La minute de vérité Sabordage du Bismarck

  • l’année dernière
La bataille entre la Royal Navy et le cuirassé allemand Bismarck fut un des événements décisifs de la Seconde Guerre mondiale. Si le Bismarck s'était avéré vainqueur, les Anglais auraient sûrement capitulé et la libération anglo-américaine de l'Europe n'aurait peut-être jamais eu lieu. Avec la défaite du Bismarck, l'Allemagne a raté sa dernière chance de vaincre le Royaume-Uni, changeant le cours de l'Histoire. Andrew Lambert, historien, revient sur les erreurs commises par les deux armées, notamment celles, stratégiques, imputables aux Allemands. Il apporte un éclairage sur les événements qui ont conduit au sabordage du cuirassé.

Category

📺
TV
Transcription
00:00 Mai 1941.
00:04 Une tempête se déchaîne dans l'océan Atlantique.
00:10 Un escadron de biplans archaïques s'attaque au bâtiment de guerre le plus puissant de l'histoire.
00:18 Le Bismarck.
00:25 "Ça paraissait presque incroyable de voir ces vieux coucous face à cette montagne cracheuse de feu."
00:31 L'enjeu, l'avenir de l'Europe.
00:38 "Si le Bismarck remplit sa mission, le système des convois va s'effondrer et la Grande-Bretagne capitulera. Donc c'est un tournant de la Deuxième Guerre."
00:52 Les catastrophes sont rarement le fruit du hasard.
00:55 Elles résultent souvent d'un enchaînement d'événements malheureux.
00:59 Aujourd'hui, dans la Minute de Vérité.
01:03 Atlantique Nord.
01:10 24 mai 1941.
01:13 Cuirassé britannique, HMS King George V.
01:21 Le commandant en chef de la Home Fleet, l'amiral John Tovey, est en train de remplir la mission la plus importante de sa carrière.
01:32 Couler un navire si redoutable qu'il menace la survie des îles britanniques.
01:38 Ce bateau, c'est le Bismarck. Le navire amiral de la Crix Marineux.
01:49 Pour son voyage inaugural, il navigue de concert avec le croiseur Prince Eugen.
01:54 Tovey envoie une flotte pour les intercepter.
01:57 A sa tête, le croiseur de bataille HMS Hood, symbole de la suprématie britannique sur les océans et fleuron de la Royal Navy.
02:13 C'était un navire qui avait beaucoup d'allure. Partout où il allait, il attirait l'attention. Et on l'aimait tous.
02:21 Le commandant du Hood, le vice-amiral d'escadre Lancelot Holland, mise sur l'effet de surprise pour s'assurer la victoire.
02:42 Le Bismarck et le Prince Eugen sont à une trentaine de kilomètres au nord du Hood.
02:47 Le commandant de la flotte est à bord du Bismarck.
02:57 Gunther Lütjens est une légende de la Crix Marineux. Il a envoyé par le fond 22 navires britanniques en seulement deux mois.
03:09 Au point du jour, il repère l'approche de l'ennemi.
03:13 Deux croiseurs lourds. Attendons d'autres contacts.
03:18 Le Hood ouvre le feu.
03:20 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:24 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:28 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:32 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:36 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:40 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
03:46 Le Hood ouvre le feu.
03:48 Étrangement, Lütjens ne donne pas l'ordre de riposter.
04:09 Le commandant de la flotte est en train de se débrouiller.
04:11 Le capitaine de vaisseau Ernst Lindemann prend alors l'initiative.
04:26 Feu à feu !
04:28 Les obus pleuvent dans le détroit du Danemark.
04:35 Un obus transperce les six ponts d'acier.
04:37 Une salve touche le Hood.
04:43 Un obus transperce les six ponts d'acier.
04:47 Et détonne dans la soute à munitions faisant sauter 300 tonnes d'explosifs.
04:56 Et détonne dans la soute à munitions faisant sauter 300 tonnes d'explosifs.
04:57 L'immense navire se disloque, écoulant seulement deux minutes.
05:11 Plus de 1 400 marins périssent, dont le vice-amiral d'escadre Hollande.
05:19 Plus de 1 400 marins périssent, dont le vice-amiral d'escadre Hollande.
05:20 Le Bismarck poursuit sa route.
05:46 Le Bismarck poursuit sa route.
05:48 La nouvelle de la destruction du Hood fait le tour du monde.
05:56 Le HMS Hood était le plus grand croiseur de bataille du monde.
06:01 Son équipage comptait 1 341 hommes.
06:04 Toutes nos pensées vont aux familles de ces braves qui sont tombées lorsqu'un obus du Bismarck a fait sauter la soute à munitions.
