Le professeur de criminologie au Conservatoire des Arts et Métiers, Alain Bauer, était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
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00:00 Place donc à la grande interview sur CNews et Europe 1. Bonjour à vous Alain Bauer.
00:04 Bonjour.
00:05 Et bienvenue, vous êtes bien connu de nos téléspectateurs et auditeurs en tant que professeur de criminologie,
00:09 auteur de nombreux ouvrages à succès dont l'Encyclopédie du crime au cinéma
00:13 ou encore une édition augmentée de Au commencement était la guerre.
00:17 Le président français a vu Benyamin Netanyahou, il a également vu Mahmoud Abbas hier,
00:21 avant de rencontrer Alain Bauer dans La matinée, le roi de Jordanie.
00:24 Sa proposition d'étendre la coalition anti-Daesh/Hamas a été tempérée par l'Elysée
00:30 et diversement appréciée par les spécialistes du Proche-Orient.
00:33 Vous-même vous l'avez critiqué, pourquoi ce n'est pas tenable ?
00:37 Parce que ça n'a aucun sens.
00:39 C'est-à-dire faire le buzz pour le buzz, c'est bien, faire de la com' pour la com' pourquoi pas,
00:42 mais en matière de relations internationales sur un sujet aussi sensible,
00:45 on peut éviter de faire ce grand écart extrêmement douloureux,
00:48 surtout pour les diplomates de l'Elysée ou le Quai d'Orsay qui est en train de faire du rétro-pédalage.
00:53 C'est d'ailleurs le deuxième rétro-pédalage, il y en a un qui est passé très inaperçu
00:57 sur les problématiques de colonisation, arrêt de la colonisation ou décolonisation de la partie Gaza.
01:04 Je précise que ça n'a aucun sens, parce que dans la zone,
01:07 les attaques qui ont été menées par le Hamas, les attaques terroristes menées par l'organisation terroriste Hamas,
01:12 je le fais en double pour être sûr que tout le monde comprend bien,
01:14 parce que visiblement c'est pédagogiquement important, l'art de la répétition est paraît-il l'art de la pédagogie,
01:19 mais on a été sur la partie Israël 1967, celle qui n'était plus contestée par le même Hamas dans sa déclaration corrigée.
01:28 Ce qui est important, c'est de faire ce qu'il fait maintenant,
01:31 rencontrer les principaux opérateurs qui sont en situation non pas de faire une coalition anti-Hamas,
01:36 mais de trouver un plan de sortie par le haut pour régler ce qui a été raté en 1993 avec les accords d'Oslo,
01:43 la liquidation volontaire par les Américains, les Israéliens et les Arabes du plan Wolfensohn
01:48 qui visait à faire une sorte de Dubaï sur Gaza,
01:51 qui aurait permis de passer à autre chose sur cette affaire extrêmement compliquée d'un territoire et de populations
01:57 dont personne ne veut, pas plus les Arabes que les Israéliens, pas plus les Américains que les autres,
02:01 et qui est devenue une variable d'ajustement pour permettre les accords d'Abraham,
02:05 qui sont les principales victimes de cette opération.
02:07 Au-delà du massacre des Israéliens et du massacre des Palestiniens en cours,
02:12 qui sont eux-mêmes les otages du Hamas par défaut,
02:15 il y avait une option, elle a été liquidée, il y en a une deuxième,
02:18 elle est en train de mourir, sauf si il y a une posture par le haut.
02:22 Cette posture par le haut nécessite un accord avec le roi de Jordanie,
02:25 elle nécessite un accord avec le président égyptien,
02:28 elle nécessite une intervention forte du prince héritier d'Arabie Saoudite,
02:33 qui a quelque part les clés d'un plan Wolfensohn 2,
02:37 avec les moyens de la reconstruction de Gaza, de créer un espoir à Gaza,
02:42 et d'y installer un processus qui amène par l'économie à la démocratie,
02:46 parce que par le désespoir, on n'atteint que la haine.
