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Marc Levy est aujourd’hui l’invité de Télématin. Il sort un nouveau roman : « La symphonie des monstres ».

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00:00 50 millions de livres vendus dans le monde,
00:03 des ouvrages traduits en 50 langues.
00:05 Il nous présente ce matin son 25e roman.
00:07 - Bonjour, Marc Lévy. - Bonjour.
00:09 Bienvenue. Ce nouveau roman s'intitule
00:11 "La symphonie des monstres",
00:12 édité chez Robert Laffont Versilio.
00:15 Alors, ce livre, c'est un thriller géopolitique, Marc.
00:19 Je vous disais juste avant qu'on démarre cette émission,
00:22 c'est du léguer pur juif.
00:23 C'est vraiment...
00:24 Vous êtes le maître pour nous tenir en haleine.
00:27 On démarre, il faut prévoir quelques heures,
00:29 vous ne pourrez pas vous arrêter.
00:30 Et en même temps, c'est un livre fort, puissant,
00:32 puisqu'il se déroule de nos jours, en pleine guerre d'Ukraine.
00:35 Il traite de l'enlèvement d'enfants ukrainiens par la Russie.
00:38 Donc, c'est un roman.
00:39 Les personnages sont inventés, le petit garçon,
00:42 le petit Valentin Neuvent, le petit garçon ukrainien,
00:44 la maman qui va avec sa fille, sa grande-fille adolescente.
00:49 On ne va pas en dire trop, mais ils vont essayer de le retrouver.
00:51 Donc, tout ça, ce sont les personnages inventés.
00:54 Mais les faits sont vrais, Marc. C'est une réalité en 2023.
00:57 Oui, c'est une histoire vraie.
00:59 C'est un roman d'amour et de courage et de résistance,
01:03 mais qui est ancré dans une réalité.
01:05 Entre 40 000 et 80 000, les estimations,
01:07 entre 40 000 et 80 000 petits enfants ukrainiens
01:10 ont été arrachés à leur famille,
01:12 ont été embarqués, emmenés en Russie.
01:15 Pourquoi ? C'est quoi le but ?
01:18 Le but, c'est une entreprise génocidaire.
01:21 C'est-à-dire que le but, c'est de faire disparaître la culture ukrainienne.
01:25 Par exemple, ça paraît être fou,
01:27 mais les Russes bombardent les cimetières...
01:29 Enfin, les Russes... La Russie de Poutine.
01:32 C'est très important de faire la distinction.
01:35 La Russie de Poutine bombarde les cimetières
01:36 dans lesquels reposent les artistes ukrainiens
01:39 du 17e, 18e, 19e,
01:41 pour faire disparaître toute trace de l'Ukraine.
01:43 De mémoire.
01:44 Toute trace de l'existence.
01:45 C'est-à-dire qu'en fait, comment vous dire ?
01:49 La civilisation de l'Ancienne Égypte, elle n'existe plus,
01:52 mais vous ne pouvez pas nier son existence
01:53 devant les pyramides et les sphinxes.
01:55 Et là, l'entreprise de Poutine,
01:57 c'est de faire en sorte que l'Ukraine n'ait jamais existé.
02:00 Donc, il y a plusieurs façons de faire ça.
02:02 Il y a d'abord la guerre, tuer les gens.
02:05 Ensuite, faire disparaître toute trace de la culture,
02:08 réécrire les livres d'histoire et de géographie,
02:10 parce que comme le disait Orwell,
02:12 "Celui qui réécrit le passé contrôle l'avenir",
02:14 et faire disparaître la génération
02:17 qui donnera naissance à une génération d'après.
02:20 Donc, en kidnappant...
02:24 Le projet de Marielle Vova-Bélova, qui est l'auteur de ce programme,
02:26 c'était de kidnapper 700 000 enfants.
02:28 - Alors, vraiment, elle existe, cette dame ?
02:30 - Oui, elle existe. - On va voir son visage.
02:31 Donc, elle est avec Poutine.
02:33 Ils sont à l'origine de ce plan, on va dire, machiavélique, en fait.
02:36 - Elle est à l'origine de ce plan et elle a convaincu Vladimir Poutine
02:39 de l'intérêt de ce plan
02:41 dans la stratégie entreprise par Vladimir Poutine.
02:44 Et donc, le plan, c'était d'enlever 700 000.
02:46 Alors, la réalité des chiffres est différente.