06:15 Les haut-parleurs nous ont annoncé que le Hood avait été coulé.
06:18 Sur le moment, on n'a pas voulu y croire parce qu'on pensait qu'il était insubmersible, qu'aucun navire ne pouvait le détruire.
06:26 L'affaire prend alors une ampleur nationale.
06:34 Il faut couler le Bismarck.
06:36 L'amiral Tovey fait appel à tous les navires disponibles de la Royal Navy.
06:44 Mais les marins britanniques savent que la mission s'annonce des plus périlleuses.
06:47 On savait que c'était un adversaire redoutable.
06:54 Et que l'essentiel de son équipement était bien supérieur au nôtre.
07:06 Avec ses 88 canons précis à plus de 35 km, une vitesse de pointe de 30 nœuds et un blindage de plus de 30 cm d'épaisseur, le Bismarck est le cuirassé le plus impressionnant jamais construit.
07:18 Sa mission ? Affamer la Grande-Bretagne pour la pousser à la rédition.
07:29 Son objectif ? Les convois de la marine marchande qui ravitaillent le Royaume-Uni.
07:33 Ils nous approvisionnaient non seulement en pétrole, mais aussi en nourriture, en chars d'assaut et en avions qui venaient des États-Unis.
07:43 Parce qu'à cette époque, nous nous battions seuls.
07:46 L'ami rototillerait les navires.
07:53 À cette époque, nous nous battions seuls.
07:55 L'amirauté britannique sait que le Bismarck veut s'attaquer à ses convois. Il est donc impératif de l'arrêter.
08:03 À bord, le moral est au beau fixe.
08:11 L'équipage fête sa victoire sur le Hood avec une ration supplémentaire de nourriture et de cigarettes.
08:20 Le cuirassé a mis cap au sud, vers l'Atlantique.
08:23 La flotte britannique lui donne la chasse.
08:28 L'amiral Thauvet a chargé deux de ses navires de surveiller le Bismarck avec leur radar et de le suivre pendant la nuit.
08:35 Mais à 4 heures le lendemain matin,
08:45 Thauvet doit déchanter.
08:47 Le croiseur britannique HMS Suffolk a perdu le Bismarck.
08:57 Le navire allemand est donc quelque part dans l'Atlantique.
09:03 On était en route pour l'intercepter,
09:11 quand on a appris qu'on avait perdu sa trace.
09:13 Il était passé au travers des mailles du filet.
09:17 Des avions de reconnaissance et d'observation décollent,
09:24 des cuirassés sillonnent l'océan, mais ils ne trouvent rien.
09:27 Puis, le jour de la fin de la course,
09:38 le commandement allemand de la flotte britannique,
09:40 qui est intercepté par plusieurs postes d'écoute,
09:42 s'envoie vers le Royaume-Uni.
09:44 Cela peut être un coup de chance pour les britanniques.
09:52 À 7 heures du matin, l'amiral Lutyens rompt le silence radio.
09:58 Il adresse un rapport au commandement allemand,
10:05 qui lui demande de se déployer.
10:07 Cela permet à Thauvet de localiser Lutyens.
10:13 Le britannique donne l'ordre à sa flotte de mettre cap au nord.
10:17 La chasse peut reprendre.
10:19 Sauf que le Bismarck fait route au sud,
10:24 en direction de la France occupée.
10:33 Le Bismarck n'a toujours pas repéré sa proie.
10:35 En vérifiant leurs calculs,
10:42 les marins se rendent compte qu'ils ont fait une erreur monumentale.
10:45 Ils vont dans la mauvaise direction.
10:47 Les heures qui suivent sont particulièrement stressantes pour Thauvet.
11:01 Ses navires ont fait demi-tour
11:03 et se sont lancés à la recherche du Bismarck.
11:05 L'Atlantique est un endroit immense,
11:10 où on est très seul.
11:12 Il allait falloir patrouiller pendant un sacré paquet de temps
11:15 pour le retrouver.
11:17 26 mai.
11:20 Un Catalina de la RAF repère le Bismarck.
11:29 Ça a été un vrai soulagement
11:32 d'apprendre qu'un hydravion Catalina l'avait vu.
11:36 Thauvet peut calculer la position de l'ennemi.
11:42 Le Bismarck est à 18 heures de navigation des eaux françaises
11:52 et du soutien des avions de la Luftwaffe.
11:55 Thauvet ne l'interceptera jamais à temps.
11:58 Son seul espoir repose sur la flotte qui arrive de la Méditerranée
12:02 et qui remonte vers le nord.