02:49 - Hier, Emmanuel Macron, face à Mahmoud Abbas, a évoqué cette solution des deux États.
02:54 Certains affirment aujourd'hui que c'est totalement déplacé,
02:57 que ce n'est pas le moment d'en parler.
02:59 - C'est maintenant le moment d'en parler, parce que le problème, c'est l'après.
03:03 Après Al-Qaïda, on a eu l'État islamique, est-ce un progrès ?
03:06 Après la destruction et les interventions en Libye, en Afghanistan,
03:10 en Syrie, en Irak, est-on satisfait de l'extraordinaire résultat
03:15 accompli par la coalition internationale, qui a réussi à créer le désordre
03:19 et le chaos, tout en liquidant en grande partie l'État islamique réel,
03:24 mais en ne supprimant pas le califat virtuel, qui continue à organiser,
03:28 à promouvoir et à générer des attentats, y compris sur notre propre territoire.
03:32 Même les Israéliens ont compris, grâce au poids des familles
03:36 qui sont en train de camper, au sens de campement, pas de camp,
03:40 comme certains l'utilisent devant le siège du quartier général de Tsaïl,
03:44 pour dire "attention, la question des otages est devenue plus importante
03:48 que la question de la revanche, de la représaille ou de la vengeance".
03:51 Il se produit quelque chose dans la société israélienne,
03:54 que nous sommes en train de découvrir, c'est le poids de sa société civile
03:58 dans son armée citoyenne, et quelque part, ce qui s'est produit
04:02 dans le désastre généré par le propre gouvernement de M. Netanyahou
04:07 et de son ministre, M. Kvir, dans cette affaire, montre que,
04:11 justement, au-delà de la vengeance et de la revanche,
04:14 il y a une véritable hystérie de la vengeance et de la revanche,
04:17 et quand on voit les images, ce que j'ai malheureusement eu l'occasion
04:20 de faire, y compris celle... - Diffusées, des massacres.
04:23 - Une sélection, parce qu'il y a pire, et là, il y a toujours pire,
04:26 mais là, il y a vraiment pire, montre à quel point il y a une volonté
04:29 de revanche et de vengeance dans la société israélienne, mais aussi,
04:32 il y a cette volonté de sauver les otages et de trouver une solution.
04:35 Et de toute façon, après, il y aura un après. Il ne va pas y avoir
04:38 2 millions de Palestiniens liquidés pour la revanche d'Israël,
04:42 il va bien falloir trouver une solution, elle est entre les mains
04:45 des principaux opérateurs, dont le roi d'Arabie Saoudite.
04:48 - Avant de parler de l'après, Alain Bauer, on voudrait comprendre,
04:51 ce matin, sur CNews et Europe 1, quand Benyamin Netanyahou affirme
04:54 que nous sommes en guerre, la civilisation contre la barbarie,
04:58 est-ce que cette terminologie est la bonne ? Est-ce qu'elle embrasse
05:01 et elle englobe le monde entier ? Et est-ce le nouvel axe du mal,
05:04 aujourd'hui, comme certains l'ont dit ?
05:06 - D'abord, l'axe du mal, ça n'a pas bien marché la dernière fois,
05:08 donc on va essayer d'éviter, comme le dit très justement le président Biden,
05:11 inutile de refaire nos propres erreurs, devant Netanyahou.
05:14 Donc, au moins, il y a eu une parole à peu près sage et due à quelqu'un
05:17 qui est un très vieux routier de la politique et qui a vu les bons
05:21 et les très mauvais côtés de la politique américaine.
05:24 Non, il y a la barbarie. La barbarie, elle est là.
05:27 Il n'y a aucune excuse à la barbarie. La barbarie du Hamas,
05:30 dans son assassinat volontaire, collectif, prémédité, organisé...
05:33 - Oui, mais alors, vous voyez que certains la mettent en parallèle
05:35 par rapport à la riposte. Ils disent "vous-mêmes, vous avez employé
05:38 le mot "liquider". Est-ce que ces mots-là...
