Racisme dans le football : "Une lacheté qui me fait gerber", les sanctions sont-elles suffisantes ?

  • il y a 8 mois
Suite aux insultes racistes qu'à subi Mike Maignan lors du match qui opposait l'AC Milan à l'Udinese, l'After Foot se demande si les sanctions sont suffisantes pour stopper des récidives par la suite. Hermann Ebongue, secrétaire général de SOS Racisme, est l'invité de l'After Foot ce mercredi soir.

Category

📺
TV
Transcript
00:00 Avec Daniel Riolo, avec Thibaut Leplat, Herman Ebengué, secrétaire général des SOS Racisme,
00:05 président de Sportitude, nous fait le plaisir d'être avec nous, invité ce soir dans Lafter.
00:09 Merci d'être avec nous. Remis après ces émotions boréennes taxistes, dirons-nous.
00:14 Alors c'est avec nous, Herman, ce soir, je le disais, c'est parce que ces derniers jours ont
00:18 été marqués par les attaques racistes dont Mike Magnon a été la cible en Italie durant le match
00:23 entre Ludinese et La Seminan. Alors info d'ailleurs de la Gazetta d'Elo Sport aujourd'hui, 4 personnes,
00:27 3 hommes et 1 femme, ont été interpellés aujourd'hui par la police italienne. Il y avait
00:30 déjà une personne qui avait été bannie à vie par Ludinese hier. Ces 4 personnes vont aussi être
00:33 bannies à vie par Ludinese. Ludinese qui a écopé d'un match à huis clos de sanctions de la part
00:39 des autorités foot italiennes. Alors Herman, c'est un débat qu'on a souvent eu malheureusement dans
00:43 Lafter ces derniers mois, ces dernières années. Mais quel genre de posture, finalement,
00:47 décision il faut prendre face à ça ? Mais ce n'est pas une décision, une seule décision,
00:53 une décision unique. Je crois que c'est tout un processus qu'il faut mettre en évidence. D'abord,
00:59 il ne faut pas oublier, il faut le rappeler, le racisme est un délit. Déjà, je pense que les
01:04 choses doivent être claires. - On savait, Herman, jusque là, on est d'accord. - Ça va être sanctionné.
01:08 Après, maintenant, je crois que la question qui est posée, c'est comment est-ce qu'on peut faire,
01:13 qu'est-ce qu'il faut faire pour éviter qu'on revive des scènes de racisme qu'on a vécues avec
01:19 MacMignan, mais bien avant aussi. - S'il te plaît, dans le micro, Herman. - D'autres actes qu'on rencontre
01:27 dans les matchs de football, on en parle beaucoup quand c'est des footballs professionnels, mais
01:30 c'est un complique dans le foot amateur. Et qu'est-ce qu'on peut faire ? Je crois qu'il y a
01:35 deux choses. D'abord, un, il faut davantage communiquer autour de ces sujets-là, sensibiliser,
01:42 mobiliser. - On le fait beaucoup, Herman. - Non, mais la nuance, c'est quoi ? C'est qu'en fait, le football,
01:50 le sport de manière générale, est un véritable levier de lutte contre les discriminations et le
01:55 racisme, y compris de l'inclusion. Paradoxalement, on a une minorité qui peut poser des problèmes,
02:01 parce qu'il faut bien le dire. On a parfois l'impression que le football, c'est le lieu où
02:06 il y a plus de racisme qu'ailleurs, alors que c'est tout l'inverse. - Ce qui est paradoxal dans
02:11 cette affaire, c'est que précisément, la sensibilisation fonctionne et pour cause, on est
02:14 beaucoup plus sensible. - Oui, non mais... - Parce que ce qui s'est passé avec MacMagnan l'autre jour,
02:18 se passait dans le passé dans beaucoup de stades. Moi, je l'ai vu en Espagne, je l'ai vu en France,
02:24 je l'ai entendu dans beaucoup de matchs. - Et on disait que c'était le folklore. - Je l'entends encore maintenant. - Il y avait en tout cas beaucoup moins de réactions. - Parfois, je ne sais plus qui disait ça, mais parfois,
02:30 effectivement, d'abord, tu ne te remarquais pas, tu demandais ce que c'était que ces cris, puis
02:33 finalement, tu finis par comprendre. Tu te rends compte que maintenant, tu es capable de les identifier,
02:36 tu es capable de réagir tout de suite et on voit bien. - On a beaucoup avancé. - Mais c'est paradoxal, comme il y en a moins...
02:43 - Mais bien sûr, mais... - Enfin, je ne sais pas s'il y en a moins, mais comme on fait beaucoup plus attention, on est peut-être beaucoup plus sensible,
02:47 du coup, on a l'impression qu'il y en a aussi beaucoup plus. - Non, mais il y a surtout que Daniel, tu as dit quelque chose, la réaction.
02:51 Parce qu'en fait, quand je disais sensibiliser, c'est plus sensibiliser les gens aux réactions.
02:56 C'est pas... Parce que, en fait, tout le monde rejette, parce qu'on voit très bien les mois que ça cause,
03:02 mais en réalité, quand ça se passe dans le stade, sur le coup, il y a très peu de gens qui s'élèvent et qui disent non,
03:11 ou alors qui pointent du doigt ceux qui font ça. Et donc, la question aujourd'hui... - Mais tu veux dire quoi, dans la tribune ?
03:15 - Ah oui, bien sûr, mais dans le stade, de manière générale, que l'écosystème, cette sensibilisation au refus du racisme,
03:24 c'est-à-dire qu'au refus de ces phénomènes, que tout l'écosystème, aujourd'hui, ce que d'ailleurs je voulais vous remercier,
03:31 parce que souvent, il n'y a pas beaucoup d'émissions, beaucoup de radios qui prennent le temps d'en débattre en profondeur.
03:38 - Moi, j'aimerais être concret, Herman. - Oui.
03:41 - Tu seras d'accord avec nous pour dire qu'il y a eu beaucoup de réflexions qui ont été menées sur qu'est-ce qu'il faut faire,
03:47 et que quand on finalement s'est arrêté pour trouver que c'était efficace la solution identification-exclusion...
03:54 - Attention, oui.
03:56 - On trouve que c'est, je ne sais pas si tu es d'accord avec ça, plutôt une bonne idée, dans la mesure où il est désormais très facile
04:03 d'identifier et d'exclure ce que j'ai dit dimanche quand je suis venu, ça s'était passé la veille ou l'avant-veille, je ne sais plus.