12:04 Elle se compose notamment du porte-avions HMS Ark Royal
12:10 et de son escadron de biplans Swordfish.
12:13 Le jour où Thauvet va se retrouver dans le Nord,
12:25 le Bismarck est en vue de se déployer.
12:28 Le Bismarck, n'étant plus qu'à 14 heures de la France,
12:35 Thauvet décide d'attaquer.
12:37 Les avions décollent en pleine tempête.
12:46 Pendant une heure, ils volent dans des conditions épouvantables.
12:54 L'un après l'autre, les pilotes s'appuient sur le radar du chef de patrouille.
12:58 Et ce dernier repère un navire.
13:03 Depuis le croiseur HMS Sheffield, George Osborne voit les avions arriver.
13:16 Tout à coup, j'ai levé les yeux
13:22 et j'ai dit à mon copain que ces avions allaient nous attaquer.
13:25 Mais il m'a répondu "arrête de dire n'importe quoi".
13:28 Par erreur, les pilotes s'apprêtent pourtant à s'en prendre à leurs compatriotes.
13:36 Ils larguent des torpilles équipées du dernier cri
13:43 en matière de détonateurs à influence magnétique.
13:46 Elles filent vers le Sheffield.
13:51 Heureusement pour nous, celles qui nous ont touchés avaient des détonateurs défectueux.
13:55 Du coup, la charge ne pouvait pas exploser.
13:58 Le Bismarck, lui, n'est plus qu'à 10 heures des côtes françaises.
14:06 Tovey apprend que le raid aérien a échoué.
14:12 Il a été touché par un avion de la France.
14:19 La météorologie se dégrade encore et il devient quasiment impossible de voler.
14:23 Mais l'amiral n'a pas le choix.
14:26 Il ordonne une nouvelle attaque.
14:31 Les techniciens ravitaillent les Swordfish en carburant et en munitions sur un pont qui tangue.
14:40 Le raid est terminé.
14:48 Par un vent soufflant à 70 km/h et depuis un bateau balloté par les vagues,
14:53 15 Swordfish s'envolent dans un ciel noir de nuages.
14:57 Le Bismarck n'est plus qu'à 10 heures du soutien aérien le plus proche.
15:07 Tovey n'a plus qu'à attendre.
15:12 Deux heures s'écoulent avant que le chef de patrouille ne retrouve la trace du cuirassé allemand.
15:17 À bord du Bismarck, un officier canonnier, le lieutenant de vaisseau Von Mühleneim-Reichberger,
15:29 entend les Swordfish approcher.
15:31 « Ils sont presque à la sortie. »
15:34 « Ils sont à la sortie. »
15:38 Le lieutenant de vaisseau von Mühleneim-Reichberger entend les Swordfish approcher.
15:42 « Ça paraissait presque incroyable de voir ces vieux coucoux obsolètes
15:49 comme suspendus en l'air face à cette montagne cracheuse de feu. »
15:54 Ken Pattison fait partie des pilotes.
15:59 « On a commencé à piquer pour descendre à 90 pieds.
16:07 [Musique]
16:16 Quand on s'est éloigné, mon observateur a regardé dans l'eau
16:20 et il a vu notre torpille filer vers l'arrière de la cible.
16:23 Une seule torpille frappe la poube du cuirassé.
16:32 [Musique]
16:38 Les gouvernailles cessent de fonctionner.
16:40 « À mon poste de combat, il y avait un indicateur d'angle de barre.
16:47 J'ai vu qu'il était bloqué sur 10 degrés bas bord et il n'en a plus bougé. »
16:53 Le Bismarck fait désormais des ronds dans l'eau.
16:59 [Musique]
17:05 Les énormes gouvernailles sont coincés et l'équipage n'arrive pas à les débloquer.
17:09 Alors qu'il n'était plus qu'à quelques heures de la France occupée,
17:14 le bâtiment ne peut plus naviguer qu'à vitesse lente et en cercle.
17:18 L'Utiens et son équipage ne peuvent plus échapper à leurs ennemis.
17:24 [Musique]
17:32 Quand les marins prennent conscience de leur situation, l'ambiance à bord devient funèbre.
17:37 « On sentait tous qu'on était sur le billot du boucher et qu'on ne pouvait pas y faire grand chose.
17:49 Le peuple allemand est à vos côtés.
17:52 Nous allons tirer jusqu'à ce que nos canons rouges voient
17:57 et jusqu'à ce que nous ayons brûlé notre dernière obus.
18:01 Pour des soldats comme nous, c'est la victoire ou la mort. »
18:09 L'équipage se sait condamné.
18:14 [Musique]
18:26 L'amiral Thauvet peut frapper n'importe quand.