02:48 Ils en ont enlevé à ce jour...
02:50 Enfin, il y en a 39 996 recensés.
02:52 Et on estime, puisque les enfants d'orphelins
02:55 ne sont pas recensés, qu'il y en a 80 000.
02:57 Mais quand j'étais à Kiev, il y a quelques semaines,
02:59 j'ai fait une rencontre avec le directeur...
03:02 le responsable des droits de l'homme,
03:04 et le chiffre était celui-là, et 996 enfants avaient été retrouvés.
03:08 Donc, voilà. Pourquoi kidnapper ces enfants ?
03:10 Parce qu'on les kidnappe pas pour les...
03:12 Je dis "on les kidnappe pas pour les tuer".
03:15 On les kidnappe pour les emmener dans des écoles et des pensionnats
03:17 où on va les rééduquer,
03:19 on va leur faire croire que leurs parents sont morts
03:20 ou que leurs parents les ont abandonnés
03:22 ou qu'ils ne veulent plus d'eux.
03:23 Et ensuite, on va les donner à des familles
03:25 en ayant changé leur nom et en ayant fait deux dérus.
03:28 Donc, en fait, l'idée de Poutine, c'est simple,
03:30 c'est "je fais disparaître toute une génération d'Ukrainiens,
03:32 et il n'y en aura plus après".
03:34 - Dans vos précédents romans, notamment la trilogie des Neufs,
03:38 Marc, il me semble que vous disiez
03:39 "toute ressemblance avec des personnages ayant existé", etc.
03:42 - Et après, dans le troisième, j'avais fait un clin d'œil,
03:44 j'avais mis "toute ressemblance avec des personnages ayant existé",
03:48 trois petits points et j'avais mis "oh et puis merde".
03:50 - Ok, et puis merde.
03:51 Sauf que là, vous avez franchi un palier supplémentaire
03:53 puisqu'on entend, on lit le nom de Poutine,
03:56 vous le citez comme un dictateur dans ce livre, etc.
04:00 Vous risquez quelque chose ?
04:02 Est-ce que les avocats de Robert Laffont ont vérifié ?
04:04 Je pense qu'il a autre chose à faire.
04:05 - Non, non, dans ce genre de cas,
04:07 on risque plus le théopolonium qu'un procès.
04:10 Non, non, Poutine ne fait pas de procès.
04:11 Poutine emprisonne ou fait assassiner ses opposants.
04:16 - Mais vous n'êtes pas posé la question en vous disant
04:18 "est-ce que je risque quelque chose ?"
04:20 Parce que ça en valait la peine, il fallait absolument ce livre,
04:23 il dénonce pour qu'on ne puisse pas dire
04:24 qu'on n'était pas au courant de ce qui se passe actuellement.
04:28 - Écoutez, dans cette époque où on ne sait plus à quoi croire,
04:33 où vous voyez l'information et la désinformation
04:35 se télescopent en permanence,
04:37 je trouve que le roman joue un rôle très important
04:39 parce que le rôle, le roman ne nous impose rien.
04:41 Le roman, comme vous l'avez dit, c'est un thriller,
04:45 c'est l'histoire de cette maman qui est infirmière,
04:47 c'est l'histoire de cette jeune fille
04:48 qui est en pleine crise d'adolescence,
04:50 c'est l'histoire de ce petit garçon de 9 ans
04:52 et c'est ces trois amours immenses qui se retrouvent égarés
04:55 sur les routes de la liberté et qui vont tout faire pour se retrouver.
05:00 Mais ce qui nous relie au contexte dans lequel ils sont,
05:05 c'est l'empathie qu'il provoque chez nous.
05:08 Je regardais avec beaucoup de joie une série que j'ai beaucoup aimée
05:13 qui s'appelle "Toutes les lumières que l'on ne voit pas",
05:16 qui est adaptée d'un roman que j'avais encore plus aimé.
05:20 L'histoire de cette jeune fille qui est aveugle
05:24 et qui transmet des messages à la résistance
05:27 par une radio depuis un grenier,
05:29 tout ça peut paraître très sinistre et très glauque
05:31 pendant la Deuxième Guerre mondiale,
05:32 mais l'humanité de cette jeune fille,
05:34 l'humanité des résistants autour d'elle,
05:37 ça me donne envie, moi, de résister.
