• l’année dernière

Relations avec les entreprises chinoises et russes, tensions entre le France et le Maroc, financement des start-up… Ismael Belkhayat, fondateur de la plateforme d'e-commerce marocaine Chari, plaide pour que les entrepreneurs du continent envisagent toutes les opportunités pour leur développement.
Grand invité de l’économie RFI-Jeune Afrique, il revient sur la situation macroéconomique du continent, analyse le développement des start-up africaines et livre son opinion sur l'attitude que doivent adopter les entrepreneurs africains vis-à-vis des grandes puissances.
L'entretien est à lire en intégralité sur Jeune Afrique : https://www.jeuneafrique.com/1436040/economie/ismael-belkhayat-chari-chine-russie-etats-unis-les-africains-doivent-etre-opportunistes/

Category

🗞
News
Transcription
00:00:00 [Musique]
00:00:10 Éco d'ici, éco d'ailleurs.
00:00:13 Le grand invité RFI Jeune Afrique, Bruno Fort, Guillaume Munier.
00:00:18 [Musique]
00:00:22 Bonjour, bonjour à tous. Bienvenue dans ce monde de 2023
00:00:26 où l'économie côtoie au jour le jour,
00:00:28 la technologie ou l'industrie numérique, le commerce, la finance à distance
00:00:33 et l'intelligence artificielle sont au centre du jeu.
00:00:36 L'économie numérique, c'est précisément le domaine de notre invité,
00:00:41 notre grand invité de l'économie RFI Jeune Afrique.
00:00:44 À nos côtés dans ce studio, Ismaël Belhayat. Bonjour.
00:00:48 Bonjour, merci pour l'invitation.
00:00:50 Merci à vous d'avoir fait le déplacement de Casablanca au Maroc
00:00:55 où est basée votre entreprise Chary. C'est une start-up lancée il y a trois ans,
00:01:00 spécialisée dans le e-commerce alimentaire, un développement international, nous le verrons,
00:01:05 et des idées au sens large que nous allons questionner avec mon camarade de Jeune Afrique.
00:01:10 Bonjour, Julien Clémenceau. Bonjour Bruno, bonjour à tous.
00:01:13 Présentez-nous en quelques mots le parcours déjà riche de notre invité.
00:01:18 Ismaël Belhayat, vous êtes au Maroc une figure de la nouvelle économie.
00:01:23 Vous n'avez pas 40 ans et depuis une décennie, vous enchaînez les créations de start-up avec succès.
00:01:28 On peut citer la plateforme de voitures avec chauffeur premium Votre Chauffeur.ma
00:01:34 que vous avez revendue aux loueurs Avis ou le site spécialisé dans l'immobilier Sarouti.ma,
00:01:40 cédé à Property Finder, le leader de l'immobilier dans le Moyen-Orient.
00:01:45 Depuis 2020, vous mettez toute votre énergie dans le développement de Chary,
00:01:49 une plateforme de e-commerce où vos clients sont des épiciers.
00:01:53 Pour ce projet qui au départ a été accompagné par l'accélérateur américain Y Combinator,
00:01:58 puis par Station F de Xavier Niel, deux références,
00:02:02 vous avez déjà levé environ 15 millions de dollars, un record au Maroc.
00:02:06 Cette réussite, vous la partagez avec votre épouse, Sofia Alge,
00:02:10 directrice des opérations de Chary, elle aussi ex-consultante,
00:02:14 mais au sein du cabinet McKinsey, un tandem que vous mettez ouvertement en avant.
00:02:19 Oui, il n'est pas commun de travailler avec son épouse,
00:02:24 et par conséquent, nous nous sommes rendus compte qu'on était extrêmement complémentaires,
00:02:29 Sofia ayant fait des études d'ingénierie à McGill,
00:02:32 puis avant d'avoir rejoint les cabinets de McKinsey.
00:02:36 Moi, de mon côté, j'ai suivi les rangs de l'ESCP à Paris, ici même,
00:02:42 sub-deco Paris, avant de m'envoler vers les Etats-Unis pour aller à Cornell,
00:02:46 et donc avec une formation plutôt commerciale, avant de rejoindre le BCG,
00:02:50 qui est aussi un cabinet de conseil, d'abord à Paris, le Boston Consulting Group,
00:02:54 puis à Casablanca.
00:02:56 C'est une façon moins personnelle de voir la direction d'une entreprise ?
00:03:00 C'est une façon… Vous savez, dans le monde de l'entreprise,
00:03:06 très rapidement, il faut mettre des règles.
00:03:08 Et ces règles, on les a mises d'une manière très simple.
00:03:12 D'abord, on s'assure de ne jamais parler du travail à la maison,
00:03:16 et de ne jamais parler de la maison au travail.
00:03:20 Et par ailleurs, nous nous sommes assurés d'avoir des champs d'exécution
00:03:24 qui soient différents, de manière à ce qu'on ne "overlappe pas",
00:03:27 comme on dit, sur les mêmes sujets.
00:03:29 Alors, vous l'avez dit, vous avez fait l'école supérieure de commerce de Paris,
00:03:34 puis l'université Cornell aux Etats-Unis.
00:03:37 Vous êtes fils d'avocat, mais votre frère, il est aussi un grand patron marocain.
00:03:44 C'est le patron de Dyslog, un des leaders de la logistique au Maroc.
00:03:48 L'entreprenariat, c'est quelque chose de famille ?
00:03:51 Alors, mon grand frère a 15 ans de plus que moi.
00:03:55 Et il a été, dans cette fratrie, le premier à être devenu entrepreneur,
00:04:00 puisque vous l'avez dit, mon papa, Feu, mon papa, était avocat.
00:04:04 Et vous savez, lorsqu'on a un grand frère de plus de 15 ans,
00:04:07 ce grand frère devient très vite un modèle et une image.
00:04:11 Au-delà du fait que ce soit quelqu'un d'extrêmement brillant
00:04:14 et qui a réussi dans les affaires, il reste...
00:04:18 Pas que dans les affaires, puisqu'il a été ministre entre 2009 et 2012,
00:04:23 ministre de la jeunesse et des sports.
00:04:25 Tout à fait. Et donc, ce modèle, forcément, lorsqu'on est jeune et qu'on se projette,
00:04:32 nous donne envie de devenir comme lui.
00:04:34 Et c'est ce qui, en tout cas pour moi, m'a beaucoup motivé pour devenir entrepreneur
00:04:39 et m'a donné cette envie dès le début.
00:04:41 D'ailleurs, à l'ESCP, j'ai suivi des cours majeurs d'entrepreneuriat,
00:04:45 notamment pour suivre les pas de mon grand frère.
00:04:48 Mais il n'y a pas que la famille, Julien.
00:04:50 Non, non, il n'y a pas que la famille.
00:04:52 Il y a aussi le réseau et la réussite d'un entrepreneur,
00:04:55 on le mesure souvent à son réseau.
00:04:57 Le vôtre est impressionnant. Donc, il y a votre frère, bien sûr.
00:05:00 Mais il y a aussi le patron des patrons marocains, qui est l'oncle de votre épouse.
00:05:04 En lisant des papiers sur vous, on se rend compte aussi que le Premier ministre,
00:05:09 qui est un entrepreneur, a aussi investi au travers de son groupe dans votre compagnie.
00:05:14 Et puis, vous aviez vos pères, le Tunisien Karim Beghir,
00:05:18 qui est le fondateur d'InstaDip, qui est un des leaders mondiaux
00:05:21 de l'intelligence artificielle, vendu pour plus de 400 millions de dollars
00:05:24 au laboratoire BioNTech.
00:05:26 Et l'Algérien Nourdin Taïbi, le fondateur de la plateforme de VTC Yassir,
00:05:30 qui tous les deux ont aussi investi dans votre compagnie.
00:05:34 Votre ambition, elle est internationale.
00:05:36 Ces derniers mois, vous êtes entré sur le marché ivoirien à la faveur de l'acquisition de Diago,
00:05:40 une start-up qui met en relation producteurs et commerçants.
00:05:43 Et vous avez obtenu, et ça c'est très important, une licence de la Banque centrale marocaine
00:05:47 pour développer des moyens de paiement, on y reviendra.
00:05:50 Autre reconnaissance, vous en parliez avant de débuter l'émission,
00:05:55 la prestigieuse université américaine de Harvard a récemment choisi
00:05:59 Chary pour servir de sujet à l'une de ses études de cas,
00:06:03 les études de cas données aux étudiants,
00:06:05 et qui sont aussi vendues aux écoles de commerce du monde entier.
00:06:09 Voir votre réussite saluer comme ça à l'extérieur, à l'international, très vite,
00:06:14 c'est quelque chose de très satisfaisant ?
00:06:16 Vous savez, l'environnement tech au Maroc est encore balbutiant,
00:06:23 et nous ne sommes qu'à ses débuts.
00:06:25 Et par conséquent, avoir une start-up marocaine qui brille à l'international
00:06:31 m'apporte en tout cas beaucoup de satisfaction,
00:06:34 et j'espère qu'elle deviendra rapidement un modèle pour d'autres entrepreneurs.
00:06:39 Au même titre que je disais que tout à l'heure mon grand frère était un modèle,
00:06:42 j'espère que Chary deviendra un modèle pour d'autres entrepreneurs,
00:06:45 et que ça les motivera pour aller dans le sens de l'entrepreneur.
00:06:49 La reine des Pays-Bas est même venue vous voir !
00:06:51 Tout à fait, il se trouve que la reine des Pays-Bas,
00:06:54 en sa qualité d'ambassadrice pour les Nations Unies,
00:07:00 et pour plus particulièrement l'inclusion financière,
00:07:03 était au Maroc et est venue rendre visite à Chary
00:07:08 pour mieux comprendre comment est-ce que Chary fait de l'inclusion financière au Maroc.
