Algérie : la politique anti-française continue.

  • l’année dernière
Avec Jocelyne Quesada, membre du Collectif Sauvegarde des cimetières d'Oranie.

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Transcript
00:00 Bien sûr, bien sûr, 1962, 1962, 60 ans, un peu plus de 60 ans, voilà, j'ai quitté mon pays,
00:08 il s'est passé ce qu'il est passé, on ne va pas revenir sur l'histoire.
00:12 Mais quelque chose se passe aujourd'hui, justement, on a parlé avec Virginie Lejaun,
00:17 avec la semaine dernière de Lampedusa, des migrants, etc.
00:20 Et puis, il y a un certain nombre de gens, ils ne sont peut-être pas nombreux, mais ils existent,
00:25 qui ne veulent pas du tout émigrer en Algérie, mais qui veulent aller se recueillir ou soigner le tombe de leurs parents,
00:33 grands-parents, arrière-grands-parents, qui sont morts là-bas.
00:37 Et apparemment, ça pose des problèmes.
00:40 Bonjour, Jocelyne Kessada.
00:41 - Bonjour, monsieur Berkoff, et merci de me permettre de m'exprimer.
00:46 - Bah écoutez, ça fait partie de la liberté d'expression, et c'est la nôtre.
00:52 Vous êtes membre du conseil sauvegarde des cimetières d'Orani.
00:56 Alors, si j'ai bien compris, on vous a refusé votre visa, à vous, d'entrer en Algérie,
01:02 pour aller, vous deviez partir dans un voyage il y a une semaine, deux semaines, et vous n'avez pas pu y aller.
01:08 - Oui, alors nous devions partir du 22 au 27 septembre.
01:15 - Oui.
01:15 - Et nous étions 90 en tout, en deux fois.
01:20 Certains partant le 22, d'autres le 23.
01:23 Il faut dire que ce n'était pas le premier voyage.
01:27 Nous y sommes retournés dès 1982.
01:34 - D'accord.
01:35 Pour la première fois, 20 ans après l'indépendance.
01:38 - Voilà, 20 ans après l'indépendance, en 1982,
01:42 et le voyage avait pris la forme d'un voyage en bateau sur lequel nous étions 600.
01:49 Je ne me rappelle plus si à ce moment-là il fallait un visa, je ne suis pas sûre.
01:55 - D'accord.
01:55 - Voilà. En tout cas, depuis, nous avons fait différents voyages, dont certains...
02:01 - Dont le but était quoi ? De rendre hommage aux tombes de vos parents, grands-parents, de vos familles ?
02:08 - Oui, alors il y avait d'abord, il y a eu des voyages à seulement quelques-uns,
02:12 on était là-bas pour recenser les tombes, les cimetières, les dégâts sur les cimetières,
02:21 et pour essayer d'y remédier.
02:24 - D'accord.
02:25 - Donc, en 2004, lors d'un voyage en Algérie,
02:35 nous avons retrouvé les tombes dans un état lamentable.
02:40 Il s'était écoulé 12 ans depuis notre précédent voyage,
02:45 et pendant ces années-là, c'était la décennie noire, comme ils appellent en Algérie.
02:50 - Oui.
02:50 - Voilà. Et à ce moment-là, nous avons retrouvé nos tombes, nos cimetières saccagées, vandalisées.
02:57 Oui, il y avait bien sûr l'usure du temps, comme on dit certains journalistes,
03:02 mais il y avait surtout eu la main de l'homme.
03:05 Donc, on a vu des tombes, des taveaux ouverts avec des ossements qui traînaient dans les allées.
03:14 - Oui.
03:15 - C'est à ce moment-là que nous avons décidé de faire l'association de sauvegarde des cimetières d'Oralie.
03:21 - D'Oralie, d'accord.
03:22 - Donc, qui a fonctionné jusqu'à maintenant en faisant des voyages seulement pour aller repérer et faire réparer,
03:31 et d'autres avec des gens.
03:35 - D'accord.
03:35 - C'est-à-dire que ce voyage qu'on devait faire cette année était loin d'être le premier,
03:40 et loin d'être aussi le plus nombreux.
03:43 - D'accord, oui, vous étiez 90.
03:45 - Le dernier voyage remontait en 2017 et nous étions 140.
03:48 - D'accord.
03:49 - Et nous n'avons jamais eu de problème pour obtenir des visas, ils nous ont toujours été accordés.
03:54 - D'accord.
03:54 - Donc cette année c'est tout à fait confiant que nous avons donc lancé ce voyage,
04:02 et que nous sommes allés demander nos visas dans les différents consulats de France,
04:08 il y en avait un peu partout.
