Le télescope James Webb _ les premières découvertes _ ARTE
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00:00 Le télescope spatial James Webb a pour mission de dévoiler les secrets du cosmos.
00:10 Il faut le voir comme un télescope qui nous permet de voir l'univers caché.
00:14 Il va tenter de découvrir les briques élémentaires de la vie ailleurs que sur la Terre.
00:20 Y a-t-il de la vie sur une exoplanète en orbite autour d'une étoile semblable à notre
00:25 Soleil ? Y a-t-il une Terre 2.0 ?
00:27 Il va chercher à expliquer le mystère des trous noirs.
00:31 Où commencent-ils à grandir ? Quelle peut être leur luminosité ?
00:35 Et sonder le passé de l'univers le plus ancien jamais observé.
00:40 On est en train de remonter jusqu'à ce qui pourrait être la première génération
00:44 de galaxies.
00:45 Est-ce ni que le début ? C'est ça qui est fou.
00:49 Voici les premières grandes découvertes du télescope spatial James Webb.
00:54 Ce télescope a été conçu pour apporter des réponses aux grandes questions de l'astronomie
01:02 moderne.
01:03 Que ce soit en détectant les toutes premières galaxies nées après le Big Bang, en observant
01:13 les objets de notre système solaire, ou en explorant tout l'espace et le temps entre
01:18 les deux.
01:19 On va tenter de raconter toute l'histoire de l'humanité, depuis le Big Bang jusqu'à
01:27 la possibilité de la vie sur une autre planète en orbite autour d'une étoile semblable
01:32 à notre Soleil.
01:33 Une histoire vertigineuse.
01:37 Mais je suis aussi toute ouïe et prête à apprendre des choses sur des sujets auxquels
01:45 on n'aurait même pas pensé.
01:49 Le télescope spatial James Webb, ou JWST, est l'observatoire spatial le plus grand
01:58 et le plus complexe jamais construit.
02:00 De retard en dépassement budgétaire, sa construction a pris plus de 25 ans.
02:07 On avait même fini par se demander s'il serait lancé un jour, s'il n'était pas
02:12 trop compliqué.
02:13 Mais finalement, le JWST décolle le 25 décembre 2021.
02:21 Le JWST est un exemple remarquable de collaboration à grande échelle.
02:38 20 000 personnes dans le monde entier ont contribué à la réalisation de ce télescope.
02:46 Depuis le lancement, les scientifiques procèdent à des essais avec leur nouveau télescope.
02:53 C'est comme une nouvelle décapotable qu'on vient d'acheter.
03:00 On veut l'emmener sur la route pour tester ses limites.
03:04 Il y a toujours un moment où on tâtonne parce qu'il faut apprendre à l'utiliser.
03:10 Et c'est ce qu'on fait.
03:11 On est en période de rodage.
03:18 On ne se contente pas de conduire ce bolide.
03:20 On apprend aussi quelles sont les meilleures méthodes pour couper les virages et optimiser
03:24 tout ce qu'on fait avec.
03:25 Voici l'histoire des hauts et des bas.
03:34 Inhérents à l'exploration de l'univers avec un télescope flambant neuf, qu'on pousse
03:47 à ses limites.
03:48 Pendant cette première phase, grâce à leur nouvel instrument, les chercheurs découvrent
03:56 l'univers tel qu'ils ne l'avaient jamais vu.
03:58 Le 12 juillet 2022, le monde entier peut enfin admirer les premières images prises par le
04:09 JWST.
04:10 Je n'en suis pas revenu.
04:15 Elles étaient encore plus belles que ce que j'avais imaginé.
04:18 Je savais qu'elles seraient belles, mais pas à ce point-là.
04:21 Ce qui m'a frappé, c'est la quantité de détails contenus dans ces images.
04:28 C'est comme quand on met des lunettes pour la première fois.
04:33 Tout devient net.
04:34 Il y a plein de choses à voir.
04:35 J'étais complètement ébloui.
04:41 C'est comme quand on est petit et qu'on observe le ciel nocturne.
04:45 Le nez en l'air, on regarde toutes ces étoiles et on se demande, il est grand comment l'univers,
04:51 comment ça a commencé ? En voyant les images du télescope, j'ai eu la même sensation.
04:57 Dès que les premières données sont transmises, les scientifiques se lancent dans une chasse
05:05 aux indices afin de répondre aux principales questions que l'homme se pose.
05:10 J'étudie les galaxies, donc je suis très impatiente de voir à quoi ressemblent les
05:16 premières qui se sont formées juste après le Big Bang.
05:21 Mais si je veux être honnête, je crois que la question la plus importante pour nous les
05:25 astronomes et peut-être aussi l'humanité, c'est, y a-t-il de la vie ailleurs ?
05:30 Sommes-nous seuls dans l'univers ? C'est une des questions à laquelle j'aimerais pouvoir
05:41 répondre.
05:42 Pour moi, ce serait tellement extraordinaire que rien que cette réponse justifierait la
05:49 construction du télescope.
05:51 Jusqu'à présent, on a découvert 5000 exoplanètes, mais ce nombre change tous les
05:58 jours.
05:59 Même moi, j'ai du mal à suivre.
06:00 Les exoplanètes sont des mondes inconnus, situés hors de notre système solaire.
06:07 Ça donne le vertige de repenser à Carl Sagan, pour qui il existait des milliards de galaxies.
06:13 Ça soulève la question, y a-t-il des milliers de milliards d'exoplanètes dans l'univers ?
06:17 Je pense que oui.
06:18 À titre de comparaison, notre galaxie, la Voie Lactée, compte au moins 100 milliards
06:26 d'étoiles, et d'après les astronomes, des milliers de systèmes solaires avec des
06:32 planètes très semblables à la Terre.
06:35 Alors, se pourrait-il qu'il y ait de la vie sur certaines d'entre elles ?
06:39 Il y a de très fortes chances pour qu'une de ces planètes contienne les ingrédients
06:45 nécessaires à la vie.
06:46 Sommes-nous seuls dans l'univers ? Quand on connaît le fonctionnement de la biologie,
06:51 la chimie, la géologie et la physique, on peut raisonnablement penser que non.
06:55 Au cours des dernières décennies, nos télescopes les plus puissants ont traqué les formes
07:02 de vie telles que nous la connaissons.
