Coups d'Etat, développement, climat, éducation... Les analyses de Delphine Traoré (SanlamAllianz)

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Delphine Traoré, directrice générale General Insurance de SanlamAllianz, est la Grande invitée de l'économie RFI-Jeune Afrique ce 11 novembre, à quelques jours de l'ouverture de l'Africa Financial Industry Summit - AFIS*, le grand rassemblement de la finance africaine qui se tiendra à Lomé les 15 et 16 novembre.

Bancarisation des ménages, conséquences des changements climatiques, pandémie, éducation, agriculture, elle revient pour JA sur la manière dont l'assurance s'inscrit dans l'économie des pays au sens large, et dont le secteur peut contribuer à solidifier la finance africaine. Elle lève également le voile sur son parcours atypique de femme africaine leader sur le continent et au-delà.

L'entretien est à lire en intégralité ici : https://www.jeuneafrique.com/1503191/economie-entreprises/delphine-traore-linclusion-financiere-pour-un-grand-groupe-veut-aussi-dire-rester-dans-le-pays-peu-importe-le-contexte/

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Transcription
00:00 Ecodici, Ecodailleurs, le grand invité de l'économie RFI Jeune Afrique, Auréline Bida, Bruno Fort.
00:09 Bonjour, bonjour à tous. Bienvenue, installez-vous confortablement. C'est le moment du grand invité de l'économie RFI Jeune Afrique,
00:19 émission que j'ai le plaisir d'animer avec ma camarade de Jeune Afrique, Auréline Bida. Bonjour Aurélie.
00:25 Bonjour Bruno, bonjour à tous.
00:27 Et c'est une invitée que nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui, une dirigeante qui bouscule le monde de la finance et de l'assurance.
00:34 Bonjour Delphine Traoré.
00:36 Bonjour Bruno, bonjour Aurélie. Merci pour l'invitation.
00:39 Merci à vous surtout d'être venue dans les studios de RFI.
00:42 Vous êtes la directrice générale assurance non-vie de Sanlam Alliance.
00:46 Alliance, c'est un des géants du secteur de l'assurance dans le monde.
00:50 Dans quelques jours, vous allez participer à l'Afiz, le grand rassemblement de l'industrie financière africaine
00:56 qui se tient à Lomé au Togo, ce secteur des assurances qui se développe sur le continent.
01:01 Vous allez avoir largement le temps de nous expliquer comment et surtout quels sont vos projets.
01:06 D'abord Auréline Bida, retrace votre parcours personnel et professionnel.
01:12 Alors Delphine Traoré, vous êtes une figure, si ce n'est la figure féminine des assurances en Afrique.
01:19 En effet, vous avez intégré le cercle très restreint des décideurs de la finance africaine il y a tout juste deux ans.
01:26 Le 1er novembre 2021, vous êtes en effet devenue directrice générale d'Alliance Africa,
01:31 l'entité régionale du géant mondial des assurances qui pèse pas moins de 152 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
01:39 Une nomination qui vous avalie plusieurs récompenses dont en juin dernier,
01:45 lors de l'Africa CEO Forum organisé par le groupe Jeune Afrique, vous avez été désignée CEO of the Year parmi une demi douzaine de concurrents.
01:56 Dirigeante de l'année et on va revivre en image ce moment important de votre vie.
02:02 Et le gagnant est...
02:05 On fait annoncer.
02:06 Le gagnant est...
02:08 La seule femme sur ce...
02:10 Wouhou !
02:13 Il s'agit bien de Delphine Traoré, de Alliance...
02:38 ...sous les ovations du public et ce sont des ovations bien méritées.
02:44 Comme quoi Delphine Traoré, même quand on est une dirigeante d'entreprise avec de l'expérience, on peut encore avoir des émotions.
02:52 Je suis encore très émue de revoir. C'est un moment très spécial.
02:59 C'était un honneur. C'était un honneur pour moi. C'était un honneur pour les femmes.
03:04 C'était un honneur pour tout le travail qu'on a fait depuis 18 mois, Sainte-Name et Alliance, de créer ce partenariat ensemble.
03:14 On va en parler tout à l'heure.
03:15 Je suis encore... Ça me donne encore la chair de poule de voir tout ça.
03:18 Un patron, on dit souvent que vous êtes des rocs.
03:22 Rien ne peut vous atteindre quand même.
03:26 On donne cette façade mais au fond on a quand même un cœur.
03:32 Votre extension ne s'est pas arrêtée là et à cet award puisque très récemment, en septembre dernier, votre entreprise a fusionné ses activités avec celle d'un autre géant panafricain.
03:45 Celui-là, il s'agit du groupe originaire d'Afrique du Sud San Lam et à vous deux, vous vous asseyez désormais sur une empreinte géographique de 30 pays du continent.
03:56 C'est vous, Delphine Traoré, qui pilotez l'activité Assurance non-vie, les dommages, les incendies, accidents, risques divers pour le groupe qui a été simplement rebaptisé San Lam Alliance.
04:09 On va tout expliquer tout à l'heure sur ce mariage.
04:12 Un autre fait notable qui démontre votre influence dans cette grosse machine, si je puis dire,
04:19 c'est qu'en 2017, quand vous accédez au poste de directrice des opérations de la branche Afrique d'Alliance, vous êtes devenue la seule femme noire à bord.
04:29 Alors ça rend beaucoup mieux en anglais parce qu'on dit « the only black woman on board ».
04:35 Le conseil d'administration est en effet communément appelé le « board » dans le milieu des affaires.
04:41 L'anglais, langue des affaires, mais aussi langue que vous avez très rapidement intégrée dès le début de vos études et de votre carrière.
04:49 Justement, on va évoquer vos débuts. Vous êtes partie du Burkina Faso. Il y a eu les États-Unis. Il y a eu le Canada avant votre retour en Afrique.
04:58 Voilà, effectivement, Delphine Traoré, vous êtes originaire de la ville d'Oro Dara, un petit village près de Bobo di Olasso, la deuxième ville du Burkina Faso.
05:09 Votre première langue avant vos cinq ans, ce n'était ni le français, ni l'anglais, mais le siamou, un idiome crou parlé dans le sud-ouest du pays.
05:18 C'est votre papa, Jules Décrins Traoré, qui était alors un ancien diplomate dans le génie rural, qui a ourdi de grands projets pour ses trois filles, autant que pour son fils unique.
05:30 Puisant dans ses économies, il vous envoie à l'université aux États-Unis. Vous partez à la Boston University.
05:37 Et alors que vous imaginez une carrière en tant qu'interprète ou experte comptable, c'est encore votre père qui vous encourage à vous diriger vers la finance.
05:47 – Vous n'avez pas regretté. – Vos recherches, elles sont excellentes.