05:40 - Oui, en disant qu'il ne fallait pas les liquider, justement.
05:42 - Oui, mais ce n'est pas ce que prévoit de faire...
05:46 - Non, mais ils ont tort, car cette pulsion irrésistible et mortifère
05:51 les amènera à être les principales victimes de cette opération.
05:54 Qu'il y ait des représailles, qu'il y ait des cibles,
05:57 que tous les dirigeants du Hamas qui ont monté cette opération
06:00 soient, eux, liquidés. Tout le monde peut le comprendre.
06:02 En fait, même si on fait des rodementades diplomatiques
06:05 avec des pudeurs de jeunes filles, chacun imagine bien
06:07 ce que nous ferions nous-mêmes si la même situation s'était produite
06:10 dans une attaque d'une même ampleur, un massacre d'une telle ampleur,
06:14 un massacre terroriste et barbare d'une telle ampleur
06:17 sur notre propre territoire. Donc, ce n'est pas la question.
06:19 La question, c'est qu'il y a 2 millions d'otages du Hamas.
06:22 Une partie d'entre eux, d'ailleurs, soutenant politiquement le Hamas,
06:25 parce que dans le désespoir, ils les trouvaient mieux
06:28 que les corrompus du FATA qui dirigent mal la Cisjordanie.
06:31 - C'est intéressant. Alors, Alain Bauer, dans cette situation inextricable,
06:34 comment on éradique le Hamas ? Est-ce qu'envoyer des bombes suffira ?
06:38 En précisant quand même, puisque quasiment personne ne le dit,
06:41 que l'offensive terrestre ne sera pas si évidente pour ça.
06:43 - Elle n'est donc pas évidente parce qu'elle n'a pas eu lieu.
06:46 Elle n'a pas eu lieu parce qu'ils ne savent pas quelle offensive terrestre.
06:48 Incursion, invasion, occupation, ces 3 thèmes ne sont pas gérés aujourd'hui.
06:54 Si on attend autant de temps, c'est à la fois parce qu'il y a un doute
06:58 sur l'opération terrestre en tant que telle,
07:01 qui se traduit par un bombardement permanent de toute une série de cibles.
07:05 Et dont il faut dire, d'ailleurs, qu'une partie des cibles enterrées du Hamas
07:08 le sont sous des écoles, sous des habitations, sous des mosquées, sous des hôpitaux.
07:12 Je veux dire par là qu'une partie des cibles de l'armée israélienne
07:16 touche des civils innocents dans ce qu'on pourrait appeler des exactions militaires
07:21 ou des crimes de guerre pour ceux qui voudront un jour les traiter.
07:24 Mais la plupart d'entre elles touchent des cibles légitimes du Hamas
07:27 qui s'est cachée derrière des boucliers humains qui sont sa propre population.
07:31 Donc la question aujourd'hui, elle n'est certainement pas celle de l'élimination
07:35 de la liquidation, mais celle de l'après.
07:37 Et la question de l'après, elle prend une toute autre importance
07:39 à cause des 200 otages.
07:41 Les 200 otages ont tout changé.
07:43 Israël a dû gérer 2 otages, 4 otages, 8 otages, les corps de militaires.
07:47 Qu'est-ce qu'on sait de cela Alain Baurin ?
07:48 Cette stratégie de la libération au compte-gouttes et avec l'une des otages,
07:52 avec cette femme d'un certain âge qui raconte sa captivité.
07:56 Qu'est-ce qu'on sait aujourd'hui de ces négociations et du rôle d'Alain Baurin ?
08:00 La politique des otages, elle a été parfaitement inventée par l'Iran.
08:03 L'Iran le fait excellemment avec une très grande...
08:05 C'est le grand vainqueur de cette opération.
08:07 De toute façon, il sera le grand vainqueur de cette opération.
08:09 Il nie depuis le début, mais vous n'y croyez pas.