07:04 Mais découvrir des mondes aussi lointains est un travail de titan.
07:09 On s'est lancé en quête de planètes dans notre galaxie, mais hors de notre système
07:16 solaire.
07:17 Or, il ne faut pas oublier qu'elles sont vraiment minuscules.
07:19 Elles sont aussi à des années-lumière de la Terre et éclipsées par l'éclat de
07:24 l'étoile autour de laquelle elles tournent.
07:27 Comment dénicher un objet à peine visible et occulter par l'éclat d'une étoile très
07:31 brillante ?
07:32 J'ai souvent entendu dire que détecter des exoplanètes, c'est comme chercher une
07:38 luciole devant la lumière d'un phare.
07:40 Mais à mon avis, c'est encore plus dur.
07:42 C'est pour ça que les astronomes se sont montrés astucieux et ont inventé des techniques
07:50 qui permettent d'observer la planète lorsqu'elle passe devant son étoile.
07:55 On observe patiemment l'étoile jusqu'à déceler une baisse infime de sa luminosité,
08:02 parce que la planète en occulte une partie.
08:04 La moindre baisse de luminosité peut révéler la présence d'une planète.
08:09 Et au moment où la lumière de l'étoile traverse l'atmosphère de la planète, les
08:14 instruments du JWST en profitent pour identifier la composition chimique de ce monde inconnu.
08:21 En général, il y a deux types d'instruments.
08:25 Les caméras qui prennent des images et les spectromètres qui observent les spectres
08:29 lumineux, les arcs-en-ciel.
08:31 Le grand public, lui, est toujours fasciné par les images, et elles contiennent une foule
08:35 de données scientifiques.
08:36 Néanmoins, l'instrument de référence pour nous, c'est le spectromètre.
08:42 Pour illustrer le fonctionnement d'un spectromètre, Matthew Diaz a construit un modèle réduit
08:48 de l'appareil lorsqu'il était stagiaire sur le JWST.
08:51 Il a utilisé une lampe de poche pour reproduire la lumière émise par un objet céleste.
08:57 Cette lumière passe à travers une lentille, semblable à l'objectif, qu'on trouve
09:02 sur un appareil photo argentique.
09:04 La lentille concentre toute la lumière en un seul point, puis cette lumière passe à
09:09 travers une fente étroite.
09:11 Ensuite, la lumière traverse une seconde lentille, puis un prisme.
09:18 Le prisme décompose la lumière en un certain nombre de couleurs.
09:22 On obtient le spectre lumineux.
09:24 C'est le même principe qu'un arc-en-ciel.
09:28 La lumière est décomposée de telle façon qu'on distingue les couleurs qui la composent.
09:32 Or, ce spectre lumineux est bourré d'informations.
09:36 Chaque molécule a sa propre signature qui est unique, comme vous avez la vôtre et moi
09:42 j'ai la mienne.
09:43 Et ce qu'on cherche justement, ce sont les signatures des différentes molécules.
09:47 Ce qui distingue un spectre d'un autre, ce sont les raies noires par lesquelles les
09:52 atomes et les molécules révèlent leur identité en absorbant la lumière.
09:57 Les molécules dans l'espace, sur les étoiles et les planètes, absorbent certaines longueurs
10:02 d'onde de la lumière.
10:03 En quelque sorte, elles volent ces couleurs à l'arc-en-ciel.
10:07 En analysant l'agencement de ces raies, on peut dire, ça c'est le code barre du calcium,
10:12 ça celui du sodium, voilà.
10:14 Ce sont des petites empreintes digitales, des petites pancartes qui annoncent "coucou,
10:19 je suis l'hydrogène", "coucou, je suis l'oxygène".
10:23 Les spectromètres du JWST ont été spécialement conçus pour détecter ces empreintes digitales
10:30 dans le domaine infrarouge du spectre.
10:33 C'est là qu'on trouve les principales empreintes des différentes molécules qu'on va chercher
10:37 dans l'espace.
10:38 L'eau, le monoxyde de carbone, le dioxyde de carbone, le méthane.
10:47 Ce sont les ingrédients essentiels pour qu'un monde soit habitable.
10:51 Les composants qu'on associe à la vie.
10:57 Dans leur quête, les scientifiques spécialisés dans les exoplanètes ont commencé par explorer
11:04 l'atmosphère d'une géante gazeuse située à 700 années-lumière de la Terre.
11:10 WASP-39b est plus grande que Jupiter, dont le diamètre est 11 fois celui de la Terre.
11:17 Elle est plus grande que Jupiter, mais beaucoup moins dense.
11:20 Cela signifie que son atmosphère est plus étendue, plus gonflée et plus facile à
11:26 détecter.
11:27 On avait déjà étudié WASP-39b avec le télescope spatial Hubble et on avait détecté
11:33 de la vapeur d'eau dans son atmosphère.
11:35 On voulait donc l'examiner dans des nouvelles longueurs d'onde avec les nouveaux instruments
11:39 du télescope et voir si on en aurait une image plus détaillée.
11:43 Les scientifiques veulent savoir si les spectromètres du JWST parviendront à détecter une molécule
11:52 qu'on n'a encore jamais trouvée dans l'atmosphère d'une exoplanète.
11:56 Une des molécules essentielles à l'apparition de la vie telle qu'on la connaît, le CO2
12:02 ou dioxyde de carbone.
12:04 Sur la Terre, le CO2 est produit naturellement par des processus géologiques et il est vital
12:11 à la croissance des plantes.
12:13 Les premiers résultats arrivent enfin.
12:17 On a vu un pic énorme de CO2, bien visible dans les données.
12:32 Tout le monde s'est congratulé.
12:38 Ça a été un grand moment, car on allait pouvoir étudier en détail la chimie du
12:42 carbone des exoplanètes.
12:44 J'avais un sourire jusqu'aux oreilles.
12:48 Ouais, on a réussi !
12:53 Le spectre contient une autre surprise.
12:56 La première détection de dioxyde de soufre sur une planète située hors du système solaire.
13:02 Le dioxyde de soufre est présent dans la couche d'ozone de l'atmosphère terrestre.
13:09 C'est un gaz crucial qui absorbe une partie du rayonnement ultraviolet nocif pour la Terre.
13:16 La découverte de molécules de ce gaz dans l'atmosphère de WASP-39b est historique.
