Comment gouverner à l'ère de la post-vérité ?
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00:00 * Extrait de la vidéo *
00:06 Transparence, expertise, démocratie directe, les injonctions pour mener une bonne politique sont nombreuses
00:11 mais sur quoi reposent-elles les hommes et les femmes politiques ?
00:14 Doivent-ils être dans le vrai pour prendre les bonnes décisions ?
00:18 Pour confronter désir populaire et réalité politique ?
00:22 Nous sommes en compagnie de la philosophe Gloria Origi, bonjour !
00:26 Bonjour !
00:27 Gloria Origi, vous publiez "La vérité est une question politique" aux éditions Albain et Michel,
00:33 c'est une sorte de manuel où vous reprenez en philosophe les différentes catégories du politique
00:39 telles que les ont perçues les philosophes,
00:43 telles qu'on peut les percevoir au travers de faits d'actualité comme par exemple l'épisode du Covid
00:50 et c'est très étonnant de lire donc cette réflexion sur la vérité en politique
00:55 puisque de manière commune on peut croire que la politique c'est plutôt l'art du mensonge,
01:00 ce n'est pas ce que pensent les philosophes ?
01:02 C'est exactement ça, ça veut dire politique et vérité n'ont jamais fait un grand couple.
01:09 Déjà Anna Arendt disait justement la vérité c'est le domaine des faits
01:18 et la politique c'est le domaine d'opinion
01:20 et le mensonge peut être une caractéristique du discours politique dans plein de cas.
01:36 Ce que j'essaie d'argumenter dans ce livre c'est que cette notion qui est si externe aux politiques,
01:45 qui est typiquement une notion philosophique, cette notion de vérité,
01:49 devient au XXIe siècle une notion politique.
01:54 Donc les politiques doivent se soucier de la vérité,
01:57 ça devient un enjeu important de comprendre qu'est-ce que la vérité,
02:01 comment on la construit, comment on construit les faits,
02:08 comment on la présente aux autres,
02:12 est-ce que les citoyens comprennent qu'il s'agit d'un discours vrai ou faux,
02:18 est-ce qu'on est capable de faire la différence entre un discours vrai ou faux.
02:22 Et étant donné les enjeux importants qui concernent des questions de vérité
02:30 comme on a vu pendant la pandémie du Covid ou lors d'une guerre,
02:34 savoir ce qui s'est passé vraiment ça devient crucial pour prendre des positions.
02:39 La vérité disons qui n'est pas justement normalement la compagne de la politique
02:47 devient pour moi une notion politique.
02:49 - Alors prenons l'exemple du Covid,
02:51 qu'est-ce qu'une philosophe peut trouver en matière de vérité dans cette période-là, Gloria Orriggi ?
02:58 - Le Covid c'était une période très difficile,
03:03 mais une fête intellectuelle pour les philosophes,
03:05 parce qu'on voyait vraiment les personnes se poser la question à qui croire,
03:12 qui il faut croire enfin, qu'on n'avait pas un virus nouveau,
03:17 on n'avait pas donc des faits scientifiques sur ce virus,
03:21 on avait un tandem entre politique et science.
03:27 La science disons c'est le domaine des activités humaines
03:33 où on cherche de se rapprocher le plus à la vérité,
03:37 qui a les méthodes les plus développées pour se rapprocher à la vérité.
03:41 Donc c'était un tandem de politique et science qui faisait peur aussi aux citoyens,
03:51 parce que selon les découvertes scientifiques,
03:56 ou l'avis des scientifiques, on pouvait prendre des décisions sur nos vies.
04:01 Vous vous souvenez du confinement,
04:03 le confinement c'était une expérience très dure et très contestée
04:07 dans plusieurs pays dans le monde entier.
04:10 Et en fait c'était sur la base des données,
04:14 quelles étaient ces données, qui les avait produit,
04:19 comment, toutes ces questions restaient assez vagues.
04:23 Il y a eu des pays par exemple européens où le confinement n'a pas été imposé,
04:27 comme la Suède par exemple, et la personne qui ne l'a pas imposé,
04:32 Anders Tegnell est devenu un héros national,
04:36 on n'a pas considéré qu'il était dans l'erreur.
04:39 Donc c'était des questions très intéressantes.
04:42 On a vu surgir des charlatans qui n'étaient pas vraiment des charlatans,
04:47 c'était très compliqué.
04:49 Moi j'ai travaillé beaucoup sur le cas du docteur Didier Raoult,
04:52 un virologue de Marseille qui avait promu l'usage de l'hydroxychloroquine,
05:02 un remède contre la malaria, pour soigner la Covid.
05:09 Pourquoi croire à Raoult ou ne pas croire à Raoult ?
05:14 Il était dans le comité national de santé publique,
05:18 vous allez regarder sur Google Scholar, son index de citations, etc.
05:24 Il a plus de citations que tous les autres virologues en France,
05:28 il n'a pas l'air d'un charlatan.
05:31 Comment le public peut en savoir plus ?