05:50 Donc c'est comme ça que vous décrochez votre premier emploi, au sein d'une compagnie d'assurance aux États-Unis.
05:57 Et puis c'est en 2005, en allant un peu vite, que vous rejoignez le groupe Allianz.
06:02 Nous sommes au Canada et vous occupez plusieurs postes à responsabilité au sein d'une filiale dédiée aux services de gestion des risques.
06:10 Et puis pour cette même entité, vous remettez les pieds sur le continent.
06:15 C'est en 2012, à Johannesburg, avant d'intégrer Allianz Africa début 2017 à Abidjan.
06:22 J'ai une petite question là-dessus. Que représente pour vous votre parcours d'Orodhara à Abidjan, en passant par l'Amérique du Nord ?
06:30 Que doit retenir de votre cheminement une jeune Africaine ou un jeune Africain qui a envie d'entreprendre aujourd'hui ?
06:37 – C'est rare que j'entende le parcours réexpliqué comme ça. Mais en fait, qu'est-ce qu'on doit entendre d'un jeune ?
06:50 Il y a une histoire de résilience quand même.
06:53 C'était pas simple pour une jeune fille d'Orodhara de débarquer aux États-Unis ne parlant même pas anglais.
07:00 Mon père est venu avec moi, il est resté avec moi une semaine.
07:04 Et après il m'a dit, bon, on a beaucoup d'attentes. Assure-toi de nous rendre fiers.
07:12 Tu as aussi tes frères et tes sœurs qui te regardent.
07:16 Donc j'y étais avec beaucoup de responsabilité. Je me disais qu'il fallait vraiment que je rende non seulement mon frère, mais aussi l'Afrique fière.
07:27 Mais c'est aussi un parcours où on se dit, rien n'est impossible en fait.
07:33 Et c'est beaucoup ce que j'ai appris aux États-Unis.
07:35 C'est-à-dire, tout peut être fait si on décide qu'on va essayer d'atteindre un certain seuil ou une certaine évolution dans sa carrière.
07:45 Il n'y a personne qui peut nous arrêter essentiellement.
07:47 Et ils sont encore plus nombreux aujourd'hui, ces jeunes Africains et ces jeunes Africaines à traverser l'Atlantique et à relever ce défi.
07:56 Et parfois ça ne fonctionne pas d'ailleurs.
07:58 Ça ne fonctionne pas toujours, mais c'est important aussi d'être clair dans sa tête, de savoir ce qu'on veut accomplir à la fin en fait.
08:08 Moi quand je suis partie, c'était toujours avec un plan de revenir sur l'Afrique.
08:12 Ce n'était pas de rester en Amérique du Nord tout le reste de ma vie.
08:15 Je me disais que l'Afrique avait besoin de certains talents.
08:20 Donc c'est bien beau d'aller aux États-Unis, au Canada, partout un peu pour étudier, mais on a quand même besoin de certains talents en Afrique.
08:29 On peut retrouver une Delphine Traoré un peu partout aux États-Unis, au Canada, en Europe.
08:34 Mais on n'est pas nombreuses en Afrique.
08:37 Donc c'était important pour moi et pour mon père d'ailleurs que je revienne sur le continent africain.
08:41 CQFD, ce qu'il fallait démontrer.
08:43 Delphine Traoré, directrice générale d'Allianz Afrique et notre grand invité de l'économie RFI Jeune Afrique.
08:50 A visionner, à partager, à commenter sur la chaîne YouTube de RFI rubrique "Les invités de l'économie".
08:56 Entretiens à lire aussi dès maintenant dans les colonnes de Jeune Afrique sur le site jeuneafrique.com.
09:03 Bonne émission à toutes et à tous.
09:05 [Musique]
09:15 D'abord Delphine Traoré, pour se fixer les idées, pour mieux connaître ce secteur des assurances en Afrique.
09:22 Combien de personnes environ cela fait travailler et où les marchés sont-ils les plus matures, les plus aboutis ?
09:31 Si on regarde un peu le domaine de l'assurance en Afrique, on parle de primes d'environ 80 milliards d'euros aujourd'hui.
09:39 70% c'est en Afrique du Sud. Le reste des 53 pays se partagent le reste des parts de gâteau.
09:46 Et même là, il y a encore une concentration sur 10 pays.
09:49 Donc les 10 pays hors de l'Afrique du Sud qui se partagent 90% du chiffre.
09:55 Ce qui se voit beaucoup en Afrique du Nord et aussi en Afrique de l'Est en particulier.
10:02 Quel type de couverture d'assurance on retrouve aujourd'hui en Afrique ?
10:07 Est-ce qu'il y a des assurances plus spécifiquement utilisées sur le continent qu'ailleurs dans le monde ?
10:11 Ou en fait on retrouve les mêmes produits partout ?
10:14 On retrouve un peu les mêmes produits mais la partie qui est beaucoup plus achetée en ce moment,
10:19 parce que c'est aussi réglementé par beaucoup de pays, c'est l'assurance auto,
10:23 qui représente une bonne partie de notre chiffre d'affaires à nous et puis aussi à d'autres compagnies d'assurance.
10:28 Mais avec la santé aussi qui commence à prendre de l'avant,
10:34 puisque le taux d'humanisation aussi sur le continent commence à croître.
10:38 Donc il y a beaucoup qui commencent à acheter de l'assurance santé.
10:42 Mais une grosse partie aussi c'est tout ce qui est assurance des investissements,
10:45 des projets d'infrastructures sur le continent africain
10:49 qui prennent une bonne part de gâteau de nos primes d'assurance en effet.
10:53 Alors on peut se demander comment ce secteur de l'assurance aujourd'hui peut contribuer plus généralement
10:59 à l'émergence d'une industrie financière solide en Afrique.
11:05 L'idée c'est de se mesurer aux grandes puissances économiques de la planète
11:11 et puis aussi d'être auto-suffisante. C'est ça l'objectif.
11:16 On n'est que huitième sur le monde, le marché des assurances africains,
11:20 et huitième dans le monde, le taux de pénétration que tout le monde connaît,
11:23 à moins de 1% quand on sort, quand on exclut l'Afrique du Sud.
11:28 Mais on a tous des responsabilités, non seulement les compagnies d'assurance,
11:33 il y a aussi la responsabilité des régulateurs,
11:37 de s'assurer que les populations africaines comprennent un peu ce que c'est que l'assurance.
11:43 Dans le domaine financier en particulier, quand on regarde le taux de bancarisation,
11:47 il est beaucoup plus élevé, on parle de 48%.
11:50 On regarde le taux de pénétration de la téléphonie mobile qui est très élevé,
11:54 on a près de 500 millions de personnes en Afrique qui ont la téléphonie mobile.