00:07:14 Cela fait partie des sujets qui nous intéressent,
00:07:16 la situation économique du Maroc et de l'Afrique,
00:07:20 leurs ressources, leurs relations avec le reste du monde,
00:07:23 les projets continentaux, le développement, le financement des start-up,
00:07:26 les enjeux technologiques, les enjeux climatiques,
00:07:29 les relations agitées entre le Maroc et la France,
00:07:32 et à un peu plus long terme, la candidature du Royaume à l'organisation de la Coupe du Monde de football,
00:07:37 un sujet également économique sur lequel nous aurons l'occasion de revenir.
00:07:41 Nous avons trois quarts d'heure pour faire le tour complet de votre actualité.
00:07:45 Ismaël Belhayat, grand invité de l'économie, entretient à écouter et à regarder en vidéo
00:07:51 sur les chaînes YouTube de RFI et de Jeune Afrique,
00:07:54 les meilleurs passages dans les colonnes de JIA et des extraits en vidéo,
00:07:58 également sur notre page Facebook RFI ÉCO.
00:08:02 Bonne émission à toutes et à tous !
00:08:14 Quelques mots d'abord Ismaël Belhayat sur le contexte économique général en Afrique,
00:08:20 que vous suivez naturellement de près puisque votre activité en dépend.
00:08:24 Le FMI dans ses dernières prévisions est un peu moins optimiste qu'il a pu l'être,
00:08:29 avec une hausse des taux d'intérêt, l'argent est très cher.
00:08:32 Le FMI craint une pénurie de financement sur le continent,
00:08:36 il en appelle aux partenaires de l'Afrique, les grandes puissances de la planète.
00:08:39 Comment vous analysez ça ?
00:08:41 Encore une fois, je vais donner un maximum d'analyses sous l'angle de la tech.
00:08:47 Il se trouve qu'en étant e-commerçant, je distribue des produits alimentaires
00:08:53 comme le mentionnait Julien préalablement,
00:08:56 que ces produits sont les premiers à être touchés par l'inflation,
00:09:00 et que par ailleurs, il se trouve que pour distribuer des produits,
00:09:05 on a besoin de consommer du gazole et de l'essence,
00:09:09 qui lui aussi a été touché par l'inflation.
00:09:12 Enfin, en tant que start-upper, nous sommes à la recherche de financement,
00:09:18 financement qui jusque-là était relativement présent,
00:09:21 parce que les taux d'intérêt de la Fed étaient bas,
00:09:23 et que par conséquent, les investisseurs étaient à la recherche d'une classe d'actifs rentable.
00:09:29 Aujourd'hui, lorsqu'il est possible de déposer son argent sur son compte bancaire
00:09:33 et d'en obtenir 5 ou 7%, forcément, on préfère le laisser dormir.
00:09:37 Ce qui a comme conséquence un assèchement du financement,
00:09:42 pas seulement en Afrique, mais partout dans le monde.
00:09:44 Mais ça vous inquiète, cet assèchement des financements,
00:09:47 ces difficultés que peuvent avoir les entreprises africaines, la vôtre,
00:09:51 mais aussi les difficultés que vont rencontrer les consommateurs
00:09:55 avec des produits dont le prix augmente ?
00:09:58 En ce qui concerne les entreprises, j'ai envie de dire que les entreprises classiques
00:10:03 qui jusque-là ont un business model qui est rentable,
00:10:06 vont pouvoir s'en sortir, puisque forcément,
00:10:09 leur métier leur permet de couvrir l'ensemble de leurs charges.
00:10:13 Maintenant, par définition, une startup doit croître rapidement,
00:10:18 et souvent avec des business models qui, au départ, ne sont pas forcément rentables.
00:10:22 Le rôle de ces financements est notamment de couvrir les besoins sur les premières années,
00:10:27 avant d'atteindre une certaine taille critique.
00:10:29 Je vous le disais tout à l'heure, les marchés tech en Afrique,
00:10:33 et plus particulièrement au Maroc, sont encore émergents,
00:10:36 ce qui veut dire que les startups sont naissantes,
00:10:39 et sont encore dans cette phase de besoin de financement.
00:10:42 Le fait qu'il y ait un assèchement est effectivement problématique.
00:10:46 On va avoir l'occasion d'y revenir.
00:10:48 Vos clients, les entreprises clientes de Chary, les grossistes, les épiciers,
00:10:54 ces entreprises aussi sont concernées.
00:10:57 Donc, est-ce que par ricochet, ça vous touche ?
00:10:59 Bien sûr, en fait, le principal concerné au bout de la chaîne, c'est le consommateur,
00:11:07 parce que le revenu du consommateur est resté le même.
00:11:11 Par contre, le prix des biens de grande consommation a lui augmenté,
00:11:16 ce qui veut dire qu'il doit dorénavant faire beaucoup plus attention à ses achats,
00:11:22 et par conséquent, les volumes d'achats s'affaiblissent,
00:11:26 et donc nos grossistes, nos clients, ou encore les points de vente,
00:11:30 les détaillants que nous couvrons, forcément, ont moins de revenus et achètent moins.
00:11:35 Les entreprises s'adaptent, pour le consommateur, c'est bien plus compliqué.
00:11:39 Votre pays, le Maroc, a d'ailleurs été très récemment le théâtre de manifestations
00:11:45 contre les conséquences de cette inflation, contre la cherté de la vie.
00:11:50 On va écouter l'un de ces manifestants, c'était il y a quelques jours.
00:11:54 Ce n'était que des paroles en l'air.
00:11:57 Au final, ce gouvernement n'est là que pour enrichir les riches et appauvrir les pauvres.
00:12:02 Les avantages sont donnés aux entreprises et non aux citoyens.
00:12:05 Nous voulons un État démocratique dans lequel il y a une juste répartition de la richesse,
00:12:10 un respect des libertés publiques et la libération des prisonniers d'opinion.
00:12:14 Nos rassemblements vont se poursuivre, nous aurons d'autres étapes.
00:12:18 Notre lutte ne date pas d'aujourd'hui et le problème de la cherté de la vie non plus.
00:12:22 Ça a commencé en 1983 avec la mise en place du programme d'ajustement structurel.
00:12:28 Donc le problème de l'inflation n'est pas uniquement lié au contexte international.
00:12:33 Ce n'est pas lié à la guerre entre la Russie et l'Ukraine, non.
00:12:36 C'est un problème qui nous est propre, c'est un problème intérieur.
00:12:39 Des propos recueillis par notre correspondante au Maroc, Nadia Ben Mahfoud.
00:12:46 Julien, c'est un sujet socialement très sensible, l'inflation en ce mois de Ramadan.
00:12:55 Est-ce que le gouvernement marocain pourrait faire mieux dans ce domaine ?
00:12:59 Pourrait débloquer des aides exceptionnelles ?
00:13:01 Ce qu'il faut savoir c'est qu'on est dans un contexte macroéconomique extrêmement compliqué.
00:13:05 On l'a dit, la guerre en Ukraine, la baisse des taux d'intérêt.
00:13:10 Et notre gouvernement a besoin de ce qu'on appelle un temps de latence.
00:13:16 Entre ce qui arrive et les mesures qui sont prises, il y a forcément une période leur permettant de prendre les bonnes mesures.
00:13:22 On a la chance d'avoir un gouvernement très agile, qui comprend rapidement les choses et qui prend les mesures.
00:13:28 Mais quand bien même ces mesures sont prises immédiatement, elles ont un effet temporel
00:13:34 qui fait que leurs conséquences arrivent au bout d'une certaine période.
00:13:38 Et je pense que ce qu'on a pu écouter est la conséquence de ce différentiel temporel
00:13:43 entre les mesures qui ont été prises, notamment pour réduire les prix,
00:13:49 que ce soit à travers des caisses de compensation, que ce soit à travers la subvention des produits de base,
00:13:54 et le moment où ça arrive effectivement au consommateur et à son subconscient.
00:13:58 Et donc, je conclue par ça, le témoignage peut avoir de la véracité,
00:14:05 mais une véracité qui est limitée dans le temps et vous le verrez, les choses seront rapidement réglées.
00:14:10 Est-ce que les entreprises dans ce contexte peuvent aider ?
00:14:12 Vous disiez qu'il y a des entreprises installées, matures, qui maîtrisent leur marché,
00:14:16 qui ont donc un modèle économique rentable. Est-ce qu'elles peuvent faire un effort dans ces circonstances particulières ?
00:14:22 Alors, c'est une excellente question. Il faudrait, je pense, faire la différence entre deux types d'entreprises.
00:14:30 Il y a les multinationales qui sont présentes dans nos pays, pour en citer quelques-unes,
00:14:35 les Procter & Gamble, les Unilever, qui sont partout dans nos maisons,
00:14:40 et qui font des plans de croissance régionaux, et qui souvent prennent des décisions depuis un hub,
00:14:49 qui est Dubaï, pour gérer la région Afrique du Nord, et qui ne vont pas forcément aller prendre en considération
00:14:57 les besoins de certains pays. Et donc, avec ces multinationales, on va avoir un peu plus de mal,
00:15:03 et on l'a vu d'ailleurs, les prix ont augmenté, mais de manière mécanique, parce que leurs entrants ont augmenté,
00:15:08 et il est difficile d'aller convaincre ces gens-là de faire un effort pour un pays en particulier.
00:15:12 Maintenant, en ce qui concerne les entreprises nationales, on en a beaucoup qui sont citoyennes,
00:15:17 on en a beaucoup qui ont décidé de garder les mêmes prix, quitte à réduire leurs marges,
00:15:23 puisque forcément, leurs coûts de production ont augmenté, et certains ont donc participé à cet effort de guerre,
00:15:29 en acceptant de garder des prix fixes, alors que derrière, leurs coûts ont augmenté.
00:15:35 Et de conserver leurs salariés, de ne pas supprimer d'emplois ?