18:29 [Musique]
18:38 Pour limiter les risques de tirs amis, ce dernier décide d'attendre le lendemain matin.
18:42 [Musique]
18:51 Le 27 mai, les Britanniques ouvrent le feu.
18:54 [Musique]
19:02 George Bell participe au combat depuis le HMS Dorset-Char.
19:06 [Musique]
19:10 « On a ouvert le feu à la limite de notre portée pratique, environ 16 000 nautiques. »
19:15 [Musique]
19:22 « Et bientôt, on a vu qu'on faisait mouche. »
19:27 [Musique]
19:32 Au bout de quelques minutes, un projectile détruit la passerelle de commandement,
19:36 tuant l'amiral Lutyens.
19:38 [Musique]
19:43 Mais même blessée, la bête reste toujours aussi dangereuse.
19:47 [Explosion]
19:52 « On a entendu les obus siffler au-dessus. Les Allemands n'avaient pas réglé à la bonne portée. Heureusement. »
19:58 [Explosion]
20:03 Les bâtiments de la Royal Navy se rapprochent.
20:06 « On a tiré 250 obus de 203 millimètres en une heure environ. »
20:12 « Et on a réduit la distance de 16 nautiques à 1800 mètres. »
20:19 [Musique]
20:23 Malgré un bombardement intensif d'une heure et demie, le navire allemand ne coule toujours pas.
20:28 [Musique]
20:32 Tove fait alors intervenir le dorset de char. Le seul bateau à encore avoir des torpilles.
20:37 [Explosion]
20:41 « On a tiré deux torpilles. La première a fait mouche. »
20:46 « Et avant même qu'on tire la deuxième, le Bismarck a commencé à chadirer. »
20:50 [Musique]
20:55 Le Bismarck gîte fortement sur bas-bord et bascule sous les vagues.
21:00 [Musique]
21:03 « On a vu la quille de l'avant à l'arrière sur toute la longueur du navire. »
21:08 « Avant que la poupe s'enfonce dans l'eau et que le bateau coule. »
21:13 [Musique]
21:15 Le Bismarck disparaît lors de son voyage inaugural.
21:19 [Musique]
21:22 Sur les 2 221 hommes qui composaient son équipage, seuls 115 survivent.
21:28 [Musique]
21:32 En seulement 4 jours, deux des plus gros bateaux du monde ont sombré,
21:37 emportant avec eux 3500 marins.
21:40 [Musique]
21:42 En retraçant le fil des événements, nous allons vous révéler pourquoi le plan qui visait à affamer le Royaume-Uni
21:48 pour le pousser à la rédition était mal conçu.
21:52 Et comment le Troisième Reich a gâché une occasion de gagner la guerre sur le front occidental.
21:58 [Musique]
22:05 70 ans après les faits, l'historien naval Andrew Lambert va nous dévoiler
22:10 comment un ensemble de mauvais calculs côté allemand a condamné le Bismarck.
22:15 [Musique]
22:20 Le 3ème Reich a été déclaré le royaume d'Astrakhan en 1941.
22:25 Le 3ème Reich doit détruire la Grande-Bretagne pour asseoir son emprise sur l'ensemble de l'Europe occidentale.
22:32 Comme la survie des îles britanniques dépend des approvisionnements en provenance des États-Unis,
22:37 l'Allemagne doit y mettre fin.
22:40 Les nazis échafaudent alors une stratégie à deux volets.
22:45 Le 1er Reich, qui a été déclaré le royaume d'Astrakhan,
22:50 voulait que ses sous-marins obligent les britanniques à recourir au convoi.
22:55 Les "hubots" vont contraindre les navires de ravitaillement à se déplacer en groupe
23:00 pour que des cuirassés rapides et à la puissance de feu importante les prennent en embuscade et les coulent.
23:07 Les britanniques seraient face à un dilemme, car sans les convois, ils perdraient la guerre.
23:14 L'Allemagne a affiné cette stratégie qui lui a déjà permis de couler 6 millions de tonnes de ravitaillement en 20 mois.
23:23 Et son meilleur cuirassé est désormais fin prêt à faire des ravages dans l'Atlantique.
23:31 L'opération a pour nom de code "Reinbung".
23:35 À l'origine, Reinbung prévoyait de faire sortir tous les bateaux de surface de fortonnage.
23:41 Le Bismarck, le Prinz Eugen, le Scharnhorst, le Gneisenau, le Admiral Hipper et peut-être le Admiral Scheer.
23:49 Mais à la veille de son lancement, l'opération se heurte à une difficulté de taille.
