1000 pays pour demain, le magazine présenté par Rebecca Fitoussi nous entraîne à la rencontre de ceux et celles , entrepreneurs , ingénieurs , artisans ou encore designers qui innovent ou remettent au goût du jour des savoir-faire ancestraux de nos territoires . Tous excellent dans leur domaine et contribuent au dynamisme de leur « pays » , tous se battent pour que vive le « made in France » . Dans chaque numéro de «¿1000 pays pour demain¿» ,nous irons à la rencontre de trois d'entre eux , à la découverte de leurs histoires . En plateau , dans un lieu itinérant choisi pour sa symbolique régionale , Rebecca Fitoussi reçoit un sénateur , élu de la région qui réagit aux reportages et met à l'honneur une entreprise de son choix . Année de Production : 2023
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TVTranscription
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00:30 - Bonjour à tous et bienvenue sur Public Sénat.
00:32 Bienvenue à Saint-Nazaire.
00:33 Nous sommes sur le port.
00:34 Vous l'aurez compris, 1000 pays pour demain est en Loire-Atlantique.
00:37 Département où l'industrie représente près de 20% des entreprises.
00:41 Mais plutôt que les géants industriels,
00:43 on a envie de vous faire découvrir les entreprises à hauteur d'homme.
00:46 Des artisans qui perpétuent et transmettent des savoir-faire précieux
00:50 et souvent reconnus dans le monde entier.
00:52 On va découvrir ensemble 3 sociétés et 3 chefs d'entreprise de ce territoire
00:56 qui se démarquent par leur sens de l'innovation,
00:59 par leur audace ou par leur histoire singulière.
01:01 On va le faire avec un sénateur qui connaît par cœur ces sujets.
01:04 C'est un enfant du pays, comme on dit.
01:06 1000 pays pour demain, depuis Saint-Nazaire.
01:08 C'est parti.
01:09 Bonjour Philippe Grovalet, sénateur RDSE de Loire-Atlantique.
01:13 RDSE, je rappelle pour le public ce que c'est exactement.
01:16 C'est Rassemblement démocratique et social européen.
01:18 Merci beaucoup de nous accueillir chez vous, sur votre territoire,
01:21 dans ce lieu si particulier.
01:23 Nous sommes donc à l'Escale Atlantique.
01:25 C'est un musée sur l'histoire des paquebots.
01:28 On peut le dire, les paquebots c'est une institution à Saint-Nazaire, non ?
01:31 Oui, c'est un haut lieu de l'industrie et de la construction navale,
01:36 en France et même dans le monde.
01:38 On y construit ici désormais les plus grands paquebots du monde.
01:42 Ce lieu est emblématique puisqu'il retrace cette histoire
01:46 de la construction des navires prestigieux,
01:48 le Normandie, le France, qui ont été construits ici.
01:51 Pour qu'on comprenne bien, l'économie de Saint-Nazaire,
01:55 c'est l'industrie navale, portuaire, aéronautique
01:59 et les énergies renouvelables marines aussi.
02:01 C'est important ?
02:02 Oui, par exemple, nous avons en Loire-Atlantique
02:04 trois usines Airbus, sans compter évidemment les milliers d'emplois,
02:08 plus de 6000 emplois dans des entreprises co-traitantes.
02:11 Et il faut savoir que la construction d'un avion ici,
02:15 dans ce territoire, ici à Saint-Nazaire,
02:17 est né d'un creux d'activité de la construction navale au XIXe siècle
02:22 et qui a fait qu'ils se sont mis à construire
02:25 pour diversifier des hydravions, un hydravion notamment.
02:28 Et de la même façon, vous parliez d'éoliennes,
02:31 les chantiers de l'Atlantique viennent de signer un très gros contrat
02:34 de ce qu'on appelle une sous-station électrique,
02:37 dont le coût, donc le chiffre d'affaires,
02:40 est supérieur aujourd'hui pour une sous-station à un énorme paquebot,
02:44 une fois et demie le paquebot, nous sommes ici en Loire-Atlantique,
02:47 le premier département, le premier territoire de France
02:49 à avoir accueilli un parc éolien offshore.
02:52 - Et alors, vous êtes vraiment ce qu'on appelle un enfant du pays,
02:55 vous êtes né ici, vous avez été président du Conseil Général,
02:58 puis départemental de Loire-Atlantique, aujourd'hui sénateur,
03:01 vous êtes aussi vice-président de la Commission des Affaires Économiques au Sénat,
03:05 quels sont les chantiers prioritaires pour faciliter la vie des chefs d'entreprise,
03:09 j'allais dire ici en Loire-Atlantique, mais plus généralement en France ?
