La société Sun'Agri, filiale d'Eiffage, poursuit ses projets dans les Pyrénées-Orientales. Elle a récemment acheté 80 hectares de terres agricoles à Terrats, Fourques et Llupia pour y installer des panneaux photovoltaïques au-dessus des vignes. Mais sur place, elle se heurte à une forte opposition.
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00:00 L'invité du 6/9
00:02 Et notre invité nous vient des Aspres ce matin, parce que si en pleine Russie, le projet de golf à Villeneuve fait la polémique,
00:08 dans les Aspres, ce qui fait beaucoup parler, ce sont ces projets de champs solaires, de panneaux photovoltaïques,
00:16 au-dessus des cultures, au-dessus des friches ou bien des vignes.
00:20 La société Sun Agri vient de racheter 80 hectares de terre agricole entre Terrat, Fourc et Lupia,
00:25 pour y installer des ombrières avec panneaux photovoltaïques.
00:29 Suzanne Chaudrier, votre invité, c'est le coordinateur du collectif d'opposants Sauvegarde des Aspres.
00:34 Bonjour Jean-François Serrat.
00:35 Bonjour Suzanne, merci de m'accueillir.
00:37 Avec plaisir. Une réunion publique à propos de ce projet a lieu samedi à 14h à Fourc devant le foyer rural.
00:44 Et à cette occasion, vous appelez donc à manifester à Fourc samedi.
00:49 Qu'est-ce qui vous dérange en fait dans ce projet photovoltaïque ?
00:52 Ce qui dérange c'est ce qu'on appellerait l'intégration verticale, à savoir un propriétaire qui a des panneaux à installer au-dessus des vignes,
01:03 il rachète le dessous, il va installer sa propre société viticole,
01:08 et puis il va aussi avoir une société pour vendre l'électricité,
01:11 donc c'est une intégration totale qui permet de capitaliser sur tous les tableaux.
01:15 Selon les promoteurs, l'agrivoltaïsme ça permet d'allier agriculture et énergie renouvelable,
01:20 sans rejet de CO2, tout en protégeant les cultures en dessous de la chaleur, du soleil, c'est pas bien ça ?
01:27 C'est le projet qui a été expérimenté entre l'INRA et le propriétaire de ce lagri, Antoine Nogier,
01:35 sur quelques petites surfaces, mais là on dépasse le sas d'expérimental,
01:40 on passe de quelques 3, 4, 5 hectares pour des petites parcelles,
01:44 on va vers 20, 25, 80 hectares en tout, et ça devient un projet industriel qui n'a rien à voir avec l'agriculture.
01:51 Ça a été expérimenté à Tresser notamment par Sun Agri, et Sun Agri dit que ça a apporté ses fruits,
01:58 c'est-à-dire que ça a bien protégé les cultures, en l'occurrence des vignes,
02:01 ça produit du vin moins fort en alcool, c'est pas primordial selon vous de se protéger face à la sécheresse ?
02:07 Je suis allé voir à Tresser, la propriétaire n'a pas voulu me recevoir,
02:11 elle voulait savoir ce que je voulais savoir, mais j'ai vu ce que j'ai vu,
02:14 c'est-à-dire que sous les panneaux photovoltaïques, il y a une jeune vigne qui doit avoir 2-3 ans maximum,
02:19 donc qu'est-ce qu'on a fait ? La première chose qu'on fait quand on veut installer les panneaux,
02:23 on rase tout, on met des grosses machines pour planter des piquets sans béton, certes,
02:28 mais pour des machines très lourdes qui vont tasser la terre,
02:31 donc je doute qu'on ait vraiment les résultats, en plus on va donner juste les résultats qui intéressent.
02:38 Le problème de cette recherche qui est payée par l'industriel,
02:42 c'est qu'elle va être plutôt orientée avec les bons résultats et pas ce qui fâche,
02:48 par exemple, maximum 25% de couverture par les panneaux, au-delà, il y a perte de quantité.
02:54 Or, l'État prévoit pour appliquer l'agrivoltaïsme un peu partout,
02:59 jusqu'à 40% de panneaux qui entraînera 35% de perte de quantité de sous.
03:04 - Et on attend votre avis sur ces panneaux photovoltaïques dans les champs, dans les Vingts, 0468 35 5000,
03:09 8h au mois d'ici sur France Bleu Roussillon, Suzanne Schott, notre invitée,
03:12 Jean-François Serrat, coordinateur du collectif associatif Sauvegarde des Aspres.
03:17 - Alors parlons un peu de Sun Agri, l'entreprise qui est basée à Lyon, c'est une filiale du géant Eiffage,
03:21 elle rachète donc les terres aux agriculteurs dans les Pyrénées-Orientales,
03:25 et puis ensuite elle emploie d'autres agriculteurs pour cultiver les terres sous les panneaux.
03:29 On l'entend depuis plusieurs semaines, c'est la crise en ce moment partout en France dans le secteur agricole,
03:34 ici notamment à cause de la sécheresse, mais pas seulement.
03:37 Est-ce que l'installation de ces panneaux finalement, c'est pas une source de revenus pour certains agriculteurs ?
03:42 - Alors c'est pas une source de revenus pour certains agriculteurs, puisque ceux qui s'installent dessous,
03:46 c'est une société viticole qui s'appelle Solas, qui appartient toujours à Sun Agri,
03:52 qui appartient à Sun Air, qui appartient maintenant à Eiffage,
03:55 donc ça n'a rien à voir avec un agriculteur qui s'installerait.