00:15:38 Et pour certains, alors, ce qu'il faut savoir, c'est qu'on a eu la chance au Maroc, et je suis bien placé pour le savoir,
00:15:44 puisque vous avez cité tout à l'heure une société de transport touristique,
00:15:49 que j'ai cédée à la société de location de voitures à vis, mais dont je suis resté administrateur,
00:15:55 et qui, pour le coup, a été fortement touchée par la crise du Covid, puisque c'est du tourisme.
00:16:00 Sachez que le gouvernement marocain a subventionné l'ensemble des salaires des collaborateurs chauffeurs,
00:16:06 pendant toute cette période. Donc oui, aujourd'hui, lorsqu'on a vu que le gouvernement avait fait les efforts nécessaires,
00:16:10 nous, entreprises citoyennes, continuons sur ce chemin, le temps que les choses s'arrangent,
00:16:17 et on le sait, ce sont des cycles, on est au plus bas, ce cycle remontera.
00:16:21 Vous disiez tout à l'heure que Chary était dans une phase d'investissement,
00:16:25 mais une manière de contribuer pour vous, c'est la création d'emplois.
00:16:29 Vous avez créé combien d'emplois avec Chary ?
00:16:31 Alors, aujourd'hui, on est 250 personnes, qui, d'abord, forment les utilisateurs.
00:16:39 Qui sont nos utilisateurs ? Ce sont principalement les épiceries de proximité.
00:16:43 On le sait, elles ne sont pas forcément tech-savvy, c'est-à-dire qu'elles ne savent pas forcément utiliser la technologie.
00:16:49 Et notre rôle, avant tout, c'est d'éduquer un marché, parce qu'on sait que l'éducation crée finalement la fraie démarche.
00:16:54 Vous travaillez avec combien d'épiceries ?
00:16:55 Aujourd'hui, on en a 15 000, qui consomment mensuellement sur notre application.
00:17:00 Allez-y, allez-y.
00:17:02 Et donc, une fois que nous les avons éduquées à l'utilisation de la technologie,
00:17:06 ces épiceries passent commande sur nos plateformes, et forcément, on a besoin, derrière,
00:17:11 de préparateurs, qu'on appelle dans notre jargon les "pick-and-packers",
00:17:15 et ensuite de "delivery boys", qui sont les personnes qui livrent les produits, ce qui explique les 250 personnes.
00:17:21 Vous vous dites que vous créez plus d'emplois que vous n'en supprimez.
00:17:25 C'est le reproche qui est fait souvent au e-commerce.
00:17:28 Alors, tout à fait.
00:17:29 Dans le commerce classique, qui peut souffrir, effectivement, de l'essor du e-commerce.
00:17:34 C'est un très bon point.
00:17:36 D'abord, quels sont les emplois qu'on supprime ?
00:17:41 Ce sont les intermédiaires qui peuvent exister entre les fournisseurs,
00:17:45 donc les multinationales dont nous parlions tout à l'heure, et les épiceries.
00:17:49 Et nous les remplaçons par des emplois internes, qui sont des personnes qui optimisent la chaîne de valeur.
00:17:55 Et vous le verrez, vous savez, il y a Schumpeter qui parlait de destruction créatrice,
00:18:00 et pour créer de la valeur, on est obligé d'en détruire.
00:18:03 Mais je vous explique, la chaîne de valeur que nous détruisons, et je le dis ouvertement,
00:18:08 est une chaîne de valeur qui est remplacée par une autre, qui est beaucoup plus optimisée,
00:18:12 et qui permet de faire de l'amélioration du fonctionnement, et donc des prix.
00:18:18 Parce que lorsqu'on optimise, encore une fois, une chaîne logistique,
00:18:22 les coûts sont moins importants, et peuvent avoir comme conséquence une baisse des prix.
00:18:26 Et c'est exactement ce qu'on essaie de faire.
00:18:28 C'est-à-dire qu'on crée des emplois directs grâce à nos employés,
00:18:31 mais aussi des emplois indirects, grâce finalement à des coûts logistiques qui sont moins élevés.
00:18:35 Et ces emplois, vous les pensez plus...
00:18:40 créant plus de valeur aussi pour les gens qui les occupent ?
00:18:43 Est-ce que ce sont plus valorisants ? Est-ce que ce sont de meilleurs emplois ?
00:18:46 Alors tout à fait. Simplement parce que nous sommes une boîte tech,
00:18:49 et que l'ensemble de nos process a été digitalisé.
00:18:52 Donc nous prenons des jeunes sortis d'école,
00:18:55 que nous formons au workflow des process informatiques,
00:18:59 et qui deviennent très rapidement des experts.
00:19:02 D'ailleurs on le voit aujourd'hui, une partie de nos équipes est recrutée par d'autres startups,
00:19:05 et ça nous fait extrêmement plaisir de créer cet exercice.
00:19:07 Et vous arrivez à les conserver lorsqu'ils demandent d'avoir des salaires un peu plus importants,
00:19:11 parce qu'ils vieillissent eux-mêmes ?
00:19:13 Alors on fait en sorte de mettre en place une composante variable,
00:19:17 qui leur permet donc d'augmenter leurs revenus en fonction des efforts qui sont faits sur le terrain.
00:19:22 Est-ce que ça, ça peut inciter des jeunes qui se voyaient peut-être partir à l'étranger à rester ?
00:19:26 C'est toute l'ambition.
00:19:29 On part du principe qu'aujourd'hui il y a un exode des talents,
00:19:33 notamment d'Afrique vers l'Europe,
00:19:36 mais pas seulement des talents, aussi des personnes qui ont le sentiment de mal vivre.
00:19:40 Et notre ambition, on pense que la tech peut apporter deux choses.
00:19:44 D'abord des emplois à des personnes qui sont qualifiées,
00:19:47 ou à des personnes inqualifiées,
00:19:49 mais aussi un service qui améliorerait le quotidien des individus,
00:19:54 leur permettant de décider de rester tout simplement dans leur pays.
00:19:58 Et pour moi, l'avenir du développement passe avant tout par la tech,
00:20:03 parce que c'est un moyen d'améliorer le quotidien de tout un chacun dans nos pays.
00:20:08 Des hommes et des femmes, réduire les inégalités entre les hommes et les femmes,
00:20:12 on sait que c'est un défi sur le continent comme ailleurs,
00:20:15 mais peut-être encore plus sur ce continent-là.
00:20:17 Encore une fois, à titre d'exemple,
00:20:19 on a parlé de destruction d'emplois,
00:20:23 j'y ai participé en coupant dans la chaîne de valeur
00:20:26 un certain nombre de grossistes qui faisaient les intermédiaires,
00:20:29 c'était des hommes.
00:20:31 Figurez-vous que je les ai quasiment tous remplacés par des femmes,
00:20:35 parce que je me suis rendu compte que les femmes étaient bien meilleures
00:20:39 à former des épiciers à l'utilisation de la tech,
00:20:43 et à vendre des produits aux épiceries.
00:20:46 Ce qui prouve bien que le rôle de la femme devient de plus en plus prépondérant.
00:20:50 - Chary emploie plus de femmes que d'hommes ?
00:20:53 - Aujourd'hui, 50% de nos collaborateurs sont des femmes.
00:20:56 Toute l'équipe Customer Care et Sales est féminine,
00:21:00 et derrière, on a plus d'hommes sur la partie tech
00:21:04 et sur la partie pick and pack,
00:21:06 c'est-à-dire préparation des commandes et livraison des commandes.
00:21:09 - Quand on dit réduction des inégalités,
00:21:11 on pense aussi à l'inclusion financière.
00:21:14 Où en est Chary ?
00:21:16 Qu'est-ce que fait Chary dans ce domaine ?
00:21:19 - Au Maroc, on a un secteur bancaire extrêmement fort.
00:21:22 Nos banques sont présentes un peu partout en Afrique,
00:21:25 et on fait un excellent travail pour bancariser une partie de notre population.
00:21:29 Lorsqu'on analyse les chiffres, près de 70% de la population est bancarisée,
00:21:34 mais lorsqu'on double-clic, on se rend compte que ces gens-là
00:21:37 utilisent leurs comptes bancaires uniquement pour recevoir leur salaire,
00:21:41 et derrière, vont dans les guichets automatiques pour retirer leur argent,
00:21:44 et ne font malheureusement aucun service financier, pour différentes raisons.
00:21:48 Et on part du principe que cette population a besoin d'être éduquée.
00:21:53 Alors pour éduquer des gens, on a deux méthodes.
00:21:56 On a la méthode du marketing et de la publicité, mais qui est extrêmement coûteuse,
00:22:00 et qui au final n'est pas efficace pour des gens qui ne comprennent pas ce dont on parle.
00:22:05 Et la deuxième méthode est d'utiliser l'humain.
00:22:08 Aller au contact. Et c'est ce qu'on a commencé à faire.
00:22:11 Les femmes dont nous vous parlions vont au contact de l'épicerie
00:22:14 pour le former à l'utilisation de différents services financiers,
00:22:18 tels qu'un wallet de paiement, tel que le transfert d'argent, tel que le paiement de facture, et ainsi de suite.
00:22:22 Notre ambition, une fois qu'on a éduqué ces points de vente,
00:22:26 c'est d'utiliser ces points de vente comme des relais, comme des ambassadeurs,
00:22:30 qui eux-mêmes iront éduquer l'utilisateur final,
00:22:34 et faire tâche d'huile pour que ces utilisateurs finaux
00:22:38 soient financièrement inclus, et comprennent l'intérêt d'utiliser des services financiers
00:22:43 pour leur quotidien, et donc améliorer leur quotidien,
00:22:46 ce qui leur permet de rester dans le pays et de ne pas aller vers l'Europe.
00:22:49 - Puisqu'on est dans la finance, Julien Clément, on est déjà en Afrique.
00:22:52 - Vous parliez des banques marocaines puissantes,
00:22:55 qui sont des vecteurs d'expansion du Maroc, aussi en Afrique subsaharienne.