03:13 - Alors bien sûr, il y a tout le contexte et l'environnement économique,
03:17 et d'ailleurs la délégation aux entreprises du Sénat va se réunir
03:21 pour étudier la simplification administrative,
03:25 on crève d'une sur-administration,
03:28 le mouvement des agriculteurs actuellement en est aussi l'illustration,
03:31 mais la force des entreprises c'est la capacité de se mettre en réseau,
03:34 dans plusieurs réseaux, des réseaux de territoire, des réseaux professionnels,
03:38 des réseaux de métiers... - Ce qui donne de l'entraide.
03:40 - Ça donne beaucoup d'entraide parce que l'entreprise c'est un exercice solitaire
03:43 pour beaucoup de chefs d'entreprise, et donc cet échange permanent
03:46 montre à l'évidence qu'ici nous avons des très grosses entreprises,
03:49 nous le disions, et en plus la construction navale,
03:51 mais aussi il y a une myriade de moyennes de petites entreprises
03:55 qui toutes travaillent ensemble, coopèrent, et c'est ce qui fait la force d'un territoire au fond.
03:58 - Et justement Philippe Grovelet, dans cette émission,
04:00 le principe c'est de partir à la rencontre d'entrepreneurs inspirants,
04:04 avec des histoires plus ou moins originales,
04:06 le premier que je voudrais vous faire découvrir s'appelle Mike Neumeyer,
04:09 il est d'origine américaine comme son nom l'indique,
04:11 et après avoir pas mal voyagé, il a décidé il y a une trentaine d'années
04:15 de poser ses valises ici, en Loire-Atlantique, précisément au pays de Guérande.
04:18 Il y a créé une école de charpente de marine,
04:21 et en plus de préserver un savoir-faire traditionnel et écologique,
04:24 il s'est donné pour mission de transmettre aux jeunes
04:27 et de réinsérer dans la vie professionnelle.
04:30 C'est un chef d'entreprise extrêmement charismatique,
04:32 il va vous embarquer j'en suis sûre, on regarde.
04:35 [Musique]
04:50 - Quoi? Tu veux reponter là-dessus là?
04:53 Mais non, mais arrête.
04:55 On va prendre cette éloire, hein?
04:57 - Non. - Ah ben oui.
04:59 Je veux un esprit ouvert de ton père aussi, hein?
05:01 [Rires]
05:03 - Le métier de charpente marine, c'est un métier, mais...
05:07 peut-être le deuxième plus ancien métier du monde,
05:11 parce qu'à un moment, on était toujours obligés de traverser un cours d'eau.
05:15 C'était quelque chose qui est très valorisant
05:18 et qui demande une implication.
05:21 C'est très bien, on ne va jamais être riche en être charpente marine.
05:25 Il y a même une vieille blague qui dit,
05:27 comment un charpentier marine devient riche?
05:29 Ben, il démarre très riche.
05:31 [Musique]
05:40 - Là, vous voyez la colonne vertébrale du bateau,
05:43 sur laquelle on va mettre les bordées.
05:46 C'est les planches successives qui vont se chevaucher l'une sur l'autre.
05:51 C'est un moyen de rendre le bateau étanche.
05:54 Un peu de méthode viking.
05:56 - Il doit languetter ici.
05:58 - Il fait une petite...
06:00 - Il fait une petite crue ici. - Ouais.
06:02 - Je pense qu'il a encore un peu à lisser,
06:04 mais il y a un peu de matière en trop, là.
06:06 - Ah oui.
06:08 Je m'appelle Mike Neumayer.
06:10 Je suis le directeur de Scola Mor.
06:12 J'ai commencé d'apprendre le charpente marine en 85.
06:16 Je travaillais aux États-Unis comme charpentier marine dans plusieurs États.
06:21 Et après, je suis parti en mission humanitaire au Gabon.
06:26 J'ai rencontré la soeur de mon meilleur ami là-bas,
06:32 qui était un Français, un VSN.
06:35 Et donc, bon, ben, on se tombait en amour.
06:40 Et donc, je me suis trouvé en France après mon mission.
06:44 Et j'ai appris comment former les gens.
06:48 Et j'ai constaté que dans notre région, il manquait cette formation.
06:54 - C'est vraiment une chance d'avoir mes anciennes patrons
06:59 qui étaient avec moi, qui m'aidaient à monter Scola Mor.
07:03 On a réussi de transmettre ce qu'on souhaitait faire.