03:58 Un jeune agriculteur qui voudrait s'installer sous les panneaux, il lui faut 300 000 euros,
04:02 et il faut espérer avoir un peu de retour au bout de 5 ans seulement.
04:05 Pendant ce temps, il va manger des radis.
04:07 Si vous installez des panneaux photovoltaïques au-dessus des vignes,
04:11 vous investissez 800 000 euros à peu près pour un hectare,
04:15 et cet hectare va vous rapporter dans les premières années déjà 200 000 euros.
04:19 - C'est pour ça que vous dites que ces projets c'est une bulle spéculative ?
04:22 - Complètement, c'est plus qu'une bulle, c'est une installation d'une entreprise industrielle,
04:27 qui va essayer de faire maximiser de l'argent,
04:30 et si vous voulez prendre des actions chez Eiffage ou autre,
04:33 vous aurez le retour sur investissement.
04:35 - Vous dites qu'en fait le problème c'est surtout que Sun Agri rachète à des prix exorbitants les terres,
04:40 c'est-à-dire que les agriculteurs ils n'ont pas le choix en fait,
04:42 ils voient arriver ce projet...
04:44 - Si vous êtes un peu étranglé, que vous allez prendre la retraite,
04:49 il faut savoir quand même que un quart des agriculteurs vont prendre la retraite d'ici 2030,
04:53 ça va libérer à peu près 6 millions d'hectares.
04:57 Donc s'il n'y a pas de repreneurs, et c'est souvent le cas,
04:59 soit c'est un voisin qui s'agrandit, ça devient des grosses fermes qui deviennent des industries,
05:05 et donc si ces 6 millions d'hectares reviennent par des achats comme ça,
05:12 notamment dans les Aspres, à des sociétés industrielles,
05:15 on ne verra plus d'agriculture dessous.
05:16 Ce que nous dénonçons, c'est qu'il n'y aura plus d'agriculture dessous.
05:20 C'est un cheval de trois pour aller sur des terres agricoles.
05:23 - Mais il y a des cultures en dessous ?
05:25 - Il y aura des cultures une fois qu'on a arraché, qu'on aura replanté.
05:29 Mais pour combien de temps ?
05:30 Il est prévu que la chambre agriculture suivra ce qui se passe dessous pendant 5 ans.
05:35 Mais si les 2 premières années on laisse reposer la terre,
05:39 3 ans pour qu'on commence à produire.
05:41 Ces sociétés sont tenues à avoir une agriculture dessous
05:48 pendant le temps que l'Etat paye une indemnité, c'est-à-dire 15 ans.
05:51 Mais après, on ne peut plus rien avoir et on aura des centrales photovoltaïques comme ailleurs.
05:56 - Justement, c'est aussi un moyen de produire de l'énergie renouvelable.
05:59 Quand on sait que la France doit répondre aux objectifs de l'Union Européenne,
06:03 à savoir 22% d'énergie renouvelable dans son mix énergétique,
06:07 sinon le pays risque une amende.
06:09 Est-ce que ce n'est pas finalement une solution parmi d'autres,
06:12 mais une bonne solution pour produire ?
06:13 - Oui, c'est une solution parmi d'autres, mais pas une bonne solution
06:15 parce que nous avons suffisamment de terres artificialisées.
06:18 L'ADEME a fait le recensement de toutes les surfaces qui pourraient accueillir du photovoltaïque.
06:23 Il y a notamment 123 gigas de photovoltaïque possible sur les toitures,
06:29 40 gigas sur les friches industrielles, 4 gigas sur les parkings.
06:33 Donc il y a suffisamment de place sur ce qui est déjà artificialisé
06:36 pour ne pas aller envahir nos terres agricoles dont nous aurons besoin.
06:39 - On a des auditeurs qui attendent au standard, donc très rapidement pour terminer,
06:42 vous appeler à manifester à 14h samedi devant le foyer rural à Fourques.
06:46 Qu'est-ce que vous espérez faire ? Capoter les projets ? Mais ils sont déjà en cours.
06:50 - Nous allons manifester non pas pour manifester,
06:53 mais uniquement pour informer.
06:55 À l'intérieur du foyer rural, il y aura ce lagri qui donne une information.
07:00 Nous, à l'extérieur, nous allons donner une autre information,
07:03 celle qui ne sera pas donnée à l'intérieur et qui veut que les citoyens soient éclairés.
07:07 La convention ARUS prévoit que les citoyens peuvent être impliqués dans le processus décisionnel.
07:14 Or là, ce n'est pas un processus décisionnel.
07:16 On nous demande de savoir si on veut qu'on repeigne les poteaux électriques en bleu, en jaune ou en vert.
07:20 Ça n'a rien à voir. Le projet est déjà arrêté.
07:22 Et nous, ce qu'on voudrait, c'est participer aux décisions.
07:25 Et on ne veut pas ce genre de projet.
07:27 - Merci Jean-François Serra. Vous êtes le coordonnateur de ce collectif associatif.
07:31 - Merci. Rendez-vous à 14h samedi devant le foyer rural à Fourques.
07:34 Le collectif sauvegarde des aspres, vous restez avec nous ?