00:22:58 Est-ce que ce ne sont pas elles qui ont fait du lobbying
00:23:01 pour éviter que le mobile monnaie, qui est moins présent au Maroc qu'ailleurs,
00:23:05 se développe au moins trop rapidement ?
00:23:08 Est-ce qu'elles n'ont pas joué un rôle de frein ? Est-ce qu'elles n'ont pas appuyé sur le frein ?
00:23:12 - Je ne suis pas sûr que... Peut-être qu'elles sont à l'origine
00:23:16 de la lenteur du décollage du mobile wallet,
00:23:21 mais ça a été fait de manière totalement inconsciente.
00:23:25 - Vous pensez que ce n'est pas un lobbying conscient ?
00:23:28 - Je ne pense pas que ce soit un lobbying conscient,
00:23:30 je pense juste qu'elles ont fait un excellent travail d'ouvrir des agences un peu partout,
00:23:34 de mettre en place des guichets d'agences bancaires,
00:23:37 de former un certain nombre d'utilisateurs.
00:23:40 Parce que je sais qu'on compare beaucoup...
00:23:43 - Si je reprends votre réponse en creux,
00:23:46 quand on fait tous ces efforts d'ouvrir des agences,
00:23:49 de former du personnel, d'embaucher du personnel,
00:23:52 la dématérialisation, la suppression d'emplois dont vous parliez avant,
00:23:57 on n'a pas trop envie de l'avoir arrivé vite.
00:24:00 On a besoin de rentrer dans ses frais.
00:24:02 - Je pense que les banques ont conscience du fait que ça finirait par arriver.
00:24:06 Vous savez, on ne peut pas aller contre la technologie.
00:24:09 On a vu comment en Afrique subsaharienne,
00:24:12 il y a eu le fameux, qu'on appelle dans notre jargon, "leapfrog",
00:24:15 celui où on saute une étape,
00:24:18 puisqu'ils sont passés directement d'un paiement cash à un paiement mobile,
00:24:22 sans pour autant passer par des cartes bancaires.
00:24:25 Et puis les banques, telles que vous les avez citées,
00:24:29 aujourd'hui s'équipent, puisqu'elles ont toutes fait la demande
00:24:33 d'agréments d'établissement de paiement,
00:24:35 et aujourd'hui toutes les banques ont leurs agréments,
00:24:37 et sont en train de mettre en place les bons fondamentaux
00:24:42 pour que les wallets décollent.
00:24:44 - Et avec des envies parfois d'aller encore plus vite
00:24:47 vers les crypto-monnaies, vers la blockchain.
00:24:50 Comment vous voyez ça, vous, en tant qu'acteur du secteur de l'Afrique ?
00:24:53 - Sur ce point-là, sur l'Afrique, oui, en effet,
00:24:56 de nombreuses banques centrales ont fait le pari.
00:24:59 Au Maroc, nous attendons toujours la régulation
00:25:03 qui est en train d'être préparée par la banque centrale.
00:25:06 Maintenant, ça a beaucoup d'avantages,
00:25:10 on le sait, la dérégulation, la décentralisation,
00:25:13 mais ça a aussi des inconvénients,
00:25:15 on l'a vu encore récemment avec NFX.
00:25:19 - La plateforme qui a fait faillite.
00:25:22 - Tout à fait. Et donc l'idée, et je pense que la banque centrale marocaine
00:25:25 a bien raison de prendre son temps pour mettre en place
00:25:28 la bonne régulation qui permette à terme aux crypto-monnaies
00:25:32 de pouvoir fonctionner au Maroc,
00:25:34 mais dans un cadre qui évite les erreurs du passé.
00:25:38 - Ces derniers mois, on a aussi beaucoup parlé d'intelligence artificielle
00:25:41 avec Chadjipiti. À votre tour de table, on l'a dit,
00:25:45 il y a Karim Beghir, le fondateur d'Instadip,
00:25:48 qui est un des leaders mondiaux dans le domaine de l'intelligence artificielle.
00:25:51 Est-ce que Shari utilise l'intelligence artificielle ?
00:25:54 - Aujourd'hui, Shari doit optimiser son stock,
00:25:58 c'est-à-dire qu'on doit faire en sorte que notre nombre de jours de stock
00:26:02 soit le plus limité possible. Et pour ce faire,
00:26:05 on prend en compte des prédictions de vente
00:26:09 qui utilisent de l'intelligence artificielle
00:26:13 et notamment les données passées de nos ventes
00:26:16 qui prennent en compte la saisonnalité, mais aussi le ramadan
00:26:20 qui, comme vous le savez, n'arrive pas toujours,
00:26:22 est décalé d'année en année, et l'ouverture de nouveaux magasins
00:26:26 et ainsi de suite. Donc oui, ce qui...
00:26:29 Tout à l'heure, je vous parlais d'optimisation.
00:26:32 Je vous disais qu'il y avait une destruction créatrice,
00:26:34 qu'on détruisait une chaîne de valeur pour en créer une autre.
00:26:37 La nouvelle créée est beaucoup plus optimisée
00:26:40 puisqu'elle utilise, entre autres, des outils d'optimisation
00:26:43 de type intelligence artificielle, machine learning,
00:26:46 qui nous permettent aujourd'hui d'optimiser ce qu'on fait.
00:26:49 - Et vous en parlez avec Karim Beghir ?
00:26:51 C'est des sujets sur lesquels vous échangez ?
00:26:53 - Alors oui, Karim, au-delà d'être un investisseur chez nous,
00:26:57 c'est aussi un conseiller.
00:27:00 C'est quelqu'un qui a fait InstaDeep,
00:27:04 une startup qui vient d'être d'ailleurs revendue
00:27:08 au montant le plus élevé...
00:27:10 Enfin, c'était le plus gros exit d'une startup en Afrique.
00:27:13 Et c'est donc quelqu'un aujourd'hui qui accompagne toujours cette startup
00:27:16 dans une phase de transition, mais qui est devenu business angel.
00:27:19 Et d'ailleurs, je lui reconnais cette envie de créer un écosystème,
00:27:24 de vouloir être un modèle, puisqu'il aide d'autres startupers
00:27:27 à suivre ses pas, non seulement en investissant dans leurs startups,
00:27:31 mais aussi en les accompagnant et en les conseillant
00:27:34 sur ces domaines de prédilection que sont par ailleurs
00:27:37 l'intelligence artificielle.
00:27:39 - Ismaël Belhahyat, le patron marocain de Shari,
00:27:42 est le grand invité de l'économie RFI Jeune Afrique.
00:27:45 Venons-en précisément et justement au financement du secteur
00:27:49 de la tech en Afrique.
00:27:51 Ces startups ont bien besoin d'argent pour se lancer, pour grandir.
00:27:55 On va écouter l'avis d'un spécialiste, Samir Abdelkrim,
00:27:59 lui-même entrepreneur et fondateur du sommet de la tech africaine
00:28:03 Emerging Valley.
00:28:05 C'est chaque année, fin novembre, à Marseille.
00:28:08 - Alors en effet, malgré le contexte économique mondial morose
00:28:11 et tout le bouleversement qui agite la tech mondiale,
00:28:15 à commencer par la Silicon Valley, malgré tout, on note
00:28:18 une forte progression de la résilience des startups africaines en 2022,
00:28:22 avec près de 1149 investisseurs enregistrés par Tech Africa,
00:28:28 soit une progression de plus de 29% par rapport à 2021.
00:28:32 Ces investisseurs ont injecté près de 6,5 milliards de dollars
00:28:36 dans le capital des jeunes pousses africaines.
00:28:39 En même temps, on note aussi un autre point important
00:28:42 qui montre un changement de la nature de ces investissements en 2022.
00:28:47 C'est le fait que le secteur de la FinTech,
00:28:50 qui historiquement, sur le continent africain,
00:28:53 a toujours tenu le haut du pavé avec un rôle moteur et même leader
00:28:58 au niveau de l'innovation, eh bien en 2022,
00:29:02 par Tech Africa a enregistré une importante baisse
00:29:05 du niveau des mégas levées.
00:29:07 On parle quand même d'une baisse de -41% par rapport à 2021.
00:29:12 Alors, c'est le signe d'une baisse, mais c'est aussi le signe
00:29:17 d'un plus grand investissement dans les autres secteurs
00:29:21 de la Tech africaine, la e-santé, l'agriculture connectée
00:29:25 et bien sûr le e-commerce.
00:29:27 Samir Abdelkrim, le fondateur d'Emerging Valley,
00:29:30 ce sera les 28 et 29 novembre prochains à Marseille.
00:29:34 On va commencer par ce qui est positif, davantage de levées de fonds
00:29:38 pour les startups, y compris dans l'e-commerce.
00:29:41 C'est prometteur pour vous, on imagine ?
00:29:44 Oui, bien sûr que c'est prometteur.
00:29:46 Pas que pour votre entreprise, pour tout le secteur ?
00:29:49 Oui, bien sûr, pour tout le secteur.
00:29:51 Ce qu'il faut savoir, c'est qu'on part quand même d'un niveau
00:29:54 qui est relativement bas.
00:29:56 Quelques chiffres ont été donnés.
00:29:58 On a parlé de 6,5 milliards de dollars qui ont été investis.
00:30:01 À titre de comparaison, la France seule l'année dernière,
00:30:04 c'était 12 milliards.
00:30:06 Donc la France, c'est deux fois toute l'Afrique.
00:30:09 C'est un peu plus de 2 milliards de dollars
00:30:11 qu'on a eu à parcourir.
00:30:13 Maintenant, on l'a dit aussi, les méga-levées ont baissé,
00:30:16 simplement parce que les fonds d'investissement
00:30:19 qui étaient derrière ces méga-levées
00:30:21 étaient des fonds qu'on appelle le Tier 1,
00:30:23 les fameux Sequoia, Tiger,
00:30:25 qui jusque-là fonctionnaient plutôt bien.
00:30:27 Et puis depuis, cette crise,
00:30:29 se sont repliées sur leurs marchés d'origine,
00:30:32 que sont notamment les Etats-Unis.