13:22 Jusqu'à présent, on a pu voir que le JWST fournissait des renseignements remarquables
13:30 sur l'atmosphère des exoplanètes.
13:31 C'est pourquoi tout le monde attend avec impatience de découvrir de nouveaux spectres
13:37 et de nouveaux transits.
13:39 Le JWST pourrait-il également détecter une atmosphère sur une planète rocheuse beaucoup
13:47 plus petite ? Une planète de la taille de la Terre ? Une chose est sûre, ça ne sera
13:54 pas facile.
13:55 On n'a encore jamais détecté la moindre atmosphère autour d'une planète rocheuse.
14:00 Mais le JWST nous offre enfin l'occasion de chercher à le faire sur une petite sélection
14:07 de planètes.
14:08 Dans quelques mois, les scientifiques recevront les premières images d'une planète rocheuse
14:16 et verront s'il est possible de déceler une atmosphère.
14:20 Jusqu'à présent, parvenir à détecter une atmosphère autour de planètes aussi
14:24 petites que la Terre n'était qu'un rêve.
14:26 Le JWST va aussi chercher la présence des briques du vivant beaucoup plus près de
14:35 nous, dans notre jardin cosmique.
14:38 La grande question à laquelle je voudrais que le télescope réponde, c'est y a-t-il
14:44 de la vie ailleurs dans notre système solaire ? Si c'était le cas, ça voudrait dire
14:48 que l'apparition de la vie n'est pas un événement aussi rare que ça.
14:54 Au-delà de la Terre et de Mars, trois objets dans notre système solaire sont des candidats
15:02 sérieux.
15:03 Europe, un satellite de Jupiter, et deux des lunes de Saturne, Encelade et Titan.
15:11 Titan est un candidat très intéressant parce qu'il est entouré d'une atmosphère
15:16 et possède des rivières, des cours d'eau, des lacs et des océans, sauf qu'au lieu
15:20 de contenir de l'eau comme sur la Terre, ils sont remplis de méthane liquide.
15:24 Il y a un cycle similaire à celui de l'eau sur Terre, mais c'est un cycle du méthane.
15:31 Pour les scientifiques, c'est passionnant, parce que si Titan héberge de la vie, celle-ci
15:35 ne ressemblera en rien à celle qui existe sur Terre.
15:38 Elle sera radicalement différente.
15:40 Alors, comment chercher une forme de vie dont on ne sait rien ? C'est un sacré défi.
15:45 Est-il possible que la vie naisse de réactions chimiques dans un liquide qui ne soit pas
15:53 de l'eau, qui n'est pas la polarité de l'eau ? En fait, on n'en sait rien.
16:00 Les chercheurs sont également en quête des ingrédients de la vie telles que nous la
16:05 connaissons, sur Encelade, une autre lune de Saturne, et Europe, une lune de Jupiter.
16:11 Ce sont ce qu'on appelle des monts d'océans, car ils renferment de grandes quantités d'eau
16:15 liquide.
16:16 Imaginez qu'elles contiennent sous leur surface un vaste océan d'eau, protégé de l'extérieur.
16:25 Dans cet océan sous la surface, il pourrait y avoir des cheminées hydrothermales, comme
16:30 on en trouve sur notre planète, et autour desquelles se développent des plantes et
16:34 des animaux.
16:35 Mélanger des composés organiques, une source d'énergie et de chaleur, et ça donne une
16:41 soupe primitive de la vie.
16:43 On ne sait pas ce qu'il pourrait se passer là-bas, mais toutes les conditions sont réunies
16:48 pour qu'on ait envie d'y regarder de plus près.
16:50 Certains biochimistes ont suggéré que c'est dans un environnement de ce type que la vie
16:57 aurait pu naître il y a des milliards d'années sur la Terre.
17:01 Même si on ne découvrait que des bactéries, ce serait vraiment fantastique.
17:06 En 2015, la sonde Cassini survole Saturne, ses anneaux et ses lunes.
17:13 Elle prend cette photo de panaches qui jaillissent de la banquise au niveau du pôle sud d'Ancelade.
17:20 On a vu des dizaines de panaches fins qui s'élevaient du pôle sud d'Ancelade.
17:25 Quand ces photos ont été publiées sur le web, ça a été la folie.
17:30 Sur Ancelade, il y a des endroits où l'océan s'échappe à travers la surface.
17:37 Il passe par des failles et jaillit dans l'espace.
17:41 Donc, c'est sans doute là qu'on a les meilleures chances d'étudier une zone habitable extraterrestre.
17:50 C'est peut-être aussi le cas d'Europe.
17:55 La lune de Jupiter, sillonnée de fractures et de fissures qui pourraient être provoquées par la chaleur d'un océan caché sous sa surface glacée.
18:05 On va chercher des traces d'âge de eau, c'est-à-dire l'eau qu'on trouve sur la Terre,
18:11 mais aussi de gaz comme le méthane, un élément chimique qui donne à penser qu'il pourrait y avoir de la vie,
18:17 car sur la Terre, les bactéries produisent du méthane.
18:22 On n'obtiendra probablement pas d'image directe d'une forme de vie,
18:26 parce qu'on ne peut pas photographier une bactérie avec un télescope.
18:30 Mais on pourra étudier ce que les bactéries produisent.
18:35 L'équipe devra patienter plusieurs mois avant que les résultats des observations lui parviennent.
18:42 Pendant ce temps, le JWST continue d'envoyer des images extraordinaires, comme celle-ci de Jupiter.
18:51 Les anneaux, les lunes, c'est absolument fabuleux.
18:55 Grâce à ces images, on peut aussi explorer tous les objets du système Jovien,
18:59 avec une précision incroyable, et découvrir la composition des glaces et des molécules qui les composent.
19:06 Ou celle-ci.
19:07 La première fois que j'ai vu cette photo, je n'ai pas pensé une seconde que c'était Neptune.
19:11 Pour moi, c'était une planète différente.
19:14 J'ai été sidérée de voir les anneaux de manière aussi détaillée.
19:19 La dernière fois qu'on a vu le système d'anneaux complet remonte à plus de 30 ans,
19:26 quand la sonde Voyager 2 a survolé Neptune.
19:31 Donc on va pouvoir étudier ce système de très près tel qu'il est aujourd'hui,
19:37 et voir s'il a évolué depuis, et comment.
