• l’année dernière
-La 39e campagne des Restos du cœur est lancée aujourd'hui. Il y a deux mois, son président Patrice Douret lançait un appel à l'aide, mais finalement ce qu'il redoutait arrive : cette année, il va devoir refuser des gens... Le chef étoilé Thierry Marx est lui aussi engagé auprès des Restos. Il a encore parrainé il y a quelques mois le premier car du cœur, qui va à la rencontre des personnes en difficulté.
Regardez L'invité de RTL Soir du 21 novembre 2023 avec Marion Calais et Julien Sellier.

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00:02 Julia Selyer, Marion Calais et Cyprien Signy.
00:07 RTL bonsoir jusqu'à 20h.
00:10 Allez RTL bonsoir avec maintenant nos invités
00:12 événements aujourd'hui le président des Restos du Coeur bonsoir Patrice Dourais.
00:16 Bonsoir.
00:17 Et le grand chef étoilé engagé depuis des années d'ailleurs aux côtés des restos.
00:21 Bonsoir Thierry Marx.
00:22 Bonsoir.
00:22 La 39e campagne des restos est lancée aujourd'hui.
00:25 Patrice Dourais il y a deux mois vous lanciez un appel à l'aide mais
00:29 finalement on a la sensation que ce que vous redoutiez
00:32 arrive c'est à dire que cette année vous allez devoir refuser des gens.
00:36 Oui malheureusement c'est un constat que l'on fait aujourd'hui c'est que les prévisions nous avions
00:40 il y a deux mois c'est à dire
00:42 la nécessité de refuser des personnes à qui nous aurions dû dire oui et là.
00:46 On n'a pas encore exactement aujourd'hui de chiffres précis et on les communiquera quand ils seront fiables.
00:51 Ce qui est certain c'est que la vague ne faiblit pas, la précarité est toujours là, elle est grandissante.
00:56 Alors cette incapacité à aider tout le monde RTL l'a constaté dans un de vos centres à
01:01 Comblaville en Seine-et-Marne c'était notre RTL événement ce matin extrait.
01:06 Est-ce que vous avez encore les dettes ?
01:08 On n'a pas de dettes, il n'y a pas.
01:09 Les éléments enregistrés permettent pas une distribution cet hiver.
01:14 C'est très intrusif pour les gens, on a l'impression qu'on les "fliques" entre guillemets.
01:18 On a des gens quand même qui ne sont pas toujours à l'aise avec les papiers.
01:22 Tout à l'heure j'ai eu une dame, j'ai lui dit dix fois que j'avais besoin d'un papier, elle ne comprenait pas.
01:26 Elle me dit "non mais c'est telle somme, c'est telle somme"
01:28 J'ai dit "mais non, j'ai besoin d'un papier"
01:29 "Oui mais je vous dis que c'est deux cents"
01:31 "J'ai besoin d'un papier"
01:33 C'est dur hein !
01:34 Les personnes à qui vous devez dire non aujourd'hui au resto, elles ont quel profil ?
01:38 Elles ont tous les profils, que ce soit les retraités qui viennent nous voir parce qu'eux
01:42 effectivement ils ont épuisé leur petite réserve notamment en aidant les enfants et les petits-enfants
01:46 pendant la crise sanitaire, mais c'est beaucoup de jeunes.
01:49 50% des personnes qu'on accueille ont moins de 25 ans.
01:51 C'est terrible.
01:53 C'est un chiffre encore plus terrible, 126 000 bébés, c'est déjà 15% de plus que ce qu'on a constaté il y a quelques mois.
01:59 C'est à dire qu'aujourd'hui nous avons des enfants qui si l'on n'y fait rien là aussi, seront demain les adultes précaires
02:06 que l'on accueillera dans nos centres des restos du coeur.
02:08 C'est plus acceptable.
02:10 Dans ces conditions, plus que jamais, j'imagine que pour vos bénévoles, on l'a d'ailleurs en partie entendu,
02:15 c'est un crève-coeur de dire non aujourd'hui.
02:18 Oui, c'est terrible parce qu'on n'est pas là nous bénévoles pour dire non.
02:23 Et on aurait tellement aimé ne pas le faire.
02:25 Il y a l'aspect financier qui compte beaucoup, mais il y a l'aspect opérationnel aussi.
02:29 Un centre qui accueille 1000 familles et qui demain en accueille 1300,
02:32 il n'a plus la capacité, nos bénévoles n'ont plus la capacité de les accueillir dignement.
02:36 Et il est hors de question pour nous d'être uniquement des distributeurs de nourriture.
02:41 On a aussi la nécessité, le devoir d'écouter, d'accueillir, d'accompagner les personnes
02:46 vers tout un tas d'autres activités que l'on réalise chez nous,
02:49 que ce soit le soutien à la recherche d'emploi, l'insertion, etc.
02:52 Mais on a surtout l'obligation, et c'est pour ça que les personnes viennent chez nous,
02:56 de les écouter et prendre le temps de le faire, ce n'est plus possible
02:59 quand on a un tel niveau de hausse en si peu de temps.