07:06 Donc, on a eu une nouvelle confiance.
07:08 On a lancé le marché. On a répondu.
07:10 Et depuis, bon, ça va.
07:12 - On est en restauration sur un bateau qui est de l'autre côté.
07:17 C'est un petit plancher zékel.
07:19 Donc là, on a une pièce maîtresse, en fait,
07:21 qui vient rejoindre notre quay,
07:23 qui s'appelle du barong, qu'on est en train de refaire.
07:25 Je suis formateur sur la recyclerie marine.
07:28 La recyclerie marine, c'est une action, en fait, d'insertion
07:32 qui prend des gens de 18 à 59 ans.
07:35 Et en fait, nous, notre critère de sélection,
07:38 c'est que les gens aient honte.
07:40 Ils vont jamais toucher un bout de bois, c'est pas grave.
07:42 On va les former et on va arriver à faire les choses.
07:44 - Tu peux faire cette... - Je sais pas.
07:46 Regarde, on est encore bloqué par lui, là.
07:48 Alors, on va commencer par mettre nos petites joutes.
07:51 Tu peux me tenir celui-là, Timothée, là, la courbe?
07:53 Ensuite, on viendra trouver le sergent qui nous vient bien
07:56 pour la plaquer ici, à la quay.
07:58 - Ici, nous avons le CAP.
08:00 Donc ça, c'est un an de formation chez nous.
08:03 Là, on prépare les stagiaires
08:05 pour l'exam de l'éducation nationale.
08:08 Les stagiaires que nous avons maintenant,
08:11 ils viennent de partout en France
08:14 et ils trouvent du boulot.
08:16 Et ils trouvent du boulot partout en France
08:19 et même à l'étranger.
08:21 Ils n'ont le résultat. Ils parlent pas aux nous.
08:24 Mais nous avons un problème de certification.
08:28 Donc on avait fait notre propre diplôme,
08:30 on était renouvelé,
08:32 et maintenant, ils ont refusé notre demande.
08:36 Et on comprend pas pourquoi.
08:38 Et ça, on est en train de lutter contre ça,
08:41 parce que si on n'arrive pas à avoir notre certification,
08:44 c'est fini.
08:46 - Bon, un Américain en Loire-Atlantique
08:49 qui perpétue un savoir-faire incroyable,
08:52 vous le connaissiez, Mike Neumeyer ?
08:54 - Oui. Alors, comme quoi, il n'y a pas besoin d'être né ici
08:57 pour s'inspirer, je pense, moi.
08:59 Je crois beaucoup à la vertu des terroirs,
09:01 un peu comme en agriculture,
09:03 ce sont les terroirs qui font pousser, germer les initiatives.
09:06 Le fait est que mon épouse
09:08 travaillait à la mission locale de Saint-Nazaire,
09:11 donc se préoccupait d'insertion,
09:13 et me parlait, mais très régulièrement,
09:15 de ce beau chantier à Mesquères que j'ai, moi-même...
09:18 - Et de ce chef d'entreprise très charismatique.
09:20 - Et de ce chef d'entreprise charismatique,
09:22 qui a emporté, qui a...
09:24 - Qui fait beaucoup pour l'insertion professionnelle, aussi.
09:26 Il y a du progrès à faire, de ce côté-là, d'après vous ?
09:28 - Bien sûr, bien sûr, parce que, je crois que...
09:30 Vous savez, ici, nous sommes quasiment en plein emploi.
09:32 À peine 5% de chômage.
09:34 - D'accord.
09:35 - Et le grand drame des entreprises ici,
09:37 par exemple les chantiers navals, mais aussi Airbus,
09:39 c'est de trouver des salariés,
09:41 et pour trouver ces salariés,
09:43 vous savez qu'ici, le problème principal, c'est le logement.
09:45 Il faut trouver des logements.
09:47 Alors, cela n'empêche pas qu'il y ait des personnes sans emploi.
09:50 Et je pense que les jeunes, ici, quand on a du travail,
09:54 il faut faire confiance à la jeunesse,
09:56 il faut les former à des métiers nouveaux,
09:58 il faut qu'ils puissent s'adapter, aussi, à l'industrie,
10:00 mais il faut aussi que les employeurs
10:02 fassent confiance à des jeunes,
10:04 qui, même ayant été, par exemple, formés à la charpente de marine,
10:07 puissent aussi travailler dans la construction navale.
10:10 - Et il a la foi, il y croit.
10:12 Peut-être aussi qu'on peut rebondir sur cette question
10:14 de la certification des diplômes,
10:16 qu'évoque Mike Neumeyer dans le reportage.