19:42 Ça nous permettra peut-être d'en déduire certaines choses sur les systèmes d'anneaux en général,
19:47 comme leur durée de vie et leur formation.
19:52 Avoir un télescope tout neuf qui vous envoie des données inédites,
19:57 c'est comme quand on est gamin le matin de Noël et qu'on descend l'escalier en se demandant ce qu'on va avoir comme cadeau.
20:05 À chaque fois qu'on reçoit une nouvelle image, on a l'impression d'ouvrir un paquet pour voir ce qu'il y a dedans.
20:11 C'est absolument génial.
20:16 Pour que nous puissions comprendre ces images fascinantes, elles doivent être retravaillées.
20:23 L'œil humain ne voit qu'une partie très étroite du spectre lumineux, du violet au rouge.
20:29 Or il y a de la lumière de chaque côté de ce spectre, et comme le JWST se concentre sur l'infrarouge, il est du côté rouge du spectre.
20:38 Il observe l'univers dans l'infrarouge. Il est sensible à la lumière que notre œil ne voit pas.
20:44 Un développeur en imagerie de données est à la fois informaticien et artiste.
20:52 Son travail consiste à transposer la lumière infrarouge en couleurs que nos yeux distinguent.
21:01 Avec des filtres infrarouges différents, le JWST prend plusieurs images successives du même objet céleste, ici en noir et blanc.
21:11 On a différencié l'infrarouge selon la longueur d'onde du rayonnement.
21:15 Il y a l'infrarouge lointain, l'infrarouge moyen et puis l'infrarouge proche.
21:22 Ces longueurs d'onde infrarouges sont ensuite converties dans les couleurs de l'arc-en-ciel.
21:27 On essaie de respecter la philosophie de colorisation des données, appelée « ordre chromatique ».
21:33 On capture ces longueurs d'onde dans l'infrarouge, puis on les décale vers la partie visible du spectre
21:38 et on leur attribue les couleurs qui représentent les ondes proches à lointaines que notre œil distingue.
21:46 C'est comme une chanson jouée au piano et transposée dans une tonalité différente. Dans les deux cas, la mélodie reste la même.
21:56 La longueur d'onde la plus lointaine sera en rouge. Je l'applique ici.
22:00 Ensuite, j'attribue le vert à la longueur d'onde moyenne et le bleu aux longueurs d'onde les plus proches.
22:07 Dans le cas de cette image, il y a quatre filtres, le dernier étant un filtre de bandes étroites qui isole un type de lumière très spécifique.
22:15 Celui-là est colorisé en orange.
22:18 Après avoir superposé les quatre filtres, j'obtiens une première image colorisée.
22:23 Je vois qu'elle est intéressante, il y a du potentiel, mais elle est aussi très plate et je vais devoir la retravailler.
22:31 C'est l'étape qui fait plus appel à la subjectivité et au sens artistique.
22:37 Les étoiles vont apparaître différemment, la qualité de la nébuleuse va apparaître différemment.
22:42 On ne passe pas tout d'un coup de la science à l'art, c'est progressif.
22:47 Les données scientifiques sont là, on les respecte, on n'essaie jamais d'introduire des choses qui ne sont pas dans l'image et on n'efface jamais des choses qui s'y trouvent.
22:57 Notre objectif est de créer une image belle à regarder, qui fascine les gens et qui, on l'espère, les encouragera à en apprendre plus sur cette région de l'espace.
23:07 Cette image de la nébuleuse de la Tarantule est splendide.
23:13 Mais l'œil infrarouge du JWST révèle aussi la présence de milliers d'étoiles en formation qu'on n'avait encore jamais vues,
23:21 offrant ainsi aux scientifiques de nouveaux éléments pour décoder le cycle de vie des étoiles.
23:27 Quand on regarde un nouveau-né, on a déjà une petite idée de ce à quoi il ressemblera une fois adulte.
23:34 C'est pareil avec les étoiles. En les mesurant au tout début, on peut déduire la façon dont elles évolueront et ce qu'elles deviendront.
23:44 À l'Institut de technologie de Californie, le Caltech, une équipe scientifique internationale a reçu ces données envoyées par le JWST.
23:58 Les chercheurs se sont réunis pour discuter des résultats de ce premier essai avec le nouveau télescope.
24:04 On a une super équipe, avec des gens aux États-Unis, au Japon, en Europe, des jeunes et des vieux.
24:10 Ça fait des années que je connais les astronomes de ce groupe. J'étais encore étudiante. Ils font partie de ma famille.
24:25 Ces deux dernières années, on a dû faire nos réunions sur Zoom.
24:29 Mais forcément, il n'y a rien de tel que l'énergie qui se dégage quand on est tous ensemble dans une même pièce. C'est fantastique.
24:35 L'équipe voudrait comprendre les données que le télescope lui a transmises sur certains des objets les plus mystérieux du cosmos.
24:45 Les trous noirs supermassifs.
24:50 Au centre de toutes les galaxies massives de l'univers, il y a un trou noir énorme.
24:55 Ce qui me plaît dans les trous noirs, c'est qu'ils sont la conséquence les plus extraordinaire de la gravitation.
25:02 La force de gravitation d'un trou noir est telle que tout ce qui tombe à l'intérieur n'en ressort jamais.
25:10 Même la lumière ne peut pas s'en échapper.
25:15 De la matière tombe dedans sans arrêt. C'est pour ça qu'un trou noir est entouré d'un immense disque de poussière et de gaz en rotation qui l'absorbe peu à peu.
25:25 Mais on ne sait pas comment ils sont arrivés là. On ne sait pas comment on fabrique un trou noir supermassif. On ne sait pas comment ils se forment.
25:35 On se pose une grande question à propos des trous noirs supermassifs au centre des galaxies.
25:43 Qui influence qui ? Est-ce la galaxie haute qui contrôle sa propre évolution ?
25:48 Ou est-ce le trou noir qu'elle abrite qui détermine la façon dont elle change au fil du temps ?
25:54 En fait, il semble exister un lien singulier entre un trou noir supermassif et la galaxie qu'il héberge.
26:04 Le rapport entre la masse d'un trou noir et celle de la galaxie haute est de 1 à 1000.
26:11 Ça semble indiquer que la galaxie elle-même connaît la masse du trou noir en son centre.