04:10 Si le club de Lourdinès, et dans les 3-4 jours, n'a pas identifié, n'a pas chopé les gars, ça veut dire qu'eux ont très mal travaillé,
04:18 et que donc ils collaborent très mal sur la cause. Or, on a appris très vite qu'ils en avaient chopé un.
04:23 Là, Nico, tu viens de nous dire qu'il y en a 4 autres. - Bien sûr.
04:27 - Ça, j'aime ça. J'aime qu'on chope le gars et qu'on lui dise "tu ne remettras plus jamais les pieds dans un sac".
04:32 - C'est même la vraie solution. - Ça c'est bien. Parce que moi, l'histoire du huis clos,
04:36 moi on ne m'enlèvera pas de la tête que ce n'est pas une solution.
04:39 - Non mais c'est la seule disponible dans le règlement de la LAPD.
04:41 - Mais oui, mais c'est à 90% du stade et du jeu qui se comportent bien.
04:44 - C'est la seule qui peut prendre immédiatement, parce que la commission de discipline peut se prolonger tout de suite,
04:49 donc sur le coup de l'émotion, c'est important. - Mais qu'est-ce que ça va faire changer ?
04:51 - Ça ne change rien, mais simplement, il faut comprendre pourquoi les impasses dans lesquelles on est.
04:55 À mon avis, il y a un sujet qui n'est pas abordé, d'ailleurs, dans le rapport qui a été remis là,
04:58 - Oui, à l'Assemblée nationale. - À l'Assemblée nationale, qui parle...
05:01 - Qui a été auditionné dans cette commission. - Oui, qui a été auditionné.
05:03 On parle de prévention, on parle d'éducation, on parle de répression,
05:06 mais il y a un sujet qui n'est pas abordé, à mon avis,
05:08 qui n'a pas été abordé, à ma connaissance, dans les auditions, en tout cas, qui n'est pas abordé dans le rapport,
05:12 qui est la question du lien qu'il y a entre les réseaux sociaux et les tribunes.
05:15 Il y a un lien direct, notamment dans les manifestations de racisme,
05:18 il y a même un rapport de l'Arccom qui est sorti hier soir.
05:21 - Oui. - Je ne sais pas si tu l'as vu,
05:23 il dit que sur la totalité des utilisateurs de réseaux sociaux,
05:28 et notamment de contenu sportif, plus de 40%, 40%, publient des messages négatifs.
05:33 Et dans ces 40%, la moitié des gens considèrent que c'est normal
05:36 de publier des contenus négatifs, parce que c'est la rançon de la gloire, en quelque sorte, des gens connus.
05:40 Ça veut dire qu'il y a un lien direct entre...
05:43 On le voit dans les phénomènes de foule,
05:45 dans ce phénomène d'une poignée de personnes, 3, 4 personnes parfois, 10 fois, 20,
05:50 qui paralysent toute une foule.
05:52 - Oui, mais ça c'est encore un autre débat. - Non, c'est la même chose !
05:54 C'est la même chose parce que c'est l'impunité de la foule, c'est le même mécanisme.
05:58 - Le mécanisme, ce que Daniel dit,
06:00 c'est ce que, effectivement, moi j'ai mis en place, c'est-à-dire
06:03 que les sanctions ne peuvent pas être collectives.
06:06 D'abord, c'est humainement injuste
06:08 de pouvoir sanctionner tout un stade, même toute une tribune.
06:13 Parce qu'en réalité, qu'est-ce qui se passe ?
06:15 On sait qu'il y a...
06:16 On est parti sur la base qu'il y a une minorité qui pose problème.
06:19 Et ça, on est bien d'accord.
06:21 Et donc, à partir de ce moment, on a les moyens,
06:23 et je dirais même assez largement,
06:26 pour identifier s'il y a une volonté...
06:28 - Là où moi j'ai un problème,
06:29 c'est que...
06:30 Et j'avoue, une incohérence,
06:33 c'est que, autant,
06:35 si un joueur prend une bouteille sur la tête,
06:37 je comprends qu'on arrête le match parce que le joueur,
06:40 il est tout bonnement handicapé et que...
06:42 - Physiquement.
06:43 - Ouais, physiquement.
06:44 Mais, dans ce cas-là,
06:46 est-ce qu'un joueur qui prend une insulte raciste,
06:49 est-ce qu'on estime qu'il est atteint humainement
06:51 et que donc il n'est plus en état de jouer ?
06:53 Et est-ce qu'on arrête le match ?
06:54 Là, j'avoue que moi j'ai un blocage là-dessus.
06:56 - Non, mais parce que je sais que c'est aux gens, aux législateurs, de décider ça.
07:00 - Je suis aussi d'avis, et je suis de ton avis.
07:01 Pourquoi ? Parce que, en voulant sanctionner tout le monde,
07:04 on crée des fausses solidarités.
07:06 Vous imaginez, vous n'avez rien fait.
07:08 Vous venez voir un match de foot avec la famille, avec vos enfants, etc.
07:12 Et vous avez une minorité de 2, 3, 4, 10 individus
07:15 qui posent un problème et on arrête le match.
07:18 Alors que parfois, vous organisez un match,
07:19 vous partez de très loin,
07:21 vous faites de...
07:22 C'est toute une organisation, c'est un bonheur...
07:25 - Juste une chose pour revenir à ce que tu disais, Thibault, sur la sanction collective.
07:29 Moi, j'avais fait un livre sur le foot et le racisme, d'ailleurs,
07:31 et j'avais notamment rencontré Nathalie Boilet-Latour
07:33 lorsqu'elle était encore présidente de la Ligue.
07:35 Et il y avait eu un cas notamment de suspicion à Dijon,
07:36 je ne sais pas si vous vous souvenez, avec Balotelli.
07:38 - Oui, c'était le cas...
07:39 - Et moi, la question que j'avais posée à Nathalie Boilet-Latour, c'est
07:41 pourquoi sanctionner un stade à huis clos en entier ?
07:45 Enfin, pourquoi sanctionner d'ailleurs un club
07:46 quand il y a un acte raciste qui est commis par une personne ?
07:48 Elle a dit une chose qui était très intéressante, elle dit
07:50 « Tu feras attention que rares sont les sanctions qu'on prend vis-à-vis des clubs
07:53 à une seule condition, c'est que le club ne collabore pas. »
07:56 Et là, je reviens à l'exemple de l'udinése, elle dit
07:58 « Si le club, demain, ne fait pas le travail nécessaire
08:02 pour identifier les fauteurs de trouble, on va sanctionner le club. »
08:04 - Et qu'au préalable, il ait les caméras pour que tout soit visible dans le stade.
08:07 - Mais là, en l'occurrence, l'udinése, elle est celle de l'Ocho-Urgent,
08:09 si ils ont identifié les...