10:18 Il n'arrive plus à l'obtenir, les critères changent tout le temps.
10:20 Ce qui nous ramène à cette question des processus administratifs
10:23 très lourds et très compliqués, quand même, pour les chefs d'entreprise.
10:26 - Alors, moi, je ne suis pas un bon exemple,
10:28 je ne suis même pas titulaire du baccalauréat,
10:30 et donc j'ai toujours été assez distant avec les diplômes,
10:33 même si, évidemment, c'est très utile pour l'insertion,
10:36 je ne dis pas cela aux jeunes, mais...
10:38 - Mais c'est intéressant.
10:40 - Simplement, ça montre cet écart qu'il y a
10:42 entre l'exigence parfois administrative
10:45 de vouloir absolument valider par des papiers, des diplômes...
10:48 - Des critères, des cases à coucher.
10:50 - Alors que beaucoup de jeunes sont très doués
10:52 de leur main, de leur tête, et qu'ils puissent,
10:54 ici, se former à d'autres métiers.
10:56 Je crois qu'il faut beaucoup de simplification.
10:58 La présidente de la région des Pays de la Loire
11:00 le disait l'autre jour dans ses voeux.
11:02 Là encore, simplifions les choses,
11:04 faisons confiance aux jeunes.
11:06 Il n'y a pas besoin d'avoir Bac +10
11:08 pour faire certains métiers,
11:10 et je crois qu'il faudrait qu'on s'inspire
11:12 un peu de cette simplicité, de cette simplification
11:14 pour les jeunes aussi.
11:15 - On va maintenant partir, si vous le voulez bien,
11:17 on va prendre la direction de Moussey,
11:19 qui est à un peu plus d'une heure d'ici, je crois.
11:21 Changement total de registre, on va découvrir
11:23 ensemble une entreprise qui fabrique des harpes.
11:25 Vous n'allez pas me croire, mais il n'y en a qu'une seule
11:27 en France, elle est ici, en Loire-Atlantique,
11:30 et comme elle est seule, elle marche plutôt bien,
11:32 elle fonctionne plutôt bien, et surtout,
11:34 elle a beaucoup, un savoir-faire d'excellence
11:36 à la française reconnu dans le monde entier.
11:38 On regarde.
11:40 - J'ai une corde de cassé, je peux la changer ?
11:52 - Oui.
11:54 - Une de mes plus grandes fiertés, aujourd'hui,
11:56 c'est quand j'ai vu pour la première fois
11:58 au concert du Nouvel An
12:00 l'Orchestre Philharmonique de Vienne
12:02 avec des gros plans sur la harpe kamak,
12:04 et je me suis dit, voilà, on a donné confiance
12:06 à des orchestres,
12:08 les premiers, les plus grands orchestres du monde,
12:11 l'émission de musique classique
12:13 la plus regardée sur Terre,
12:15 et c'est la harpe kamak qu'on voit en gros plan.
12:18 Je suis président des harpes kamak,
12:25 donc fabricant de harpe,
12:27 facteur de harpe, comme on dit,
12:29 mais je suis aussi musicien,
12:31 je joue de la harpe, c'était mon premier métier,
12:33 jusqu'à intégrer cette entreprise
12:35 à Mouzeil, en Loire-Atlantique.
12:37 Le fondateur des harpes kamak
12:41 m'a proposé de rejoindre son équipe.
12:43 J'ai appris sur le terrain avec lui, d'abord,
12:45 pendant 12 ans,
12:47 et j'ai repris l'entreprise à son décès.
12:49 La fabrication de nos harpes,
12:53 elle est intégralement fabriquée ici,
12:55 dans nos locaux.
12:57 Nous sommes vraiment les portes-étendards
12:59 du Médille-France.
13:01 Les deux fondateurs de l'entreprise
13:05 habitaient dans ce village.
13:07 Il n'y a pas d'autre raison que le fait
13:09 que c'est l'implantation historique.
13:11 Kamak a commencé à fabriquer des harpes
13:13 il y a donc une cinquantaine d'années,
13:15 et aujourd'hui,
13:17 on est devenu le fabricant français
13:19 de harpes celtiques
13:21 et de harpes clés.
13:23 Le défi, il n'est pas de recruter des personnes
13:27 qui ont le savoir-faire de la harpe,
13:29 puisqu'on est les seuls fabricants en France.
13:31 Le défi, c'est plutôt dans la formation
13:33 des ébénistes qui viennent travailler chez nous
13:35 et que l'on va former aux spécificités
13:37 de la fabrication de harpes.