23:56 La plupart des cuirassés sont immobilisés.
24:00 Malheureusement pour les Allemands, le Scharnhorst et le Gneisenau,
24:04 deux autres cuirassés rapides qui étaient rentrés de la chasse aux convois dans l'Atlantique,
24:08 avaient été bombardés à Brest.
24:11 Ils souffraient d'avaries et n'étaient plus opérationnels.
24:14 Donc le Haut-Commandement n'a envoyé que deux cuirassés au lieu d'une demi-douzaine.
24:20 D'après Andrew Lambert, c'est le premier d'une série de mauvais calculs.
24:26 Comme au départ ils avaient prévu une opération de grande ampleur,
24:32 les Allemands auraient peut-être dû attendre de pouvoir envoyer plus de bâtiments.
24:37 Mais confiant en leur stratégie, ils se montrent téméraires.
24:43 Il faut dire que pour cette seule année 1941,
24:47 ils ont coulé 22 navires ennemis et, croyant la victoire à portée de main,
24:51 ils sont impatients d'en finir.
24:54 Donc le Bismarck et le Prinz Eugen se cacheront dans l'immensité de l'Atlantique
24:59 pour couler les convois avant de s'évanouir dans la nature.
25:02 Mais avant, ils doivent contourner les îles britanniques sans se faire repérer.
25:07 Là encore, les Allemands ne pensent pas avoir matière à s'inquiéter.
25:12 Les Allemands avaient organisé plus d'une demi-douzaine de missions dans l'Atlantique depuis 1939
25:18 et pas une n'avait été interceptée.
25:20 Donc ils pensaient qu'ils en iraient de même avec celle-ci.
25:27 Mais c'est un mauvais calcul de plus.
25:30 Les Britanniques souffrent de la campagne menée contre les convois
25:35 et prennent la menace que représente un cuirassé comme le Bismarck très au sérieux.
25:40 Si le Bismarck remplit sa mission, le système des convois va s'effondrer
25:45 et la Grande-Bretagne capitulera.
25:47 Donc c'est un tournant de la Deuxième Guerre.
25:54 Le plus gros cuirassé d'Europe doit donc rallier l'Atlantique en toute discrétion.
25:59 Mais Andrew Lambert suppose que l'Allemagne a sous-estimé le réseau d'espionnage britannique.
26:08 Les Allemands occupaient le Danemark, la Norvège, la France, les Pays-Bas, la Belgique
26:15 et il y avait plein de gens dans ces pays qui étaient trop heureux de renseigner les Britanniques.
26:23 En seulement 48 heures, ils sont mis au courant.
26:26 Ensuite, le Bismarck et le Prinsen Gunn font relâche à Bergen, en Norvège, pour faire le plein.
26:37 Les Britanniques en profitent pour les localiser.
26:40 Les Britanniques sont obsédés par l'idée de trouver ce bateau.
26:44 Ils savent qu'il arrive, ils savent d'où il vient
26:47 et quand le Bismarck mouille à Bergen, un Spitfire en vol de reconnaissance le prend en photo.
26:53 Ce cliché compromet un peu plus la réussite de l'opération Rhein-Neubung.
26:59 Ignorant que ces déplacements sont observés, l'amiral Lutyens essaye de passer subrepticement dans l'Atlantique.
27:15 La météo, qui devient très mauvaise, va le dissimuler.
27:18 C'est l'occasion que l'amiral attendait.
27:21 Il repart alors que les réservoirs ne sont pas encore remplis, pariant sur le fait qu'il pourra faire le plein plus tard.
27:29 C'était un très bon choix tactique.
27:34 Il fallait passer dans l'Atlantique où des ravitailleurs pourraient lui fournir du carburant.
27:40 Les quelques centaines de tonnes qui manquaient étaient bien moins importantes que traverser le détroit du Danemark sans se faire intercepter.
27:46 Ignorant qu'il a été repéré, Lutyens se jette droit dans l'embuscade que lui tend le HMS Hood.
27:56 Il était possible d'organiser l'interception soit à l'Est, soit à l'Ouest de l'Islande.
28:06 Stopper le Bismarck aux portes de l'Atlantique, c'était exactement ce que les britanniques avaient prévu.
28:10 Lutyens se retrouve alors dans une situation inconfortable, car il a reçu des ordres express lui interdisant d'attaquer la Royal Navy.
28:20 Il est là pour détruire les convois, pas pour livrer bataille.
28:31 Lorsque le Hood attaque, Lutyens est indécis et ne riposte pas, ce qui lui vaut de voir son autorité sapée par un de ses subalternes, le commandant du Bismarck, Ernst Lindemann.