11:59 C'est important aussi pour les assureurs de travailler en étroite collaboration
12:04 avec les banques, avec les compagnies de téléphonie mobile
12:09 pour pouvoir partager les produits d'assurance.
12:12 C'est un des sujets que vous évoquerez lors de la FISE,
12:16 cette réunion allômée au Togo de l'industrie financière.
12:21 L'idée, c'est de faire émerger cette industrie potentielle,
12:26 1 500 milliards de dollars, nous dit-on.
12:30 Comment faire pour que l'assurance ne soit pas le petit pousset de la banque
12:36 ou des investissements financiers qui, on le sait, explosent sur la planète ?
12:41 Une des grandes discussions qu'on a avec nos homologues de la banque,
12:45 c'est de dire quand ils font des prêts, que ce soit des prêts immobiliers,
12:51 que ce soit des prêts de véhicules ou quels autres prêts,
12:54 ce sont des actifs, dans des actifs que ces personnes investissent.
12:58 Donc c'est très important aussi de s'assurer que les actifs dont les banques prêtent,
13:05 prêtent de l'argent, il faut qu'on s'assure qu'ils soient aussi assurés.
13:08 Donc il y a ces grandes discussions qu'on a avec nos partenaires en banque,
13:13 les PME qui doivent être assurés, qui ont besoin de financement pour se développer.
13:17 Donc c'est important qu'on travaille ensemble dans le domaine financier.
13:20 Les assureurs ne peuvent pas travailler seuls, les banquiers ne peuvent pas travailler seuls.
13:24 Mais je pense que pour vraiment booster l'économie financière
13:29 dans le domaine financier en Afrique, c'est important qu'on travaille ensemble.
13:32 C'est pour ça que la FISE est brillante comme initiative,
13:36 d'avoir tout le domaine financier africain à la même table,
13:39 pour voir comment on peut contribuer ensemble au développement de l'économie de notre pays.
13:43 Alors le financement des petites entreprises, on va en parler dans quelques minutes.
13:46 Parlons d'abord de ce rapprochement entre Allianz et le Sud-Africain Sandlam.
13:52 Oui, effectivement, il y a une autre façon de travailler ensemble et d'être plus fort ensemble.
13:58 C'est l'exemple de votre partenariat avec Sandlam en Etat.
14:03 Qu'est-ce qui a motivé ce rapprochement entre deux vraiment géants,
14:07 qui avaient déjà des parts de marché importantes en Afrique ?
14:11 Qu'est-ce qui a fait que vous décidiez de vous entendre et en un an et demi se soit ficelé ?
14:16 On avait un objectif en commun.
14:19 La première chose, c'est comment développer davantage le secteur des assurances en Afrique.
14:25 Nous, on y était, quand je dis nous, Allianz y était, ça faisait plus de 100 ans.
14:30 Sandlam est aussi sur le territoire africain depuis plus de 100 ans.
14:34 Ils connaissent mieux le continent que nous, parce qu'ils étaient dans près de 27 pays déjà.
14:40 Nous, on a la vision un peu globale des assurances.
14:44 On a des produits, on a des practices dans le monde qu'on pense qu'on pouvait emmener en Afrique aussi.
14:50 Pour créer un leader africain, c'était important qu'on se mette ensemble,
14:55 que chacun emmène ses compétences.
14:57 Avec ça, on devient un leader incontesté, avec 16% de parts de marché hors de l'Afrique du Sud,
15:03 dans 27 pays, 80 filiales.
15:07 C'était important pour nous.
15:11 Vous avez dit que ce secteur est très concentré dans quelques pays,
15:15 en tout cas, le poids de ce secteur est très concentré dans quelques pays.
15:19 Comment vous faites d'un point de vue stratégique,
15:23 quand vous devez quand même aussi être présent dans des pays où l'assurance représente beaucoup moins ?
15:30 Dans ces pays, un des plans qu'on a, c'est de dire qu'on sera numéro 1 ou numéro 3 dans chacun,
15:38 dans les pays où on est, entre 1 et 3.
15:41 Quel que soit le pays.
15:42 Quel que soit le pays.
15:43 Donc, soit ça sera quand on n'est pas à ce niveau, soit on aide la filiale en particulier à croître.
15:50 Ce qui est important aussi, c'est de s'assurer qu'on assure les non-assurés.
15:54 Ce n'est pas forcément se battre pour les parts de gâteau avec la compétition dans les pays,
15:59 mais la seule manière aussi de croître le domaine de l'assurance,
16:02 c'est de s'assurer que les non-assurés commencent à prendre des produits d'assurance.
16:07 Donc, il y a ça, mais il y a aussi ce qui n'est pas exclu,
16:09 c'est de voir dans certains pays comment on peut réinvestir,
16:14 racheter d'autres sociétés quand on n'est pas numéro 1 ou numéro 3.
16:18 Donc, c'est une vision qui est assez claire pour nous.
16:21 La seule manière d'être un leader panafricain, c'est d'être dans la plupart des pays,
16:26 mais aussi dans les pays où le secteur des assurances n'est pas développé.
16:30 C'est aussi notre responsabilité d'aider ce pays à développer le secteur des assurances
16:34 en offrant des produits qui peuvent nous aider à le faire.
16:39 Dans ce panorama, il y a aussi des acteurs de taille intermédiaire
16:42 qui parfois sont même leaders dans leur marché.
16:46 On peut regarder par exemple Sonu de Feu Pate et Dion,
16:50 il y a Ncia de Jean-Cacou Diagou, bien encore Activa, Richard Lowey en Afrique centrale.
16:56 Toutes ces figures sont d'ailleurs des figures emblématiques de l'assurance en Afrique.
17:00 Y a-t-il de la place pour tout le monde et pour toutes ces figures ?
17:04 Absolument. On parle de taux de pénétration de 1% en Afrique.
17:09 Donc, toutes ces figures et nous-mêmes, c'est notre responsabilité d'augmenter ce taux de pénétration.
17:14 L'objectif, ce n'est pas de rentrer en compétition directe les uns avec les autres.
17:19 Il faut qu'on fasse grossir le gâteau.
17:21 Il faut qu'on fasse grossir le gâteau si on veut développer le secteur des assurances.
17:25 C'est notre responsabilité à tous de le faire.
17:27 Et mieux protéger les gens, effectivement.
17:30 Vous n'allez pas partir du continent africain comme le font ou envisagent de le faire certaines banques, par exemple.
17:37 Nous, on le dit depuis plusieurs années et on est là.
17:40 Quand je dis "on", c'est Sandlam Alliance.
17:43 Sandlam, c'est un groupe africain.
17:46 Sandlam ne partira pas de l'Afrique.