05:36 Comment décider ?
05:38 Évidemment, votre livre Gloria Origi a une résonance particulière.
05:43 Vous intéressez à la vérité en politique,
05:47 et on a l'impression qu'on est passé à une autre ère, celle de la post-vérité.
05:52 Par exemple, un pays que vous connaissez bien, en Italie,
05:55 Matteo Salvini, Giorgia Meloni,
05:58 comment se situe-t-il tous les deux vis-à-vis de la vérité ?
06:02 Alors, Guillaume Erner, ça c'est la très mauvaise question.
06:07 Parce que justement, il ne faut pas se poser la question
06:10 est-ce que les politiques disent le vrai ou le faux ?
06:13 Pourquoi ? Parce que cette question,
06:16 étant donné que la vérité est devenue une notion politique,
06:19 on utilise la vérité pour dire,
06:21 les autres de l'autre parti qui ne nous plaît pas,
06:24 disent des fake news, ils disent le faux.
06:26 Et nous, on dit le vrai.
06:28 Donc, Salvini est quelqu'un qui fait beaucoup plus d'usage
06:32 que Meloni de la propagande.
06:34 Par exemple, il a une machine de propagande
06:37 qui est bien rodée, et notamment la propagande,
06:40 la propagande est très souvent de l'information fausse,
06:44 ou de la demi-vérité, enfin.
06:47 Et Meloni dit des vérités et des faussetés, comme tout le monde,
06:50 enfin, comme Macron, comme Lépin, comme tout le monde.
06:54 Donc, si la vérité devient une notion politique,
06:57 on ne peut pas utiliser la vérité comme un hache pour dire,
07:02 et c'est ce qui arrive maintenant, pour dire,
07:05 ceux qui sont dans l'autre camp disent le faux,
07:08 et nous, on dit le vrai.
07:09 Donc, il y a le parti du vrai et le parti du faux.
07:12 Ça n'existe pas.
07:13 C'est tout simplement comment on construit cette vérité.
07:16 Par exemple, si vous la construisez à travers seulement des slogans
07:20 et des propagandes, vous pouvez dire avec la propagande
07:22 des choses qui sont vraies.
07:24 Mais si vous utilisez une technique comme la propagande,
07:30 bon, ce n'est pas génial, enfin, ce n'est pas vraiment démocratique.
07:34 Donc, une fois que la vérité devient si importante en politique,
07:38 c'est d'autres questions qu'il faut se poser.
07:40 On l'a compris, finalement, votre méthode,
07:42 c'est d'aller à rebours de la manière de penser traditionnelle, Gloria Origi,
07:47 puisque vous expliquez que la vérité est une construction politique
07:52 autant que la vérité scientifique.
07:55 C'est-à-dire qu'il y a finalement des questions de plus en plus complexes
08:00 parce qu'elles peuvent être à l'articulation de la science et de la politique.
08:05 On l'a vu avec le Covid ou avec des questions technocratiques.
08:09 Qu'est-ce que ça signifie ? Qu'est-ce que ça implique ?
08:11 Oui, prenez, enfin, j'ai suivi votre émission
08:15 en arrivant ici à France Culture.
08:18 On a parlé de l'intégrité scientifique
08:22 et d'une charte d'intégrité scientifique qui circule.
08:26 À l'Inserm, c'est Alexandra Delbault qui en a parlé.
08:29 Voilà, exactement.
08:30 Et il faut, disons, les scientifiques doivent, disons, s'uniformer, enfin,
08:34 à cette charte d'intégrité scientifique.
08:39 Qu'est-ce que l'intégrité scientifique ?
08:42 Est-ce que les gens savent ?
08:43 Ça veut dire qu'il faut se comporter bien, s'habiller bien quand on va au laboratoire,
08:47 enfin, ne pas harceler les collègues ou quoi ?
08:53 C'est une série de normes, de règles, de transparence,
08:57 de réplicabilité des expériences, de partage de données,
09:02 de coopération, d'assignation des postes académiques,
09:10 des recherches d'une façon, disons, objective, sur la base de la mérite
09:15 et non pas sur la base parce que c'est ton cousin,
09:17 comme on fait chez nous en Italie, par exemple, ou ton grand-père.
09:23 Donc, par exemple, l'intégrité scientifique, c'est un ensemble des normes,
09:30 des valeurs qui sont du type politique, disons, qui font la science, enfin.
09:35 La science politique se ressemble beaucoup plus que ce qu'on pense, enfin,
09:40 pour produire de la bonne vérité.
09:44 Il faut aussi des bonnes normes politiques et morales, enfin.
09:51 Donc, c'est ce que j'essaie de faire dans ce livre,
09:57 c'est de voir à quel point ces deux activités se ressemblent.
10:03 Il y a dans l'actualité, Gloria Origi, un certain nombre d'affirmations,
10:08 d'affirmations politiques, par exemple, quand Trump dit que les membres de l'OTAN
10:14 doivent payer pour rester membre.
10:16 Ah oui, ça c'est génial parce que là, on rentre dans la catégorie des demi-vérités.