00:30:34 Maintenant, la bonne nouvelle,
00:30:36 c'est que les fonds d'investissement sont compensés
00:30:39 par une prise de conscience de l'importance de la tech en Afrique,
00:30:42 et surtout de l'opportunité que peut représenter l'Afrique
00:30:45 quand un marché qui est vierge,
00:30:47 et on voit de plus en plus d'investisseurs
00:30:49 s'intéresser à l'Afrique,
00:30:51 avec des chèques bien plus petits,
00:30:53 mais lorsqu'ils sont ajoutés, finissent par compenser ces méga-levées.
00:30:56 - Jusqu'à présent, on constatait que les investisseurs,
00:30:59 ils étaient rarement africains.
00:31:01 Vous êtes un peu un contre-exemple
00:31:03 parce que vous avez plusieurs fonds africains à votre capital,
00:31:05 mais très souvent, c'est de l'argent qui venait d'Asie,
00:31:08 des Etats-Unis, d'Europe.
00:31:10 Est-ce que ça change ?
00:31:12 Est-ce que c'est en train de changer ?
00:31:14 Est-ce qu'il y a aussi cette prise de conscience ?
00:31:16 - Alors, on a toujours les deux,
00:31:18 parce que l'Afrique reste, comme je le disais,
00:31:20 une opportunité avec de la croissance
00:31:22 qui est bien plus forte qu'ailleurs.
00:31:24 Et donc, ces investisseurs ont besoin
00:31:26 de ce qu'on appelle des relais de croissance
00:31:28 lorsque leurs économies sont à l'arrêt.
00:31:31 Maintenant, ces investisseurs,
00:31:34 aujourd'hui, sont des leaders et sont "followed",
00:31:37 suivis par des investisseurs locaux.
00:31:39 Et lorsqu'on voit qu'un Sequoia, par exemple,
00:31:41 a fait son premier investissement en Afrique du Nord
00:31:44 il y a encore deux ans,
00:31:46 les suiveurs se disent, bon, si Sequoia a pris la décision
00:31:48 d'aller vers cette géographie,
00:31:50 ça veut dire que c'est le début de quelque chose.
00:31:52 Et derrière, on se retrouve avec de nombreux investisseurs locaux
00:31:55 qui arrivent à lever des fonds,
00:31:57 d'ailleurs, eux-mêmes, levent des fonds de chez des LP,
00:31:59 des Limited Partners, qui souvent sont des DFI,
00:32:02 donc des Development Financial Institutions,
00:32:04 que peuvent être des gens comme BPI France
00:32:07 ou encore BII en Angleterre
00:32:09 ou KfW en Allemagne.
00:32:11 Et donc, attirent ces investisseurs institutionnels
00:32:14 vers l'Afrique et ensuite redistribuent cet argent
00:32:17 vers l'écosystème start-up.
00:32:19 Vous pensez que l'Afrique francophone,
00:32:21 dans ce domaine, pourra rattraper un jour
00:32:23 l'Afrique anglophone ? Il y a du chemin, là, aussi.
00:32:25 Alors, on est très en retard, soyons honnêtes.
00:32:28 La plupart des fonds, aujourd'hui,
00:32:30 sont des fonds gérés par des anglophones.
00:32:32 Et forcément, lorsque vous êtes entrepreneur
00:32:34 et que vous êtes anglophone,
00:32:36 il vous est bien plus simple de convaincre un investisseur
00:32:38 d'investir chez vous que lorsque vous êtes francophone.
00:32:41 Et puis, on le voit, les valos...
00:32:43 Alors, bien sûr, il y a des fonds, aussi,
00:32:45 dans des pays francophones,
00:32:47 mais les valos offerts par ces fonds
00:32:49 sont bien inférieurs aux valos offerts
00:32:51 par les fonds anglophones.
00:32:53 Et donc, en tout cas, en Afrique francophone,
00:32:55 on a un peu plus de mal, on se bat
00:32:57 pour essayer de rattraper le retard.
00:32:59 L'exemple de Karim est excellent.
00:33:01 Et puis, on essaie de suivre son pas.
00:33:03 - Mais, donc, vous, quand vous cherchez des investisseurs,
00:33:05 vous allez les traquer où ?
00:33:07 Est-ce que c'est les États-Unis, l'Europe ?
00:33:11 C'est l'Asie, c'est la Chine ?
00:33:13 - Alors, nous, on a eu la chance
00:33:15 d'avoir un tour de table
00:33:17 extrêmement hétéroclite,
00:33:19 puisque nous avons beaucoup d'Américains.
00:33:21 On parlait tout à l'heure de l'Université d'Harvard,
00:33:23 mais nous avons aussi le Y Combinator,
00:33:25 nous avons Plug & Play,
00:33:27 la société Airbnb qui est dans notre tour de table,
00:33:29 Pincus Capital et de nombreux autres.
00:33:31 Mais nous sommes aussi allés du côté de la France,
00:33:33 puisque nous avons été accélérés
00:33:35 à Station F, et à Station F,
00:33:37 nous avons rencontré les équipes d'Orange,
00:33:39 qui sont aujourd'hui même
00:33:41 dans notre conseil de surveillance.
00:33:43 Nous sommes aussi allés frapper
00:33:45 à la porte du Moyen-Orient,
00:33:47 puisque nous avons ramené
00:33:49 un investisseur saoudien.
00:33:51 Vous savez, aujourd'hui,
00:33:53 on a en tout cas plus de chance
00:33:55 d'aller chercher de l'argent là-bas.
00:33:57 Nous sommes aussi allés en Allemagne,
00:33:59 du côté de l'Allemagne, nous avons ramené
00:34:01 le fameux Rocket Internet de Oliver Somewhere,
00:34:03 qui a investi, qui a leidé, dans notre jargon,
00:34:05 notre Seed Investment.
00:34:07 Mais nous sommes aussi allés
00:34:09 en Asie du Sud-Est, puisque nous avons
00:34:11 dans notre tour de table des gens comme
00:34:13 Reflect Ventures, My Asia VC, et ainsi de suite.
00:34:15 Et en fait, c'est la force
00:34:17 d'être dans une géographie comme le Maroc.
00:34:19 Un, on est en Afrique,
00:34:21 donc on attire tous ceux qui s'intéressent à l'Afrique.
00:34:23 Deux, on est au Middle East,
00:34:25 Nord-Africa, et donc forcément, on va frapper
00:34:27 à la porte du Moyen-Orient.
00:34:29 Mais on est aussi à la porte de l'Europe,
00:34:31 et forcément, on peut aller en Espagne,
00:34:33 on peut aller en Allemagne. Et c'est la force,
00:34:35 et encore une fois, c'est la force du Maroc de manière générale,
00:34:37 cette porte d'entrée vers l'Afrique,
00:34:39 à côté de l'Europe,
00:34:41 et qui attire tout le monde.
00:34:43 - Parlons maintenant, Ismail Belhaya, de votre développement
00:34:45 dans le reste de l'Afrique.
00:34:47 L'an dernier, vous avez acquis Diago,
00:34:49 c'est une application ivoirienne
00:34:51 qui met en relation des commerces de proximité
00:34:53 et des producteurs.
00:34:55 C'est assez comparable à ce que vous faites au Maroc.
00:34:57 Quel bilan vous faites de cette opération en Côte d'Ivoire ?
00:34:59 - Alors,
00:35:01 la Côte d'Ivoire est un pays subsaharien,
00:35:03 donc relativement loin du Maroc
00:35:05 en termes géographiques,
00:35:07 puisqu'il faut 5-6 heures pour y arriver en avion,
00:35:09 mais qui est extrêmement proche
00:35:11 en termes de consommation.
00:35:15 Donc ils ont aussi de nombreux
00:35:17 points de vente de proximité,
00:35:19 qu'on appelle pas épicerie, mais boutiquier,
00:35:21 et qui, aujourd'hui,
00:35:23 représentent plus de 80 à 90%
00:35:25 de la consommation des produits
00:35:27 de grande consommation.
00:35:29 A la différence de la France,
00:35:31 où le modern trade
00:35:33 que sont les grands supermarchés, en tout cas les marques,
00:35:35 représentent, elles,
00:35:37 90% et les épiceries de proximité seulement 10%.
00:35:39 Donc, en Côte d'Ivoire,
00:35:41 on se rend compte que
00:35:43 les habitudes de consommation sont très similaires,
00:35:45 que la législation est aussi similaire,
00:35:47 parce que, encore une fois,
00:35:49 on est tous un héritage
00:35:51 du système,
00:35:53 en tout cas du cadre légal français,
00:35:55 et que, par conséquent,
00:35:57 tous nos process, tout notre mode de fonctionnement,
00:35:59 qui était marocain,
00:36:01 ont pu être appliqués en Côte d'Ivoire.
00:36:03 Idem aussi pour nos fournisseurs.
00:36:05 Nos fournisseurs sont des multinationales.
00:36:07 Souvent, nos interlocuteurs sont
00:36:09 les directeurs
00:36:11 de la vente de la région,
00:36:13 et la région est l'Afrique francophone.
00:36:15 Enfin, je conclue par ça,
00:36:17 Orange, étant dans notre tour de table
00:36:19 et dans notre conseil de surveillance,
00:36:21 Orange a un footprint qui est
00:36:23 africain-francophone. Ils sont en Côte d'Ivoire,
00:36:25 entre autres, et ils nous aident
00:36:27 dans notre développement localement.
00:36:29 - Julien ? - Le e-commerce,
00:36:31 est-ce qu'il peut être rentable
00:36:33 en Afrique ? C'est la question
00:36:35 qu'on se pose. On a vu
00:36:37 - Et sur le long terme.