17:49 Et une des raisons pour lesquelles on s'est associé avec Sandlam,
17:53 c'est que l'Afrique représentait une part pas très importante pour le groupe Alliance.
17:59 Mais parce que l'Alliance croit en Afrique,
18:02 on s'est dit que c'est plus important pour nous d'être actionnaires dans une société beaucoup plus large que celle qu'on avait avant.
18:09 Et avec le groupe Sandlam Alliance, maintenant, on représente une partie très importante du marché africain.
18:17 Delphine Traoré, directrice générale d'Allianz Africa,
18:20 est la grande invitée de l'économie RFI Jeune Afrique.
18:23 Parlons des banques, justement, chargées de financer les particuliers, mais aussi les entreprises.
18:29 On pense avant tout aux jeunes entrepreneurs qui ont besoin de se lancer.
18:33 Je voudrais que l'on écoute un de vos compatriotes.
18:36 Burkinabé, il s'appelle Harry Lionel Wangrawa.
18:39 Il est président du business club manager Burkina Faso.
18:43 C'est le côté garantie qui pose problème.
18:46 S'il n'y a pas de garantie, il n'y aura pas d'accompagnement.
18:50 Donc ça rend les choses un peu plus difficiles.
18:53 Et c'est l'un des problèmes vraiment cruciaux.
18:57 Mais nous avons des gens qui nous accompagnent.
19:01 Nous avons des mentors.
19:03 Quand je dis mentor, je parle spécifiquement du secrétaire permanent du salon des banques et PME de Lyon-Moi,
19:11 qui nous accompagne depuis nos débuts.
19:14 Voilà, en ce qui concerne tout ce qui est accompagnement.
19:17 Donc, vu qu'ils sont encore un peu plus aguerris en termes de finance, d'accompagnement et de relations entreprise-banque, PME-banque,
19:29 ils réussissent à nous guider pour qu'on puisse aller taper à la bonne porte, sans pour autant avoir des problèmes plus tard.
19:43 Delphine Traoré, cette question des garanties, ces jeunes entrepreneurs qui en ont besoin pour accéder au financement,
19:50 est-ce que la finance africaine est suffisamment à l'écoute de ces jeunes entrepreneurs ?
19:55 Je ne pense pas malheureusement.
19:58 Et c'est important aussi de donner une opportunité.
20:02 Si on veut développer le secteur, notre économie en Afrique, c'est important aussi que les banques prennent certains risques.
20:11 Mes partenaires bancaires vont sûrement se fâcher, mais c'est important.
20:18 Les taux d'intérêt sont élevés, les crédits ne sont pas disponibles.
20:26 La plupart de ces jeunes entrepreneurs, quand ils veulent commencer une affaire, évidemment, ils n'ont pas de garantie.
20:33 Mais si on veut vraiment développer ce secteur, il faut avoir foi en ces gens-là.
20:38 Il faut les accompagner, parce que ce sont ces gens qui vont devenir les grands clients de ces banques à long terme.
20:47 Mais je pense qu'on a encore beaucoup à faire dans ce domaine.
20:49 Le jeune homme qu'on vient d'écouter, il est encore étudiant.
20:52 Il est entre l'université et l'entreprise. Il est vraiment à ce moment de bascule dans la vie.
20:58 Exactement. Sans rien, sans garantie.
21:02 Mais je pense qu'il faut parfois les écouter.
21:05 Dans le reste du monde, ce sont des jeunes entrepreneurs qui sont devenus les leaders économiques des grandes nations.
21:13 Donc je pense qu'en Afrique, on devrait faire un peu plus pour ces jeunes-là.
21:17 Auréline Vida, de Jeune Afrique.
21:18 Bruno l'a un peu évoqué tout à l'heure.
21:20 Ces derniers mois, on a vécu le départ de nombreux groupes bancaires internationaux de tout ou partie du continent.
21:27 D'ailleurs, il y a eu BNP, Société Générale en partie.
21:30 Il y a eu le Britannique Standard Chartered.
21:33 Tous cèdent leur position, jugeant qu'en fait, les pays ne sont pas assez rentables par rapport aux risques de conformité, etc.
21:42 qui les a fait partir, qui leur a donné le choix de partir.
21:46 Est-ce que t'ont devoir des géants mondiaux, des assurances, quitter l'Afrique ?
21:50 Vous avez répondu pour, sans l'amaliance, mais pour les autres.
21:54 Je dis souvent que c'est important pour faire du business en Afrique, il faut avoir une vision qui est long terme.
22:03 Pas une vision de 5, 6, 7 ans, mais une vision de long terme.
22:07 Nous, on est là, ça fait plus de 125 ans.
22:09 On a traversé toutes sortes de crises en Afrique.
22:11 On a traversé des moments où on n'était pas rentable, mais en se disant que l'opportunité reviendra où on sera rentable.
22:19 Et c'est comme ça qu'on est resté.
22:21 Mais il faut avoir l'appétit du risque pour opérer en Afrique.
22:25 Et nous, on est là pour rester.
22:29 Il n'y a plus vraiment de grosses compagnies d'assurance internationale qui couvrent tout le continent.
22:37 Il y en a une bonne partie qui ont fermé leur filiale ici et là.
22:41 Donc c'est une opportunité pour nous comme grand groupe africain.
22:45 Mais on est là pour rester.
22:49 Pourquoi les autres partent ?
22:51 Ça dépend de leur vision de l'Afrique à long terme.
22:55 Nous, on est africains d'abord, donc on sera là pour plus longtemps que prévu.
22:59 Alors on va parler d'Elphintra Horé, des risques que vous assurez.
23:04 On sait que le monde a changé depuis le Covid, depuis la guerre en Ukraine.
23:08 Ce Covid qui a fait mourir près de 7 millions de personnes dans le monde, 60 par jour en Afrique en 2022.
23:19 La pandémie a été un électrochoc, on le sait, pour les Etats, pour les populations.
23:24 Et pourtant, il n'existe pas aujourd'hui en tout cas d'assurance pandémie.
23:29 Parce qu'il risque d'y en avoir d'autres, des virus.
23:33 Est-ce que vous trouvez ça normal ?
23:35 Les compagnies d'assurance en général sont là aussi pour pouvoir survivre à long terme.
23:43 Si on doit assurer des risques systémiques comme la pandémie,
23:48 après une autre pandémie, on n'aura plus d'assureurs dans le monde.
23:52 Ça serait trop d'un coup.
23:53 Exactement.
23:54 Donc c'est important aussi qu'on mesure un peu nos risques.
23:59 Il y a eu des situations où le monde a eu besoin de nous,
24:05 surtout pendant la Covid, il y a certains risques qui n'étaient pas assurés.