26:16 Ce n'est pas très logique parce que la sphère d'influence d'un trou noir est si petite qu'il ne peut pas savoir ce qui l'entoure.
26:23 Alors, comment expliquer cette corrélation entre les deux ?
26:28 Il faut garder à l'esprit que certaines étoiles sont tellement éloignées du trou noir qu'elles ne subissent pas directement son influence gravitationnelle.
26:39 Une des meilleures méthodes pour enquêter sur cette relation étrange est d'étudier des galaxies en train de fusionner.
26:46 La fusion de deux galaxies est susceptible de créer un trou noir supermassif parce qu'il se nourrit de cette collision entre les deux galaxies.
26:57 C'est pourquoi l'étude de ce phénomène peut nous aider à mieux comprendre la création d'un trou noir supermassif
27:05 et son interaction avec tout ce qui l'entoure.
27:08 Dans ces galaxies, on a à la fois des trous noirs qui se nourrissent et des étoiles qui se forment.
27:16 Toute cette activité génère une telle quantité de poussière qu'il est presque impossible de voir ce qu'il se passe.
27:25 C'est très difficile d'observer un trou noir à cause de toutes ces poussières et tous ces gaz.
27:33 C'est là que l'œil infrarouge du JWST entre en action.
27:37 J'ai fait mon doctorat dans l'Arizona et de temps en temps on avait une tempête de sable.
27:43 Tous ceux qui ont connu ça savent qu'on ne voit absolument plus rien.
27:47 Mais la lumière infrarouge a une propriété géniale qui lui permet de regarder à travers la poussière.
27:53 Voici une image de deux galaxies en train de fusionner, prise par le télescope spatial Hubble en lumière visible.
28:03 Et voici le même phénomène vu dans l'infrarouge par le télescope spatial Spitzer.
28:09 Sur cette image prise dans l'infrarouge, toute l'énergie vient d'une seule région cachée par le nuage de poussière.
28:16 C'était ça qu'on voulait analyser.
28:19 D'après les scientifiques, quelque part dans cette région se trouve un trou noir en train de se nourrir.
28:26 Mais si Spitzer a été un des télescopes spatiaux les plus perfectionnés de son époque, observant dans l'infrarouge,
28:32 son miroir principal ne faisait que 85 cm de diamètre.
28:36 En comparaison, celui d'Hubble mesure 2,40 m et celui de JWST 6,60 m.
28:43 Donc, Spitzer, la résolution est clairement assez basse.
28:47 Mais si on va voir ce que nous voyons avec les images de la nouvelle James Webb,
28:51 c'est ce que nous voyons quand nous avons un télescope de 6 m de diamètre en l'espace.
28:56 Les spectromètres du JWST voient à travers la poussière et nous dévoilent ces trois points distincts.
29:04 Deux d'entre eux sont des amas d'étoiles en formation.
29:07 Le troisième est probablement un trou noir en plein repas.
29:12 "Le scénario final est que vous pouvez voir exactement ce qu'il y a sur ce giant bloc."
29:18 "Avant, on savait juste que quelque chose illuminait la poussière. Mais quoi ?
29:25 Désormais, on sait qu'il s'agit d'un trou noir supermassif qui, en plus,
29:30 avale la poussière qui se trouve dans son voisinage immédiat."
29:34 "Ca nous permet de voir de très près ce que l'on peut voir dans le milieu de la poussière."
29:40 "Ca nous permet de voir de très près ce qu'il se passe à l'intérieur des galaxies,
29:43 comment les gaz tombent dans le trou noir supermassif
29:46 et quelle influence ce dernier exerce sur la région qui l'entoure."
29:50 "Ce qui me sidère, c'est le degré de précision de ce qu'on voit."
29:57 Les chercheurs pensent que dans les années à venir, ce degré de précision sans précédent
30:05 donnera des indices sur la façon dont s'établit la relation
30:08 entre un trou noir supermassif et sa galaxie.
30:12 Il est tôt ce matin-là à l'Université du Texas à Austin.
30:20 Mais une équipe vient juste de recevoir des images et des données du JWST.
30:25 Le directeur de recherche, Steven Finkelstein, tient journal vidéo de ces travaux.
30:34 "On a eu des hauts et des bas, mais c'était fantastique de découvrir les données quand elles sont arrivées."
30:40 L'équipe teste les capacités du télescope à détecter des galaxies
30:51 distantes de plusieurs milliards d'années-lumière,
30:54 avec pour objectif de répondre à une question
30:57 qui laisse les scientifiques perplexes depuis des décennies.
31:02 Comment les lumières de l'Univers se sont-elles allumées ?
31:05 "On sait que l'Univers est né il y a environ 13,8 milliards d'années,
31:12 et on connaît une grande partie de son histoire.
31:16 Néanmoins, il reste des trous, des blancs, qu'on n'est pas tout à fait capable de combler.
31:21 Or, un de ces blancs correspond au tout premier chapitre de l'histoire de l'Univers.
31:27 On ignore comment les galaxies sont apparues."
31:31 Si l'Univers faisait l'album de son histoire,
31:34 voici ce qui serait la toute première photo de lui bébé.
31:38 Le fond diffus cosmologique,
31:41 le rayonnement fossile du Big Bang,
31:44 quand l'Univers n'avait que 378 000 ans.
31:47 "Il est couvert de petites tâches fondamentales pour notre histoire.
31:53 D'après nos calculs, elles correspondent à des variations de densité.
31:59 C'est important parce qu'on pense que les régions plus denses sont devenues des galaxies et des étoiles,
32:04 et au bout de la chaîne, des planètes et des humains.
32:07 Si on est là, c'est parce que le Big Bang est couvert de petites tâches."
32:12 Mais après…
32:16 "Il manque une pièce du puzzle. Il y a ce…
32:19 qui s'étale sur des centaines de millions d'années."
32:24 Une période mystérieuse baptisée "l'âge sombre de l'Univers".
32:29 "C'est une période de l'histoire de l'Univers
32:33 qui a duré plusieurs centaines de millions d'années, quand les étoiles elles-mêmes n'existaient pas.
32:38 C'était une sorte de brouillard constitué principalement d'hydrogène,
32:44 car les atomes d'hydrogène en suspension renvoient le rayonnement lumineux,
32:48 et on ne voit absolument pas à travers.
32:50 C'est pour ça qu'on parle de "brouillard".