04:09 - Bien sûr.
04:10 - Mais beaucoup plus dans le Midi, c'est-à-dire qu'à Marseille nous avons déposé le 22 août 19 passeports,
04:19 et à Nice, ils ont déposé...
04:22 - Dans les consulats d'Algérie, quoi, un peu partout.
04:24 - Dans les consulats d'Algérie, de France.
04:26 - D'accord.
04:27 - Donc, on nous avait dit...
04:29 - Alors qu'est-ce qui s'est passé, là ?
04:31 - On nous avait dit "on vous appellera pour que vous reveniez chercher vos passeports avec les visas".
04:37 - Exact.
04:38 - Voyant que ça n'arrivait pas, nous nous sommes quand même agités,
04:43 et nous avons écrit des mails, téléphoné, tout cela est resté sans réponse.
04:49 - Oui, oui.
04:50 - Donc, on avait depuis 3 ou 4 jours avant le départ, connaissance que des visas avaient été refusés dans plusieurs consulats.
05:00 - 3 ou 4 jours avant le départ ?
05:01 - Et pire que cela, certains avaient été acceptés,
05:07 et on a rappelé les gens pour leur dire "revenez, vos visas sont annulés".
05:12 - Ah bon ? D'accord.
05:14 - Ils sont allés dans ces consulats, en particulier à Lyon, à Montpellier, à Metz,
05:20 et on leur a mis sur le visa déjà accordé, un tampon annulé.
05:26 - Ah d'accord, ils avaient accordé le visa et ils ont mis un tampon annulé sur le passeport.
05:31 - Absolument.
05:32 - D'accord.
05:33 - Donc, nous, la veille du départ, finalement, R-Algérie, et non pas le consulat,
05:41 nous a appelés pour nous dire que nos visas étaient refusés, que nous ne pouvions pas partir.
05:46 La veille du départ.
05:47 - Ouais.
05:48 - C'est-à-dire que nos participants au voyage avaient tous leur valise prête.
05:54 - Oui, bien sûr, c'est la veille.
05:55 - Voilà.
05:56 - Et, Josie Kiesiada, est-ce qu'on vous a donné une raison ?
06:00 - Alors, évidemment.
06:02 - Qu'est-ce qu'on vous a dit ?
06:03 - Nous sommes retournés au consulat de Marseille le 26 septembre pour récupérer nos passeports.
06:10 À ce moment-là, nous avons été reçus par le chef du service visa,
06:15 et il nous a dit, d'une part, qu'il n'avait aucune explication à nous donner,
06:21 ajoutant "notre peuple est souverain et a le droit d'accepter chez eux ce qu'il veut".
06:30 Bon. Et ensuite, il nous a dit que, parce qu'on avait payé 110 euros pour nos visas,
06:41 et que ça ne nous serait pas remboursé.
06:43 - Ah bon ? En plus ?
06:44 - Non.
06:45 - Ah, il ne vous a même pas dit "ce sera remboursé". Ah oui, d'accord.
06:48 - Non, non, en plus, oui.
06:49 - Voilà.
06:50 - Donc, pour nous, oui, ce n'est pas bien, mais ce n'est pas le pire.
06:54 - Non, non, bien sûr, mais c'est le geste.
06:57 - Oui, et participant au voyage. Et des optogénères, des septuagénaires,
07:03 voulant retourner, beaucoup retourner pour la première fois,
07:08 disant "je veux revoir mon pays natal avant de mourir".
07:14 - Oui.
07:15 - D'autres plus jeunes voulaient connaître le pays natal de leurs parents.
07:21 Et donc, imaginer leur tristesse, leur désarroi, leur peine.
07:26 - Oui, bien sûr.
07:27 - Leur peine, hein ?
07:28 Quand ils se sont retrouvés devant leur valise pleine,
07:35 et sans pouvoir y aller certains, il y en a une qui nous a dit
07:39 "mais moi j'avais même pris des fleurs artificielles pour les mettre sur la tombe,
07:44 j'avais pris de la peinture pour repeindre les lettres".
07:47 Voilà.
07:48 - Oui, oui.
07:49 - Voilà.
07:50 Donc, évidemment, c'est une situation qui nous met en colère
07:52 parce que nous n'avons pas d'explication.
07:54 Il nous a quand même dit, avant qu'on s'en aille,
07:58 "la prochaine fois, essayez de revenir moins nombreux".
08:02 - Ah bon ?
08:03 Parce qu'il estimait que 90 c'était une invasion ?