24:08 Pas mal d'assureurs ont quand même payé des sinistres qui n'étaient pas assurés,
24:12 parce qu'on était quand même dans une crise assez importante dans le monde.
24:15 Mais il faut garder en tête aussi qu'il y a certains risques qui ne sont pas assurables.
24:23 Et si les compagnies d'assurance ouvrent les portes à assurer ce genre de risque,
24:30 on ne sera pas là dans 10, 20, 30 ans.
24:32 On a quand même des personnes sur la planète, des terriens,
24:36 qui sont davantage préoccupés par leur santé de façon générale,
24:40 en dehors des épidémies, depuis cette période-là.
24:43 L'assurance santé a quand même eu une croissance.
24:47 Juste après la Covid, une des rares bonnes nouvelles,
24:51 c'est de voir quand même que les populations ont commencé à prendre un peu plus de conscience
24:56 sur leur assurance santé.
24:59 Donc on a vu une croissance en assurance santé pendant cette période-là.
25:04 Mais en même temps, c'est un domaine des assurances qui n'est pas en général,
25:10 en Afrique en général, qui n'est pas très profitable pour les compagnies d'assurance.
25:14 Ça a du mal, que ce soit pour des raisons de fraude,
25:18 ou bien de la situation sanitaire en général,
25:22 ou bien de la santé des populations.
25:25 C'est une branche qui n'est pas vraiment rentable.
25:28 Donc c'est aussi une opportunité pour nous de voir comment on la rend rentable à long terme
25:32 pour pouvoir rester dans ce marché.
25:34 Il y a une branche qui est rentable, c'est l'assurance vie.
25:37 En revanche, si on regarde, basiquement, les gens vivent de plus en plus longtemps,
25:42 est-ce que finalement ça va rester intéressant pour un assureur de surfer sur ce créneau,
25:46 dans un monde qui change, avec des gens qui soignent mieux et qui vivent plus longtemps ?
25:52 N'oubliez pas que l'assurance vie aussi quand les clients payent leur assurance vie.
26:00 Cet argent est investi aussi.
26:03 Plus ils vivent longtemps, plus l'investissement est rentable.
26:08 On n'assure pas les gens en espérant qu'il y ait un problème à long terme,
26:17 mais c'est aussi de s'assurer qu'on investisse cet argent qu'on reçoit d'eux,
26:21 pour s'assurer que le jour où ils ne sont pas là où leur famille en aura besoin,
26:24 qu'on puisse... Donc ça va rester rentable, je pense.
26:27 Le monde d'aujourd'hui est aussi préoccupé par les dérèglements climatiques.
26:31 C'est un sujet que vous évoquez souvent, énormément de catastrophes naturelles sur la planète,
26:37 et notamment en Afrique.
26:39 Quel rôle doivent jouer, selon vous, les assurances ?
26:43 Comment doivent-elles s'adapter dans ce contexte ?
26:46 Les assurances et plus largement le secteur privé, la finance, de manière générale.
26:52 Il y a plusieurs manières.
26:54 Si on parle d'abord d'adaptation, parce que c'est le problème qu'on court en Afrique,
27:00 on a un gros problème de financement à l'adaptation climatique en Afrique.
27:05 Il y a un gap d'environ 40 milliards de dollars par an,
27:09 où nos États manquent d'investissement.
27:14 Donc c'est important aussi pour les assurances de jouer un rôle dans ce sens.
27:18 On a beaucoup d'actifs à investir.
27:20 Donc on a tendance à investir dans tout ce qui est projets renouvelables.
27:24 On investit dans l'agriculture aussi, pour s'assurer que les sécheresses,
27:30 au cas où il y a des sécheresses qu'elles soient couvertes,
27:33 ou s'il y a des inondations qu'elles soient couvertes.
27:35 Donc le rôle de l'assurance, c'est vraiment non seulement d'investir pour l'adaptation,
27:42 mais aussi l'atténuation du changement climatique.
27:45 Quand on regarde en Afrique, en 2022, on a près de 8 milliards de dollars de pertes,
27:53 de dommages liés au changement climatique, que ce soit des sécheresses,
27:56 que ce soit des inondations.
27:58 Et la plupart de ces dommages ne sont pas assurés.
28:01 Donc c'est important aussi qu'on joue un rôle.
28:03 Mais il y a aussi un rôle de sensibilisation à faire.
28:05 Vous vous assurez des entreprises, des organisations ?
28:08 Des entreprises, des organisations, au niveau de Solidarn Alliance,
28:12 mais aussi quand on regarde un peu le domaine des assurances en général,
28:15 il y a aussi une opportunité d'assurer les États.
28:18 Donc les États prennent des assurances pour les populations les plus vulnérables dans leur pays.
28:24 Mais en général, ce qu'on trouve, c'est que ces États n'ont pas toujours les fonds
28:27 pour payer les primes d'assurance.
28:29 Donc il y a les États qu'il faut assurer,
28:31 il y a les agriculteurs qu'il faut assurer en direct,
28:34 il y a aussi les sociétés qu'on peut assurer.
28:36 Aurélie Bida ?
28:38 On va parler un petit peu aussi des conséquences des changements climatiques
28:41 et du moins des règles que sont mises les États du monde lors des COP.
28:46 Dans un récent rapport qui s'appelle "Insure our Future",
28:51 pour l'anglicisme encore,
28:53 ils classent chaque année 30 des principaux assureurs et réassureurs mondiaux
28:58 qui ont un rapport politique sur les énergies fossiles.
29:01 Il apparaît dans ce rapport que la plupart d'entre eux
29:04 continuent de financer les industries fossiles,
29:08 donc en gros à contribuer au dérèglement climatique.
29:12 Il y a plusieurs assureurs qui sont mentionnés, dont Allianz,
29:15 dont Tube, AXA, Zurich, AIG, tout le monde en fait.
29:20 Faut-il selon vous cesser de financer et aussi d'assurer
29:24 les projets relatifs à l'industrie fossile ?
29:27 Nous, on a, et quand je dis nous, c'est Salam Allianz en général,
29:33 on a une politique d'investissement et puis d'assurance aussi
29:38 qui permet de réduire, enfin notre contribution à la réduction au changement climatique.
29:43 Tout ce qui est investissement, on investit plus dans tout ce qui est énergie renouvelable,
29:49 tout ce qui est oil and gas,
29:51 on évite d'investir surtout dans les nouveaux projets de oil and gas,
29:58 projets d'exploration, nouvelles infrastructures oil and gas,
30:02 pour vraiment essayer d'éviter de contribuer à ce changement climatique.
30:07 Donc à long terme, sans Salam Allianz en Afrique,
30:14 on va de moins en moins investir.
30:16 Donc vous dites on n'investit pas dans de nouveaux projets,
30:19 mais les projets existants ?