08:10 - Je vais même plus loin, si le club met les moyens.
08:12 Parce que c'est pas évident.
08:15 C'est pas évident.
08:16 Il y a des clubs qui mettent...
08:17 Moi, je vais vous prendre l'exemple d'un club que moi je connais très bien,
08:20 qui est le Paris Saint-Germain.
08:21 Aujourd'hui, qui met beaucoup de moyens pour identifier,
08:25 pour que les matchs se passent très bien au parc.
08:27 Ce qu'il ne peut pas dire, qu'il ne garantit pas,
08:29 qu'il ne peut pas y avoir un problème.
08:31 Là où il y a un souci, c'est lorsque le club ne collabore pas
08:34 et ne met pas les moyens pour trouver des solutions.
08:37 Et à partir de ce moment, là où je suis contre,
08:39 c'est de les sanctionner avec des clubs qui font des efforts.
08:42 Parce que la prime ne peut pas être la même.
08:44 Tu fais, tu fais pas, c'est le même tarif.
08:46 Parce qu'à un moment donné, c'est un message que vous envoyez
08:49 aux clubs qui font des efforts et qui mettent des moyens pour identifier.
08:53 - Parce qu'on est dans une impasse, à partir du moment où on n'arrive pas à...
08:56 On est coincé dans, à mon avis, cette fausse opposition
08:59 entre sanctions collectives et sanctions individuelles.
09:00 C'est une fausse opposition, parce que les deux sont nécessaires
09:02 à des échelles différentes. Tu viens de l'expliquer, Nico, très bien.
09:05 Les deux sont nécessaires. Il faut bien comprendre la logique de chaque type de sanction.
09:07 Mais il me semble qu'il y a un troisième élément qui n'est jamais abordé,
09:10 je reviens sur mon histoire, c'est que c'est un problème d'identification.
09:13 Parce que les personnes qui font ça, sont souvent membres de groupes,
09:15 ou sont souvent... - Pas toujours.
09:17 - Oui, mais ils sont souvent...
09:18 - Oui, mais tu peux quand même les identifier, Thibault, non ?
09:21 - Là où je veux en venir, je donne l'exemple, par exemple,
09:23 de la Ligue... du championnat espagnol. Ils ont fait quelque chose d'intéressant,
09:25 ils ont fait un système de monitoring, c'est-à-dire de recensement,
09:28 sur les réseaux sociaux, par une intelligence artificielle,
09:30 de système de modération, mais surtout un système de repérage
09:33 sur chaque match, et de monitoring de la haine en ligne.
09:37 Ça va au-delà de la question du racisme. - Oui, bien sûr.
09:39 - Donc ça leur permet de mesurer sur chaque match
09:41 la possibilité éventuelle qu'il se passe quelque chose.
09:43 Ça veut dire que déjà, en amont, tu prépares,
09:46 et t'as des outils pour ça, t'as des outils technologiques qui peuvent servir aussi à ça.
09:49 Parce que moi, quand je lis le rapport, il est très intéressant,
09:51 mais si la réponse, c'est faire une commission,
09:53 je pense pas que ce soit très utile de passer autant de temps...
09:55 - Une commission de quoi ?
09:56 - Une commission, il faut faire une nouvelle instance,
09:58 une autorité administrative indépendante qui va résoudre le problème d'éthique,
10:01 créer une nouvelle loi, faire un nouveau règlement, je ne crois pas...
10:04 Je ne suis pas certain que ce soit indispensable.
10:05 - Il y a quand même des choses qui sont assez simples.
10:07 - En revanche, il y a des outils qui sont modernes,
10:09 qu'on peut utiliser dans plein de domaines, qu'on utilise dans le marketing,
10:11 qu'on utilise sur Netflix, qu'on utilise sur Instagram,
10:13 mais on ne les utilise pas pour lutter contre la haine en ligne.
10:15 - Non mais attends, attends. - C'est des choses qui sont en ligne.
10:17 - Il y a des choses qui sont quand même simples.
10:18 Herman, toi, tu sais ça parce que tu vas dans tous les stades,
10:21 même si tu bosses beaucoup au parc, avec Sporting, tu nous avais tout fait.
10:25 Il y a quand même des choses, il faut être un petit peu concret.
10:28 Les clubs ont l'obligation d'être équipés pour voir tout ce qui se passe dans un stade.
10:32 Et ça, ça vaut également pour la violence entre supporters,
10:34 pour gérer les groupes et tout.
10:37 Les clubs, par le biais de leurs référents,
10:40 de la façon dont ils nouent le dialogue avec les assos de supporters,
10:43 un club est capable, et je crois que la plupart,
10:45 ils connaissent quasiment tous leurs supporters.
10:47 Les leaders d'associations, ils savent comment ça se passe.
10:50 Et là, ce qui s'est passé, c'était en Italie, alors qu'on parle en France.
10:54 D'ailleurs, on aurait dû commencer par ça.
10:56 Un bilan, est-ce qu'en France,
10:57 on a ce genre de choses comme ça s'est passé avec Maignan ?
10:59 J'ai l'impression que c'est devenu rarissime fortement.
11:02 Là-dessus, on a beaucoup éradiqué ça.
11:05 - Sauf que dans le rapport, on dit même qu'on n'arrive pas à le chiffrer.
11:07 Non, Daniel, il y a un des problèmes,
11:09 c'est qu'on n'arrive justement pas à être objectif.
11:10 On ne sait pas combien il y en a en France.
11:12 Ça, c'est un des problèmes.
11:13 - Mais parce qu'il n'y a aucun travail qui est fait.
11:16 - Ce que je suis en train de dire, c'est qu'on n'arrête pas à faire un diagnostic d'abord.
11:18 - Le seul travail de recensement, c'est l'organisation FAIR qui l'a fait.
11:21 - Non, mais moi, je l'ai fait.
11:22 - Elle a déjà dû le faire en 2017.
11:23 - On est d'accord que les clubs peuvent savoir,
11:25 parce qu'ils connaissent les gars qui viennent dans leur stade,
11:27 qu'ils font les déplacements,
11:30 exactement comme le cas des Lyonnais qui étaient au Montréal Vélodrome.
11:33 On le savait depuis des années.
11:34 Donc, c'est que parfois, il y a également des failles du côté des clubs
11:38 qui se laissent un petit peu dominer sur les ailes extérieures.
11:42 Mais je vais vous donner un exemple.
11:44 - Par des associations.
11:45 - Je crois qu'on a tous vu le match OL-OM de l'année dernière,
11:50 où il y a eu une vidéo qui est passée,
11:52 où un groupe de jeunes que nous avons reçus
11:55 et qui ont déposé plainte aujourd'hui,
11:57 qui ont été violemment attaqués.
