Tous les jours dans Culture Médias, Thomas Isle dresse le portrait sonore de l'invité. Ce jeudi, c’est Clémentine Célarié, comédienne, pour la pièce "Je suis la maman du bourreau" au Théâtre de la pépinière.
Retrouvez "Le portrait sonore de l'invité" sur : http://www.europe1.fr/emissions/le-portrait-inattendu
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00:00 - Quel bonheur de recevoir ce matin une comédienne tellement forte, tellement touchante sur scène.
00:06 Oui, j'emploie des superlatifs, mais ceux qui suivent régulièrement cette émission savent que je ne dis pas ça tous les jours.
00:11 Bonjour Clémentine Scellarié. - Bonjour.
00:13 - Merci d'être avec nous ce matin. - Merci à vous.
00:16 - On va parler de ce magnifique seul en scène, "Je suis la maman du bourreau".
00:20 On va d'abord dresser votre portrait sonore, des petits sons pour mieux vous connaître.
00:25 Voici le premier.
00:26 - "Mama Africa" de Youssou N'Dour, c'est la superstar sénégalaise.
00:41 Vous êtes né à Dakar, au Sénégal. Vous avez vécu dans plusieurs pays d'Afrique d'ailleurs.
00:47 - Cameroun, Gabon, Congo aussi. Congo-Belge à l'époque.
00:52 - Vous avez beaucoup de souvenirs de cette enfance ?
00:54 - Oui, souvenirs, le mot est faible. Vous vous sentez faite de quelque chose qui est d'ailleurs.
01:05 Vous voyez ce que je veux dire ? En vous, une espèce de truc. Je ne sais pas comment décrire ça.
01:09 - C'est plus des sensations ?
01:11 - C'est une sorte de chaleur, comme un truc de feu qui ne cesse jamais d'être allumé, d'être en vie.
01:22 Je vous décris ça.
01:24 - Vous êtes restée jusqu'à quel âge ?
01:26 - 14 ans. C'est toute votre enfance, je suis africaine, et puis voilà, il me fait tôt.
01:33 Mais c'est merveilleux. Du coup, je suis un peu déracinée.
01:38 - Parce qu'à 14 ans, on a le temps où on réalise vraiment les choses. Vous êtes arrivée en France après, c'est ça ?
01:44 - Oui, c'est ça. On avait fait quelques petits séjours, parce que ma part était journaliste,
01:47 c'est lui qui nous a amené en Afrique. Mais on avait fait quelques petits séjours,
01:52 et à chaque fois, on revenait en Afrique. Alors on avait un autre pôle, c'était la Bretagne.
01:59 Et puis quand je suis arrivée à Lille, à 14-15 ans, ça faisait bizarre, mais Lille c'est chaleureux aussi.
02:06 Vous voyez ce que je veux dire ?
02:08 - Oui, mais entre le Congo et Lille, il y a...
02:10 - Je suis en train de dire le Canada !
02:12 - Oui, oui.
02:14 - C'est le cœur des gens qui compte.
02:17 - Exactement. Et puis alors après le bac, vous êtes partie un an aux Etats-Unis,
02:21 vous atterrissez à Indianapolis.
02:23 - On m'a dit qu'il ne vaut pas que je ne veuille pas de noir à la maison.
02:25 - C'est ça, ils étaient bien tombés avec vous.
02:28 - Ah oui, c'est la sœur.
02:29 - Mais vous en avez ramené quand même.
02:31 - Bien sûr. Enfin j'ai ramené des personnes... Oui, mais c'était pas drôle du tout.
02:35 Alors ça, le racisme... Attention, le racisme c'est immonde, c'est ignoble,
02:39 et c'est même pas consovable d'ailleurs.
02:41 Mais quand vous le voyez en face de vous avec des gens qui vous disent...
02:44 C'est quand même... Enfin, c'est affreux quoi.
02:47 Donc, elles étaient très mal tombées, effectivement.
02:49 Mais bon, après...
02:51 - Et puis après vous êtes rentrée en France.
02:54 - Oui, oui, oui. Non mais en plus les Etats-Unis, c'était pas que du racisme,
02:57 heureusement, c'était passionnant aussi.
02:59 Mais je suis rentrée en France, puis après je ne sais plus...
03:01 - Après il y a eu ça, après il y a eu ça.
03:03 - J'ai changé de planète, écouté Radio 7.
03:06 - On est super contents, mais on est morts de trucs !
03:10 - Oui, oui.
