Mali : pourquoi l’Azawad reprend les armes contre Bamako

  • l’année dernière
Assiste-t-on au début de la sixième rébellion touarègue depuis l’indépendance du pays ? Analyse des causes de la reprise des combats entre la CMA et les forces armées maliennes par François Soudan.

Le directeur de la rédaction de Jeune Afrique est l’invité de La Semaine de JA, chaque semaine sur RFI.

Plus d’infos : https://www.jeuneafrique.com/1485134/politique/dans-le-nord-du-mali-linquietante-reprise-de-la-guerre/

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00:00 Bonjour François Soudan. Bonjour Catherine.
00:02 A la une de Jeune Afrique cette semaine, le Mali.
00:05 Et cette question, pourquoi est-ce que l'Azawad reprend les armes ?
00:09 Et cela pour la première fois depuis les accords d'Alger qui datent de 2015.
00:13 Or ces dernières semaines de violents combats ont opposé l'armée malienne aux groupes armés Touareg.
00:20 François Soudan, comment en est-on arrivé là ?
00:22 Alors la cause immédiate de ce que la coordination des mouvements de l'Azawad appelle depuis le 11 septembre,
00:27 l'état de guerre et ce qui est peut-être le début de la sixième rébellion Touareg au Mali depuis l'indépendance,
00:33 c'est d'abord le désengagement des casques bleus Laminusma, poussé vers la sortie par les autorités de Bamako.
00:38 Le départ de Laminusma a pour conséquence qu'il n'y a plus de médiateurs possibles sur le terrain entre les deux parties.
00:44 La dernière tentative de négociation, elle a été menée mi-juillet par le patron du renseignement malien, le colonel Kone,
00:49 qui s'est rendu à Kidal pour y rencontrer l'incontournable chef Touareg, Al-Ghabas Agintala, qui est le président de la CMA.
00:56 Manifestement, ça a échoué depuis le dialogue est au point mort, tout comme l'accord d'Alger de 2015, même si Catherine s'y n'est pas encore totalement rompue.
01:04 En tout cas, chaque camp s'accuse mutuellement de la responsabilité de ces combats. Quels sont les arguments des uns et des autres ?
01:12 Alors, il est clair que depuis l'arrivée au pouvoir du colonel Goïta en 2021, il n'y a plus cette dose de confiance minimale entre Bamako
01:19 et les combattants Touareg du nord, sans laquelle rien n'est possible.
01:22 Le pouvoir militaire de transition a fait du rétablissement de la souveraineté de l'État, surtout le Mali, le fondement de sa légitimité.
01:29 Alors bien sûr, quand on regarde la situation sécuritaire, pour le moins dégradée du Mali, ou au pair d'autres groupes armés, notamment djihadistes,
01:36 on voit qu'il y a très loin de la coupe aux lèvres, mais ce mantra souverainiste centralisateur, c'est l'ADN de l'agent.
01:42 Et ça s'accompagne d'une assez grande méfiance vis-à-vis de la composante Touareg et arabe de la société malienne.
01:48 De leur côté, les ex-rebel Touareg ont boycotté le référendum de juin constitutionnel,
01:53 justement parce qu'ils estimaient que ce texte ne consacrait pas la décentralisation prévue par les accords d'Alger et Kadri.
01:59 En tout cas, les violents affrontements qui ont éclaté ces dernières semaines se déroulent aussi sur fond de guerre de communication.
02:07 Est-ce que l'annonce de la création d'une alliance des États du Sahel entre le Mali, le Burkina et le Niger fait partie de cette guerre de communication ?
02:15 Alors, guerre de communication, vous avez raison. Chaque affrontement sur le terrain donne lieu à des communiqués, des vidéos, des récits, des bilans totalement contradictoires.
02:23 D'un côté, la CMA exhibe volontiers ses prisonniers. De l'autre, Bamako, on le sait, est devenue une sorte d'incubateur de toute une kyrielle de faux comptes et de trolls pro-régime,
02:33 dont les infos d'ailleurs sont souvent relayées par la chaîne russe RT. Alors, difficile dans ces conditions de savoir avec précision qui contrôle quoi sur le terrain.
02:42 L'annonce le 16 septembre de la création d'une alliance entre les trois régimes, Bamako, Ouagadougou, Niamey, espèce de G3 Sahel dont l'initiateur, le patron, c'est le colonel Goïta,
02:53 ça relève pour l'instant de l'opération de com', même si sa charte se veut explicite sur le sort à réserver au mouvement irrédentiste ou à régo-Mali,
03:02 mais aussi peut-être demain au Niger où le coup d'État semble les avoir animés. L'article 5 de cette charte du YPTACO Gourma appelle en effet à régler aux besoins par la force
03:11 toute rébellion armée ou menace portant atteinte à l'intégrité du territoire. L'avertissement, on le voit, ou plutôt la sommation est claire.
03:18 Reste à savoir, Catherine, si l'armée malienne a les moyens de mettre en oeuvre une guerre sur deux fronts à la fois,
03:23 même si cette armée de 2023 n'a plus grand chose à voir avec celle de 2012. Ça paraît très compliqué.
03:28 Merci, François Soudan.

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