Emmanuel Macron au Proche-Orient : "Une parole pas toujours très audible"

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Transcript
00:00 - Merci d'avoir accepté notre invitation.
00:02 Vous êtes vice-présidente de l'IREMO,
00:04 l'Institut de recherche et d'études méditerranéens.
00:07 On a vu ces images.
00:09 Lorsqu'Emmanuel Macron est à Amman,
00:11 il veut évoquer la relance du processus de paix
00:14 en vue d'une solution à deux Etats.
00:16 La France a-t-elle les moyens ?
00:18 - On peut en douter, malheureusement,
00:20 puisqu'on voit bien que, depuis des années,
00:23 la communauté internationale, y compris la France,
00:26 a laissé tomber cette question palestinienne
00:29 avec la violence que l'on connaît de façon dramatique.
00:32 Depuis quelques années, on voit aussi un glissement
00:35 de la position française à l'égard de ce conflit israélo-palestinien,
00:39 où, jusque la présidence de Jacques Chirac,
00:42 il y avait une volonté de se faire entendre des deux côtés,
00:45 israéliens et palestiniens.
00:47 Une inflexion a commencé avec Nicolas Sarkozy,
00:50 ensuite avec François Hollande, et confirmée par Emmanuel Macron.
00:53 L'année dernière, le Premier ministre français
00:56 de l'Israël, Emmanuel Moussalem, était la capitale de l'Etat d'Israël,
01:00 alors que ça n'est pas reconnu par le droit international,
01:04 puisque c'est un territoire qui a été occupé par Israël.
01:07 La solution doit être partagée entre Israéliens et palestiniens.
01:11 Ces différentes prises de position,
01:13 je rappelle que Emmanuel Macron a été le premier chef d'Etat
01:17 à recevoir le Premier ministre israélien
01:20 lors des dernières élections à la tête d'une coalition
01:23 pour la droite de l'histoire d'Israël.
01:25 Ces différents éléments ont entamé la crédibilité de la France
01:29 vis-à-vis du monde arabe et des Palestiniens
01:32 sur la capacité à pouvoir agir.
01:34 C'est très bien que le président français aille à Rahman et au Ker
01:38 pour mettre en avant cette idée qu'il faut un Etat palestinien
01:42 pour sortir de l'engrenage de la violence
01:44 dans laquelle se trouve ce conflit.
01:47 C'est très bien, mais avec une parole
01:49 qui n'est pas toujours très audible.
01:51 Emmanuel Macron a été le premier à se rendre à Rahman,
01:55 d'où l'intérêt pour le président de France
01:57 de dire qu'il n'est pas équivoque.
01:59 - Oui, et en même temps, le problème,
02:02 c'est qu'aujourd'hui, Mahmoud Abbas,
02:04 le chef de l'autorité palestinienne,
02:07 a perdu toute légitimité aux yeux des Palestiniens.
02:10 Il y a un problème de visibilité et de compréhension
02:13 du message français puisqu'il va à Rahman
02:16 après avoir déclaré que la France proposait
02:19 une coalition nationale pour lutter contre le Hamas.
02:22 Ca fait passer au 2e plan, la proposition politique
02:26 qui consiste à dire qu'il faut un Etat palestinien.
02:29 - Cette tournée sert-elle aussi à clarifier la position de la France ?
02:33 Vous avez évoqué ce langlissement.
02:35 Emmanuel Macron a rappelé que la France regardait des 2 côtés.
02:39 - Oui, mais message brouillé avec l'annonce de cette coalition.
02:43 Alors que le message qui était porté par la diplomatie française
02:48 était de dire que la France a conscience
02:50 qu'il faut un Etat palestinien.
02:52 - Cette phrase a été prononcée hier à Tel Aviv
02:55 en compagnie de Benyamin Netanyahou.
02:57 Emmanuel Macron a proposé que la coalition contre l'Etat islamique
03:02 puisse lutter contre le Hamas.
03:04 - Oui, parce que je pense que c'est faire un amalgame dramatique
03:08 entre l'Organisation de l'Etat islamique et le Hamas.
03:11 - En quoi sont-elles différentes ?
03:13 - La 1re différence, c'est que le Hamas porte la voix
03:17 qui a été mise de côté depuis des années.
03:19 Même si les actions du 7 octobre qui ont été menées par le Hamas
03:23 sont éminemment condamnables, il n'y a aucun doute là-dessus,
03:27 ils peuvent évoquer des pratiques qui ont été celles de Daech.
03:31 Ce n'est pas le même projet politique.
03:34 Hamas veut un Etat palestinien sur la terre de Palestine.
03:37 - L'Etat islamique veut combattre l'Occident.
03:40 - L'objectif et l'ennemi du Hamas, c'est l'Etat d'Israël
03:44 qui refuse un Etat palestinien.
03:46 On n'est pas dans la même logique.
03:48 Je trouve que de faire cet amalgame,
03:51 qui est le narratif de l'Etat d'Israël,
03:53 et on peut comprendre pourquoi Netanyahou porte ce discours,
03:57 mais que la France s'associe à ce discours israélien
04:00 sur cet amalgame entre le Hamas et Daech,
04:03 me semble dangereux pour la position de la France.
04:06 Qu'est-ce qu'on retire de cette visite d'Emmanuel Macron à Tel Aviv ?