30:21 Si les investissements étaient déjà là,
30:23 il y a des projets dans lesquels on a investi il y a plusieurs années,
30:27 on ne va pas les sortir,
30:30 mais tout ce qui est nouveaux projets, on n'investit plus à long terme dans ce genre de projet.
30:36 Pourtant en Afrique, en apportant un sous-sol qui est riche en hydrocarbures,
30:42 il y a plusieurs écoles là-dessus et il y a une école aussi sur
30:45 "il faut nous laisser, nous Africains, exploiter nos ressources".
30:50 Vous inscrivez dans quelle école ?
30:52 Je m'inscris dans l'école du groupe,
30:55 c'est une discussion que j'ai aussi à long terme.
31:01 La planète c'est une ressource qui appartient à tout le monde.
31:06 Donc si on dit aujourd'hui,
31:08 parce que d'autres ont plus contribué à l'impact,
31:14 à ce changement climatique,
31:16 et tout simplement parce que d'autres pays se sont développés à cause de ça,
31:20 et maintenant il faut qu'on laisse l'Afrique faire la même chose,
31:23 on n'arrivera pas au net zéro en 2050.
31:26 Alors justement sur ce sujet,
31:28 vous avez eu assez récemment, il y a quelques semaines,
31:30 une conversation télévisée avec le chancelier allemand Olaf Scholz.
31:35 Je vous propose de l'écouter lors de ce petit extrait.
31:39 Beaucoup de personnes en Afrique me posent la même question.
31:50 Qu'est-ce que cela veut dire d'essayer d'être neutre sur le plan climatique en 2045,
31:55 alors que nous ne sommes responsables que de 2% des émissions mondiales ?
31:59 Agissons ailleurs, dans les pays riches, ça sera plus efficace.
32:02 Ce que je leur réponds, c'est que même si la croissance est forte,
32:05 et elle va être forte dans les pays du sud global, particulièrement en Afrique,
32:09 on ne pourra plus vivre sur cette planète
32:11 si les 10 milliards de terriens que nous serons à la moitié du siècle
32:14 veulent vivre de la même façon,
32:16 en utilisant les énergies fossiles, le pétrole et le gaz.
32:19 La planète ne pourra pas survivre à cela.
32:26 Alors c'était au mois de septembre dernier.
32:31 Que signifie être neutre en carbone à l'horizon 2050,
32:35 quand on émet très peu de gaz à effet de serre, je parle de l'Afrique,
32:39 et comment l'Afrique peut bénéficier de cette baisse globale des émissions ?
32:45 Quelle est votre réponse ?
32:47 Je répète une chose que je dis souvent, la planète c'est un bien public.
32:54 C'est important, et c'est ce que j'ai dit aussi au chancelier pendant la discussion,
33:01 c'est important aussi, l'Afrique, le monde entier n'atteindra pas le net zéro à 2050
33:08 si l'Afrique est ignorée, si on n'investit pas plus
33:13 dans le domaine des ressources, des énergies renouvelables en Afrique.
33:19 On a besoin d'investir près de 110 milliards d'euros par an en électricité en Afrique,
33:26 donc électricité renouvelable en particulier,
33:29 et ce qui va devenir près de 190 milliards d'euros par an jusqu'à 2050.
33:34 Donc c'est important que le reste du monde investisse aussi
33:38 dans tout ce qui est énergie renouvelable sur le continent africain
33:42 pour qu'on puisse utiliser les ressources fossiles de moins en moins.
33:45 Donc un groupe allemand comme le vôtre qui a des filiales régionales en Afrique.
33:52 Vous êtes en première ligne finalement.
33:54 Oui, et si on parle d'Allianz en particulier,
33:58 Allianz travaille avec ce qu'on appelle "Blended Finance".
34:03 On a une équipe qui, le rôle principal c'est d'investir dans tout ce qui est énergie renouvelable
34:11 et avec un focus particulier sur l'Afrique.
34:14 Il y a un fonds par exemple qu'on a développé de près de 200 millions de dollars
34:18 avec d'autres partenaires dont le gouvernement allemand
34:22 pour investir dans tout ce qui est ressources énergie renouvelable en Afrique.
34:26 Donc il y a plusieurs mécanismes financiers qu'on est en train de créer de non-Allianz
34:31 pour pouvoir faire ce genre d'investissement à long terme.
34:36 Mais on ne peut pas avancer à net-zéro en 2050 sans ça,
34:42 sans un investissement particulier dans l'énergie renouvelable en Afrique.
34:47 Comment la technologie, le secteur de la tech qui est très dynamique,
34:50 d'ailleurs très dynamique en Afrique, peut contribuer, peut aider justement
34:54 à accélérer ces investissements et à se positionner en ligne
34:58 avec des objectifs de neutralité carbone ?
35:01 Moi je vois un domaine particulier,
35:05 je ne sais pas si vous connaissez un peu ce qu'on appelle l'assurance indicielle,
35:09 l'assurance paramétrique.
35:12 Dans l'agriculture par exemple ?
35:14 Dans l'agriculture par exemple, où on utilise des satellites
35:17 pour pouvoir payer les agriculteurs quand il y a eu une sécheresse, etc.
35:21 Ça c'est un domaine qui est très important en ce moment,
35:25 dans lequel on devrait tous, comme je dis,
35:30 tout le secteur des assurances, pouvoir apporter ce genre de produit
35:35 aux agriculteurs un peu partout sur le continent africain en particulier.
35:39 Ça se fait un peu partout dans le monde,
35:41 mais on devrait le faire un peu plus sur notre continent en ce moment.
35:44 Delphine Traoré, directrice générale assurance non-vie chez Saddam Allianz
35:49 et la grande invitée de l'économie RFI Jeune Afrique.
35:52 Au-delà du climat de la prochaine COP28 qui va se tenir à Dubaï
36:00 à la fin du mois de novembre, une importante actualité
36:03 sur le continent africain, actualité politique, diplomatique
36:07 et des conséquences économiques.
36:10 On parle évidemment de la succession de coups d'État.
36:13 Il y a eu le Mali, la Guinée, le Burkina Faso, le Niger.
36:17 En tant que dirigeante d'un grand groupe qui est coté sur les marchés financiers
36:22 et qui oeuvre dans plusieurs de ces pays,
36:24 on imagine que votre activité pourrait être touchée.
36:28 D'autant plus qu'Allianz est une société allemande,
36:33 donc vue comme issue de l'Occident ou du Nord.
36:36 Comment fait-on pour travailler dans ce climat ?
36:39 N'oublions pas qu'on est Saddam Allianz et on est sur le continent africain
36:43 depuis plusieurs années et on a eu à traverser plusieurs conflits en particulier.