10:22 Les demi-vérités sont quand vous utilisez quelque chose qui est un peu vrai,
10:26 mais en fait, l'interprétation du public devient quelque chose de complètement faux.
10:34 Il n'y a pas les comptes courants de l'OTAN à la banque où les pays versent des sous.
10:42 Ça n'existe pas. Il n'y a pas une unité centrale de l'OTAN qui marche comme ça.
10:47 Personne ne verse de l'argent à l'OTAN.
10:49 Ce qu'il veut dire, enfin, c'est que les pays doivent augmenter leur budget d'investissement
10:59 dans les dépenses militaires, ce qui a été à peu près fait partout en Europe
11:05 après le cranchement de la guerre en Ukraine.
11:09 Donc, c'est une façon de faire de la propagande.
11:16 Là, typiquement, les demi-vérités sont le pain de la propagande qui fait passer quel message ?
11:23 C'est nous les Américains qui payons, cette fameuse banque de l'OTAN,
11:27 et tous les autres sont des escrocs.
11:29 Ce n'est absolument pas comme ça qui marche.
11:34 Et c'est typiquement une technique de propagande.
11:39 Gloria Aurigie, on se retrouve dans une vingtaine de minutes.
11:42 Vous publiez donc "La vérité est une question politique" aux éditions Albin Michel.
11:45 Vous serez rejointe par une ancienne politique, Chantal Jouannot.
11:51 Elle a été ministre des Sports, elle a été secrétaire d'État chargée de l'écologie.
11:55 Elle a également été présidente de la Commission nationale du débat public.
12:00 Et on va voir avec elle, avec son vécu de femme politique,
12:04 comment elle observe l'usage de la vérité dans ce milieu qui a été le sien.
12:10 7h56 sur France Culture.
12:13 6h39, les matins de France Culture.
12:17 Guillaume Erner.
12:18 Et nous sommes en compagnie de Gloria Aurigie, philosophe, chercheuse au CNRS,
12:22 membre de l'Institut Jean-Nico.
12:24 Vous publiez un ouvrage original, Gloria Aurigie,
12:27 "La vérité est une question politique" aux éditions Albin Michel,
12:30 où vous expliquez que la vérité, ce n'est pas ce qui est vrai et ce qui est faux.
12:36 C'est quelque chose qui se construit, qui se construit notamment sur le plan scientifique.
12:41 Puisqu'il y a de plus en plus de sujets qui se tranchent de manière scientifique.
12:48 Et la science, hélas, ne donne pas toujours de réponses claires à des réponses claires.
12:54 Il y a des sujets aussi technocratiques, où là, les réponses sont complexes à construire.
12:59 Et puis, il y a des combats de valeurs.
13:01 Et dans les combats de valeurs, là aussi, il est extrêmement ardu d'avoir du vrai et du faux.
13:07 Et pour confronter justement votre point de vue de philosophe,
13:11 nous sommes tournés vers une femme qui a fait de la politique et qui aujourd'hui n'en fait plus.
13:17 Dès lors, on va postuler qu'elle a une parole libre.
13:20 Chantal Joanneau, bonjour.
13:21 Bonjour.
13:22 Vous avez été ancienne ministre des Sports, ancienne secrétaire d'État chargée de l'écologie,
13:26 ancienne présidente de la Commission nationale du débat public.
13:31 La vérité pour les politiques, est-ce une obsession ? Est-ce au contraire un frein ?
13:35 Parce qu'on explique souvent que la politique, c'est l'art du mensonge.
13:40 Il y a une multitude de formules.
13:42 On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment.
13:44 Enfin, je ne vais pas vous faire la liste de toutes les maximes pour politique.
13:47 Mais en tout cas, on considère que dans votre ancien métier,
13:52 la vérité, ce n'est pas quelque chose de véritablement apprécié.
13:57 C'est injuste.
13:59 C'est injuste en politique.
14:01 Mais le livre est absolument génial.
14:04 Contrairement à ce que l'on m'avait dit, on m'avait dit que c'était un peu ardu à lire.
14:07 Pas du tout.
14:08 Il se lit très bien.
14:10 Parce que la philosophie, parfois, peut être ardue.
14:12 Mais là, pas du tout.
14:14 La politique, ce n'est pas d'un côté le monde des faits de la science
14:18 et de l'autre côté le monde de l'opinion qui serait la politique.
14:21 C'est la rencontre des deux.
14:23 C'est la rencontre entre des faits de la science et des opinions
14:27 qui ont plus ou moins accès à cette science.
14:31 La science nous dit le vrai.
14:33 La politique essaye de trancher entre le vrai et le juste.
14:36 Vous avez été notamment ministre de l'écologie et l'écologiste.
14:42 Un domaine absolument fascinant parce qu'on aurait envie, nous, citoyens,
14:47 d'avoir des réponses tranchées.
14:49 Et dès qu'on se penche sur une question, on s'aperçoit que, souvent,
14:54 les débats sont très techniques.