12:00 C'était des jeunes blacks qui ont été violemment attaqués
12:03 par un groupe, je précise bien, un groupe de supporters lyonnais,
12:07 parce qu'ils ont juste manifesté le but.
12:11 Je ne sais pas si vous vous rappelez des conditions du match OL-OM,
12:14 où le but de l'OM a été marqué à la dernière seconde.
12:18 Et il a juste résulté, il a manifesté le but et il a été lâché.
12:23 Cette vidéo a été tournée sur les réseaux sociaux.
12:26 On demande "Sale négro, tu vas rentrer chez toi, etc."
12:30 On a eu, et aujourd'hui, pour tout vous dire,
12:35 c'est-à-dire que les caméras,
12:37 on voit quand même le stade, le nouveau stade de l'OL,
12:40 c'est quand même le stade le plus équipé en caméra, en vidéo, en image.
12:44 Mais au moment où je vous parle, ça va faire un an,
12:46 le prochain match a lieu dans une semaine.
12:48 La fête n'a pas encore été audiencee, il n'y a pas eu de sanction pour l'instant.
12:53 Et les images, parce que nous avons demandé quand même
12:55 que les images soient remises,
12:57 parce que les clubs doivent coopérer dans ce genre de cas.
13:02 D'ailleurs, ce qui a permis l'affaire de Marseille,
13:06 et que vous êtes au courant, que tu l'évoquais,
13:10 que les supporters qui ont été identifiés ont été condamnés.
13:12 Ils ont été audiences, l'affaire est passée la semaine dernière,
13:16 et ils ont été condamnés. Pourquoi ?
13:17 Parce que d'abord, il y a eu beaucoup de volonté de la part de l'OM,
13:21 parce que ces images ont été fournies, les clubs ont coopéré.
13:25 - Il fallait que le club dépose plainte aussi,
13:26 pendant longtemps le club ne déposait pas plainte.
13:28 - Que le club, s'il ne dépose pas plainte,
13:30 au moins qu'il se constitue parti civil.
13:33 Et contre ces supporters, il y en a beaucoup,
13:35 et c'est là où je te rejoins, Daniel,
13:36 c'est qu'il y a cette complaisance qui fait que beaucoup de clubs
13:40 ont du mal à sanctionner leur propre supporter,
13:43 et même à condamner leur propre supporter.
13:45 - Et c'est la même chose en dehors du racisme,
13:47 c'est la même chose pour les violences, les bastons entre la N-G,
13:51 on sait tout de suite que la réaction des dirigeants, c'est de dire
13:54 "ah non, mais ce n'est pas vraiment eux, mais ils ont été provoqués par là".
13:56 Souvent, ils défendent, et ils vont même jusqu'à défendre parfois,
13:59 des assos qui sont au bord d'eux.
14:00 - Ils ont même, en fait,
14:02 une réaction corporatiste presque, je dirais,
14:05 parce qu'on dit "ben oui, il y a des supporters lyonnais".
14:08 Il ne s'agit pas de pointer le club de Lyon,
14:10 mais on ne peut pas les appeler autrement que des supporters d'un club.
14:14 - Oui, parce qu'en l'occurrence, il y avait clairement des extraditions, les ABU.
14:17 - Mais ça ne veut pas dire qu'on pointe le club,
14:19 mais il y a une réaction presque épidémique, corporatiste,
14:22 qui vous a dit "ah mais non, non, non, on n'a pas de problème dans notre stade".
14:26 - On poursuit le débat dans un moment.
14:28 On a un peu touché le sujet du doigt il y a quelques instants également,
14:30 mais tu parlais tout à l'heure, Erman, de prise de conscience de la part,
14:33 finalement, des gens qui sont dans le stade,
14:34 autour des agisseurs de ces troupes, de ces délits même d'ailleurs.
14:39 Et on a eu un exemple le week-end dernier en Coupe de France, en France,
14:42 des supporters de Lille qui ont condamné sur les réseaux sociaux notamment,
14:45 ce qui s'était passé lors du match à Chambly face au Racing en Coupe de France.
14:50 - On avait déjà eu les sifflets contre ceux qui sifflaient.
14:54 On avait déjà eu une sorte de manifestation d'hostilité.
14:57 - Et là, les Lillois ont dénoncé les Lillois finalement.
14:59 - Oui, c'est cet esprit que je disais tout à l'heure
15:03 quand je disais de sensibiliser non pas à la question du racisme,
15:06 mais surtout à ne plus accepter, parce qu'on est nombreux,
15:10 on est même très, très majoritaire, à ne pas accepter,
15:13 à ne pas vouloir ces phénomènes dans un stade.
15:15 Mais comment le manifester, comment le faire ?
15:17 Parce qu'en réalité, souvent, des gens ont peur.
15:19 - Bien sûr.
15:20 - On a trouillé.
15:22 - Flo racontait très justement la semaine dernière,
15:24 avec son expérience avec ses enfants, avec son fils à Rennes.
15:28 Moi, ça m'est arrivé aussi.
15:29 C'est une des raisons pour lesquelles je ne vais pas au stade avec ma fille aussi.
15:31 Je ne veux pas entendre ça.
15:33 - Et donc voilà, Thibault, ce qu'il dit, ça se traduit par le silence.
15:37 - Mais ça peut se passer dans n'importe quelle tribune.
15:39 Ce n'est pas que le tribune du Parc.
15:41 - C'est pour ça que j'allais...
15:42 - Vous ne savez pas sur qui vous tomber.
15:44 Vous avez tombé sur un énervé.
15:45 Il va vous répondre.
15:46 Personne ne va vraiment vous soutenir si vous dites quelque chose.
15:50 - Absolument.
15:50 - Et vous vous retrouvez à perdre l'expérience que vous êtes en train de partager avec votre enfant,
15:53 avec quelqu'un, par passivité en fait.
15:57 - Oui, bien sûr. C'est la raison pour laquelle je crois que...
16:00 Moi, je pense qu'il faut pour tous les matchs, ce protocole qui doit être un peu diffusé
16:06 de manière à ce que les gens n'acceptent plus que le voisin puisse délibèrement tenir des propos
16:13 racistes, antisémites, violents, etc.
16:17 Et parce que petit à petit, et ça prend du temps,
16:19 parce que je crois qu'on est dans une vraie bataille culturelle dans le football.
16:24 Soit c'est nous qui gagnons, qui avons cet esprit,
16:28 qui voulons que ça se passe dans les meilleures conditions,
16:30 que le football reste quelque chose de festif, de joyeux,
16:33 et que certains éléments n'ont pas leur place dans un stade.