00:36:39 - beaucoup de compagnies se heurter à cet obstacle,
00:36:41 et on pense bien sûr à Jumia,
00:36:43 qui est le pionnier,
00:36:45 et dont on observe
00:36:47 les grandes difficultés à mettre en place
00:36:49 un modèle qui arrive
00:36:51 à l'équilibre. - C'est une excellente
00:36:53 question à laquelle je ne m'attendais pas du tout.
00:36:55 C'est une question de piège.
00:36:57 Alors, tout à fait,
00:36:59 on voit la belle histoire de Jumia
00:37:01 avant tout, parce que ce sont des gens qui ont éduqué le marché,
00:37:03 qui ont beaucoup participé.
00:37:05 - Donc ça a été une source d'inspiration pour vous ?
00:37:07 - Tout à fait, bien sûr, et Jumia a fait un excellent
00:37:09 travail. D'ailleurs, le même Oliver
00:37:11 Sommewhere de Rocket Internet
00:37:13 est à l'origine de la création de Jumia,
00:37:15 et c'est donc lui qui a l'idée,
00:37:17 mon seed round, qui prouve bien qu'il est toujours
00:37:19 à la recherche
00:37:21 de créer des modèles
00:37:23 qui fonctionnent. Alors maintenant, la grosse différence
00:37:25 entre un Jumia qui est B2C
00:37:27 et un Chary qui est B2B.
00:37:29 - Donc, Jumia qui s'adresse aux consommateurs
00:37:31 et vous, aux points de vente.
00:37:33 - Tout à fait. Alors, Jumia va aller
00:37:35 chercher l'utilisateur final en faisant
00:37:37 de l'acquisition client à travers du marketing,
00:37:39 qui est extrêmement coûteux, comme vous pouvez l'imaginer,
00:37:41 parce que c'est ce qu'on disait tout à l'heure,
00:37:43 il faut des montants conséquents pour expliquer
00:37:45 à quelqu'un comment utiliser une technologie.
00:37:47 Donc déjà, première source de coûts,
00:37:49 c'est l'acquisition client qui est énorme.
00:37:51 Nous, on fait du B2B, c'est-à-dire qu'on fait du
00:37:53 e-commerce pour les professionnels.
00:37:55 Donc notre acquisition client ne se fait pas grâce
00:37:57 à Internet, elle se fait grâce à du porte-à-porte.
00:37:59 Nous envoyons des personnes
00:38:01 former les utilisateurs. Et comme notre base
00:38:03 d'utilisateurs est moins importante,
00:38:05 forcément, il est plus simple d'aller les acquérir
00:38:07 à des coûts plus bas. Ensuite,
00:38:09 deuxième source de coûts pour le e-commerce
00:38:11 B2C, c'est les coûts logistiques.
00:38:13 Parce que livrer un particulier,
00:38:15 c'est extrêmement coûteux.
00:38:17 Il n'est pas souvent chez lui.
00:38:19 Par conséquent, on doit revenir une à deux fois.
00:38:21 Et lorsqu'on doit revenir, c'est les coûts
00:38:23 qui doublent. Alors que nous,
00:38:25 dans le B2B, nos points de vente sont
00:38:27 toujours au même endroit et leurs
00:38:29 horaires d'ouverture sont fixes.
00:38:31 Donc c'est possible d'être rentable si on ne va pas
00:38:33 jusqu'au consommateur, c'est ça que vous dites ?
00:38:35 Donc, si on ne va pas vers le consommateur,
00:38:37 on peut être rentable.
00:38:39 Maintenant, notre "game",
00:38:41 ce qu'on dit, notre "play", c'est
00:38:43 de commencer... - Votre défi.
00:38:45 - Notre défi, merci, j'utilise beaucoup d'anglicisme,
00:38:47 c'est parce que je "pitch", encore une fois,
00:38:49 à des investisseurs anglophones
00:38:51 et forcément, et je m'en excuse
00:38:53 pour nos auditeurs français, mais
00:38:55 on pense... - Ou francophones.
00:38:57 - Ou francophones, merci. On pense que
00:38:59 le e-commerce B2B peut être
00:39:01 rentable. Et surtout,
00:39:03 on pense que c'est une porte d'entrée
00:39:05 vers ce qu'on appelle
00:39:07 le B2B2C,
00:39:09 c'est-à-dire utiliser
00:39:11 les commerces de proximité
00:39:13 comme ambassadeur intermédiaire
00:39:15 pour aller faire de l'acquisition
00:39:17 d'utilisateurs finaux sans pour autant
00:39:19 dépenser un argent monstrueux
00:39:21 comme l'a fait Jumia dans le marketing.
00:39:23 - Ismaël Belhayat, patron
00:39:25 polyglotte de Chary, est le
00:39:27 grand invité de l'économie RFI
00:39:29 Jeune Afrique. Nous parlons maintenant de libre-échange.
00:39:31 [Musique]
00:39:33 L'un de vos espoirs pour vous développer sur le continent,
00:39:35 c'est la Zlekav,
00:39:37 cette zone de libre-échange continentale.
00:39:39 Belle idée sans doute, mais qui connaît
00:39:41 quand même des limites
00:39:43 ou en tout cas des problématiques.
00:39:45 Écoutez ce qu'en disait notre dernier grand invité
00:39:47 de l'économie, l'économiste
00:39:49 togolais Kako Ndoubko.
00:39:51 - Je crois
00:39:53 qu'il faut qu'on définisse d'abord
00:39:55 le degré de solidarité
00:39:57 budgétaire qu'on n'ait pas
00:39:59 à consentir dans cette affaire.
00:40:01 C'est-à-dire que vous ne pouvez pas
00:40:03 mettre sur le même marché
00:40:05 l'Egypte et le Burundi,
00:40:07 le Maroc
00:40:09 et la Gambie.
00:40:11 Ce n'est pas possible
00:40:13 parce qu'il y a
00:40:15 certaines économies
00:40:17 qui ont dépassé
00:40:19 ce qu'on appelle la zone de coût fixe
00:40:21 et qui vont
00:40:23 certainement augmenter leur part
00:40:25 de marché.
00:40:27 Et donc la zone
00:40:29 des libres échanges continentaux
00:40:31 africains ne devrait pas
00:40:33 être l'arbre qui va cacher
00:40:35 la forêt
00:40:37 de toutes les
00:40:39 divergences
00:40:41 encore fortement présentes
00:40:43 entre les économies
00:40:45 et entre les dirigeants africains.
00:40:47 - Kako Ndoubko,
00:40:49 grand invité de l'économie RFI
00:40:51 Jeune Afrique, entretien à retrouver
00:40:53 sur nos chaînes YouTube
00:40:55 "On ne peut pas mettre
00:40:57 sur le marché le Maroc
00:40:59 et la Gambie"
00:41:01 Ismaël Belrayat, trop de disparités
00:41:03 sur le continent, ça remet en cause
00:41:05 pour l'instant l'Azlekaf ?
00:41:07 - Alors, dans le fond,
00:41:09 il a raison.
00:41:11 Maintenant j'ai envie de dire que c'est un mal nécessaire.
00:41:13 Souvent lorsqu'on veut avancer,
00:41:15 on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs
00:41:17 et on est obligé d'accepter
00:41:19 des côtés négatifs
00:41:21 à un certain nombre de choses.
00:41:23 Il se trouve, et on le disait tout à l'heure,
00:41:25 que nos marchés
00:41:27 souhaitent accueillir des investisseurs.
00:41:29 Et pour accueillir des investisseurs,
00:41:31 on a besoin de montrer un certain nombre de choses.
00:41:33 D'abord, montrer que
00:41:35 le risque pays est faible.
00:41:37 Quand même quelque chose arriverait dans ce pays,
00:41:39 il pourrait être compensé par d'autres pays.
00:41:41 Et donc la zone de libre-échange
00:41:43 est un excellent moyen de montrer
00:41:45 une intégration entre différents pays.
00:41:47 Ensuite, lorsqu'on prend l'ensemble de ces pays
00:41:49 pris un à un,
00:41:51 la taille du marché n'est pas suffisante
00:41:53 pour attirer
00:41:55 l'intérêt d'investisseurs.
00:41:57 Et ça ne devient logique
00:41:59 que lorsque l'on
00:42:01 considère que ces marchés sont des marchés
00:42:03 intégrés totalement.
00:42:05 Et donc pour moi, la ZLECAF,
00:42:07 on n'en est d'abord qu'à ses débuts,
00:42:09 puisque rappelons-le, elle n'a été mise en place
00:42:11 qu'en début 2021,
00:42:13 au départ avec 8 pays,
00:42:15 et qu'il faut lui laisser le temps,
00:42:17 mais qu'on verra qu'à long terme,
00:42:19 elle ne peut avoir que des effets positifs.
00:42:21 Et on le voit nous aujourd'hui,
00:42:23 nous souhaitons faire ce qu'on appelle
00:42:25 du cross-border trading.
00:42:27 Je m'excuse encore une fois,
00:42:29 mais c'est du commerce international
00:42:31 nous permettant, encore une fois,
00:42:33 de sourcer des produits d'un pays
00:42:35 d'Afrique francophone et de l'envoyer
00:42:37 vers un autre pays d'Afrique francophone
00:42:39 sans qu'il y ait de barrières diverses.
00:42:41 Ce n'est que comme ça qu'on pourra,
00:42:43 encore une fois, je parle sous l'angle
00:42:45 de la technologie, convaincre des investisseurs
00:42:47 et là encore, je vais utiliser une terminologie
00:42:49 très précise. Un investisseur,
00:42:51 lorsqu'il vous parle, la première question,
00:42:53 c'est ce qu'il demande à votre pitch deck,
00:42:55 c'est-à-dire la présentation que vous lui montrez,
00:42:57 c'est quel est votre TAM.
00:42:59 Le TAM, ça veut dire Total Addressable Market,
00:43:01 ça veut dire la taille de votre marché global.
00:43:03 Si toutefois, on ne parlait que du Maroc,
00:43:05 le call, enfin en tout cas l'appel avec cet investisseur
00:43:07 ne durerait pas plus que 5 minutes,
00:43:09 on est obligé d'intégrer l'ensemble de l'Afrique.