32:54 Sur la photo suivante, l'Univers est en pleine adolescence et il a bien grandi.
33:00 Il est même bourré de galaxies.
33:03 "On a des images de lui à l'adolescence et à l'âge adulte,
33:08 mais il nous manque celle de l'époque où il commence à marcher."
33:11 Il nous manque cette photo où l'âge sombre s'achève
33:17 et où les premières étoiles et galaxies prennent forme.
33:21 C'est une page blanche dans la compréhension de notre histoire cosmique
33:25 que de nombreux chercheurs espèrent écrire un jour.
33:28 Par exemple, l'équipe d'Austin.
33:31 Elle vient de passer une semaine à étudier ces données pour dénicher de très vieilles galaxies.
33:37 "Un groupe a travaillé ici sur les galaxies très lointaines.
33:42 On s'est tous rassemblés autour de l'ordinateur et on les a examinées en disant
33:46 "Celle-ci oui, celle-ci aussi, celle-là non."
33:50 C'est alors qu'il tombe sur cette tâche rougeâtre à peine visible.
33:54 "C'était incroyable. Son décalage vers le rouge est de 14,
33:58 ce qui correspond à 290 millions d'années après le Big Bang."
34:01 Si elle est correcte, cette date confirmera que les instruments infrarouges du JWST
34:08 voient plus loin dans le temps que ceux des télescopes précédents.
34:13 "Ce qu'il y a de fabuleux avec les télescopes,
34:17 c'est qu'ils sont des véritables machines à remonter le temps
34:19 grâce auxquelles on peut voir l'Univers tel qu'il était il y a très longtemps."
34:23 La lumière des galaxies primitives qui arrive jusqu'à nos télescopes
34:27 subit une transformation étonnante.
34:30 Du domaine du visible, elle passe dans celui de l'infrarouge.
34:34 "Ca s'explique par le fait que l'Univers est en expansion,
34:38 ce qui provoque la dilatation de l'espace et un étirement de la lumière."
34:46 Ce phénomène curieux est appelé "décalage vers le rouge".
34:49 Plus ce décalage est élevé, plus la galaxie est âgée.
34:53 "C'est la raison d'être du JWST,
34:56 découvrir les galaxies rouges à peine visibles dont certaines sont les premières à s'être formées après le Big Bang."
35:01 D'après les premiers résultats, l'équipe de Stephen Finkelstein
35:08 pense avoir trouvé une des plus vieilles galaxies jamais observées par l'Homme.
35:14 "Au cours des dernières 24 heures, on a absolument tout essayé pour se convaincre
35:17 que cette galaxie n'était pas une galaxie très lointaine.
35:20 Et on a échoué."
35:22 "En plus, c'est l'anniversaire de ma fille.
35:28 Je vais l'emmener au restaurant et demain, je passerai la journée à rédiger le premier jet de notre article,
35:32 en espérant pouvoir le publier très vite."
35:35 L'équipe la baptise Maisie, en l'honneur de la fille de Stephen, âgée de 9 ans.
35:41 Après cette découverte initiale, d'autres surprises les attendent.
35:44 "Très vite, on a vu qu'on allait en fait trouver énormément de galaxies très lointaines.
35:49 À chaque fois que les données s'affinaient, on en découvrait potentiellement d'autres."
35:53 "On en avait le vertige. On était comme des gosses devant toutes ces galaxies et toutes ces images."
36:02 Maisie n'est qu'une galaxie primitive parmi une myriade d'autres
36:08 que l'on peut voir dans cet extraordinaire mosaïque d'images prises par le JWST.
36:13 "Des galaxies, encore des galaxies. L'image complète en contient environ 100 000."
36:19 "Il n'y a quasiment pas d'espace vide dans les images.
36:24 La moindre place est occupée par une galaxie.
36:27 Et plus on zoom, plus on en voit. Ça n'arrête pas."
36:32 "C'était la galaxie de Maisie.
36:34 C'est ce beau bloc rouge ici.
36:37 On est ravis, car on a énormément de résultats préliminaires.
36:42 Le processus scientifique, c'est, on trouve plein de candidats possibles au titre de galaxies la plus lointaines
36:48 et on étudie leurs propriétés."
36:51 Pour l'instant, Maisie reste une candidate parmi d'autres.
36:55 En effet, son âge est encore incertain,
36:58 car le télescope est encore dans la phase d'alignement de ses miroirs.
37:01 "C'est très important que le télescope soit calibré correctement,
37:05 parce que quand on prend une image d'une galaxie ou d'une étoile,
37:08 la seule chose qu'on mesure, la seule mesure fondamentale,
37:12 c'est la luminosité de l'objet dans différentes longueurs d'onde.
37:15 Il faut donc que ce soit exact."
37:18 C'est justement ce qu'une équipe du Space Telescope Science Institute tente de faire.
37:26 Le résultat sera crucial pour l'avenir du JWST
37:29 et la fiabilité des découvertes faites grâce à ces données,
37:33 à commencer par l'âge de galaxies primitives comme Maisie.
37:37 Les chercheurs observent un amas globulaire baptisé Messier 92,
37:48 un des regroupements d'étoiles les plus brillants et les plus vieux dans la Voie lactée.
37:53 "Ces étoiles sont scrutées depuis des dizaines d'années par tout un tas de télescopes dans le monde entier,
37:58 alors on sait beaucoup de choses sur elles."
38:00 Mais quand les données envoyées par le JWST arrivent…
38:04 quelque chose cloche.
38:10 "Quand on a analysé les données pour la première fois,
38:13 on s'est aperçu que la luminosité des étoiles mesurées par les capteurs
38:18 était légèrement différente sur chaque capteur.
38:22 Sur l'un, elle était plus forte, sur l'autre, plus faible."
38:25 Hakim Oulouchei est astrophysicien.
38:33 Il va faire la démonstration de cet écart
38:36 à l'aide de plusieurs photomètres et d'une ampoule de 100 watts.
38:40 "Imaginons que cette ampoule est l'étoile dont on a régulièrement mesuré la luminosité depuis des décennies,
38:46 donc je connais cette luminosité.
38:49 Je vais pointer ce premier photomètre vers elle et il va afficher un nombre qui correspond à sa luminosité.
38:54 Voilà, je le pointe en direction de mon étoile et j'enregistre la valeur mesurée.