13:39 Pour fabriquer la caisse de résidence
13:43 des harpes classiques,
13:45 on commence par fabriquer le squelette
13:47 qui va supporter la traction des corbes
13:49 et sur lequel va s'asseoir la table d'harmonie.
13:51 Donc on voit comme une sorte de squelette,
13:53 comme une armature de bateau,
13:55 et tous les arceaux en métal
13:57 qui vont donner la rigidité
13:59 et la structure de ce squelette.
14:01 Le corps sonore de la harpe en général
14:05 et de la harpe celtique en particulier
14:07 se compose d'une caisse de résonance
14:09 avec les ouïes
14:11 et sur cette caisse,
14:13 on va mettre en place la table d'harmonie.
14:15 Donc quand les cordes vibrent,
14:17 c'est cette table d'harmonie en épicéa
14:19 qui va vibrer et dont le son va être amplifié
14:21 par la caisse de résonance.
14:23 Tout ça, ça compose le corps sonore.
14:25 Je vous emmène au montage et au réglage des harpes.
14:33 L'assemblage, ça veut dire
14:39 qu'on va constituer le triangle de la harpe
14:41 et mettre les cordes.
14:43 Quand on ferme le triangle,
14:45 c'est vraiment qu'on a fabriqué une harpe.
14:47 C'est le moment le plus important.
14:49 C'est bien fait, hein ?
14:51 On dirait que ça a été fait exprès.
14:53 Notre outil de travail ne peut plus évoluer aujourd'hui.
15:07 On est dans un bâtiment qui a 50 ans,
15:09 qui est vétuste, qui est arrivé au maximum
15:11 de ce qu'on peut en faire.
15:13 On a un travail qui est très dur
15:15 et qui est très dur,
15:17 mais qui est arrivé au maximum
15:19 de ce qu'on peut en faire.
15:21 Notre défi actuel, c'est la construction
15:23 d'un nouveau bâtiment.
15:25 Ce qui est compliqué, c'est la gestion
15:27 que ça représente.
15:29 Ça fait un tel paquet
15:31 de contraintes et de normes
15:33 qu'on doit respecter
15:35 et certaines sont carrément
15:37 en contradiction les unes avec les autres
15:39 que c'est assez démotivant.
15:41 C'est clair que si on n'était pas
15:43 déjà installé ici,
15:45 on aurait choisi d'y rester.
15:47 On aurait cherché une solution plus simple,
15:49 probablement plutôt
15:51 du côté du soleil levant.
15:53 - Vous la connaissiez cette entreprise,
15:55 Philippe Grovelet ?
15:57 - Non, pas du tout.
15:59 Il y a beaucoup de pépites sur nos territoires,
16:01 on ne connaît pas tout.
16:03 Je connaissais Mouseille en tant que coureur cycliste
16:05 à l'époque, puisque Mouseille était le circuit d'arrivée
16:07 d'une très grande course nationale en Loire-Atlantique,
16:09 la vallée de la Loire, mais pas pour son fabricant de harpe.
16:11 - C'est quand même un peu terrible ce qu'il nous dit
16:13 à la toute fin du reportage.
16:15 Il aurait presque intérêt à délocaliser
16:17 son entreprise en Chine pour s'éviter
16:19 beaucoup de tracas.
16:21 Comment on peut éviter cela ?
16:23 - C'est sans doute une façon exagérée
16:25 de dire les choses, mais des choses vraies
16:27 comme nous l'évoquions tout à l'heure,
16:29 les tracasseries administratives, les difficultés.
16:31 Et puis sans doute,
16:33 le fait que je ne le connaisse pas, c'est aussi le fait
16:35 qu'il est assez isolé,
16:37 à la fois peut-être dans sa commune,
16:39 mais j'y reviendrai, et peut-être aussi par rapport
16:41 à d'autres entreprises, peut-être par rapport
16:43 à toutes celles et ceux qui pourraient l'accompagner.
16:45 Je pense évidemment aux chambres consulaires,
16:47 chambres des métiers, ou chambres
16:49 de commerce et d'industrie,
16:51 mais aussi aux services de la région et à l'ensemble
16:53 des dispositions de l'État qui permettent
16:55 d'accompagner les entreprises.
16:57 Mais vous savez, Mouzaye est une commune
16:59 qui fait partie de la communauté de communes
17:01 du pays d'Ancenis, et tout cet écosystème
17:04 est extraordinairement développé.