00:43:11 Mais pour que l'ensemble de l'Afrique francophone
00:43:13 puisse fonctionner,
00:43:15 il faut qu'il y ait des législations
00:43:17 qui permettent un libre-échange et donc
00:43:19 on est très content d'avoir...
00:43:21 - Vous parlez des pays d'Afrique francophone,
00:43:23 on pourrait parler des pays
00:43:25 arabes en Afrique.
00:43:27 Est-ce qu'un jeune entrepreneur comme vous
00:43:29 ne rêve pas de voir un jour exister
00:43:31 l'union du Maghreb arabe avec
00:43:33 la Mauritanie, le Maroc, l'Algérie,
00:43:35 la Tunisie et la Libye ?
00:43:37 Est-ce que ce ne serait pas extraordinaire ?
00:43:39 - C'est plus qu'un rêve.
00:43:41 On le souhaite tous.
00:43:43 Et je vais vous dire,
00:43:45 lorsque vous en parlez
00:43:47 aux différentes populations,
00:43:49 qu'elles soient algériennes, marocaines
00:43:51 ou tunisiennes,
00:43:53 il y a un amour incommensurable.
00:43:55 On parle la même langue,
00:43:57 on se ressemble, c'est la même religion,
00:43:59 on est des frères.
00:44:01 - Donc c'est une énorme frustration ?
00:44:05 - Pour tout le monde.
00:44:07 Ensuite, ce qui se passe au plan politique
00:44:09 a ses raisons.
00:44:11 Les dizaines de millions
00:44:13 des personnes concernées ne souhaitent qu'une chose,
00:44:15 c'est qu'un jour on puisse se retrouver
00:44:17 et on espère rapidement.
00:44:19 - On pourrait aller encore plus loin ?
00:44:21 Au Liban, en Arabie Saoudite, aux Émirats ?
00:44:23 Intégrer aussi cette région-là ?
00:44:25 - Alors, sur un plan
00:44:27 business, elle est déjà
00:44:29 intégrée relativement, dans le sens
00:44:31 où, comme je vous le disais tout à l'heure,
00:44:33 les grandes multinationales ont un headquarter
00:44:35 qui est souvent au Moyen-Orient, du côté de Dubaï.
00:44:37 - Leur siège régional.
00:44:39 - Leur siège régional, c'est une excuse, encore une fois,
00:44:41 et qui couvre nos régions.
00:44:43 Maintenant, on se rend compte
00:44:45 que ça reste une zone
00:44:47 avec de nombreux conflits
00:44:49 bilatéraux
00:44:51 et on espère tous que ça finira
00:44:53 par s'améliorer. Maintenant,
00:44:55 on voit que ça s'améliore.
00:44:57 J'avais suivi l'actualité comme moi,
00:44:59 mais l'Arabie Saoudite vient de redevenir
00:45:01 copain avec l'Iran.
00:45:03 Et pour la première fois,
00:45:05 l'entremetteur n'était pas les États-Unis,
00:45:07 mais la Chine. Peut-être que la Chine va jouer
00:45:09 un rôle géopolitique pour permettre
00:45:11 à cette région de se rabibocher.
00:45:13 Peut-être que l'Arabie Saoudite
00:45:15 va aussi améliorer
00:45:17 ses relations avec le Yémen,
00:45:19 on le souhaite. Il faut que cette zone,
00:45:21 de manière générale,
00:45:23 arrête toutes ces luttes
00:45:25 intestines parce que nous ne pourrons
00:45:27 être attractifs
00:45:29 pour ces investisseurs que
00:45:31 si nous leur montrons qu'on est capables
00:45:33 d'abord, entre nous,
00:45:35 d'être d'accord.
00:45:37 - Merci pour la transition. Allons en Chine,
00:45:39 justement, bien plus à l'Est.
00:45:41 Le poids de la Chine dans l'économie africaine.
00:45:43 Comment est-ce que vous décririez
00:45:45 l'apport
00:45:47 de ce pays dans le secteur de la tech ?
00:45:49 La Chine est incontournable.
00:45:51 Il n'y a pas que Huawei, d'ailleurs.
00:45:53 Irremplaçable.
00:45:55 - La Chine a une stratégie
00:45:57 assez particulière. C'est qu'elle a d'abord
00:45:59 commencé par
00:46:01 interdire
00:46:03 les outils globaux
00:46:05 qu'on connaît, les fameux GAFAM, sur son territoire,
00:46:07 de manière à pouvoir
00:46:09 créer des champions nationaux.
00:46:11 Par exemple, les WeChat, les Didi, et ainsi de suite.
00:46:13 La Russie a d'ailleurs fait la même chose.
00:46:15 On en parlera aussi tout à l'heure.
00:46:17 Mais ce sont des modèles qui ont consisté
00:46:19 à s'enfermer dans un premier temps
00:46:21 pour créer des champions nationaux
00:46:23 et ensuite essayer de les exporter.
00:46:25 A titre d'exemple, vous le disiez tout à l'heure,
00:46:27 je suis arrivé de Casablanca.
00:46:29 Hier, une société russe
00:46:31 a fait l'annonce du lancement
00:46:33 de son activité au Maroc.
00:46:35 Cette société russe s'appelle
00:46:37 Yandex. Ce n'est rien d'autre que
00:46:39 Google, Spotify,
00:46:41 Netflix combinés en une seule société,
00:46:43 aussi Uber, qui a
00:46:45 suffisamment grandi parce que sa taille
00:46:47 de marché était suffisamment grande
00:46:49 et surtout, elle n'avait pas de concurrents puisque le pays était fermé.
00:46:51 Une fois qu'elle a atteint
00:46:53 cette taille critique, elle a décidé
00:46:55 de s'exporter notamment en Afrique. J'étais encore
00:46:57 en Côte d'Ivoire la semaine dernière
00:46:59 et leur publicité était partout.
00:47:01 C'était amusant de réaliser que
00:47:03 maintenant que la Russie
00:47:05 a perdu un peu de son aura
00:47:07 géopolitique
00:47:09 dans l'Occident, de manière générale,
00:47:11 elle compense
00:47:13 ses efforts en
00:47:15 billard, vous savez de ce dont je veux
00:47:17 parler, par des efforts
00:47:19 en
00:47:21 permettant à ces startups locales
00:47:23 de se développer et en
00:47:25 investissant des montants conséquents. Lorsqu'ils
00:47:27 sont dans un pays, c'est à force
00:47:29 de subventions, c'est à force
00:47:31 d'achats de parts de marché. - Surtout pas de
00:47:33 boycott des sociétés russes en Afrique.
00:47:35 L'économie peut rester
00:47:37 neutre, quelle que soit... - Pour plusieurs
00:47:39 raisons. D'abord, ils font en sorte
00:47:41 d'être le plus discret possible
00:47:43 pour qu'on ne sache pas forcément qu'ils
00:47:45 sont russes. Ensuite, leur
00:47:47 service est tellement bon que quand bien même
00:47:49 on voudrait les boycotter,
00:47:51 on serait les premiers lésés.
00:47:53 Et enfin, je vous le disais, comme
00:47:55 ils subventionnent, ils arrivent sur le marché
00:47:57 avec des prix qui sont extrêmement bas. Donc le fait
00:47:59 de ne pas les utiliser est un
00:48:01 coup d'opportunité dans un certain sens.
00:48:03 Et donc, quand bien même on est extrêmement
00:48:05 orienté politiquement, géopolitiquement et
00:48:07 qu'on ne veut pas avoir affaire avec la Russie,
00:48:09 on finit par céder à la tentation
00:48:11 d'aller consommer un service
00:48:13 sympathique et pas trop cher. - Je reviens un instant
00:48:15 sur la Chine, Ismaël
00:48:17 Benhaïat.
00:48:19 Il y a des tensions très fortes
00:48:21 autour de Taïwan.
00:48:23 Il y a eu récemment des manœuvres
00:48:25 militaires chinoises.
00:48:27 Est-ce que
00:48:29 c'est inquiétant ? Est-ce que ça
00:48:31 vous inquiète ? La Chine, c'est...
00:48:33 les Taïwans
00:48:35 sont des producteurs
00:48:37 de semi-conducteurs.
00:48:39 Dans la tech, on l'a dit, ils sont très
00:48:41 importants. Les entreprises chinoises sont très
00:48:43 importantes en Afrique.
00:48:45 Qu'est-ce qui se passe s'il y a
00:48:47 un conflit demain ? Est-ce que
00:48:49 les Africains vont pouvoir rester à l'extérieur ?
00:48:51 - La Chine
00:48:53 joue un rôle prépondérant en Afrique.
00:48:55 On le sait. Dans l'infrastructure,
00:48:57 de manière générale, que ce soit dans les ports,
00:48:59 dans les ponts, mais aussi maintenant dans la tech.
00:49:01 Je ne vous l'ai pas dit, mais il y a de nombreux fonds
00:49:03 aujourd'hui qui viennent frapper à nos portes
00:49:05 pour demander
00:49:07 à investir dans nos startups. - Des fonds chinois ?
00:49:09 - Des fonds chinois, bien sûr. On était encore
00:49:11 en discussion avec un fonds
00:49:13 MSA Novo, qui est un grand fonds chinois
00:49:15 et qui s'intéresse à toutes les startups africaines
00:49:17 et qui aujourd'hui a les moyens
00:49:19 pour aider le financement de ces startups.
00:49:21 C'est encore une fois
00:49:23 une méthode d'influence.
00:49:25 Jusque-là, on passait par
00:49:27 d'autres outils géopolitiques,
00:49:29 de lobbying. Aujourd'hui, un outil
00:49:31 de lobbying, c'est d'investir dans
00:49:33 les startups. Alors, pour répondre
00:49:35 plus précisément à votre question, est-ce que c'est inquiétant,
00:49:37 le contexte macroéconomique, de manière
00:49:39 générale, aujourd'hui, est extrêmement inquiétant.