08:11 Mais non, même les dirigeants du Hamas...
08:13 Moi je crois ce que les terroristes disent.
08:15 J'ai écrit un livre pour ça en disant que les terroristes disent toujours ce qu'ils vont faire
08:17 et nous faisons d'immenses efforts pour ne jamais les croire.
08:19 Il faut arrêter, il faut écouter ce qu'ils disent.
08:21 Le 2 septembre, la réunion de coordination de cette attaque a eu lieu à Beyrouth
08:25 avec une photographie et il y en a eu une autre fin septembre,
08:28 qui est annoncée par le Wall Street Journal, qui a des sources en général bien informées,
08:31 pour lancer les opérations, en tout cas ne pas les empêcher.
08:34 L'idée qu'il y ait une déchotomie entre la direction politique du Hamas et la direction militaire
08:38 est une rigolade totale. Il y a une compétition pour la direction au cœur du Hamas.
08:43 Quant à la position du Qatar, pour l'instant c'est un allié utile et nécessaire
08:47 dont il faudrait cesser, cesser, cesser de casser les pieds.
08:52 Parce que pour l'instant, ceux qui jouent avec ça jouent avec la vie de nos propres hôtels.
08:56 Alors attendez, c'est important ce que vous dites Alain Bauer.
08:58 Je recommande une immense cure de silence sur le Qatar.
09:01 Si je vous pose la question en affirmant ou en tout cas en laissant supposer
09:05 que le Qatar est le sponsor historique du Hamas, n'est pas le moment de le dire ?
09:08 C'est le sponsor historique du Hamas à la demande du gouvernement d'Israël et des États-Unis.
09:12 C'est-à-dire ?
09:14 C'est eux qui l'ont demandé de régler le problème politique visant à permettre
09:18 à ce que les Israéliens pensaient être un pragmatique M. Yair Yassinevar,
09:23 de diriger la bande de Gaza qui devenait une variable d'ajustement
09:26 qui allait attendre gentiment qu'on fasse les accords d'Abraham
09:28 puis qu'un jour peut-être quelqu'un s'occupe de ce qui s'y passe.
09:30 C'est un jeu où chacun joue l'hypocrisie. Ils y sont tous responsables.
09:36 Doha a eu la bonne volonté et la gentillesse de gérer cette affaire
09:40 en faisant les fins de mois de l'administration territoriale du Hamas
09:43 et de gérer le bureau politique du Hamas à Doha.
09:47 Je rappelle d'ailleurs que les Américains eux-mêmes disent grâce au Qatar,
09:50 ils ont la plus grande base américaine hors sol au Qatar,
09:53 grâce à Doha et au Qatar nous parlons à des gens avec qui nous ne pourrions pas parler
09:58 mais à qui nous devons parler.
10:00 Donc à vous entendre, le Qatar va s'en sortir sans trop de dommages
10:02 et peut-être avec un chèque, mais le plus important...
10:04 Oui, le Hamas va avoir un chèque, le Qatar va donner un chèque,
10:07 mais nous on va peut-être récupérer nos otages.
10:09 Donc en attendant de les récupérer, je propose une grande cure de silence
10:12 et un retour à l'ermitage, ça leur fera du bien à tous,
10:14 à la suite de quoi tout le monde pourra critiquer en long, en large
10:17 et en travers le Qatar, ses capacités fiscales, ce qui a été fait pour eux
10:22 et par eux, voilà. Mais vraiment, je demande une cure de silence.
10:25 Nous avons des otages à sauver, des otages à sauver.
10:29 Avec un lourd trébut que paye la France, il y a une phrase hier très lourde de sens
10:35 de Benyamin Netanyahou, on dirait qu'il a eu besoin, Alain Bauer,
10:38 d'éveiller, de réveiller un peu l'Occident, l'Europe et la France
10:42 quand il dit que c'est comme si on avait l'État islamique juste à côté de Paris.
10:49 Pourquoi a-t-il besoin d'utiliser ces images ?