17:06 Alors évidemment, fabriquer des harpes
17:08 à cet endroit-là,
17:10 c'est exceptionnel, mais peut-être que cela
17:12 explique son isolement.
17:14 Je le disais tout à l'heure, l'isolement est sans doute
17:16 un phénomène contre lequel il faut lutter.
17:18 - La solitude des chefs d'entreprise.
17:20 - La solitude des chefs d'entreprise.
17:22 - Et ce qu'on remarque aussi dans le reportage, c'est que c'est un passionné.
17:24 Et ça, monter une entreprise sans passion, c'est pas possible.
17:26 J'imagine que même dans tout, d'ailleurs,
17:28 même dans votre activité, il faut être passionné.
17:30 - Oui, mais quand en plus on fabrique un objet
17:32 exceptionnel, comme une harpe, comme ici,
17:34 les paquebots par exemple, il y a une passion ici,
17:36 les gens pleurent quand les bateaux s'en vont.
17:38 Donc dès l'instant où on fabrique
17:40 des objets exceptionnels,
17:42 il y a beaucoup d'émotions. Ce sont des métiers
17:44 d'art au fond, et donc on a
17:46 la même passion que les artistes. - On donne beaucoup de soi.
17:48 On a un petit rituel dans cette émission,
17:50 Philippe Grovalet, on demande aux élus
17:52 s'ils ont une entreprise coup de cœur,
17:54 une entreprise pour laquelle ils se sont engagés,
17:56 ou pour laquelle ils ont eu un véritable coup de cœur.
17:58 Vous en avez choisi une, la vôtre, c'est
18:00 SIDES, une société qui fabrique des véhicules
18:02 de secours et de lutte contre les incendies, c'est ça ?
18:04 - Oui, d'abord les camions
18:06 de pompiers, ça fait rêver les enfants.
18:08 Au-delà de ça, c'est une entreprise locale,
18:10 implantée ici depuis des décennies,
18:12 et qui d'ailleurs est devenue
18:14 un leader français,
18:16 puisqu'il y a très peu de constructeurs de véhicules
18:18 incendie en France, mais surtout
18:20 qui fabrique aussi des énormes
18:22 camions incendie pour les aéroports,
18:24 et qui exportent dans le monde entier.
18:26 Et donc nous avons toujours,
18:28 les entreprises ont toujours des hauts et des bas,
18:30 nous avons toujours accompagné cette entreprise,
18:32 et vous voyez dans toute la France,
18:34 tous les services départementaux d'incendie de secours,
18:36 des camions logotés
18:38 SIDES, et j'en suis très très fier.
18:40 - Je voudrais maintenant vous emmener à Clisson,
18:42 Philgourvelais, je crois que c'est à
18:44 25 km de Nantes à peu près,
18:46 on va rencontrer une jeune chef d'entreprise,
18:48 elle s'appelle Manon Cornuet,
18:50 il y a quelques années, elle a repris une société
18:52 qui fabriquait des corsets, et qui
18:54 allait disparaître, elle a décidé
18:56 de créer à la place la manufacture de
18:58 Clisson, et ça marche, et au passage
19:00 bien sûr, elle a sauvé pas mal d'emplois,
19:02 et surtout un savoir-faire d'excellence,
19:04 encore un, on regarde.
19:06 (musique)
19:30 - Je ne sais pas ce que c'est ça par contre.
19:32 - On va vérifier, on va vérifier le BL.
19:34 - Donc on a repris cette entreprise avec mon père,
19:40 qui m'a vraiment accompagnée sur la partie
19:42 gestion financière,
19:44 montage du dossier
19:46 devant la barre du tribunal,
19:48 parce que du coup c'est une entreprise qu'on a reprise
19:50 à la barre du tribunal de commerce du Nantes,
19:52 et on a repris cette entreprise parce que c'était un défi,
19:54 que moi j'étais attachée à ce monde là,
19:56 et que c'était
19:58 une occasion où si on
20:00 sautait pas le pas, c'était peut-être un regret,
20:02 et on voulait pas avoir de regrets
20:04 par rapport à ça.
20:06 - Vous avez été jusqu'à 150 personnes,
20:08 - Oui. - Quand vraiment la marque
20:10 battait son plein. - Ouais,
20:12 jusqu'à 150 personnes. - Donc c'est vrai que
20:14 à l'échelle de Clisson, c'était une très
20:16 grosse entreprise, donc c'est-à-dire qu'il y a
20:18 certaines générations de Clissonnais,
20:20 qui ont toujours connu cette entreprise dans le paysage
20:22 de la ville,
20:24 et qui étaient contentes en fait,
20:26 que ça soit pas perdu, et que l'aventure
20:28 continue on va dire.