16:36 Et donc, il faut se donner les moyens pour gagner cette bataille culturelle.
16:40 Parce qu'au fond, c'est qu'est-ce qui se passe ?
16:42 Il y en a beaucoup qui finissent par croire que ça fait partie du socle des valeurs du football.
16:47 Parce que vous arrivez tout jeune, vous ne voyez que ça.
16:50 Vous n'entendez que ça.
16:51 Vous ne connaissez que ça.
16:52 Et on ne peut pas vous demander du jour au lendemain de reproduire quelque chose
16:56 dont vous ne connaissez absolument pas.
16:57 Parce que vous n'entendez que des insultes,
16:59 vous n'entendez que des comportements qui sont totalement abjects,
17:02 et quelque part, vous les normalisez dans votre esprit.
17:05 Moi, je l'ai vu, des gens, quand on les a pris en flagrant délit devant les tribunaux,
17:09 ils disent "ben oui, mais moi j'entendais ça, je ne savais même pas que c'était..."
17:12 - Il y a des choses, je parle souvent ici de ce fameux édito dans Philomac que j'avais lu,
17:16 qui était excellent, l'histoire d'Alexandre Lacroix,
17:18 qui va à la pâtisserie demander son dessert préféré pendant longtemps,
17:22 qui était cette meringue au chocolat qu'on appelait la tête de nègre.
17:25 - La tête de nègre, ouais.
17:26 - Il raconte qu'il va demander sa meringue au chocolat,
17:29 il voit qu'elle a changé de nom, qu'elle ne s'appelle plus tête de nègre mais meringue au chocolat,
17:32 et il se dit "mais pourquoi on a changé de nom ? Moi, j'avais même jamais entendu ce mot-là."
17:36 Et au moment où il dit "je vais le dire quand même, après tout, c'est mon dessert,
17:39 je peux dire 'moi, je ne suis pas raciste', je peux dire 'tête de nègre' sans que ce soit raciste,
17:42 c'est mon dessert", il se dit qu'au moment où il le dit,
17:46 il se rend compte qu'à ce moment-là, il est raciste.
17:49 C'est au moment où il sait que la norme sociale a changé,
17:51 et que lui continue d'aller là-dedans, et c'est à ce moment-là.
17:54 Et ça veut dire quoi ? Ça veut dire que les comportements racistes, les propos racistes
17:58 sont variables, en fait, et que les normes sociales varient.
18:02 Et c'est ça qui est difficile à comprendre.
18:04 On est en plein là-dedans, on voit bien qu'on a du mal à fixer la limite.
18:07 On ne sait pas à partir de quel moment il faut intervenir, plus intervenir,
18:10 qu'est-ce qui fait partie du folklore et qu'il n'en est plus pendant longtemps ?
18:12 C'est du folklore, ça ne l'est plus. On ne l'entendait même pas.
18:14 - Oui, je me disais, quand on parlait de l'Égyptien, je n'en entendais même pas.
18:16 - Et surtout qu'il prend différentes formes, et qu'on s'arrête surtout,
18:21 et principalement trop souvent, sur une seule forme.
18:24 Et là, moi, je vais maintenant essayer d'élargir un petit peu le débat
18:27 avec des questions dont on a souvent parlé, Arman.
18:29 D'ailleurs, suite à Megnan, on a envoyé un message, on a commencé à en parler,
18:33 et je voulais ton avis là-dessus, et le vôtre également.
18:36 L'émotion des joueurs après ce qui s'est passé autour de MacMegnan,
18:38 il est évident qu'on la comprend tous, c'est une sorte de combat universel
18:41 avec lequel on sera tous d'accord.
18:44 Par ailleurs, il y a quand même des choses dans ce milieu du foot
18:47 qui, moi, m'interpellent de plus en plus, qui me gênent.
18:52 On reproche à un public, que ce soit à Lille, à Lyon, à Houdiné, ce week-end,
18:57 une violence, parce que c'est clairement une violence,
19:00 et encore une fois, c'est un combat universel, on a raison de leur reprocher.
19:03 Est-ce que ce public-là a face à lui des joueurs et un monde du foot
19:11 qui peut se regarder dans un miroir tranquillement,
19:15 et des joueurs qui n'ont pas beaucoup de choses, eux aussi,
19:18 par rapport à ces combats-là, à se reprocher ?
19:21 Moi, c'est une question que je pose,
19:22 et il y a eu beaucoup de cas ces derniers temps qui m'ont interpellé.
19:25 D'abord, bon, après, évidemment, le constat qu'il y a fait,
19:28 en tout cas, moi, je fais de notre société, où le rejet de l'autre,
19:31 le repli identitaire communautaire, il est de plus en plus présent,
19:34 et quand ce n'est pas encore pire, la défense des intérêts liés au business
19:38 qui prévaut sur toutes les grandes valeurs qui devraient être universelles,
19:41 là, c'est encore pire.
19:42 Je ne reviendrai pas sur l'épisode du Qatar l'année dernière et sur tout ça.
19:46 Je reviens à ces fameux joueurs de foot qui sont tous émus
19:50 quand il se passe ça autour de Mike Magnan,
19:51 mais qui, par ailleurs, vont classer les discriminations
19:55 et ce qui les touche ou ce qui ne les touche pas.
19:57 À la limite, qu'ils classent.
19:59 On n'est pas tous touchés par les mêmes choses.
20:02 Dans un monde totalement mondialisé,
20:04 on n'a pas tous les mêmes sensibilités à des problèmes de société,
20:07 même par rapport au racisme et à ces différentes formes de racisme.
20:10 J'essaie d'être concret maintenant.
20:14 Par quoi je commence ?
20:15 Il y a deux semaines, je crois,
20:18 tu dois être au courant de ce voyage qui a été organisé
20:21 pour des anciens sportifs.
20:23 Voilà, qui était un combat contre toute forme de racisme,
20:27 détaché des combats et plutôt de l'actualité internationale du moment.
20:34 Un voyage prévu bien avant.
20:36 Un voyage à Auschwitz.
20:39 On est dans un combat totalement universel puisque c'était...
20:42 - Racontez, parce que c'est le contexte...
20:44 - J'arrive, j'arrive, j'arrive.
20:44 C'était présenté comme un combat contre le racisme.
20:47 Plein de joueurs, plein d'anciens sportifs ont été contactés.
20:52 Ceux qui ont répondu négativement,
20:55 quasiment à 100%, sont les footeux.
20:58 À part Sonia Anderson.
21:00 - Les anciens footeux ou les footeux en activité ?