04:11 C'est cette phrase, et on a tendance à oublier
04:14 que Emmanuel Macron va se rendre, on l'a dit, cet après-midi,
04:18 en Égypte pour rencontrer le président al-Sissi.
04:21 C'est quoi le point de négociation ?
04:23 C'est l'ouverture du passage de Rafa,
04:26 même si les Égyptiens l'ouvrent dans les prochains jours ?
04:29 - C'est évident que c'est l'Égypte qui détient la clé
04:32 de l'ouverture du point de passage à Rafa,
04:35 qui a déjà été rouvert dans des conditions très minimales
04:39 par rapport aux besoins exprimés dans la bande de Gaza.
04:42 Si Emmanuel Macron en allait voir le président Sissi,
04:46 c'est d'obtenir cette médiation pour le sort des otages.
04:49 Parmi les otages retenus à la bande de Gaza,
04:52 il y a un certain nombre de ressortissants français
04:55 et le président s'est engagé pour obtenir la libération.
04:59 Il y a eu 4 otages libérés,
05:00 ce qui est très peu par rapport au nombre,
05:03 mais on sait que l'Égypte et le Qatar
05:05 ont été impliqués dans cette libération.
05:08 Il y a aussi ce message important de la part du président Macron
05:12 et de la part de Michel Sissi.
05:14 - Le Qatar, dont on parle beaucoup,
05:16 joue un rôle très trouble.
05:18 - Pas trouble, il joue un rôle dans le sens
05:21 où, abritant sur son territoire les responsables politiques du Hamas,
05:25 il peut être un intermédiaire.
05:27 On sait que le Qatar est souvent sollicité par les Occidentaux
05:31 pour la libération d'otages.
05:33 On sait que le Qatar a déjà été impliqué
05:36 à la demande des Occidentaux
05:38 et que le Qatar a les moyens de payer des rançons
05:41 lorsqu'elles sont demandées.
05:43 Trouble, tout dépend de l'endroit,
05:45 mais c'est un interlocuteur.
05:47 - Soutien de la cause palestinienne
05:50 et interlocuteur privilégié des Français.
05:53 - On a besoin de cet interlocuteur.
05:55 On reconnaît au Qatar un rôle que lui souhaite jouer
05:58 et qu'il joue en fonction de ses intérêts.
06:01 - Un dernier message sur la politique intérieure.
06:04 Lorsqu'Emmanuel Macron va à Ramallah,
06:07 va en Égypte,
06:08 il va à une partie de la population française.
06:11 Il faut lire dans un message de politique intérieure.
06:14 - Il tient à rassurer, après toutes les tensions
06:17 qu'il y a eu en France sur cette question,
06:20 d'avoir interdit les manifestations pro-palestiniennes.
06:24 - Pro-Hamas, pro-palestinienne, on sait que le vocabulaire...
06:28 - Il y avait aussi la défense des Palestiniens
06:31 dans les manifestations, même si certains défendaient le Hamas.
06:35 En faisant ces déclarations et en allant en Jordanie et en Égypte,
06:39 on est quand même tout à fait conscients
06:42 de la nécessité de nous adresser au monde arabe
06:45 et aux populations en France qui sont sensibles à ce message.
06:49 - Je voudrais aussi vous interroger
06:51 sur les dernières déclarations de Recep Tayyip Erdogan,
06:55 le président turc qui considère le Hamas
06:57 comme un groupe de libérateurs qui protège leur terre.
07:01 Il annonce qu'il annule tous ses projets de déplacement en Israël.
07:05 Surpris qu'il aille aussi loin, le président turc, aujourd'hui ?
07:09 - Non, parce qu'il y avait un rapprochement
07:12 entre la Turquie et Israël,
07:14 et que la réaction de l'armée israélienne à Gaza
07:17 après le drame du 7 octobre...
07:19 Effectivement, les images qui sont montrées
07:22 dans toutes les télévisions provoquent une réaction très forte
07:26 de la part des sociétés dans le monde arabo-musulman.
07:29 Donc Erdogan a besoin aussi de montrer
07:32 qu'il comprend cette réaction.
07:34 Et là aussi, en remettant sur le devant de la scène
07:37 par ses propos le fait qu'il faut trouver une réponse,
07:41 une solution à ce conflit israélo-palestinien,
07:44 sinon on sera dans un cycle de violence infernale
07:47 qui ne s'arrêtera jamais.
07:49 C'est pourquoi il faut dire que le Hamas est un moment de résistance.
07:53 Je comprends que ce soit inaudible en Israël,
07:56 mais c'est aussi ça, la réalité de la situation.
07:59 - La réalité, n'est-ce pas que la politique est morte
08:03 avec ces attaques du Hamas ?
08:05 On entend très peu parler des partis israéliens.
08:08 La politique a-t-elle encore une chance
08:10 d'aboutir à quelque chose ?
08:12 - Oui, je pense qu'après l'effet de sidération
08:15 qu'a représenté cette attaque,
08:17 le fait qu'Israël, l'armée la meilleure de la région,
08:21 se soit fait déborder...
08:23 - Par ses propres erreurs.
08:25 - Oui, et tout ce qui s'est passé, c'est une conséquence.
08:28 Il y a un effet de sidération tel
08:31 qu'il a été provoqué par l'attaque.
08:33 - Merci, Agnès Levallois.
08:35 Sous-titrage ST' 501
08:37 telle qu'il a été provoqué par l'attaque.

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