14:56 Il y a des débats qui sont très techniques.
14:59 Par exemple, quand vous parlez de biodiversité,
15:01 c'est scientifiquement très compliqué.
15:03 On n'a pas encore tous les éléments.
15:05 Il y a des débats qu'on connaît beaucoup mieux, comme le climat.
15:08 Le climat, on a un groupe de scientifiques, le GIEC,
15:11 qui a un super passage sur comment les experts du pétrole
15:14 ont essayé de décrédibiliser les experts du climat.
15:18 Mais c'est beaucoup plus clair.
15:20 Les experts du climat vont nous dire que voilà la situation,
15:24 voilà idéalement ce que l'on devrait faire,
15:28 limiter le réchauffement climatique.
15:30 La première question politique qu'on va poser, c'est
15:32 est-ce qu'on a envie de limiter le réchauffement climatique ?
15:35 Certains pourraient vous dire que tant pis,
15:38 ils ne pensent pas aux générations futures,
15:40 et continuons comme ça.
15:42 Ensuite, il n'y a qu'à savoir ce qu'on fait
15:44 pour limiter ce réchauffement climatique.
15:46 Prenons la question de l'énergie.
15:48 On peut commencer à se dire qu'on va réduire au maximum
15:50 notre consommation d'énergie puisqu'elle émet des gaz à effet de serre.
15:54 Premier arbitrage, un peu lourd,
15:56 parce qu'il dit baisse de la consommation,
15:58 on ne sait pas encore la concilier avec l'augmentation de la croissance.
16:02 Et après on va se dire qu'est-ce qu'on fait ?
16:03 On va développer des énergies décarbonées.
16:05 Lesquelles ? Du renouvelable, du nucléaire,
16:07 seulement l'un, non seulement l'autre.
16:09 Donc vous voyez, il y a la science, il y a le vrai,
16:11 et puis derrière il y a tous ces arbitrages
16:13 qui sont éminemment politiques.
16:16 Jean Lemarie, vous le résumiez d'un mot dans la formule en commençant,
16:19 le rôle du politique, des politiques,
16:22 serait d'arbitrer entre le vrai et le juste.
16:25 Est-ce que ces deux idées-là, ces deux buts-là sont antagonistes ?
16:29 Ce n'est pas la même chose ?
16:30 Non, ce n'est pas antagoniste.
16:31 Idéalement, c'est de trouver le juste sur la base du vrai.
16:34 Idéalement, mais on n'a pas toujours tous les éléments du vrai.
16:36 Ce que je vous disais d'ailleurs, par exemple sur la biodiversité.
16:39 Et puis on a un autre sujet qui m'avait beaucoup marquée
16:41 quand on fait de l'écologie,
16:43 c'est qu'on peut avoir des conflits entre deux sujets.
16:48 Le vrai, réchauffement climatique.
16:50 Le vrai, effondrement de la biodiversité.
16:53 Le vrai, les énergies renouvelables sont une des solutions
16:57 pour limiter le réchauffement climatique.
16:59 Mais le vrai aussi, les énergies renouvelables,
17:01 quand vous avez des éoliennes,
17:02 ça pose des problèmes pour les oiseaux, par exemple.
17:04 Et donc c'est négatif, en partie, pour la biodiversité.
17:07 Donc vous voyez, il y a quand même des arbitrages
17:09 qui se font nécessairement entre des sujets.
17:11 Gloria Origi, vous revenez sur les questions écologiques dans votre livre.
17:16 Pourquoi est-ce important pour la philosophe que vous êtes
17:20 de réfléchir justement à la vérité en fonction de ces questions écologiques ?
17:24 L'écologie est un très bon exemple,
17:28 comme justement vous disiez, Chata Joano,
17:33 d'arbitrage continu.
17:36 Et aussi la façon dont le GIEC est composé,
17:44 là aussi vous montre à quel point la science
17:48 ne vous délivre pas des faits comme ça, hop,
17:51 dans lesquels on peut tomber déçu.
17:53 C'est une énorme structure politique.
17:57 Il y a 4000 scientifiques qui sont impliqués.
18:01 La sélection n'est pas seulement sur le mérite scientifique,
18:05 c'est aussi en termes de genre, des pays, d'ethnies.
18:10 Enfin, il y a énormément de critères qui sont plutôt de l'ordre des valeurs
18:15 et du politique que de l'ordre scientifique.
18:18 Et cette complexité et diversité cognitive, etc.
18:23 est censée produire de la vérité.
18:26 Donc, vous voyez que ce n'est pas...
18:30 Je suis tout à fait d'accord avec...
18:32 Ce n'est pas quelque chose de tranché, c'est ça que vous voulez dire ?
18:35 Voilà, exactement.
18:36 Mais est-ce que le danger...
18:37 On peut...
18:38 C'est une très belle définition de dire enfin
18:40 la politique c'est un arbitrage entre le vrai et le juste.
18:42 Je trouve que ce sont des notions qui sont très différentes.