21:02 - Non, en activité, ils ne pouvaient pas y aller.
21:03 - Ils ne pouvaient pas, voilà, c'est ça.
21:04 - Non, c'était des anciens sportifs.
21:07 J'ai entendu, je ne dirai pas les noms,
21:12 j'ai entendu des propos d'anciens joueurs extrêmement connus
21:18 qui se sont excusés de ne pas pouvoir y aller.
21:20 Je t'assure que ça me donne envie d'abandonner tout ce genre de combat.
21:24 Tellement c'est affreux et dégueulasse.
21:25 - Et comment ils justifient alors ?
21:27 - Alors, tu as ceux qui justifient,
21:29 "Voilà, tu comprends le contexte actuel,
21:31 c'est pas bon pour mon image."
21:33 - Le business, donc ce que tu disais tout à l'heure.
21:35 Un ça et l'autre, dans le contexte, je ne sais pas si ce sera bien vu.
21:39 De quel contexte on parle, pardon là ?
21:41 On parle d'un combat, ce n'était pas sur une cause,
21:44 c'était le racisme en général avec visite d'un camp de la mort.
21:47 De quoi on parle ? Refus.
21:50 De la grande, je l'ai dit, 95 % des footeux.
21:53 Le Variety Club de France a été contacté.
21:56 Ils n'ont pas bougé.
21:57 - La France ?
21:58 - Non, ils n'ont pas bougé, le Variety Club de France.
21:59 Ils n'ont pas bougé parce qu'ils ont peur du contexte et des réseaux sociaux.
22:04 De quoi on continue ? Je continue.
22:06 Je continue.
22:08 Parce qu'on classe les discriminations.
22:10 Nous, on ne le fait pas.
22:11 Je pense qu'autour de cette table, on n'a pas envie de s'amuser à classer.
22:14 Mais on sait qu'il y a eu des combats récemment.
22:16 Tu connais Johan Lemaire ?
22:17 - Oui, bien sûr.
22:18 - Bon, la difficulté qu'il a quand il va parler aux jeunes dans les centres de formation
22:23 de l'homosexualité et de la façon dont il est traité.
22:25 - Oui, bien sûr.
22:26 - Pour des motifs religieux.
22:27 - Oui, bien sûr.
22:27 - Voilà.
22:29 On a quoi encore ?
22:30 On a...
22:32 Il suffit de regarder la canne, ce qui s'est passé autour des fausses accusations sur Walid Regraghi.
22:36 Dégueulasse parce que Regraghi, mais même pas en rêve, la moitié d'un propre raciste,
22:40 il n'aurait pas pu tenir.
22:42 Il fallait lire ce qui s'est passé sur Twitter, les commentaires en dessous.
22:46 Entre les...
22:49 - Les courageux anonymes de Twitter.
22:51 - Benba ou les défenseurs de Walid et tout.
22:53 Mais c'était au-delà du racisme tellement c'était dégueulasse tout ce qui se disait.
22:59 Je peux terminer parce que je crois que tu es le premier à m'avoir dit autour de l'affaire
23:03 ce qui s'est passé à Nice, autour de l'affaire Galtier.
23:07 Je ne vais pas revenir sur ce qui s'est passé juridiquement, même s'il faudra expliquer.
23:11 Mais tu m'avais dit très vite, Herman, il ne se passera rien.
23:14 Je t'ai dit pourquoi, Herman, il ne se passera rien ?
23:16 Tu m'avais dit parce qu'à partir du moment où on ne pourra pas prouver la discrimination,
23:19 ce sera parole contre parole.
23:20 Et je t'avais dit, Herman, mais tu sais qu'il y a quand même des joueurs qui ont parlé en off
23:23 et qui n'arrêtaient pas de dire quand arrivera le moment, on parlera.
23:27 Le moment est arrivé, ils ont parlé devant les flics, mais derrière ils n'ont rien dit.
23:30 Il n'y a pas eu une plainte de déposé, il n'y a rien eu de fait.
23:32 Ils se sont tous défilés, pour quelle raison ? Pour le business.
23:35 Pour le business, de ne pas être dans la sauce,
23:37 de ne pas parler de moi et je ne veux pas de ceci cela.
23:41 Donc au bout d'un moment, moi ce contexte global, je t'assure,
23:46 moi je t'admire pour ton combat parce que dans ce monde du foot,
23:49 où de toute façon il y a une lâcheté, une hypocrisie générale qui me fait gerber,
23:56 moi parfois, c'est pour ça qu'à chaque fois qu'on veut parler de ça,
23:59 et évidemment quand il se passe ce qui s'est passé autour de Maignan,
24:01 comment tu veux ne pas en parler ?
24:03 C'est tellement dégueulasse ou quand le mec Chelsea avait pris des bananes,
24:06 c'est tellement dégueulasse.
24:08 C'est pour ça que moi je dis toujours,
24:10 identification, sanctions, sort les abrutis.
24:12 Sort les abrutis.
24:13 Mais j'aimerais que de temps en temps, on n'oublie pas de parler des acteurs
24:17 qui sont d'une hypocrisie absolue sur ces sujets-là,
24:20 qui sont à choisir leur petit combat,
24:22 quand ça les arrange, quand l'agent dit OK,
24:24 quand ceci, quand cela.
24:25 Moi ça, on ne le dit pas, personne n'en parle de ces choses-là.
24:28 C'est absolument dégueulasse.
24:29 - Oui, mais Daniel, franchement,
24:33 je suis ému quand je te vois comme ça en train de parler.
24:36 - Moi aussi je suis ému par rapport à tout ça.
24:38 - Alors Herman, tu voulais répondre à Daniel.
24:40 - Oui, je voulais répondre, d'abord sur l'affaire Galtier,
24:42 parce qu'on en a effectivement beaucoup échangé,
24:44 Daniel et moi, je remercie Daniel,
24:46 parce que dans sa recherche de la transparence et de compréhension des sujets,
24:52 moi j'avais dit à Daniel que ce dossier,
24:54 je l'avais dit, qu'il n'en sortira pas grand-chose ou rien.
24:59 Pour la simple et bonne raison que nous avons eu accès à ce dossier,
25:02 il était vide.
25:03 Parce qu'il y a un tribunal médiatique,
25:06 il y a ce qui se passe dans la réalité.
25:07 - Oui, mais il y a des joueurs qui ont parlé quand même.
25:09 - Oui, j'appelle tout ça médiatique.
25:10 - Le dossier de l'équipe était quand même...
25:12 Il y avait des choses qui ont été dites par les joueurs.
25:14 - C'est tout ça, j'appelle ça médiatique,
25:17 parce que la vérité judiciaire n'est plus la même.