28:41 Jan Vith a découvert que leurs relations étaient conflictuelles.
28:50 Il faut prendre en compte le fait qu'ils voyaient l'opération de deux points de vue différents.
28:59 Le commandant du navire est responsable de la tactique, ça c'était le point de vue de Lindemann.
29:04 L'amiral, lui, pense à la stratégie.
29:08 Gunther Lutyens tient à obéir aux ordres.
29:15 Ernst Lindemann s'intéresse à la survie de son navire.
29:18 Fait sans précédent, il passe outre son supérieur.
29:27 Finalement, c'est le capitaine de vaisseau Lindemann qui a donné l'ordre d'ouvrir le feu en disant "pas question que je laisse mon bateau m'exploser sous le cul".
29:36 Le Hood est envoyé par le fond.
29:52 Mais alors que l'équipage allemand se félicite, Lutyens songe à ce qu'il attend et ne participe pas aux réjouissances.
30:00 Ce qui est intéressant c'est que Lutyens, loin de se réjouir de son succès, semble démoralisé.
30:09 Comme il a coulé le fleuron de la Royal Navy, il sait que les britanniques vont faire leur possible pour achever le Bismarck.
30:20 Il est conscient que les britanniques vont tout mettre en œuvre pour venger le Hood.
30:24 La destruction du Hood est une catastrophe pour le moral des britanniques.
30:30 Mais au lieu de les décourager, elle leur inspire instantanément le désir d'une vengeance implacable.
30:36 Autre problème, le Bismarck a été touché pendant l'affrontement.
30:45 Un obus du Prince of Wales avait touché la proue, ce qui avait provoqué une fuite de combustible et la vitesse était amoindrie.
30:54 La fuite de combustible ralentit le cuirassé et neutralise un de ses principaux avantages, sa vitesse.
31:02 La décision d'anticiper le départ de Bergen se retourne contre Lutyens qui tente alors un nouveau pari.
31:14 Il avait un choix à faire, soit arrêter l'opération, soit la poursuivre.
31:21 En ces instants d'une importance cruciale, la tension entre les plus hauts gradés refait surface.
31:29 Il y a eu une discussion houleuse entre le commandant du Bismarck, Lindemann, et l'amiral Lutyens.
31:37 Fallait-il continuer ou regagner la Norvège ?
31:42 Le premier veut faire demi-tour, sa priorité numéro un étant son navire.
31:48 Le second veut privilégier l'opération Rhein-Neubung.
31:54 Si le Bismarck parvient à rallier la France occupée, il pourra être réparé et depuis la côte atlantique, il pourra s'en prendre au convoi.
32:07 Autre avantage, il n'aura plus à affronter les dangers du détroit du Danemark.
32:12 Lutyens n'a pas suivi l'avis de Lindemann et il a donné l'ordre de rallier un port français.
32:20 Selon Andrew Lambert, c'est une décision dramatique.
32:26 Lutyens a choisi de ne pas rentrer, c'était une grosse erreur.
32:34 Il pense pouvoir se mettre à l'abri en France, même s'il sait que les britanniques sont sur ses talons.
32:40 Il capte les signaux de leur radar, mais surestime les possibilités offertes par cette technologie nouvelle.
32:55 Lutyens entendait les émissions radar du Suffolk et il pensait que les britanniques connaissaient sa position.
33:03 Ce qu'il ignore, c'est que les signaux radar qu'il entend ne reviennent pas vers les navires émetteurs qui sont trop éloignés les uns des autres.
33:20 A 3h du matin, le 25 mai, les britanniques perdent le contact.
33:25 Pour Lutyens, c'est l'occasion de rallier la France sain et sauf.
33:30 Mais il commet une erreur funeste.
33:34 Il envoie un message décousu, wagnerien, à Berlin, ce qui permet aux britanniques de le retrouver.
33:45 Ironie du sort, alors qu'il a échappé à l'ananas, Lutyens appelle l'Allemagne pour expliquer qu'il se trouve dans une situation épineuse.
33:53 Il n'est ni euphorique, ni pompeux, ni triomphant, mais abattu.
33:59 Les britanniques sont toujours à mes trousses, ils me poursuivent et ils vont me couler.
34:04 Au moment où il passe cet appel, l'amiral a plus d'une heure d'avance sur la flotte britannique.
34:11 Sans ce message, les britanniques auraient eu du mal à le retrouver.
34:16 Cette erreur est grave, mais la Royal Navy en commet alors une encore plus calamiteuse.
34:25 Les britanniques calculent mal la route et croient que le navire va vers le nord, alors qu'il va vers le sud.
34:34 Tauvey n'a plus qu'une seule solution.