18:45 D'un côté, les faits et le juste, c'est une question de valeurs.
18:49 Donc, l'opposition des faits et valeurs.
18:51 Mais en fait, ce vrai, d'un côté, est complexe.
18:56 C'est ce que j'essaie de montrer dans les livres.
18:58 Le vrai est complexe.
18:59 Il y a des valeurs aussi dans la façon où on construit cette vérité.
19:03 Enfin, je fais un exemple, un long exemple dans les livres
19:06 jusqu'au début du 19e siècle.
19:11 La craniométrie, qui est une science qui mesurait l'intelligence
19:17 selon la taille du cerveau, était une science absolument mainstream.
19:25 Broca, en France, il y a une rue Broca à Paris,
19:29 était un des champions de la craniométrie.
19:32 Je veux dire, on le considère encore un grand scientifique, etc.
19:36 Je veux dire, là, c'était des valeurs, bien sûr,
19:38 qui produisaient ces "vérités".
19:42 Mais le problème, justement, Gloria Origi,
19:45 parce qu'on comprend bien que la vérité est construite,
19:48 que rien n'est simple, que le GIEC n'est pas une sorte d'organisme pur,
19:53 il y a des sélections, il y a des biais, etc.
19:56 Mais bien souvent, dans le domaine de l'écologie,
19:59 dans le domaine de la santé, l'action des lobbies consiste
20:03 à nous faire croire que les choses sont plus complexes.
20:05 Par exemple, sur la cigarette, pendant très longtemps,
20:08 les cigarettiers ont payé des gens, de faux experts,
20:12 ou des experts qui étaient là, en l'occurrence,
20:17 uniquement voués aux mensonges, pour nous faire croire
20:21 que la nocivité de la cigarette était finalement un problème complexe.
20:25 Voilà, là, c'est un bon usage du doute,
20:32 en fait, un mauvais usage du doute.
20:34 Il y avait un livre très célèbre qui s'appelle
20:38 "Les marchands de doutes", enfin, sur les cas du tabac,
20:41 et il y a des marchands de doutes, comme vous le savez sûrement,
20:45 Jean-Antoine Joannot, dans les cas de l'écologie.
20:48 Ça veut dire que les gens sont contents d'être sceptiques.
20:53 Ils se disent "je suis très intelligent parce que je me doute de...
20:57 enfin, je n'avale pas n'importe quelle vérité, n'importe quelle chose qu'on me dit".
21:02 Et donc, ces gens-là, comme dans les cas du climat change,
21:06 enfin, il y a la même marchandisation de doute,
21:11 ont créé le doute en disant "en fait, les résultats ne sont pas si clairs,
21:16 enfin, il y a quand même d'autres résultats qui montrent que..."
21:21 et en utilisant, disons, cette espèce de faiblesse,
21:27 un peu de fierté personnelle, si on doute, on est bien,
21:31 ça veut dire qu'on n'est pas crédules,
21:34 et très souvent, c'est comme ça que la propagande marche,
21:38 en disant aux gens "soyez sceptiques, ne croyez pas n'importe quoi, etc."
21:45 Chantal Joannot, un bon exemple de cela, c'est la question des pesticides,
21:50 où là, si on essaye, nous, pauvres citoyens, d'avoir une idée claire, précise,
21:56 c'est vraiment pas facile.
21:58 Oui, je ne vais pas parler tout de suite des pesticides,
22:01 parce que c'est peut-être un sujet hyper sensible et vraiment d'actualité,
22:04 mais on avait un précédent, c'était le bisphénol A,
22:06 je ne sais pas si vous vous souvenez de ce problème,
22:08 c'est le bisphénol A, on trouvait ça dans les contenants alimentaires,
22:11 notamment dans les biberons pour bébés,
22:13 et on était, c'était peut-être 2009, je crois, ou 2010, par là,
22:18 et tout le monde disait "non, non, il n'y a pas de problème sur le bisphénol A,
22:21 ne vous inquiétez pas, c'est dans du contenant alimentaire,
22:23 donc ça ne va pas se diffuser dans les produits, il n'y a pas de souci."
22:26 Et on va à une grande réunion internationale,
22:28 et là je vois dans d'autres pays qu'on a des tonnes d'études scientifiques
22:32 qui prouvent que c'est nocif.
22:34 Mais effectivement, il y a eu une bataille pendant au moins deux ans, minimum,
22:37 pendant deux ans, où on expliquait que non, ces études, c'était pas sérieux,
22:41 que vraiment, c'était pas scientifique, qu'on n'avait jamais observé de problème,
22:46 bah oui, on ne les observe pas immédiatement,
22:48 parce que c'est des effets à long terme de faible dose,
22:50 donc il n'y a pas d'effet immédiat, immédiat,
22:52 et ça a été une vraie bataille ce bisphénol,
22:54 mais moi je regarde un souvenir justement sur ce rapport entre la science,
22:58 parce que des scientifiques, des ministères eux-mêmes,
23:02 nous disaient "non, non, il n'y a pas de souci".