25:19 - Tu ne peux pas condamner quelqu'un s'il y a un mot de l'humour.
25:21 - Absolument, moi je m'en remets complètement à ce que la justice a décidé.
25:27 Moi ce qui m'a étonné, c'est...
25:29 Parce que si on va par là dans ces cas-là,
25:31 ce qu'il faut qu'on me dise,
25:32 c'est que les joueurs ont menti.
25:34 - Mais après...
25:35 - Dans ces cas-là, dites-moi que les joueurs ont menti.
25:37 - Ou ils n'ont pas assumé.
25:39 - Non mais...
25:40 - Non, non, chose l'une, Nico.
25:42 - Parce que...
25:43 Et on peut demander à plein de gens de la rédac
25:44 et dans toutes les rédactions,
25:46 ce que les joueurs ont dit, comment ils ont parlé,
25:48 et on ira parler, et on dira ça,
25:50 et on a assisté à ça.
25:51 Et il y en a eu un, parce que dans l'équipe,
25:53 ils avaient relevé les témoignages.
25:54 - Oui, bien sûr.
25:55 - Et après, plus personne...
25:56 - C'est pour ça que je t'ai dit...
25:57 - Soit ils ont menti, et c'est très grave,
25:59 parce que mentir sur le racisme,
26:00 c'est également, je pense, condamnable.
26:03 - On ne peut pas se commentaliser.
26:04 - Soit ils se sont débinés, comme tu dis, Nico.
26:05 Donc on est là encore dans un problème d'hypocrisie de ce milieu.
26:08 - Oui, c'est ce que je disais.
26:10 Et Daniel, de toute manière, ce qui compte,
26:12 c'est la vérité judiciaire.
26:13 Tu as eu un dossier judiciaire,
26:15 et que ce n'est pas tout ce qui est écrit dans les médias.
26:17 Effectivement, soit il y a eu des propos,
26:20 et les gens ne l'ont pas assumé
26:23 lorsqu'il a fallu parler devant la justice
26:26 et devant la police.
26:27 C'est la raison pour laquelle je t'ai dit,
26:29 ce dossier sera vide et il sera classé,
26:31 parce que nous avons eu accès...
26:32 - J'ai compris après quand tu m'as expliqué.
26:33 - Voilà.
26:34 Et sur le voyage tel que tu es en train de parler,
26:37 mais en fait, je l'apprends.
26:38 Je savais que ce voyage avait été organisé,
26:41 puisque nous travaillons avec le CRIF et l'UEJF,
26:43 c'est un nombre d'organisations antiracistes
26:46 qui luttent contre l'antisémitisme.
26:47 Et ce que j'en retiens,
26:49 c'est que tu me dis, et je te crois,
26:53 et que les joueurs,
26:55 aucun n'a voulu faire,
26:57 mais je vais mener un peu ma petite enquête,
26:59 même si je ne vois pas...
27:01 - Tony Anderson.
27:02 - Et que je vais me rapprocher du CRIF
27:05 pour essayer de comprendre pourquoi.
27:08 Je peux avoir des explications ?
27:09 - J'avais raconté qu'il y a un jeune artiste,
27:13 il y a quelques années,
27:14 qui a voulu faire un clip contre l'homophobie.
27:17 Plein de joueurs de foot avaient été contactés.
27:19 - Oui, tous refusés.
27:21 Mais le voyage à Autovik,
27:22 moi je connais, c'est un voyage de mémoire
27:24 qui permet de comprendre,
27:26 qui est même à la fois une dimension historique.
27:28 - Absolument.
27:28 - De comprendre qu'il y a même...
27:29 - Avant tout un fait historique.
27:30 - C'est un fait historique.
27:31 - C'est un fait politique, c'est un fait historique.
27:33 - Et qui n'est pas une...
27:34 On ne demande pas aux gens d'adhérer,
27:37 de mener le combat.
27:38 C'est à la fois...
27:39 - Ah oui, ce n'était pas une validation
27:40 de la politique internationale d'Israël.
27:43 Ce n'était vraiment pas ça.
27:44 - On n'arrive à...
27:45 - Nous organisons assez régulièrement
27:46 ces voyages de mémoire,
27:48 que ce soit en Afrique du Sud,
27:50 pour comprendre la part de...
27:51 - J'allais le dire, j'allais donner l'exemple
27:52 de la prison de Nelson Mandela.
27:53 - Bien sûr.
27:54 - Qui est un voyage de mémoire très important.
27:55 - Même au Sénégal,
27:57 pour comprendre effectivement
27:58 tout ce qui s'est passé
27:59 pendant la traite négrière,
28:01 parce que c'est des clés et des outils de compréhension
28:03 qui permettent à la jeunesse...
28:04 - Ça s'appelle la culture.
28:05 - Ça s'appelle la culture.
28:06 - Et je rappelle quand même que...
28:08 - Ce qui est terrible dans cette histoire-là,
28:09 c'est que c'est un échec complet de la culture,
28:11 c'est un échec complet de l'éducation,
28:13 d'arriver à transformer un sanctuaire
28:14 comme peut être le sanctuaire d'Auschwitz,
28:16 comme une sorte d'événement politico-médiantique...
28:19 - Mais c'est une honte même !
28:21 - ... que l'on a peur des réseaux sociaux...
28:22 Mais attendez, on parle d'un sanctuaire historique, là.
28:25 - Je me demande...
28:26 - On parle pas d'une visite à Louis Vuitton...
28:28 - Les gars, ils peuvent perdre 10 000 followers,
28:29 tu comprends ?
28:30 Non, mais moi...
28:31 - Alors, justement...
28:32 - Justement, pour finir, Armand,
28:34 je sais que tu voulais répondre à ce que disait Daniel,
28:36 et moi j'en parlais en off avec Daniel aussi.
28:39 Moi, quand j'ai écrit mon livre sur le foot et le racisme,
28:41 j'ai eu plein de joueurs qui ont accepté de témoigner,
28:42 et j'ai reçu des coups de fil d'agent en me disant
28:44 "Écoute, je suis désolé, mais tu vas pas pouvoir publier,
28:46 tu comprends, ça peut nuire à leur carrière,
28:48 d'éventuels dirigeants pourraient ne pas aimer,
28:51 d'éventuels sponsors non plus."
28:52 C'est-à-dire qu'il y a aussi finalement...
28:54 C'est pas bon pour le business, mais je sais que toi...
28:56 - Peut-être, peut-être, mais moi...
28:57 - T'as un peu peur de cet argument,
28:58 parce que tu penses que ça peut cacher la conviction derrière.