36:49 Quand je regarde ces trois pays en particulier,
36:54 le Niger, le Burkina et le Mali,
36:59 je vois plus la situation conflictuelle en ce moment,
37:04 mais aussi le fait que ce sont les pays qui ont une plus grosse autosuffisance
37:09 où la plupart de la population ne mange pas à sa faim.
37:13 On a un problème d'autosuffisance alimentaire dans ces pays
37:15 qui parfois aussi contribue au conflit.
37:18 Mais en tant que business, la population continue à avancer.
37:23 L'économie continue à croître. C'est vrai que c'est difficile.
37:27 Il y a moins d'échanges internationaux.
37:29 Il y a moins d'échanges internationaux, c'est vrai,
37:32 mais je ne sais pas si vous êtes allé dans ces pays ces derniers temps,
37:36 l'économie locale fonctionne.
37:38 Nous, on a une société qui est implantée dans ces pays
37:42 avec des dirigeants locaux qui donnent des produits ou des assurances locales.
37:49 C'est vrai que la croissance est réduite dans ces pays difficiles,
37:55 mais on n'a pas eu de problème.
37:56 Vous n'avez pas eu de ralentissement de votre activité dans ces pays-là ?
37:59 Un peu plus ralenti qu'avant,
38:03 mais on n'est pas dans des situations où on est en train de perdre de l'argent dans ces pays.
38:06 Au contraire, on continue à croître dans ces pays-là.
38:11 N'oubliez pas qu'on a des dirigeants locaux qui connaissent le marché
38:14 et qui vivent là-bas. Ce sont des gens du pays.
38:17 Ils savent comment gérer ce genre de situation difficile quand il le faut.
38:21 Ce qui est intéressant avec ces pays,
38:23 en tout cas pour deux d'entre eux, le Burkina et le Mali,
38:26 il se trouve qu'Allianz avait quitté ces pays,
38:29 avait cédé ces pays en 2019 à l'un de ses concurrents, le groupe Sunu,
38:34 mais qu'avec le partenariat sans lames Alliance,
38:37 vous venez de signer votre grand retour dans ce pays.
38:41 Y a-t-il une stratégie spécifique pour travailler au Burkina, au Mali ?
38:49 Aujourd'hui, au Burkina, au Mali, on est les leaders des assurances en tant que sans lames Alliance.
38:56 Les décisions qui ont été prises à l'époque,
38:59 je ne vais pas commenter sur les raisons pour lesquelles elles ont été prises,
39:02 mais ce qui est important, c'est de savoir que ce sont des pays à forte croissance,
39:06 ce sont des pays où on est leader aujourd'hui.
39:08 Ce sont des pays où il faut qu'on reste, malgré la situation qui est difficile, il faut qu'on reste.
39:13 Parce que quand on parle d'inclusion financière, c'est important que des grands groupes comme nous
39:17 ne courent pas aux premiers problèmes qui se posent dans un pays.
39:22 Si on parle d'inclusion financière, c'est aussi, on est là pour aider les populations à se développer.
39:28 Aujourd'hui, dans ces pays, on est leader sur le marché.
39:30 Et comme je vous disais, la stratégie de sans lames Alliance,
39:33 c'est d'être soit numéro un ou trois dans les pays où on est.
39:36 Et en ce moment, en Burkina Faso, en Mali, on est numéro un.
39:39 Inclusion financière, on pense évidemment aux hommes, on pense aussi aux femmes.
39:46 On sait que la marge est peut-être un peu plus importante pour ce qui les concerne, elles.
39:51 Est-ce que ça fait partie aussi des priorités du groupe ?
39:55 Et qu'est-ce que vous faites concrètement dans ce sens ?
39:58 La première des choses, c'est de s'assurer que les femmes comprennent les produits d'assurance,
40:04 ce qui est déjà un problème.
40:07 C'est de l'éducation financière avant l'inclusion.
40:09 Exactement.
40:11 Et on s'associe très souvent aussi aux banques,
40:13 parce qu'on voit que les femmes commencent à avoir de plus en plus confiance.
40:16 Quand on parle des femmes, les femmes dans les domaines ruraux
40:19 commencent à déposer un peu plus leur argent en banque.
40:23 Donc il y a cette confiance qui se crée déjà avec le domaine bancaire.
40:27 Donc c'est important pour nous en assureurs de s'associer avec les banques
40:31 pour vendre nos produits aux femmes en général.
40:37 Vous allez faire de la banque assurance bientôt ?
40:40 On l'a fait déjà. La banque assurance, on l'a fait depuis des années.
40:45 On est très proche de certains groupes internationaux bancaires en Afrique.
40:51 Et c'est eux qui nous ont vraiment aidés à développer la banque assurance.
40:55 Mais on devrait le faire de plus en plus fortement en tant que nouveau groupe.
41:02 La question des femmes au pouvoir cette fois avec Aurélie.
41:06 Oui, effectivement. On approche le terme de l'émission bientôt.
41:11 Mais on voudrait un peu en savoir plus sur vos convictions.
41:13 On sait que dans vos convictions, il y a celle des femmes, la question des femmes en tout cas.
41:19 Vous avez dernièrement déclaré dans la presse que plusieurs femmes
41:23 que vous avez croisées durant votre parcours, vous avez marqué.
41:27 Moi, je me souviens particulièrement de Ngozi Okonjo-Iweala, la directrice générale de l'OMC.
41:33 Quels sont vos modèles ?
41:36 Elle, c'est un modèle important pour moi parce que j'ai travaillé avec elle dans un conseil
41:43 pendant quelques années avant qu'elle prenne la tête de l'OMC.
41:49 Pourquoi ? Parce que c'est le genre de femme qui a ses convictions dans les réunions,
41:55 mais qui s'assure qu'il y a une cohésion dans les décisions.
42:01 Ce sont des choses qu'en tant que femme, on l'a innée.
42:06 On sait comment s'arranger pour que dans des réunions où tout le monde n'est pas tout le temps allié,
42:12 qu'on puisse créer ce genre de cohésion.
42:14 Mais dans le domaine des affaires, j'ai l'impression que parfois on s'oublie.
42:17 On oublie qu'il y a cette force qu'on a en tant que femme.
42:20 C'est une femme qui a su l'utiliser pendant toute sa carrière, que j'admire beaucoup.
42:27 Autre question importante dans cet ordre d'idées.
42:32 Est-ce que, selon vous, d'autres femmes dirigeantes vont émerger et au plus haut niveau sur le continent ?
42:40 Je voudrais que l'on écoute à ce propos Zouhéra Youssoufou, qui est la présidente et directrice générale de la Fondation Dengote.
42:48 Il y en aura. Il n'y en a pas encore.