23:04 Et donc c'était effectivement un bon exemple politique de cette difficulté,
23:09 pour le citoyen quand il voit cette bataille d'experts se faire leur propre idée,
23:14 c'est effectivement assez compliqué,
23:17 surtout aujourd'hui on a un développement de la mésinformation,
23:20 on pourra en reparler après, mais c'est évoqué aussi d'ailleurs,
23:23 mais c'est assez compliqué.
23:25 Ce n'est pas pour autant que le citoyen n'est pas légitime,
23:27 loin de là, et je pense qu'on va en reparler parce que c'est bien évoqué dans le livre,
23:31 qu'il n'est pas légitime à s'exprimer et à débattre de ces sujets.
23:36 - Jean-Les-Marie, par exemple, si on prend cet exemple qui était important,
23:40 qui est important effectivement du bisphénol A,
23:42 où était la principale bataille à l'époque,
23:45 puisque vous étiez aux premières loges,
23:46 du côté des scientifiques, du côté des politiques, face à l'opinion,
23:49 où pouviez-vous jouer,
23:50 ou essayez-vous de jouer à l'époque pour faire avancer les choses ?
23:53 - Alors du côté des politiques, la question était très peu connue,
23:56 elle apparaissait un peu technique, un peu particulière,
23:58 donc il y avait peu de personnes qui s'étaient saisies du sujet,
24:01 et du côté des scientifiques, il y avait peu d'études,
24:05 parce que pareil, on ne s'était pas vraiment intéressés au sujet,
24:08 et donc on manquait d'études,
24:10 donc on les a trouvées dans d'autres pays,
24:13 mais on manquait d'études,
24:14 et puis il y a eu aussi cette campagne de certains industriels
24:18 qui expliquaient que non, déjà,
24:20 un, on ne pouvait pas s'en passer,
24:21 que les substituts, donc les produits pour les remplacer,
24:24 finalement seraient pires,
24:26 et que les bons produits, on ne les trouvait pas,
24:28 donc il y a eu cette bataille,
24:30 qu'est-ce qui s'est passé ?
24:31 Le bisphénol a été interdit, il n'y a pas eu de drame,
24:34 ça s'est super bien passé,
24:35 ils avaient les substituts sous la main,
24:36 bon certes, c'était peut-être un peu plus cher, c'est possible,
24:38 mais en tout cas, ces substituts existaient,
24:42 donc c'était vraiment un exemple de cette bataille
24:44 de désinformation d'experts,
24:46 de ce manque d'expertise,
24:47 de ce manque d'accès à l'expertise.
24:48 Là, c'était le bisphénol a,
24:50 au moins on pouvait le remplacer d'autres substances,
24:53 c'est toujours compliqué en matière d'arbitrage de savoir…
24:57 C'est ce qu'on nous dit à chaque fois,
24:58 enfin, vraiment, le bisphénol a,
25:00 moi, on m'a une drogue dans les yeux,
25:02 on m'a dit non, non, mais il n'y a pas de produit de substitution,
25:04 et puis vous allez voir, c'est pire,
25:05 c'est quand même beaucoup plus dangereux.
25:07 Il n'y en a pas et c'est pire.
25:08 Donc du coup, voilà,
25:10 maintenant j'ai toujours un doute quand on me dit ça.
25:12 La question du citoyen, Gloria Origi,
25:16 justement, lorsqu'il s'agit de se repérer parmi ces vérités
25:22 qui sont des vérités complexes,
25:24 qui sont des vérités soumises à expertise,
25:26 sachant qu'il n'y a rien de plus difficile
25:29 qu'expertiser les experts.
25:31 Exactement, qui juge les juges ?
25:33 Enfin, je pense que la limitation
25:38 qu'on a en tant que citoyenne,
25:41 ce n'est pas l'ignorance.
25:43 En fait, je pense que les gens savent
25:47 beaucoup plus de choses qu'il y a longtemps.
25:50 Enfin, on peut trouver des informations
25:52 sur n'importe quoi, sur Internet.
25:54 Donc moi, je ne suis pas comme ça,
25:58 terrifiée de cette espèce de retour à l'ignorance
26:01 qui devrait être notre R au troisième millénaire.
26:04 Je pense qu'il y a un vrai problème
26:10 de communication.
26:13 Les citoyens sont obligés à faire confiance.
26:18 La confiance est la ressource cognitive
26:21 pour apprendre, plus importante que nous avons.
26:25 Ça veut dire, si je ne me fie pas à mes profs,
26:28 à ma mère et mon père, à la télévision,
26:31 etc., je n'apprends rien.
26:34 Faites-le compte dans votre cerveau
26:36 de combien de croyances vous avez
26:38 et essayez de mesurer combien de ces croyances
26:41 sont dérivées par les autres,
26:43 ont été acquises par les autres.
26:45 C'est probablement les 95 % des croyances
26:47 que vous avez dans la tête.
26:49 Donc, comment faire confiance ?