29:00 - Moi, cet argument financier,
29:03 celui d'image, etc.,
29:05 je peux bien l'entendre, mais en fait...
29:07 - C'est un alibi, c'est un alibi.
29:08 - Voilà.
29:09 Parce que ce que Daniel dit,
29:10 c'est qu'on est là, on est dans un domaine de la culture,
29:13 de l'émancipation, de la compréhension,
29:16 qui est enrichissant.
29:17 Et dire qu'on n'y va pas parce qu'on va payer 10 000 euros,
29:21 j'y crois pas une seule seconde.
29:23 Pourquoi ? Pour la simple raison que...
29:24 - C'est un effet moral, anthropologique, majeur.
29:26 - C'est soit les gens, ils veulent cacher, ils veulent se refugier,
29:30 parce qu'effectivement, c'est difficile de démontrer
29:32 que c'est parce qu'ils ne veulent pas payer 10 000 euros
29:34 qu'ils ne font pas ce voyage,
29:35 et encore, ce qui est encore pire,
29:37 ce qui est encore pire,
29:38 - C'est-à-dire que j'y vais pas parce que j'ai peur de perdre 10 000 euros.
29:39 - Même moralement, sur un plan intellectuel,
29:43 refuser d'aller faire un voyage de mémoire
29:47 pour la compréhension du monde,
29:49 d'ouverture du monde,
29:50 et dans cet insu des sujets qui sont contemporains
29:53 et qui permettent aujourd'hui d'avoir un peu
29:55 du recul de l'acte de la compréhension.
29:57 D'ailleurs, je me pose la question, s'ils refusent eux,
30:00 mais qu'est-ce qu'ils font de leurs enfants ?
30:02 Qu'est-ce qu'ils disent à leurs enfants ?
30:03 Par rapport à ces sujets,
30:04 par rapport à ces sujets qui sont d'actualité,
30:06 qui quelque part interpellent,
30:08 non seulement nous, les adultes,
30:10 mais surtout la jeunesse.
30:11 Mais surtout la jeunesse !
30:12 Qu'est-ce qu'ils disent de leurs enfants ?
30:14 Parce que, en réalité...
30:15 - La responsabilité des gens qui font croire à ces jeunes-là,
30:17 à ces gamins-là, parce que j'imagine que ce ne sont pas des joueurs
30:19 qui pensent à tout seuls.
30:20 La responsabilité des gens qui leur murmurent à l'oreille,
30:22 ce genre de choses-là,
30:23 ces gens-là doivent se regarder dans une face.
30:24 - Ah Thibault, je suis à 100% d'accord avec toi
30:26 et que c'est mortifère !
30:28 Et c'est une honte, s'il vous plaît !
30:29 Mais...
30:30 Mais...
30:31 Mais Daniel, j'arrive même pas à comprendre que...
30:34 Peut-être qu'il y a d'autres raisons qu'on se croie un jour !
30:36 - On n'a pas ce genre d'idée tout seul.
30:37 - Non, parce qu'on pensait qu'on...
30:38 Oui, je veux croire qu'on va quand même un peu dans le bon sens,
30:42 mais bon, parfois, j'ai...
30:44 Je ne sais pas, j'ai l'impression qu'on se met en arrière,
30:46 le repli sur soi est absolument terrible.
30:49 Absolument terrible en ce moment, mais partout dans le monde !
30:52 - Mais après, Daniel, tu disais...
30:53 Et le but, c'est pas de comparer finalement ces actes-là,
30:55 mais le fait est que nous, on est parti de l'affaire Mégnan,
30:58 qui est un délit, où finalement c'est quelque chose...
31:00 C'est une expression manifeste d'un acte, d'un délit finalement,
31:03 et que là, c'est des choses beaucoup plus tendancieuses,
31:05 difficiles à prouver.
31:05 Tu as pris l'exemple de l'affaire Galtier,
31:07 l'exemple du voyage qui a été organisé,
31:09 où certains ont décliné.
31:10 Je veux dire, ce n'est pas des choses qui sont aussi...
31:11 - Tu as expliqué, Nico, là-dessus,
31:12 c'est un peu la même affaire que l'histoire du brassard homosexuel.
31:15 C'est que c'est difficile de condamner quelqu'un
31:16 pour ce qu'il ne fait pas ou ce qu'il ne dit pas.
31:19 - C'est pour ça que je te dis, c'est plus tendanceuse.
31:20 - Là, en l'occurrence, je vous parle de témoignages
31:23 où les types ont dit "je n'y vais pas",
31:25 en prétextant des trucs bidons,
31:29 alors à ça, on le savait aussi qui était.
31:31 - Oui, voilà !
31:32 - Simplement, repos chacun.
31:33 - Le pire, c'est qu'ils ne l'assument pas,
31:34 une éventuelle idéologie ou une éventuelle pensée...
31:39 - Non mais, ceux qui ont argumenté...
31:42 - Moi, je pense que ça cache des choses.
31:44 - Ça cache des idées qu'ils ne veulent pas assumer,
31:47 parce que pour certains, lutter contre l'antisémitisme,
31:51 qu'il est juif, c'est un problème.
31:52 Donc, il ne faut pas avoir peur de dire des choses,
31:54 il ne faut pas avoir peur de dire des mots,
31:55 voilà, c'est aussi simple que ça.
31:56 - Herman Némbongué, secrétaire général des SOES Racisme,
31:59 président de Sportitude, merci beaucoup d'avoir été avec nous.
32:01 - C'était un plaisir.
32:02 - Je vous dis toujours le bienvenu.
32:03 - Et encore, bravo.
32:05 Franchement, je pense que ce ne sont pas des sujets aussi simples,
32:07 ce ne sont pas des sujets très simples,
32:09 mais le courage...
32:10 - En même temps, ce n'est pas nouveau, ce n'est pas un scoop.
32:13 - On ne veut pas juste dire "Ah, ce n'est pas bien ce qui s'est passé dans un sad",
32:16 oui, évidemment que ce n'est pas bien, on combat tout le temps.
32:18 - Quand le chauffeur reporte à toi au milieu de la route...
32:20 - On a essayé d'aller un petit peu plus loin,
32:22 et le monde du foot, il n'est pas vraiment très propre malheureusement.
32:25 - Alors, il t'a pris un...
32:27 - On a quoi comme chauffeur, du coup, Jérôme ?
32:29 - Bravo à vous.
32:30 - Il parle russe, un plaisir.
32:31 - À mon retour, on va essayer de trouver un Uber sympa.
32:33 - Non mais, pour moi, c'est Jérôme, il faut demander à Jérôme.
32:35 - Ah !
32:36 Merci à tous !

Recommandée