10:51 Pourquoi aujourd'hui Israël a besoin de montrer, malheureusement,
10:55 les vidéos de ces massacres ? Il y a une forme de post-vérité,
10:59 beaucoup n'y croient pas.
11:00 Alors il y a deux cas. Benyamin Netanyahou, il tient à sauver sa peau.
11:04 Il assume l'immense responsabilité de ce qui s'est produit en termes
11:09 d'incapacité de l'armée et de l'État d'Israël à réagir, à prévenir
11:15 et à anticiper cette attaque alors même que c'est sans limite.
11:17 Pourtant le renseignement militaire ne s'est pas trompé.
11:18 Non, ni le renseignement militaire, ni le Shin Bet, ni l'ancien chef d'État
11:22 major israélien à Gaza qui, en fin juillet, a dit "c'est là que ça va se passer
11:26 et c'est bientôt", ni mon collègue Carmon qui, dans une note fin août,
11:29 dit "ça va se passer bientôt à Gaza" et personne n'a écouté parce que
11:33 le gouvernement d'Israël était tout préoccupé par sa réforme de sa
11:36 cour constitutionnelle et considérait que c'était un rideau de fumée
11:39 pour régler un problème majeur qui était la crise des réservistes
11:42 qui a affaibli l'armée d'Israël en même temps que le gouvernement
11:46 a envoyé tout le monde en Cisjordanie, conscient qu'il ne se passerait
11:49 rien à Gaza. Voilà, cette responsabilité politique-là, en général,
11:52 hors période de guerre, ça amène à la démission ou au procès, à la haute cour.
11:56 On va attendre. Les Israéliens feront leur commission d'enquête
11:58 et elle ne sera pas gentille. Mais en attendant, il a besoin de ça.
12:02 Benjamin Netanyahou a besoin d'expliquer qu'il est encore utile alors qu'il sait
12:06 très bien que sur le cœur de ce qui était sa promesse, la sécurité d'Israël,
12:10 la faillite est immense. La deuxième partie, c'est Israël.
12:13 Israël a un problème de gestion de sa communication, de la diffusion
12:17 des informations, de la tiktokisation du monde, du fake news et de l'incapacité
12:23 à faire comprendre ce qui s'est produit en réel. Horadour sur Glane,
12:27 Boucha et ce qui s'est passé dans les kibbouts israéliens, c'est la même chose.
12:32 - 20-11 septembre a-t-il. - Oui, en quantité, c'est vrai,
12:35 par rapport à la population d'Israël. Donc, nous avons le plus grand mal
12:39 à intégrer ce qu'est le 13 novembre. On a eu très peu de photos et d'images,
12:42 mais chacun a perçu dans sa chaire, ou l'attentat de Nice,
12:45 perçu dans sa chaire ou dans ses... C'était à proximité.
12:48 Là, on ne sait plus quelle est la vraie image et quelle est la fausse image.
12:51 Il a fallu à un moment dire, voilà, c'est ça qui s'est passé.
12:53 On l'a vu avec la vraie fausse information, où tout le monde, ou presque,
12:57 est tombé sur l'affaire du missile de l'hôpital.
13:00 Alors, c'est une roquette sur le parking, envoyée de Gaza vers Israël
13:04 et pas d'Israël vers Gaza, et probablement liée au djihadisme.
13:07 Il a fallu récupérer la vidéo de Al Jazeera pour arriver à convaincre
13:11 une partie seulement de la population arabo-musulmane
13:15 que ce n'était pas ce que tout le monde racontait, y compris le New York Times,
13:19 le Monde ou l'AFP. Je veux dire, nous sommes tous dans une telle frénésie
13:23 de répondre tout de suite à l'actualité que tout le monde raconte n'importe quoi
13:26 et qu'une information a un démenti, ces deux informations,
13:28 donc il n'y a plus d'informations. La grande victime de cette affaire,
13:31 c'est la vérité. Elle l'est depuis le Covid. Le Covid et l'auto-destruction
13:35 de mes propres collègues, qui ont détruit la science.