03:02 Thierry Marx, vous qui êtes engagé auprès des restos, vous avez encore parrainé d'ailleurs il y a quelques mois
03:06 le premier "Cart du coeur" qui va à la rencontre de personnes en difficulté.
03:10 Quand vous entendez ce constat, ces chiffres, 126 000 bébés bénéficiaires, qu'est-ce que vous ressentez ?
03:15 Le "Cart du coeur", je ne peux pas employer d'autres mots, c'est d'abord, 1) de rester...
03:20 Pourquoi je reste très proche des restos du coeur ? Parce que les restos du coeur nous font encore faire peuple.
03:25 Nous rassembler, même dans la précarité. Ça c'est important.
03:28 Et 2) l'interrogation et le "Cart du coeur" que nous ressentons, c'est de dire
03:32 comment, en 30 ans, nous ne réfléchissons pas sur nos modèles économiques
03:36 qui sont devenus des modèles d'exclusion.
03:38 Et une société qui, en permanence, exclut une grande partie de sa population,
03:42 ça devient une société extrêmement dangereuse, finalement, et inquiétante.
03:46 Vous faites référence au premier lancement il y a 39 ans.
03:50 Je voudrais vous faire écouter à tous les deux cet archive de Coluche. Nous sommes là en 1986.
03:54 Bon, on a confiance ou on n'a pas confiance, ça dépend.
03:58 Mais en tout cas, on sait quelque chose, c'est qu'il y a officiellement 600 000 personnes
04:02 qui n'ont pas à bouffer en France, tous les jours.
04:04 Et les mecs vous disent ça comme un chiffre, et quand on leur demande
04:08 ce qu'ils vont faire pour ça, ils disent "je sais pas".
04:12 Alors nous on sait et on le fait.
04:14 On entend Coluche. Comme on a réentendu très récemment l'appel de l'abbé Pierre
04:18 à l'occasion de la sortie du film, Thierry Marx, vous qui avez commencé comme bénévole au resto
04:22 aux portes de la Villette, vous qui avez grandi dans des quartiers populaires
04:24 et notamment à Ménilmontant à Paris, vous vous dites quoi ?
04:27 "Mais en 39 ans, rien n'a bougé, c'est pas possible ?"
04:29 Mais en 39 ans, effectivement, rien n'a bougé.
04:31 Les modèles économiques ne se sont pas réformés, parce qu'il y a une vraie réforme de fonds
04:36 si on prend ce que disait Marx, par exemple, pas moi, celui qui avait plus de cheveux,
04:41 il disait "le capitalisme est efficace mais il n'est pas juste".
04:43 Donc comment on peut faire en sorte que les choses deviennent plus justes
04:46 pour que cette fracture sociale, aujourd'hui, ce sont deux murs qui s'opposent.
04:50 Et dans cette précarité, c'est installer une précarité, une alimentation à deux vitesses,
04:55 une alimentation pour des gens qui vont plutôt bien, et tant mieux pour eux,
04:58 et puis une alimentation pour des gens qui vont mal.
05:00 Donc quand vous parlez de précarité, on a une précarité de tout.
05:03 Vous avez une précarité alimentaire, vous avez une précarité énergétique,
05:06 vous avez une précarité de santé, et vous avez une précarité d'éducation.
05:10 On a parlé de bébés, des adultes de demain, qui aujourd'hui sont touchés par cette précarité,
05:14 et qui en feront des personnes inégaux et différents face à la vie qu'ils vont devoir mener.
05:20 Et ça, c'est plus supportable.
05:22 Il faut réviser nos modèles économiques pour que ces sociétés soient beaucoup plus inclusives.
05:26 Alors il y a un appel qui a été entendu quand même, Patrice Doré, celui que vous aviez lancé il y a deux mois.
05:32 Il vous manquait 35 millions d'euros, l'État, les entreprises ont mis la main à la poche,
05:37 mais visiblement, malgré tout, vous êtes toujours sur un fil.
05:40 Vous manquez de quoi aujourd'hui ? De dons ? D'argent ? De bénévoles ?
05:44 Oui, très clairement, l'appel que l'on a envoyé le 3 septembre a été entendu, c'est clair.
05:49 Sauf que depuis, il s'est passé l'été. L'été, c'est un million de personnes qui ont été accueillies.
05:53 C'est bien plus que ce qu'on ne fait d'habitude sur cette période-là.
05:57 Des moyens financiers, on a encore quelques incertitudes.
05:59 60% des dons que nous recevons, c'est novembre et décembre.
06:03 Donc quel sera le niveau de dons que les Français pourront, et ils sont extrêmement généreux,
06:07 et je les remercie par votre antenne, mais quel sera ce niveau de dons sur la fin de l'année ?
06:11 Quel sera le niveau des personnes inscrites au Restos du Coeur ?
06:15 Juste pour terminer, je vous pose la question à tous les deux.