34:39 Pour défier le navire le plus performant des mers, il fait appel au vieux biplan embarqué à bord du HMS Ark Royal, des Swordfish.
34:50 Les Swordfish sont des avions complètement surannés.
34:57 Ce sont des biplans, ils ont un petit moteur, un poste de pilotage ouvert.
35:03 Pourtant, le fossé technologique qui sépare les avions et le bateau tourne à l'avantage des premiers.
35:09 Car les canons antiaériens du Bismarck sont trop performants face à des vieux coucous.
35:18 Un officier canonnier a expliqué que les batteries antiaériennes ne pouvaient pas être remplacées par des canons.
35:28 Elles étaient conçues pour des avions volant à 240 km/h, mais ceux-ci volaient à 130, donc les allemands tiraient en avant de leurs cibles et n'ont abattu aucun Swordfish.
35:39 Les avions larguent tous leur torpille.
35:45 Leur moteur est un peu plus puissant que celui de la Britannique.
35:55 Elles filent vers la coque blindée du Bismarck.
35:58 Et même le navire le plus puissant de cet océan a un talon d'achille.
36:05 Il faut bien comprendre que le gouvernail et les hélices sont le point faible de tous les bateaux.
36:12 Il est impossible de les protéger par un blindage ou par quoi que ce soit d'autre.
36:21 Seule option pour le Bismarck, esquiver les torpilles.
36:25 Le capitaine de vaisseau Lindemann ordonne de virer violemment sur bas bord pour éviter les projectiles.
36:34 Mais ce faisant, il expose les fragiles gouvernails.
36:43 Quand la torpille a explosé, le Bismarck était en train de manœuvrer.
36:48 Donc s'il a été touché à cet endroit là, c'est parce qu'il n'a pas eu de chance.
36:54 Les gouvernails du Bismarck s'orientent vers bas bord.
37:01 La torpille touche sa cible.
37:05 Elle explose à l'arrière du local où se trouve le mécanisme des gouvernails.
37:12 Les dégâts qu'elle occasionne entraînent leur blocage et une onde de choc secoue tout le navire.
37:18 Dès lors, il est impossible de manœuvrer le bateau.
37:25 La torpille qui fait mouche stoppe le Bismarck et elle permet sa future destruction.
37:32 C'est le tournant de la chasse.
37:39 Le navire va être coulé, reste juste à savoir quand.
37:43 Au matin du 27 mai, le sort du Bismarck est donc scellé.
37:48 A 10h39, il s'enfonce dans les flots.
37:56 Sa première et dernière mission a duré à peine plus d'une semaine.
38:09 Il a coulé le plus gros croiseur de bataille britannique et trompé les radars de l'ennemi.
38:14 Mais bien qu'il ait été le navire à la technologie la plus avancée de son époque,
38:18 il a été envoyé par le fond par des avions lents et dépassés.
38:22 L'opération a été victime de la malchance et de décisions mal avisées.
38:30 Mais Andrew Lambert est persuadé que l'erreur la plus grave n'a pas été commise en mer.
38:36 Selon lui, la mission était vouée à l'échec avant même que le Bismarck appareille.
38:41 Et la faute incombe au plus haut niveau du Troisième Reich.
38:45 La destruction du Bismarck a été la conséquence de plusieurs grosses erreurs.
38:54 19 mai, H-8 jours.
39:00 Le cuirassé part en mission malgré l'absence de la flotte qui devait l'accompagner.
39:05 Dès le lendemain, le réseau d'espions lève le secret sur l'opération.
39:09 A Bergen, le bateau ne fait pas le plein.
39:14 H-3 jours.
39:22 Lütjens décide de rallier la France plutôt que de rentrer en Norvège
39:26 et appelle Berlin par radio, trahissant sa position.
39:30 H-13 heures.
39:32 Une manœuvre malheureuse pendant le raid des Swordfish conduit à une avarie de barres.
39:37 A 10h39, le 27 mai, le Bismarck sombre.
39:54 D'après Andrew Lambert, l'échec de la mission n'est pas le fait de l'amiral Lütjens.
39:58 Il aurait des origines plus lointaines qui remonteraient au Führer lui-même.
40:05 L'intervention d'Adolf Hitler dans la sortie du Bismarck est relativement limitée.
40:11 La marine ne le passionne pas beaucoup et cet aspect de la guerre ne l'intéresse vraiment pas.
40:19 Jusqu'à cette date, Hitler a eu pour objectif de s'adjuger la suprématie en Europe.
40:24 Et seuls les Britanniques résistent encore à l'ouest du continent.