26:54 Donc, si vous voulez, la philosophie
26:57 nous apprend à douter, à être plutôt sceptique,
27:00 critique, etc.
27:02 Mais en fait, la ressource cognitive
27:04 la plus importante qu'on a,
27:06 et particulièrement en cette période,
27:08 étant donné les moyens de communication
27:10 que nous avons, c'est la confiance.
27:12 Donc, il faut trouver des façons
27:15 de rendre les citoyens moins vulnérables,
27:21 de les laisser, enfin,
27:24 et comment le faire, enfin,
27:26 à travers une éducation qui permette
27:30 de leur faire reconnaître
27:32 quels sont les bons indicateurs de confiance.
27:34 Comment je reconnais un expert ?
27:36 Pourquoi ? Par exemple,
27:38 parce que je suis capable d'estimer son travail
27:41 en allant tout simplement sur Google Scholar,
27:44 en voyant qu'il n'est pas un charlatan, enfin.
27:47 Des choses simples, des stratégies simples
27:50 pour que les citoyens puissent juger de l'expertise.
27:55 - Chantal Joanneau, parlons des sujets qui fâchent,
27:58 parlons des pesticides.
28:00 Je ne vais pas vous demander une réponse définitive
28:02 sur un sujet aussi vaste, mais
28:04 quand on est politique et qu'on doit se faire
28:06 une opinion là-dessus,
28:08 j'imagine qu'on est en proie à toutes sortes
28:11 de lobbies, d'intérêts contraires,
28:14 de paroles contradictoires.
28:16 Comment on fait lorsqu'on est secrétaire d'État
28:19 à l'écologie et qu'on doit essayer
28:21 de se construire une représentation des choses ?
28:23 - La première chose, c'est d'avoir accès
28:27 à une expertise pluraliste et contradictoire.
28:29 Il faut regarder les différentes expertises
28:31 des différents scientifiques et autant que possible
28:34 le faire de manière un peu contradictoire,
28:36 pas toujours les mêmes.
28:38 J'ai une vraie principe de base,
28:40 je prends toujours les institutions publiques,
28:42 mais parce que je viens du public,
28:44 j'ai naturellement confiance dans les institutions publiques.
28:48 Il faut aussi écouter les lanceurs d'alerte.
28:50 Ils sont bien défendus en France,
28:53 mais il faut écouter les lanceurs d'alerte,
28:55 parce qu'on a quand même eu plusieurs cas
28:57 qui venaient de lanceurs d'alerte.
29:01 Et après, on a la partie scientifique,
29:04 mais il ne faut pas oublier toute la partie conciliation
29:07 avec la donnée économique, la donnée sociale.
29:10 C'est-à-dire qu'on sait où on veut aller,
29:13 mais comment on veut y aller,
29:15 comment on concilie, comment on fait cette transition
29:17 pour que ce soit quand même supportable pour tout le monde.
29:19 C'est essentiel, surtout quand on est en démocratie.
29:22 On est en démocratie.
29:24 Il y a deux choses que j'ai bien aimées.
29:30 Science et scientisme font courir à la politique
29:33 à risque de totalitarisme.
29:35 C'est-à-dire que si tout est déterminé par la science,
29:38 il n'y a plus de démocratie.
29:40 Évidemment, puisque la démocratie,
29:42 c'est aussi la prise en compte des émotions.
29:45 C'est un autre endroit là où vous évoquez
29:47 l'éthos et le pathos.
29:49 Et puis, un autre point que j'aimais bien,
29:52 c'est... je fais la promotion...
29:55 - Vous êtes une bonne attachée de presse !
29:58 - C'est une question qui est posée.
30:01 Si la politique est influencée par la science,
30:03 est-ce que ça signifie que toutes les opinions
30:05 ne se valent pas ?
30:07 Et ça, c'est une question centrale aussi,
30:09 quand on évoque ce rapport entre science et politique,
30:11 surtout dans une démocratie.
30:13 - Jean Lémarie, à cet égard,
30:15 vous avez une expérience importante aussi, Chantal Joannot.
30:17 C'est la Commission nationale du débat public.
30:19 La place des citoyens au milieu de tout ça.
30:21 Entre les experts d'un côté,
30:23 les politiques de l'autre,
30:24 qui doivent prendre des décisions
30:25 face à des projets précis, souvent controversés.
30:27 Quelle est la place de la vérité
30:29 et de la vérité scientifique dans les débats
30:31 tels que vous les organisez à la CNDP ?
30:33 - Alors, ça renvoie exactement à ça.
30:36 C'est-à-dire que quand on fait un bon débat,
30:38 on donne un maximum d'informations
30:40 et on essaye qu'elles soient la mieux sourcée possible,
30:42 la plus pluraliste, la plus contradictoire possible.
30:44 Pour que le citoyen se fasse sa propre opinion.
30:48 Maintenant, quand on fait ces débats-là,
30:50 on attend effectivement des citoyens,
30:52 des prises de position.
30:53 On attend aussi, et ça va peut-être vous étonner,
30:56 qu'ils expriment leurs émotions, leurs sentiments.