08:07 - Peut-être, il pensait qu'on allait reprendre la conquête de l'Algérie.
08:11 - Il vous a dit exactement ça ?
08:12 Attendez, attendez.
08:13 Il vous a dit ça, Jocyn Kessada ?
08:14 Il vous a dit "la prochaine fois, essayez de revenir moins nombreux".
08:16 - Exact.
08:17 - Intéressant, oui.
08:18 D'accord.
08:19 - Oui, voilà.
08:20 - D'accord.
08:21 Mais est-ce que vous allez, alors du coup,
08:24 est-ce que vous allez réagir ou...
08:27 Enfin, je ne dis pas porter plainte parce qu'il n'y a peut-être pas...
08:30 - Non.
08:31 - Juridiquement, il n'y a pas la possibilité.
08:32 - Non.
08:33 - Mais est-ce que vous allez, dans six mois, dans un an,
08:37 réessayer ou pas ?
08:39 - Alors, pour ma part, non.
08:41 C'est terminé pour moi.
08:43 Non, non, non, non.
08:45 Écoutez, on nous a déjà donné un coup de pied en 72,
08:48 un autre maintenant, ça suffit comme ça.
08:50 Les autres, je ne sais pas, ils ont tellement envie d'aller, peut-être,
08:54 mais on aura du mal, nous, nous, hein,
08:57 nous, l'association, à organiser un nouveau voyage.
09:00 - Oui.
09:01 - On aura du mal, je ne sais pas, malheureusement.
09:03 - C'est très étonnant, on va essayer d'avoir, nous, une réponse.
09:08 Mais on est très étonnés, mais je voulais savoir ce qui s'était passé.
09:12 Mais c'est quand même tout à fait étonnant.
09:14 Alors, est-ce que c'est lié au fait du refroidissement
09:17 des relations franco-algériennes ?
09:20 On le sait, pour des tas de raisons, on ne va pas rentrer là-dedans.
09:22 Mais je ne sais pas si vous savez, Jocelyne Kieseda,
09:24 et j'aimerais savoir si, comment vous réagissez,
09:30 vous savez que depuis cette rentrée scolaire en Algérie,
09:32 depuis septembre, les programmes scolaires français
09:35 ne doivent plus être enseignés dans les écoles privées.
09:38 C'est-à-dire que l'enseignement du français est interdit
09:41 dans les écoles privées,
09:43 pas encore dans les écoles publiques, mais est-ce que ça viendra ?
09:46 Qu'est-ce que ça vous inspire ?
09:48 - Mais qu'est-ce que ça m'inspire ?
09:50 De toute façon, on y est allé tout droit.
09:52 Ça ne me surprend pas en tout cas.
09:54 Je peux vous dire, vous pourrez le traîner plusieurs fois en Algérie,
09:57 le français est parlé par tout le monde.
10:01 - Oui, c'est vrai.
10:03 - Mais il y a toute une génération qui s'éteint,
10:07 comme la nôtre d'ailleurs,
10:09 cette génération-là, par les français,
10:13 qui a même parlé, pour ce qui concerne nos rangs, espagnol.
10:17 Et c'était même très drôle, parce qu'il commençait une phrase en arabe,
10:21 il a continué en espagnol et il a poursuivi en français.
10:24 - Bien sûr.
10:25 - Donc cette génération s'éteint.
10:29 Vu les rapports conflictuels,
10:32 c'est le moins qu'on puisse dire, entre la France et l'Algérie,
10:37 ce n'est pas étonnant qu'ils arrêtent le français.
10:40 - Et c'est l'anglais qui va remplacer tout ça.
10:42 - Et c'est l'anglais qui va remplacer le français.
10:45 Il y avait pourtant une association
10:49 qui avait été créée par l'association des panneaux académiques,
10:56 qui s'est occupée pendant des années de promouvoir cette langue française,
11:01 en se déplaçant dans les écoles,
11:04 en faisant même des concours de textes en français.
11:08 Et il y avait des textes en français excellents.
11:11 - Oui, mais vous savez, à partir du moment où il y a une politique,
11:14 une politique globale, une politique générale, c'est ça.
11:17 Joseline Quesada, merci de votre témoignage.
11:20 Je comprends que les gens qui devaient partir, et vous-même,
11:23 vous sentez pas très bien.
11:26 - Non, c'est le moins qu'on puisse dire.
11:28 - C'est le moins qu'on puisse dire. Merci encore.
11:30 - Merci beaucoup.
11:31 - Merci Joseline Quesada.
11:32 Je rappelle que vous êtes membre du collectif Sauvegarde des cimetières d'Orani.

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