40:28 Et ils le font seuls, l'URSS et les États-Unis n'étant pas encore entrés en guerre.
40:34 Si le Troisième Reich est victorieux à terre, le Royaume-Uni lui tient tête dans les années 70.
40:46 Si le Troisième Reich est victorieux à terre, le Royaume-Uni lui tient tête dans les aires et sur mer.
40:50 La Crix marine pense que si elle peut dominer l'Atlantique, les îles britanniques capituleront.
40:57 Le Bismarck est l'instrument parfait pour cette stratégie.
41:03 Le Bismarck était le premier gros cuirassé construit par l'Allemagne depuis la Grande Guerre.
41:10 Donc il faisait passer un message très important au sujet de ce pays et de son identité.
41:15 C'était un symbole de l'Allemagne nazie.
41:18 Si Hitler est conscient de la nécessité de disposer de navires aussi imposants et aussi puissants, la guerre navale n'est pas son fort.
41:28 Hitler n'a jamais compris l'océan. Il n'était pas marin dans l'arbre.
41:33 Au contraire, il venait d'Autriche, un pays qui n'a pas de côte.
41:36 Donc l'immensité de l'océan et la guerre qui s'y déroulait lui étaient étrangères.
41:43 Et à cette date, vaincre le Royaume-Uni n'est plus son objectif principal.
41:48 Il a désormais les yeux tournés vers l'Est et prépare l'invasion de l'URSS.
41:54 Pour l'Allemagne, le grand événement de mai 1941, c'est l'opération Barbarossa.
42:01 Hitler se concentre sur la mobilisation d'une armée gigantesque qui doit détruire l'Union soviétique d'ici la fin de l'année.
42:08 Si Hitler envahit l'URSS, il va devoir se battre sur deux fronts, un à l'Ouest et un à l'Est.
42:14 Coupé en deux, son armée sera fragilisée.
42:17 C'est pourquoi il veut fermer le front occidental.
42:22 La marine du Reich pense que le Bismarck est le moyen d'y parvenir.
42:28 Le meilleur moyen d'obliger les Britanniques à cesser de se battre, c'est de détruire l'Union soviétique.
42:36 Et la Kriegsmarine arrive à vendre son idée, parce qu'elle peut résoudre le problème du double front.
42:42 L'opération reçoit donc le feu vert.
42:46 Dans sa précipitation à faire la preuve de l'efficacité de ses nouveaux cuirassés,
42:50 la marine lance l'opération Rhein-Bung à l'insu du Führer.
42:54 Mais le problème pour le Bismarck, c'est qu'Hitler ne s'intéresse déjà plus qu'à l'URSS,
42:59 et les renforts dont l'opération aurait besoin sont engagés ailleurs.
43:03 Tous les dirigeants nazis, hormis les chefs de la marine, ont les yeux tournés vers l'est.
43:09 Donc Rhein-Bung ne recevra pas l'appui aérien dont elle pourrait avoir besoin.
43:14 Elle ne s'inscrira pas dans d'autres opérations,
43:17 et le Bismarck devra se contenter d'un appui très réduit, y compris de la part des sous-marins.
43:22 La Grande-Bretagne a dirigé son immense empire grâce à sa suprématie navale.
43:28 Mais c'est une leçon que le Führer n'a pas retenue.
43:31 Quand le Bismarck apparaît, il manque cruellement de soutien.
43:35 Et huit jours plus tard, il disparaît.
43:44 La formidable nouvelle du naufrage du Bismarck est tombée.
43:48 Dès l'instant où Churchill a annoncé à la Chambre des communes que le Bismarck avait été coulé,
43:54 ça a été un soulagement énorme.
43:56 C'était l'heure la plus sombre de la guerre pour la Grande-Bretagne.
43:59 Le jour où le Bismarck a été découvert,
44:01 le premier ministre de la République, le président de la République,
44:04 et le premier ministre de la République, le premier ministre de la République,
44:07 ont été les premiers à se réunir pour lutter contre le Bismarck.
44:10 C'était l'heure la plus sombre de la guerre pour la Grande-Bretagne.
44:13 La destruction de ce navire est absolument capitale pour la victoire des Alliés.
44:19 Cette semaine de mai 1941 a été un tournant majeur du conflit.
44:28 Si le Bismarck avait mené sa mission à bien et si la Grande-Bretagne avait capitulé,
44:33 il n'y aurait plus eu de tête de pont pour préparer le débarquement en Normandie.
44:38 Lorsque le Bismarck a coulé,
44:40 les Allemands ont perdu toute chance de vaincre les Britanniques et de remporter la guerre.
44:45 (Générique)

Recommandations