39:01 Ensuite, je fais pareil avec le deuxième photomètre.
39:04 Idem avec le troisième, à la même distance, et j'enregistre la valeur.
39:16 Eh bien, vous savez quoi ? Les relevés sont tous légèrement différents les uns des autres et c'est normal.
39:22 Si on dirige la lumière d'une seule étoile sur plusieurs capteurs,
39:28 il est donc possible que chacun affiche un relevé différent."
39:32 C'est un problème courant que Mike Ressler connaît bien.
39:37 Il a participé au développement des capteurs d'un des instruments du JWST, baptisé MIRI.
39:44 "Les capteurs qu'on utilise sur MIRI sont en silicone
39:47 et ressemblent beaucoup à ceux qui équipent les appareils photo numériques."
39:52 Il suffit de retirer l'objectif.
39:57 Le capteur est cette puce rectangulaire en silicone gris-vert placée derrière l'obturateur.
40:03 "La lumière traverse l'objectif et arrive concentrée en un point sur ce rectangle, c'est-à-dire le capteur.
40:10 Chaque capteur a une personnalité propre.
40:13 L'un peut être plus sensible que l'autre.
40:16 Ils ne réagissent pas tous de la même manière à la lumière."
40:19 MIRI est équipé de trois capteurs comme celui-ci
40:23 et le JWST en compte 18, avec chacun sa personnalité.
40:28 "On fait en sorte que la personnalité du capteur ne dénature pas les données
40:34 qui doivent représenter la réalité de l'univers."
40:38 L'équipe se sert de la luminosité connue des étoiles de Messier 92
40:42 comme référence pour affiner le calibrage du télescope.
40:46 "Une fois que l'instrument est calibré,
40:50 il suffit de le pointer sur n'importe quel objet dont on ignore la luminosité intrinsèque.
40:54 En mesurant sa brillance, on est alors en mesure de déterminer sa distance avec une grande précision.
41:00 On a besoin de ces données pour nos calculs sur l'évolution de l'univers."
41:05 De son côté, l'équipe de Steven Finkelstein a elle aussi amélioré le traitement des données.
41:10 Avec le réglage des instruments, c'est ce qui a permis de préciser l'âge de la galaxie Messier.
41:16 "Cette distance a changé depuis les premières semaines parce qu'on a affiné notre lecture des données.
41:21 On a révisé notre estimation initiale d'environ 300 millions d'années après le Big Bang
41:25 à environ 370 millions d'années."
41:28 Messier n'est donc plus dans le cadre de la recherche de la galaxie.
41:33 "Messier n'est donc plus dans la course pour le titre de plus vieille galaxie jamais observée."
41:38 "C'est un petit jeu entre les chercheurs. Chacun veut découvrir la plus lointaine.
41:43 C'est marrant, mais la véritable avancée scientifique sera de pouvoir étudier les propriétés des galaxies de façon plus détaillée.
41:50 Quelles couleurs et quelles formes ont-elles ? Quelles sont les particularités de leurs étoiles ?
41:55 C'est bien plus intéressant que de remporter un record."
42:00 Le JWST explore le cosmos 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
42:05 Les spécialistes des exoplanètes, Kevin Stevenson et David Singh,
42:10 s'apprêtent à recevoir des données d'une des missions les plus complexes du télescope.
42:15 Détecter l'atmosphère d'une exoplanète rocheuse, ce qu'aucun autre instrument n'a jamais pu observer.
42:22 L'équipe a sélectionné l'exoplanète GJ486b.
42:27 D'après les estimations, elle est environ 30% plus grande que la Terre,
42:32 mais elle reste minuscule comparée à Jupiter ou à une autre géante gazeuse comme WASP-39b.
42:39 Ce qui rend l'observation de son atmosphère d'autant plus difficile.
42:45 Mais alors, face à la multitude de planètes rocheuses, pourquoi ce choix ?
42:49 "Elle n'est qu'à 26 années-lumière de nous, autant dire dans notre voisinage immédiat."
42:55 Compte tenu de la taille de l'univers, c'est même la porte à côté.
43:00 En outre, cette exoplanète est en orbite autour d'une naine rouge, une étoile plus petite que la Terre.
43:08 "Etudier des planètes rocheuses semblables à la Terre implique qu'on ne peut pas changer la taille de la planète.
43:13 On vise donc les objets en orbite autour des étoiles les plus petites."
43:18 "C'est une des rares planètes rocheuses sélectionnées autour de laquelle on a une chance de trouver une atmosphère."
43:26 L'expérience de GJ486b a été une expérience de la vie.
43:32 Les deux chercheurs vont pouvoir tenter d'établir la présence d'une atmosphère.
43:36 Pendant plusieurs jours, ils analysent les observations, chacun par une méthode légèrement différente.
43:42 Les résultats de Kevin et de Kevin sont très intéressants.
43:47 "On a une planète qui est en orbite autour de la Terre, et on a une chance de trouver une atmosphère."
43:53 "On a une planète qui est en orbite autour de la Terre, et on a une chance de trouver une atmosphère."
44:00 Les résultats de Kevin semblent prometteurs.
44:03 "Il y a beaucoup de paramètres à vérifier pour être sûr de la validité du résultat."
44:10 "Mais pour l'instant, je dirais... peut-être."
44:15 "Ce serait super."
44:20 Étape suivante, les membres de l'équipe se réunissent pour comparer leurs résultats.
44:25 "Êtes-vous enthousiastes?"
44:28 "Excellent. Ok. Bien, voyons la transmission spectrale."
44:32 En poursuivant son analyse des données, David n'a finalement pas trouvé la signature chimique d'une atmosphère.
44:39 "Il est possible qu'elle n'ait pas d'atmosphère."
44:43 "Et dans ce cas, le spectre dessine une ligne plate."
44:47 "Du coup, on discute beaucoup pour déterminer si elle est vraiment plate ou pas."
44:52 Si la ligne est plate, c'est que la signature chimique de la luminosité de l'étoile n'a pas changé quand la planète est passée devant elle.
45:00 Kevin, lui, a détecté un décalage infime.
45:13 "Celui-ci est assez consistent avec l'eau."
45:17 La présence d'eau pourrait signifier que la planète a bien une atmosphère.