20:30 - C'était une entreprise familiale,
20:32 donc il y a eu trois générations,
20:34 et la marque elle s'essoufflait,
20:36 il y avait des tranches de licenciement,
20:38 donc on avait une grosse vague où on avait
20:40 34 ou 36 personnes,
20:42 et là ça
20:44 faisait vraiment mal au coeur.
20:46 - Et c'est vrai que quand on est arrivés,
20:54 il avait tout à refaire.
20:56 Genre vraiment, c'est vrai que
20:58 c'était un gros changement, on passait
21:00 d'un atelier qu'il fabriquait pour lui-même,
21:02 en propre, c'est-à-dire qu'il fabriquait pour sa propre marque,
21:04 qu'il dessinait lui-même, qu'il créait lui-même,
21:06 il achetait ses propres tissus, il faisait ses
21:08 propres développements, et puis là on lui
21:10 demandait de totalement changer,
21:12 c'était un parti pris de ma part,
21:14 et d'aller sur
21:16 une activité à façon, c'est-à-dire
21:18 qu'on vend du temps et du savoir-faire.
21:20 Du coup ce qu'il a fallu totalement faire,
21:22 de zéro, c'était reconstruire
21:24 une clientèle. Aujourd'hui,
21:26 qui sont nos clients ? On va avoir des
21:28 gros mastodontes du luxe,
21:30 on va dire, qui vont vraiment nous faire notre fil rouge
21:32 en termes de production dans l'atelier.
21:34 - Je suis en train de faire
21:44 les deux premières pièces, parce que demain on va lancer
21:46 le produit. Donc
21:48 c'est une robe
21:50 longue en matière
21:52 soit dévorée. Plus on va
21:54 monter dans le haut de gamme, le luxe,
21:56 on va finir par avoir un modèle
21:58 qui va se retrouver aussi
22:00 beau à l'intérieur qu'à l'extérieur.
22:02 Par exemple,
22:04 sur ce produit-là,
22:06 eh bien,
22:08 que vous voyez mes brides sur l'endroit
22:10 ou sur l'envers, on ne voit
22:12 pas de couture. Donc ça, c'est
22:14 son définition dite "haut de gamme
22:16 luxe".
22:18 -
22:20 Le plus grand défi
22:22 de demain pour la tenue, ça va être de continuer
22:24 à faire grandir l'équipe, puisqu'on a toujours
22:26 une demande croissante de la part
22:28 des marques en termes de production.
22:30 Et c'est en fait challenge
22:32 de former sur un métier manuel.
22:34 Ce qui, aujourd'hui, nous permettrait
22:40 peut-être d'être plus attrayant pour justement
22:42 aider les Français à acheter du Made in France,
22:44 ce serait tout simplement moins taxer les produits
22:46 qui sont faits à plus de 90% en France,
22:48 ce qui serait plus juste pour le consommateur,
22:50 puisqu'il fait un effort
22:52 déjà de payer un peu plus cher
22:54 et de consommer local.
22:56 - Elle lance quand même un appel, cette
22:58 chef d'entreprise, à la fin du reportage,
23:00 moins taxer les produits
23:02 fabriqués à plus de 90%
23:04 en France. Ça semble presque
23:06 être du bon sens. C'est pas délirant
23:08 ce qu'elle propose et ce qu'elle demande, quand même ?
23:10 - Oui, on en rêve tous.
23:12 On en rêve tous de produits locaux.
23:14 On parle beaucoup
23:16 en matière d'agriculture,
23:18 de cette souveraineté agricole, souveraineté
23:20 industrielle. Moi, j'y crois beaucoup.
23:22 Et il faut faire confiance à nos artisans.
23:24 Et on voit bien, d'ailleurs,
23:26 l'industrie textile qui a disparu
23:28 quasiment de France. Ici,
23:30 nous étions sous l'influence, on parle de
23:32 Clisson, sous l'influence notamment
23:34 de la Vendée, de Chaland, où il y avait des
23:36 manufactures importantes. Et donc, tout cet
23:38 écosystème a progressivement
23:40 disparu et renaît aujourd'hui. Donc, il faut
23:42 absolument les encourager.
23:44 Moi, je pense qu'il faudrait que l'Europe soit
23:46 plus exigeante en matière
23:48 de souveraineté, de protection. Il n'y a pas
23:50 de raison que d'autres pays
23:52 du monde, d'autres territoires dans le monde
23:54 se protègent eux-mêmes et que nous ne nous protégeons
23:56 pas, même si, évidemment, il faut échanger.
