:19 À la fin de l'année dernière,
15:22 nous avions obtenu, arraché de haute lutte,
15:24 une promesse d'Elisabeth Borne
15:26 d'avoir cette loi enfin déposée
15:28 avant la fin du premier semestre 2024.
15:31 Gabriel Attal est arrivé Premier ministre
15:33 et dans son discours de politique générale,
15:34 plus un mot sur cette promesse d'une loi de grand âge.
15:37 Ça, c'est un véritable scandale,
15:38 parce que derrière, c'est à la fois la situation des familles,
15:41 avec des problèmes de reste à char,
15:42 pour payer l'APAD,
15:43 c'est un problème d'emploi,
15:45 d'attractivité de ces métiers,
15:47 de ces premières lignes qui sont si précieuses,
15:49 souvent des femmes, dans les métiers du soin, du lien,
15:51 de l'accompagnement,
15:52 pour lesquels nous ne les reconnaissons pas.
15:54 Vous avez raison d'en parler.
15:55 Et il manque cette impulsion.
15:56 Il faut leur rendre hommage.
15:57 Il faut évidemment leur rendre hommage,
15:59 mais le meilleur hommage que la nation peut leur rendre,
16:01 c'est de valoriser ces métiers,
16:02 de mieux les payer,
16:03 de créer des postes supplémentaires,
16:05 parce que sinon on se retrouve avec un système
16:07 qui est maltraitant institutionnellement.
16:09 Et là, c'est nous tous qui devons nous regarder dans la glace
16:11 en disant "nous sommes responsables de cette situation".
16:13 Monsieur Guet, on va bientôt arriver à la fin de cette interview.
16:16 Tout autre sujet,
16:17 vous faites partie de la commission d'enquête parlementaire
16:19 autour des fréquences de la TNT.
16:21 Pour la transparence pour nos auditeurs et téléspectateurs,
16:24 vous avez auditionné CNews, je le dis,
16:26 les dirigeants, et puis nous-mêmes,
16:28 mes confrères Pascal Praud, Laurence Ferrer et moi-même,
16:30 nous avons eu d'ailleurs un échange au cours de cette audition.
16:33 Et je vous remercie d'être là ce matin,
16:35 parce qu'il en a été question.
16:37 Je voulais simplement vous demander
16:38 comment vous, vous avez vécu ce moment, cette audition,
16:41 et qu'est-ce que cela apporte plus largement aujourd'hui
16:43 au débat démocratique dans notre pays ?
16:46 Moi, je suis attaché aux commissions d'enquête parlementaire.
16:48 C'est une prérogative du Parlement
16:50 pour creuser sur des sujets qui sont d'intérêt public.
16:53 Celui qui est sur la table,
16:55 ce n'est pas la question du groupe Bolloré,
16:58 on va auditionner après-demain, non, demain, Vincent Bolloré,
17:02 c'est la question du renouvellement des fréquences de TNT.
17:05 Et une fréquence de TNT, c'est une autorisation
17:07 qui est donnée par la puissance publique, via l'ARCOM,
17:10 à des exploitants privés.
17:11 C'est donc un contrat.
17:12 Et donc, on doit s'assurer du respect du contrat.
17:14 Et dans ce contrat, il y a la question du pluralisme,
17:17 de l'honnêteté et de l'indépendance de l'information.
17:20 C'est donc des questions qu'il est légitime d'évoquer,
17:22 et je le dis sur votre plateau,
17:25 y compris de vérifier celles et ceux qui ont été rappelés à l'ordre
17:29 par le gendarme de l'audiovisuel, l'ARCOM,
17:31 et il s'avère que le groupe auquel vous appartenez
17:34 est celui qui a été le plus rappelé à l'ordre.
17:36 Et donc, poser la question de savoir
17:38 pourquoi il y a eu ces rappels à l'ordre...
17:40 - Il y a eu des rappels à l'ordre et des sanctions, pardonnez-moi.
17:42 - Il y a eu des rappels à l'ordre, encore très récemment.
17:45 - Et qui n'ont pas donné lieu...
17:47 On ne va pas rentrer dans un débat.
17:48 - On ne va pas rentrer dans les détails.
17:49 - Vous, vous l'avez vécu.
17:50 - Mais ce que je veux dire, c'est qu'une commission d'enquête,
17:52 c'est un moment légitime.
17:54 Il faut que ce soit efficace.
17:55 - Est-ce que ça a été serein ?
17:57 Honnêtement, on peut aussi dire le contraire.
17:59 - J'ai connu des commissions d'enquête.
18:01 J'ai participé précédemment à une commission d'enquête
18:03 sur les fédérations sportives confrontées aux violences sexistes
18:05 et sexuelles ou aux problèmes de corruption.
18:07 J'ai connu des commissions d'enquête plus sereines
18:09 et qui n'avaient pas une sorte de vocation,
18:12 de procès d'intention avant les conclusions
18:15 de la commission d'enquête.
18:16 Mais après, chacun apprécie la manière dont il conduit
18:19 une commission d'enquête.
18:21 Moi, ce qui m'intéresse, c'est les conclusions
18:23 qui en seront tirées, parce que je suis attaché
18:27 à la liberté d'expression.
18:29 Vous savez, je suis un socialiste,
18:30 un universaliste républicain, avec quelques piliers.
18:32 On n'a pas eu le temps de parler de la laïcité.
18:34 C'est bien dommage.
18:35 Mais dans ces piliers, il y a la laïcité,
18:38 il y a la liberté d'expression, il y a la dispute apaisée
18:40 dont on a besoin.
18:41 Il peut y avoir des opinions.
18:43 Est-ce qu'il peut y avoir des chaînes d'opinion ?
18:46 Ça, c'est un débat que je trouve intéressant.
18:48 Et de savoir, est-ce que certaines chaînes
18:51 sont devenues des chaînes d'opinion ?
18:53 Je trouve ça intéressant.
18:54 Il y a des radios qui sont des radios d'opinion,
18:55 mais est-ce qu'on peut le faire sur une fréquence publique
18:57 qui a été donnée par la puissance publique ?
18:59 Ce débat, pour l'instant, il n'est pas tranché.
19:01 Mais ce n'est pas le rôle de la commission d'enquête,
19:03 c'est le rôle du législateur sur la base de ses conclusions.
19:05 Vous avez dit un mot très important, pluralité.
19:07 Et c'est le cas ici-même et par votre présence.
19:10 Je vous remercie pour cet entretien, M. Guelph.
19:12 Je vous dis à bientôt pour parler des autres sujets.
19:14 Il faudra qu'on reparle de la laïcité quand même,
19:15 c'est un vrai sujet.
19:16 Merci.
19:17 [Musique]