03:11 - Salut Radio 7 ! - On a ouvert la radio quand même.
03:16 - Bonjour, c'est Radio 7. - Lundi 2 juin 1980.
03:19 - Sur 99,7 MHz. - En modulation de fréquence, bien sûr !
03:25 - Vous avez toujours la même voix ? - Oui, mais on vous sentait pas très...
03:28 - On vous reconnaît pas. - Si, si, mais j'étais complètement surexcité.
03:33 Vous vous rendez compte ? Ouvrir une station de radio, c'est dingue !
03:36 - C'était l'ouverture de Radio 7 le 12 juin 1980.
03:39 - C'est l'époque où il y a eu Radio 7 et Le Palace, c'était complètement lié.
03:42 Moi je ne dormais pas, j'allais danser jusqu'à 6 heures,
03:45 et après métro et à la radio le matin. - Et vous faites ça pendant 4 ans, jusqu'en 1984.
03:51 Vous y rencontrerez deux chavannes notamment.
03:53 - Oui absolument, qui s'étaient virées de l'époque.
03:56 Après ça ne l'a pas empêché de faire tout ce qu'il a fait.
04:00 - Il a pas trop mal réussi, et c'est là que vous changez de prénom aussi.
04:03 - Ah mais à Radio 7, j'ai changé de prénom.
04:06 Patrick Meyer qui m'a engagé m'a dit "Meryem", parce que je m'appelle Meryem,
04:11 M-E-R-Y-E-M, Marie en arabe, et il m'a dit "C'est bien, mais bon,
04:16 tu rigoles tout le temps, allez un truc un peu de fruit, il va en être pire".
04:20 - C'est lui qui a choisi Clémentine. - Oui c'est lui, oui.
04:24 Moi je m'en fous parce que je voulais être comédienne, vous voyez ce que je veux dire.
04:27 Bon puis après, vous êtes un peu débiles, surtout moi, pas vous, je veux dire.
04:32 Et du coup vous dites "si je change de prénom, les gens vont pas savoir".
04:37 - Il y a des gens qui vous appellent Meryem encore ?
04:39 - Heureusement, mes proches, mes intimes.
04:42 - C'est bien, ça permettra la différence entre les intimes et les autres.
04:44 - Mes copains, mes copines, maman, puis mes frères.
04:47 - Et maintenant tous les auditeurs d'Europe 1 à partir d'aujourd'hui.
04:51 - Meryem, c'est votre vrai nom de famille ? - Oui, c'est mon vrai nom.
04:54 - Allez, extrait suivant.
04:58 - Est-ce que vous reconnaissez cette musique ? - Oh bah oui, c'est "37 de le matin".
05:02 - "37 de le matin" Jean-Jacques Bennex.
05:04 - "37 de" oui.
05:05 - C'est le film qui vous a révélé en 86, qui a également révélé Béatrice Dalle, Jean-Luc Anglade.
05:09 - C'est magnifique, Yared, Gabriel Yared, cette musique elle est...
05:13 Bennex c'était un grand, grand, grand monsieur.
05:18 C'était vraiment... il avait une vision, c'était un type extraordinaire.
05:23 Et le rencontrer ça a été génial, ça a été très violent.
05:27 En un sens de...
05:28 Ben quand vous commencez en disant "on la chatte sur un écran" si vous voulez,
05:33 les gens sont assez quand même choqués quand même.
05:36 Même s'ils rigolent, ben justement ils rigolent parce qu'ils sont choqués.
05:39 Et qu'il y avait une espèce de violence, je veux dire, quelque chose de très cru quoi.
05:45 Elle s'est très cru ce qu'elle fait.
05:47 Alors les gens disaient "c'est de la nain faux", mais ça c'est pas du tout une nain faux.
05:50 C'est une femme qui est en manque d'amour, le personnage que je jouais.
05:53 Alors après ça m'a collé une espèce d'étiquette.
05:56 Mais bon, ça dure.
05:57 De toute façon, tout ça, ça va.
05:58 C'est pas grave.
05:59 Mais c'était un très beau film, j'ai adoré être en scène.
06:01 C'était incroyable.
06:02 Magnifique film effectivement.
06:03 Et puis alors magnifique aussi le théâtre.
06:06 On va en parler de ce seul en scène qui m'a beaucoup ému.
06:09 Je suis la maman du bourreau.
06:11 On en parle dans une minute sur Orpah.
06:12 - C'est parti pour le défi.