42:51 On a des femmes entrepreneurs qui n'ont pas encore réussi à avoir des entreprises énormes.
42:59 On a des femmes milliardaires en Afrique, mais elles n'ont pas nécessairement des femmes
43:03 qui ont construit leur entreprise "from the ground up", comme on dit, n'est-ce pas ?
43:08 Est-ce que c'est possible ? Bien sûr.
43:11 Je pense que dans la nouvelle génération des jeunes femmes,
43:15 les héritières de leurs familles qui ont grandi dans les "family businesses",
43:22 il y en a plusieurs en Afrique, et je pense que d'ici une dizaine d'années,
43:25 on aura peut-être pas 10, peut-être moins, mais d'ici quelques années,
43:29 on aura forcément une émergence de femmes entrepreneurs qui seront d'envergure nationale et internationale.
43:38 Des femmes milliardaires en Afrique bientôt, et plusieurs même, Delphine Traoré.
43:43 Absolument. C'est important que les banques les soutiennent.
43:48 On a eu cette discussion. C'est important que le domaine financier les soutienne,
43:53 que ce soit les banques, que ce soit les assurances.
43:56 Parce que parfois, les hommes qui réussissent ça ne partent pas de grand-chose non plus.
44:00 Exactement. Mais quelqu'un a eu foi en eux, foi en leurs idées,
44:05 et ont cru en leurs idées pour pouvoir apporter le financement derrière.
44:10 Les femmes ont toujours un gap assez important, un besoin assez important de financement,
44:16 qu'elles n'ont pas tout le temps.
44:18 Mais je pense que ça va.
44:20 Avec la FIS, on espère pouvoir créer un peu cet environnement
44:25 où il y a beaucoup plus d'opportunités pour les femmes entrepreneurs de croître.
44:29 En termes de success story d'hommes et de femmes, africains, on va dire les hommes aussi,
44:35 on constate qu'il y a de nombreux exemples qui se conjuguent avec le Burkina Faso.
44:41 Et oui, il n'y a pas que vous.
44:43 Et heureusement, Delphine Traoré, on a vu récemment la montée en puissance d'un banquier burkinabé,
44:49 Simon Thiem-Toré, mais il y en a d'autres, Awagadougou et ailleurs.
44:53 Il y a Idrissa Nassar qui, par exemple, vient de prendre la tête du patronat burkinabé.
44:59 Il y a aussi un jeune entrepreneur qui s'appelle Isouf, Joseph Zagré,
45:03 qui exerce dans les logements sociaux.
45:06 De quoi être fière, Delphine Traoré, de Burkinabé aux affaires.
45:10 Ça me donne la chair de poule.
45:12 Et puis ce sont mes frères.
45:15 Simon et moi, on est assez proches et c'est fascinant de voir comment les Burkinabés évoluent dans le domaine financier,
45:25 mais aussi dans d'autres domaines, malgré la situation difficile qu'on a parfois dans le pays.
45:31 De voir que j'ai des frères et sœurs qui évoluent au plan international, d'ailleurs,
45:37 c'est une fierté pour moi et puis pour le pays.
45:40 - Alors les frères et les sœurs, une autre raison d'être fière, Delphine Traoré, la famille.
45:46 - Yes.
45:47 - Écoutez.
45:48 - Bonjour Fifi. C'est vrai, je t'appelle Fifi, excuse-moi.
45:52 Tout le monde t'appelle Delphine, the big boss, mais je suis ta sœur, ta petite sœur.
45:57 Et je suis, évidemment, pour ceux qui ne me connaissent pas, réalisatrice de cinéma.
46:02 Un domaine qui n'a rien à voir avec ce que tu fais.
46:05 Mais évidemment, ça se rejoint, les finances, parce que notre métier est très, très, très compliqué
46:12 concernant les finances, parce qu'il faut qu'on convainque les gens pour investir.
46:17 Ce qui n'est pas simple quand c'est l'art, mais on se bat et on aime ce qu'on fait.
46:21 Voilà, je voulais te dire que je t'aime énormément. Je suis très, très, très, très fière de toi.
46:26 Keep it up, continue comme ça. Et puis je t'adore. Bisou, bisou.
46:31 Keep it up. Pas la petite larme, Delphine Traoré, votre sœur cadette, Apolline Traoré,
46:39 qui est cinéaste, qui est productrice. Son dernier film, Syrah, sur la lutte des populations
46:45 contre le terrorisme au Sahel, était en compétition au FESPACO 2023 à Ouagadougou.
46:51 Elle a obtenu l'étalon d'argent. Vous êtes fière d'elle.
46:54 - Absolument. - Évidemment, aussi. Ça va dans les deux sens.
46:57 - Absolument. Je l'appelle une enfant parce que c'est toujours la petite sœur
47:03 qui a toujours voulu raconter des histoires. Donc, pour voir aujourd'hui que cette passion
47:13 qu'elle avait depuis le départ est devenue... Elle en a fait un métier. C'est fascinant.
47:18 - Sur des sujets graves. - Exactement.
47:20 - Sur des sujets difficiles, en l'occurrence. Aurélie.
47:24 - Elle pose aussi, dans son message, un sujet qui est quand même intéressant,
47:29 sur la difficulté pour l'industrie créative africaine à décrocher des financements.
47:34 Elle dit d'ailleurs qu'il faut convaincre les gens d'investir.
47:38 Vous comprenez ça ? Vous répondez quoi ?
47:42 - C'est un peu le même commentaire que j'ai fait au départ. Il faut croire en la jeunesse africaine.
47:48 Il faut croire au travail qu'elles font. Elles font un boulot extraordinaire
47:52 quand il s'agit de raconter l'histoire des femmes et l'histoire de l'Afrique.
47:56 Elles se battent beaucoup. Les financements, ça vient parfois, ça vient pas parfois.
48:02 Mais je pense que c'est important, pour les banques en particulier,
48:06 de voir aussi l'art comme un investissement où elles peuvent avoir des retours importants.
48:11 - Merci à vous, Delphine Traoré, d'être passée parmi nous dans les studios de Radio France Internationale.
48:18 Vous étiez la grande invitée de l'économie RFI Jeune Afrique,
48:22 directrice générale assurance non-vie de Sanam Alliance.
48:26 Cet entretien est à lire dès maintenant sur le site internet de Jeune Afrique.
48:31 Il est à voir en vidéo sur YouTube, sur la chaîne YouTube de RFI. Merci Aurélie.
48:36 - Merci Bruno. - Merci également à Guillaume Meunier, à Stephen Elsley
48:40 pour la réalisation audio et vidéo. Bonne journée, bonne soirée. Portez-vous bien.
48:46 - Merci.
48:49 Échos d'ici, échos d'ailleurs sur RFI.
48:56 [Rire]

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