30:58 Leurs pathos.
31:00 Parce que peut-être qu'ils ne savent pas tout
31:02 et on est tous ignorants de quelque chose.
31:04 Mais ces émotions, elles vont révéler derrière des questions,
31:07 elles vont révéler des valeurs.
31:09 Et quand on fait de la politique, c'est important.
31:11 Du coup, je reviens à ma première question,
31:13 c'est de bien concilier le vrai et le juste.
31:15 La valeur, ce qui porte les citoyennes et les citoyens.
31:19 Donc certes, quand on fait un débat,
31:23 tout le monde a le droit de s'exprimer.
31:24 Il est important qu'on prenne en compte tout ce qui est dit.
31:26 Que ce soit vrai ou faux.
31:27 Et c'est important de connaître le faux.
31:29 C'est important de savoir là où les personnes peuvent se tromper.
31:32 Ensuite, évidemment, il y a la donnée scientifique
31:35 qui, elle, vient apporter quelque chose de plus à la décision.
31:39 Mais on ne peut pas discréditer un citoyen
31:41 parce qu'il serait ignorant de quelque chose.
31:44 Gloria Origi, justement, là aussi,
31:48 la question de la démocratie
31:51 avec la possibilité de discréditer un citoyen,
31:54 la manière dont s'organise le débat,
31:57 tout cela est bien différent,
32:00 d'une manière univoque de voir la vérité.
32:02 Je suis tout à fait d'accord avec Chantal Jarnot.
32:08 Et je pense que la démocratie devrait être semblable
32:13 à ces débats partout.
32:15 Malheureusement, c'est très compliqué de les organiser
32:18 et c'est très compliqué d'imposer à 80 millions de personnes
32:24 de participer à des débats collectifs.
32:26 Mais c'est comme ça qu'on construit la vérité.
32:29 Non seulement en politique, mais en science aussi.
32:32 C'est comme ça, c'est seulement à travers le contradictoire,
32:35 c'est seulement à travers le dialogue qu'on construit la vérité.
32:40 Les faits ne sont pas si robustes que ça,
32:43 parce que les faits sont fragiles.
32:45 Hannah Arendt le disait, les faits sont faibles.
32:48 Ça suffit de ne plus les questionner, etc.
32:53 Qu'ils disparaissent, enfin, ce qui est arrivé
32:57 le 24 février 2022 entre la Russie et l'Ukraine.
33:03 On va les oublier facilement si on ne renouvelle pas les débats.
33:06 Donc la vérité est collective, est un dialogue,
33:10 est construite en politique comme en science
33:13 par un dialogue intelligent.
33:16 Chantal Jouannot ?
33:18 Moi, je l'ai tellement bien dit, je n'ai rien à rajouter.
33:22 Mais c'est parce que c'est vraiment de ce que vous dites au départ
33:25 que la vérité est effectivement une construction,
33:28 c'est un objet politique.
33:30 Les politiques n'aiment pas tellement la contradiction
33:33 parce que bien souvent, ils préfèrent jouer sur du flou.
33:36 Je ne suis pas d'accord, je crois que les politiques adorent la contradiction.
33:39 Au contraire, parce que c'est un moyen de valoriser ce qu'ils disent
33:43 et au contraire de cautionner ce qu'ils disent.
33:46 Mais non, si on fait de la politique et qu'on n'aime pas la contradiction,
33:49 honnêtement, il faut faire autre chose.
33:52 Il y a peut-être des réorientations.
33:54 J'ai fait autre chose, donc...
33:58 Un mot de conclusion, Gloria Origi.
34:01 Finalement, ce livre est à la fois plus inquiétant
34:04 parce qu'il dit que cette vérité est à construire
34:07 et plus rassurant parce qu'il explique que finalement,
34:10 il peut y avoir des demi-vérités, des quarts de vérité.
34:14 Bref, il y a toute une série de nuances en matière de vérité.
34:18 D'abord, je ne suis pas une relativiste.
34:21 Je pense que la vérité est construite,
34:23 mais on peut la construire mal ou on peut la construire bien.
34:26 Donc, je n'ai pas une attitude post-moderne
34:30 de dire que de toute façon, tout est construit,
34:33 le savoir et le pouvoir, c'est la même chose, etc.
34:36 Donc, ce n'est pas ma position.
34:38 Je pense que la vérité, on peut la construire bien,
34:41 par exemple, avec les débats publics,
34:43 avec des bonnes procédures scientifiques,
34:46 inclusives et transparentes, etc.
34:48 Je ne pense pas que les gens soient idiots.
34:50 Je pense que les gens sont...
34:53 Si leur pensée, étant donné que la pensée,
34:56 je pense que l'intelligence, elle est collective,
34:59 si l'intelligence est bien organisée,
35:03 voilà, on peut approcher à la vérité.
35:06 Merci, Gloria Origi.
35:08 La vérité est une question politique aux éditions Albain Michel.
35:11 Merci, Chantal Joanneau.