05:39 Je trouve que ce sont des romans,
05:42 je ne suis pas en train de faire la pub pour mon roman,
05:44 mais je trouve que les romans de résistance,
05:48 c'est des romans qui ont une importance aujourd'hui,
05:52 parce que tout est fait pour nous faire croire à la fatalité.
05:56 Quand je travaillais avec "Jean-Christophe Fuffin, action contre la faim",
06:00 on entendait des gens qui nous disaient
06:02 "ça ne sert à rien de donner pour la faim,
06:03 de toute façon, la faim, ça existera toujours, ça a toujours existé".
06:06 Or, le message a changé,
06:09 les gens se sont rendus compte que la faim dans le monde,
06:10 ce n'était pas une fatalité, mais c'était une maladie qui se soignait.
06:13 Et aujourd'hui, il y a eu des progrès énormes.
06:15 Donc voilà, je trouve que c'est un roman,
06:17 je crois que l'amour qu'on ressent pour ce petit garçon,
06:21 qui a un imaginaire incroyable.
06:22 Il est courageux, il est méga courageux.
06:24 Il se croit qu'il ne se rend même pas compte qu'il est courageux.
06:26 Du haut de ses 9 ans, évidemment.
06:27 Il a une imagination dingue, et au lieu d'avoir peur,
06:31 pardon, au lieu d'avoir peur, il plonge dans son imagination
06:34 et il n'a qu'une envie, c'est de s'évader.
06:36 Une question marque importante, on va voir quelques photos
06:38 du Salon du Livre de Moscou en 2020, je crois.
06:41 Vous êtes très populaire en Russie.
06:43 On est d'accord que là, alors d'abord,
06:45 est-ce qu'il va sortir en Ukraine et en Russie, ce livre ?
06:48 Et deuxièmement, est-ce que vous pensez
06:49 que vous allez pouvoir remettre les pieds sur le sol russe
06:50 pour aller faire des dédicaces de ce livre ?
06:52 À mon avis, non.
06:53 Alors, le roman en Ukraine, oui, il sort,
06:55 il va sortir en février et je vais faire une...
06:58 Bien sûr, je vais aller à Kiev pour faire une signature.
07:00 En Ukraine, en Russie, alors mon éditeur russe qui est en exil
07:04 avait réussi à faire sortir "Noah",
07:05 ce qui était déjà un tour de passe-passe.
07:07 Il est évident que celui-là, il ne peut pas.
07:09 Alors, on a pris une décision qui est,
07:11 le roman va être mis en ligne gratuitement en russe
07:15 pour les Russes.
07:16 C'est une décision importante.
07:17 C'est un vrai acte fort.
07:20 Oui, mais c'est pas pour me la péter et jouer...
07:23 C'est parce que, encore une fois,
07:25 je pense que si entre 1930 et 1939,
07:27 des Allemands avaient lu des romans populaires
07:31 qui les avaient, comment vous dire,
07:33 qui les avaient touchés, qui les avaient ému
07:35 et dans lesquels ils avaient rencontré
07:36 les premières victimes du nazisme...
07:38 S'ils avaient su.
07:39 S'ils avaient ressenti.
07:41 Parce que, comment vous dire,
07:43 la haine n'existe qu'à partir du moment
07:46 où on réussit à déshumaniser l'autre.
07:48 Et ça, c'est vrai dans tous les conflits.
07:50 Et donc, voilà, là, c'est important
07:52 parce que les lecteurs russes,
07:54 moi, j'ai la chance d'en avoir un paquet,
07:55 comme vous avez vu,
07:56 quand ils vont lire l'histoire du petit Valentin,
07:58 ils vont avoir envie d'avoir peut-être
08:00 autant de courage que lui.
08:02 Et puis, tout à l'heure, je faisais une petite précision
08:06 quand je vous ai dit la Russie de Poutine n'est pas les Russes.
08:08 Une maman russe, elle aime ses enfants
08:10 comme une maman ukrainienne et comme une maman française.
08:12 Une sœur russe, elle aime son petit frère
08:14 comme nous, on aime nos frères et nos sœurs.
08:16 Et on n'est pas différents les uns des autres.
08:20 Ce sont ceux qui déclarent les guerres
08:23 qui font que les jeunes meurent sur les champs de bataille.
08:27 Le dernier roman, "Le 25e" de Marc Lévy,
08:29 s'intitule "La symphonie des manches"
08:31 et Robert Laffont, "Versilio".

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