06:18 On a évoqué Coluche, on a évoqué l'abbé Pierre pendant cet entretien.
06:22 À l'époque, on avait la sensation que ses appels touchaient extrêmement fortement l'opinion publique,
06:28 mais aussi les décideurs.
06:31 Est-ce que vous avez la sensation que malheureusement, aujourd'hui, on s'est habitué à la précarité ?
06:35 Qu'elle s'est banalisée, et que quelque part, vos mots, ceux que vous tenez aujourd'hui, ils pèsent moins ?
06:41 Non, je pense que notre appel a été entendu.
06:43 Ça a été un choc aujourd'hui de pouvoir penser que même les Restos du Coeur, et je le rappelle,
06:47 si notre appel a été entendu si fortement, c'est bien parce qu'à un moment donné,
06:51 on pensait que les Restos du Coeur étaient installés dans les murs.
06:54 Mais non, nous ne sommes pas une institution, nous sommes une association,
06:57 avec 73 000 bénévoles et qui accueille 1 300 000 personnes,
07:00 et 171 millions de repas distribués.
07:03 Donc, je pense qu'aujourd'hui, il faut refuser cette fatalité.
07:07 C'est plus acceptable chaque année d'égrener des chiffres en hausse.
07:10 On ne peut pas considérer ça, 171 millions de repas.
07:13 Vous n'êtes jamais fataliste, Thierry Marx ?
07:15 Non, jamais.
07:16 Et c'est vrai, l'exclusion sociale, la précarité, il faut des fois 4 ou 5 générations pour s'en sortir.
07:23 C'est colossal.
07:24 Ce qu'il faut dire sur les Restos du Coeur, c'est qu'il y a un lien social extrêmement fort.
07:27 Et encore une fois, quand on entend encore la voix de Coluge,
07:30 quand on entend la chanson qui a été faite autour de cela,
07:34 vous sentez que vous êtes capable de mobiliser.
07:36 Mais on est sur cette mobilisation, il va falloir aller sur le fond.
07:39 Mais cette précarité, elle naît bien souvent de notre surconsommation,
07:42 fait énormément de gens extrêmement riches et elle fabrique énormément de gens extrêmement pauvres.
07:47 Chaque individu, chaque citoyen, finalement, ceci, finit par se dire
07:51 "Pourquoi pas moi ? Pourquoi moi, dans mon entourage, je n'ai pas quelqu'un qui peut tomber ?"
07:55 C'est ce que vous constatez dans vos centres,
07:57 des gens qui ne pensaient pas pouvoir tomber dans la précarité
08:00 et qui se retrouvent au Restos du Coeur.
08:02 C'est probablement ce qui est le plus visible aujourd'hui,
08:04 c'est que nous avons des personnes qui viennent nous voir,
08:06 vous parliez de profil tout à l'heure, mais ce sont des personnes qui,
08:09 jusqu'à il y a quelques mois, avaient une vie, j'allais dire normale,
08:12 si toutefois on peut employer ce mot-là, mais un emploi, un logement, une vie de famille,
08:16 et qui aujourd'hui, viennent au Restos du Coeur,
08:18 parce qu'effectivement, le coût de tout ce qu'elles achètent,
08:21 de tout ce que nous achetons, de crise énergétique, fait qu'on ne s'en sort pas.
08:25 Et 38% des personnes qui viennent nous voir aujourd'hui,
08:29 une fois que le loyer est payé et que les charges de logement,
08:32 quelques factures d'électricité, de gaz, sont payées,
08:34 il n'y a plus un seul euro pour finir le mois.
08:37 C'est ça qui est terrible, c'est que c'est une bascule, et on ne mesure pas la fin.
08:41 Moi, je suis incapable de prédire les semaines et les mois qui arrivent,
08:45 qui aurait pu prévoir il y a trois ans une crise sanitaire,
08:48 puis un conflit en Europe, puis aujourd'hui,
08:50 quelques difficultés aussi dans certains pays. Personne.
08:53 Merci beaucoup Patrice Douvrez, vous le président des Restos,
08:55 merci Thierry Marx, vous le chef étoilé, d'avoir été nos invités événement dans RTL,
08:59 bonsoir, alors que s'ouvre la 39e campagne des Restos du Coeur, merci.
09:02 RTL, bonsoir.
09:04 Et la suite c'est dans un instant, avec tout d'abord RTL Inside.
09:07 Et avec le salon des maires, nous allons faire nos emplettes
09:11 et acheter des feux de circulation, des ronds-points, des drapeaux,
09:14 bref, tout ce qui peut servir à une commune.
09:16 Et puis il y aura une nouvelle visoconférence,
09:18 Alex, qui va bénéficier de votre bienveillance ce soir ?
09:21 Bien vous tous, puisque vous allez connaître les comportements
09:23 qui au travail peuvent énerver vos collègues.
09:25 Très bien, tout de suite ce sera pratique pour le bureau.
09:28 RTL, bonsoir, jusqu'à 20h.
09:32 [SILENCE]

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