23:58 Nous exportons beaucoup, donc il faut
24:00 accepter aussi que des produits
24:02 arrivent d'autres endroits du monde. - Mais ça vous paraît possible, vous,
24:04 une mesure qui permettrait de moins taxer ces entreprises-là ?
24:06 Vous êtes au Sénat ? Vous, dans la législation ?
24:08 - Oui, mais nous ne sommes pas seuls.
24:10 Je pense que nous pouvons développer et essayer
24:12 de faire évoluer la situation. Le nouveau
24:14 Premier ministre s'est exprimé au Sénat
24:16 pour dire qu'il fallait simplifier,
24:18 qu'il fallait revoir un certain nombre
24:20 de dispositions. Je pense que nous pourrions
24:22 envisager des mesures très particulières pour
24:24 protéger les petites entreprises
24:26 qui, ici, fabriquent
24:28 sur le territoire avec de la main-d'œuvre locale.
24:30 Encore faut-il les associer
24:32 à ces démarches. Je pense que notre
24:34 pays manque d'écoute et nous ne
24:36 pouvons pas construire des politiques publiques
24:38 sans écouter d'abord
24:40 ceux qui travaillent, les employeurs
24:42 bien sûr, mais aussi les syndicats,
24:44 les organisations syndicales qui ont à nous
24:46 dire des choses, à nous faire des propositions
24:48 en la matière. - Clisson,
24:50 c'est environ 7 000 habitants. Quand une entreprise
24:52 de 150 salariés
24:54 ferme, c'est un véritable cataclysme.
24:56 Est-ce que vous êtes alerté, parfois,
24:58 sur des débuts de délocalisation,
25:00 sur des délocalisations ? Est-ce qu'on vient vous voir en disant "attention,
25:02 il faut qu'on reste, aidez-nous" ? - Oui.
25:04 J'ai un exemple
25:06 manifeste ici d'une entreprise,
25:08 le leader français en matière
25:10 de fabrication de cycles,
25:12 de vélos. Cette entreprise était en
25:14 grande difficulté parce que la plupart des activités
25:16 avaient été délocalisées.
25:18 Et un jour, le conseiller général
25:20 du secteur m'alerte
25:22 en me disant "voilà, l'entreprise va fermer".
25:24 J'étais vice-président à l'époque, je suis allé
25:26 le matin même dans cette entreprise, l'après-midi
25:28 j'étais dans le bureau du président du
25:30 département de Loire-Atlantique, de l'époque,
25:32 et je lui ai demandé 3 millions d'euros pour racheter
25:34 les locaux et amener du cash
25:36 à l'entreprise. Une heure après,
25:38 nous avions signé et aujourd'hui
25:40 cette entreprise qui à l'époque avait 200 salariés,
25:42 aujourd'hui a plus de 500 salariés. - Incroyable.
25:44 - Sur une petite commune de Loire-Atlantique.
25:46 - Donc parfois c'est possible. - C'est une belle histoire et aujourd'hui c'est toujours
25:48 le leader mondial et il fabrique des vélos électriques,
25:50 il fournit les collectivités.
25:52 - Encore un tout petit mot, Philippe Gondelet,
25:54 3 bonnes raisons de venir s'implanter
25:56 en Loire-Atlantique. - Bien sûr, le cadre de vie.
25:58 Nous avons le littoral, nous avons un milieu rural
26:00 extraordinaire, nous avons de l'eau, un fleuve,
26:02 la mer et c'est un cadre propice
26:04 pour bien vivre parce que
26:06 on travaille bien quand on vit bien.
26:08 Et puis il y a un écosystème, je le disais ici,
26:10 et alors on nous reconnaît, toujours, toujours,
26:12 travailler ensemble et nous associer, donc il y a
26:14 beaucoup de... - 3 belles raisons.
26:16 - Et celle-ci peut-être est la première.
26:18 - Merci, merci beaucoup Philippe Grovalet
26:20 de nous avoir accueillis ici sur votre territoire.
26:22 Merci aussi aux chefs d'entreprise
26:24 qui nous ont accueillis les bras ouverts et puis bien sûr
26:26 merci à l'équipe de l'Escale Atlantique
26:28 qui nous a accueillis dans ce lieu absolument
26:30 magique, merci beaucoup et merci à vous
26:32 de nous avoir suivis. A très bientôt sur Public Sénat, merci.
26:34 - Merci.
26:36 (Générique)