13:37 La vérité politique avait disparu, la vérité journalistique était largement entamée.
13:41 Il restait un peu de vérité scientifique et elle a été liquidée durant le Covid.
13:44 Il n'y a plus de vérité, il n'y a plus que des options alternatives
13:47 qui nous... C'est ce qu'on appelle un biais de confirmation.
13:49 On cherche toujours l'information qui nous confirme ce qu'on croit
13:52 et pas ce qui est la réalité. Et donc, il y a un besoin désormais
13:56 de montrer les images, y compris les plus horribles, pour dire,
13:59 mais vous savez, les gars, ça s'est vraiment passé.
14:01 Le procès de Nuremberg a commencé par les films de l'ouverture des camps
14:05 de concentration pour que tout le monde se rende compte de ce que c'était
14:08 en réalité. Et à l'époque, on ne truquait pas les images, il n'y avait pas de sujet.
14:12 Aujourd'hui, il y a en plus l'idée que toute image est truquée,
14:16 qu'il n'y a que du deepfake, etc. C'est un vrai enjeu que de remettre
14:20 les images et donc de remettre des journalistes. Le drame d'Israël
14:23 et le drame du Hamas, c'est d'avoir empêché les journalistes indépendants,
14:27 les uns en les bombardant, les autres en les interdisant d'accès
14:30 et de faire leur métier. Il y a encore une capacité de vérité,
14:33 celle que vous portez vous ici et d'autres, c'est de dire, voilà ce qui se passe
14:38 et nous, nous en parlons parce que c'est notre métier et que nous sommes indépendants.
14:42 Et ça montre aussi qu'Israël est aussi sur ce front-là.
14:44 C'est une bataille de l'image et une guerre de la communication.
14:47 Je voudrais finir par un avertissement qui a été prononcé ici même
14:50 par une chercheuse au CNRS, Florence Bergeau-Blacklare, qui a dit,
14:53 Alain Bauer, que ce qui s'est passé en Israël, tout ce que vous venez
14:56 de décrire, tout ce qu'on a vu avec ces images de terreur et de cortège,
15:00 d'atrocité, pouvait se passer en France.
15:02 Ça peut se passer partout. Ce n'est pas le Bataclan, ce n'est pas il y a 200 ans,
15:06 ce n'est pas il y a 100 ans, ce n'était pas durant la guerre,
15:10 l'Antiquité romaine ou le Moyen Âge. Donc la barbarie, elle existe,
15:15 elle est naturelle, elle est humaine. Dans mon métier, la criminologie,
15:18 on voit des barbares assez réguliers. En général, nous arrivons par la science,
15:22 l'éducation, le contrôle social, le surmoi, pour faire plaisir à Freud,
15:26 à gérer nos pulsions irrésistibles. Mais quand vous regardez le nombre
15:29 de crimes d'assassinat, d'agression qui existent, vous savez que la barbarie,
15:33 elle est à fleur de peau. Et dès que vous avez un mouvement de foule...
15:35 - Mais notre droit, ce qu'on a appris, nos renseignements, tout cela,
15:38 on espère au moins que c'est une digue. Fût-elle fragile face à ce que vous décrivez ?
15:42 - Ça va mieux qu'avant. Avant, on a eu cinq opérations antiterroristes préventives
15:46 avant les attentats de Nice en 2006, cinq ans de depuis.
15:49 Donc une immense amélioration. Ça ne veut pas dire que ça marche
15:51 tout le temps. Ça veut dire que ça marche mieux, mais qu'il y a encore
15:53 beaucoup de travail à faire.
15:54 - Merci Alain Beauvoir. Je cite votre ouvrage à apparaître en édition augmentée.
15:59 "Commencement était la guerre". Bonne journée à vous.
16:01 C'était votre grande interview ce matin.
16:03 - Merci.
16:05 Sous-titrage Société Radio-Canada
16:09 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org