45:26 "Je pense que l'atmosphère est toujours sur la table. Si je me suis mis à prendre une preuve, je pense que c'est probablement une ligne plate, mais c'est proche."
45:37 Il faudra encore des mois d'études et d'observations pour savoir si GJ 468 b possède bel et bien une atmosphère.
45:45 "On commence tout juste à exploiter les capacités du télescope et la précision de ses instruments."
45:55 "On espère bien réussir à obtenir des signaux de l'ordre de dizaines de parties par million."
46:06 "On n'a pas encore la réponse, mais on ne peut pas dire que le spectre de transmission soit totalement plat alors. On reste optimistes."
46:13 "Un optimisme prudent."
46:16 Et qu'en est-il de la présence des éléments essentiels à la vie, dans notre système solaire ?
46:23 Les nouvelles observations d'Ancelade et d'Europe, par le JWST, sont parvenues aux chercheurs.
46:32 Ils ont commencé à analyser les données, pixel par pixel, établissant des cartes chimiques de ces deux mondes mystérieux.
46:40 C'est en examinant les panaches qui s'échappent de la surface d'Ancelade qu'ils ont découvert quelque chose d'étrange.
46:49 "C'est un panache gigantesque, 40 fois plus grand qu'Ancelade elle-même."
46:56 Pour mettre cela en perspective, ce pixel rouge fait à peu près la taille d'Ancelade.
47:02 "Le pixel est même plus grand qu'elle."
47:05 Et les pixels bleus tout autour sont la vapeur d'eau du panache.
47:11 "Ce n'est pas possible, c'est trop grand par rapport à la Lune."
47:15 Or, ce panache gigantesque pourrait être bourré d'indices sur la présence des ingrédients nécessaires à la vie, dans l'océan qui s'étend sous la surface glacée.
47:26 "On va chercher du dioxyde et du monoxyde de carbone, puisque pour chaque pixel de l'image, on a un spectre complet."
47:32 Les scientifiques ont également été surpris par Europe, dont la surface s'avère beaucoup plus complexe qu'ils ne le pensaient.
47:42 "C'est sur la surface, on voit toute cette composition sur la surface qui nous parle.
47:47 Et on a un spectre pour chaque pixel, donc on peut voir ce qui est fait. Je pense que cette information va être super cool."
47:54 "On voit des choses à la surface qu'on n'avait jamais vues avant. La glace change et on a détecté de nouvelles signatures de glace.
48:03 Il faudra aller sur place pour creuser, il n'y a que comme ça qu'on saura.
48:08 Pour le moment, le processus d'exploration est lent, molécule par molécule, et il y en a peut-être des centaines d'autres cachées sous la surface, derrière chaque pixel."
48:17 Geronimo Villanueva et son équipe vont consacrer les prochains mois à l'examen de ces pixels, traquant les briques élémentaires sur Europe et en Slade.
48:35 Pendant ce temps à Austin, les chercheurs ont reçu de nouvelles données des spectromètres du JWST.
48:41 "Les spectres nous renseignent sur la chimie et la physique des galaxies, sur le nombre d'éléments lourds qui ont été produits.
48:50 Ils donnent l'âge d'une galaxie et le taux de formation des toiles.
48:54 Toutes ces informations matérielles essentielles sont visibles dans les spectres."
48:59 Des spectres qui réservent de nombreuses surprises.
49:05 "Une des choses qui m'a frappée dans les spectres des galaxies qui montrent un décalage élevé vers le rouge,
49:10 c'est la quantité des détails contenus dans les données, comme la signature d'éléments plus lourds, même dans ce type de galaxies très lointaines."
49:18 "On n'avait encore jamais eu d'informations aussi précises sur des galaxies nées au cours des premiers 500 millions d'années.
49:32 Non seulement on les découvre, mais en plus on est en mesure de les analyser.
49:36 C'est absolument passionnant."
49:39 Mais cela soulève aussi de nouvelles questions.
49:43 Car la découverte d'éléments lourds dans des galaxies aussi vieilles,
49:47 sous-entend que l'Univers s'est peut-être allumé beaucoup plus rapidement qu'on ne le pensait.
49:55 "Le fait qu'on voit de nombreuses galaxies très lointaines, mais également des galaxies plus riches en éléments chimiques à la même période, est assez mystérieux.
50:03 Pourquoi des étoiles se seraient-elles formées plus tôt ou plus rapidement qu'on ne le pensait ?
50:09 Le processus de formation des étoiles est plus efficace, il se produit plus vite qu'on ne le supposait."
50:15 "On avait fait des modélisations de la formation des galaxies primitives, et du temps que ça avait pris.
50:24 Mais le JWST les a fait voler en éclats.
50:27 On s'est aperçu que nos modélisations étaient... un peu lentes par rapport à la nature."
50:34 "On observe plus de choses que ce que nos modélisations avaient prédit.
50:42 Donc on s'est trompé quelque part.
50:44 Et on va devoir revoir ces modélisations de la formation des galaxies anciennes pour qu'elles correspondent aux nouvelles observations."
50:52 À chaque lancement d'un nouveau télescope, notre image de l'univers se précise.
50:57 "Avec des yeux tout neufs, on découvre des choses inédites.
51:01 C'est exactement ce qui se passe en ce moment.
51:04 C'est presque comme si on découvrait une Terre ou une planète nouvelle.
51:07 Avec le JWST, on découvre un univers nouveau."
51:11 Le premier chapitre de l'exploration de l'univers par JWST a montré combien ce télescope était révolutionnaire.
51:20 "À chaque fois qu'on le pointe vers quelque chose de nouveau, c'est la surprise.
51:23 Le JWST ne nous a pas déçus.
51:26 Il fait ce qu'on pensait qu'il ferait, et même plus."
51:30 "On a construit un télescope capable de bien d'autres choses encore.
51:36 Et on est très loin d'avoir exploré toutes ces possibilités.
51:40 Les deux prochaines années s'annoncent absolument géniales.
51:43 Je pense vraiment qu'on n'a encore rien vu."
51:47 "Je pense vraiment qu'on n'a encore rien vu."
51:50 "La Terre"
51:55 "La Terre"
51:58 "La Terre"
52:02 "La Terre"
52:05 "La Terre"
52:12 "La Terre"
52:30 "La Terre"
52:33 "La Terre"
52:37 "La Terre"
52:42 "La Terre"
52:47 "La Terre"