00:49:41 Mais il faut prendre un peu de hauteur.
00:49:43 Jusque-là,
00:49:45 l'Ouest,
00:49:47 les Etats-Unis, l'Europe,
00:49:49 en y ajoutant le Japon,
00:49:51 représentait
00:49:53 70 à 75 % du PIB mondial.
00:49:55 Depuis peu,
00:49:57 en réalité, le non-Ouest,
00:49:59 c'est-à-dire le reste de ces pays,
00:50:01 qui inclut la Chine, qui inclut le Brésil,
00:50:03 et on le voit à quelle vitesse
00:50:05 est-ce qu'il croit, aujourd'hui,
00:50:07 le monde s'est équilibré.
00:50:09 La Chine, l'Arabie saoudite,
00:50:11 le reste des pays représentent 50 %.
00:50:13 - Ça veut dire que
00:50:15 vous devez rester, vous,
00:50:17 votre intérêt, c'est de rester équidistant
00:50:19 par rapport à ces grandes puissances ?
00:50:21 - Ça veut tout simplement dire que, jusque-là,
00:50:23 on avait un monde bicéphale,
00:50:25 où il y avait
00:50:27 une partie forte et une partie faible.
00:50:29 Aujourd'hui, ce monde est
00:50:31 toujours bicéphale,
00:50:33 mais les deux parties
00:50:35 sont devenues tout aussi fortes.
00:50:37 Et donc, lorsqu'on est non-aligné,
00:50:39 pour reprendre des termes historiques,
00:50:41 et qu'on veut
00:50:43 gérer ce qu'on gère,
00:50:45 il est évident que
00:50:47 on peut
00:50:49 devenir opportuniste,
00:50:51 et lorsqu'on reçoit,
00:50:53 c'est le terme, lorsqu'on se fait draguer
00:50:55 par les deux parties, on se pose la question
00:50:57 "Quelle est la partie la plus intéressante ?"
00:50:59 - Mais demain, au capital de Shari,
00:51:01 on peut imaginer, avec les tensions,
00:51:03 des tensions encore plus fortes,
00:51:05 voir une intervention chinoise à Taïwan,
00:51:07 on peut imaginer des investisseurs chinois
00:51:09 et des investisseurs américains ?
00:51:11 - C'est une bonne question.
00:51:13 Ce qu'il faut savoir, c'est qu'aujourd'hui,
00:51:15 les Américains demandent
00:51:17 d'avoir le tour de table, lorsqu'on a
00:51:19 des investissements de type russe,
00:51:21 chinois ou encore iranien,
00:51:23 c'est un no-go, surtout lorsque ce sont
00:51:25 des fonds publics. - No-go, on n'y va pas.
00:51:27 - On n'y va pas, merci.
00:51:29 Maintenant, les Chinois, les Russes,
00:51:31 sont très intelligents,
00:51:33 ils font en sorte de maquiller,
00:51:35 de créer des sociétés à écran,
00:51:37 de manière à pouvoir investir
00:51:39 et créer des risques pour les sociétés
00:51:41 dans lesquelles ils investissent.
00:51:43 Je vais vous donner un exemple
00:51:45 assez amusant,
00:51:47 mais les Chinois ont été
00:51:49 extrêmement pulsifs en Afrique
00:51:51 depuis plus de dix ans.
00:51:53 Il y a seulement trois mois,
00:51:55 le gouvernement Biden,
00:51:57 c'était en décembre,
00:51:59 donc il y a quatre mois maintenant,
00:52:01 a organisé un sommet qui s'appelle
00:52:03 US Africa, dans lequel
00:52:05 il a pris la décision d'inviter
00:52:07 l'ensemble des chefs d'État
00:52:09 de l'ensemble des pays africains,
00:52:11 mais aussi les représentants
00:52:13 des compagnies aériennes, des offices nationaux,
00:52:15 et pour la première fois,
00:52:17 ils ont invité des start-upers.
00:52:19 Ils les ont invités pour leur dire
00:52:21 "Messieurs, on vous a oubliés,
00:52:23 j'y étais, j'y étais avec
00:52:25 les meilleurs start-upers africains,
00:52:27 et ils nous ont dit textuellement
00:52:29 "On s'excuse, on vous a oubliés.
00:52:31 Sachez qu'on a aussi des
00:52:33 outils de financement,
00:52:35 des outils d'aide au développement,
00:52:37 et qu'on est là pour vous aider.
00:52:39 À partir de maintenant,
00:52:41 voici qui pourraient être vos relais,
00:52:43 et l'avenir passe
00:52:45 par la technologie, et par conséquent,
00:52:47 on sera là pour vous."
00:52:49 Maintenant que j'ai dit ça,
00:52:51 l'Europe fait la même chose.
00:52:53 J'ai été invité il y a moins d'un an
00:52:55 à Station F, j'avais devant moi
00:52:57 le président Macron et le président Macky Sall,
00:52:59 en présence de
00:53:01 la Banque arabe de développement,
00:53:03 de la BPI,
00:53:05 de l'Agence française de développement,
00:53:07 et à qui ils ont dit
00:53:09 "Messieurs, jusque là,
00:53:11 les deniers publics vous ont
00:53:13 financé pour que vous financiez à votre tour
00:53:15 les infrastructures,
00:53:17 les sociétés de private equity,
00:53:19 maintenant on vous demande textuellement
00:53:21 de commencer à vous intéresser
00:53:23 aux start-up, aux VCs."
00:53:25 C'est un monde qu'ils ne maîtrisent pas,
00:53:27 donc forcément ils ne pourront pas y aller immédiatement seuls,
00:53:29 et c'est pour ça qu'ils ont besoin de VCs locaux.
00:53:31 - De capital risque. - De capital risque, merci.
00:53:33 Ils ont besoin de relais locaux,
00:53:35 et ces relais locaux sont
00:53:37 souvent des fonds qui ont fait du
00:53:39 private equity par le passé,
00:53:41 et qui maintenant font du capital risque
00:53:43 pour pouvoir distribuer cet argent
00:53:45 aux bonnes start-up. - Ismaël Belhayat,
00:53:47 la Chine et les Etats-Unis ont un point commun,
00:53:49 ils ont fait naître des géants mondiaux
00:53:51 du e-commerce, votre domaine,
00:53:53 bien plus gros,
00:53:55 Alibaba, Amazon, qu'est-ce que vous pensez
00:53:57 de ces modèles de plus en plus
00:53:59 contestés, socialement,
00:54:01 écologiquement ? Je voudrais d'abord
00:54:03 vous faire réagir aux propos
00:54:05 de Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon,
00:54:07 qui est aujourd'hui président du conseil d'administration.
00:54:09 Il se dit
00:54:11 engagé pour la défense de l'environnement,
00:54:13 contre le changement climatique.
00:54:15 Un extrait de son discours à la COP26,
00:54:17 c'était à Glasgow,
00:54:19 fin 2021.
00:54:21 Je suis heureux de vous annoncer
00:54:23 un engagement de 2 milliards de dollars
00:54:25 allocé directement pour la restauration
00:54:27 de la nature et la transformation
00:54:29 des systèmes alimentaires.
00:54:31 C'est une partie du commité
00:54:33 de Bezos Earth Funds,
00:54:35 10 milliards de dollars,
00:54:37 pour la défense du changement climatique,
00:54:39 l'amélioration de la nature,
00:54:41 l'amélioration de la justice environnementale
00:54:43 et l'opportunité économique.
00:54:45 Ensemble, ce 3 milliards de dollars
00:54:47 en engagements,
00:54:49 c'est la nature,
00:54:51 l'amélioration de la nature,
00:54:53 l'amélioration de la justice environnementale
00:54:55 et l'amélioration de la justice environnementale.
00:54:57 C'est un engagement de 2 milliards de dollars
00:54:59 pour la défense de la nature,
00:55:01 l'amélioration de la justice environnementale
00:55:03 et l'amélioration de la justice environnementale.
00:55:05 C'est un engagement de 2 milliards de dollars
00:55:07 en engagements,
00:55:09 l'amélioration de la nature,
00:55:11 l'amélioration de la justice environnementale
00:55:13 et l'amélioration de la justice environnementale.
00:55:15 C'est un engagement de 2 milliards de dollars
00:55:17 en engagements,
00:55:19 l'amélioration de la justice environnementale
00:55:21 et l'amélioration de la justice environnementale.
00:55:23 - Il y a une part d'hypocrisie selon vous, Ismaël Belhayat ?
00:55:28 Ou est-ce que c'est totalement sincère ?
00:55:30 - Je ne suis pas sûr que ce soit hypocrite.
00:55:32 J'étais à Stanford il y a 2 mois.
00:55:34 J'ai rencontré un des fondateurs d'Intel
00:55:36 qui entre-temps a monté un fonds de capitalisme
00:55:38 qui s'appelle Kleiner Perkins
00:55:40 et qui vient d'investir 3 milliards de dollars
00:55:42 dans une école à Stanford
00:55:44 qui s'appelle la John Dewey Climate Change School.
00:55:46 dans une école à Stanford qui s'appelle la John Dewey Climate Change School.
00:55:48 dans une école à Stanford qui s'appelle la John Dewey Climate Change School.
00:55:50 Ils ont tous bien pris le temps
00:55:52 Ils ont tous bien pris le temps
00:55:54 de l'urgence.
00:55:56 - Donner de l'argent c'est une chose
00:55:58 mais dans la pratique, au quotidien de ces entreprises ?
00:56:00 - Ensuite dans la pratique,
00:56:02 je vous dis, on va prendre l'exemple d'Amazon.
00:56:04 Amazon a eu un effet néfaste
00:56:06 et un effet bénéfique.
00:56:08 L'effet néfaste,
00:56:10 disons-le clairement,
00:56:12 c'est qu'il pousse à la consommation.
00:56:14 On n'a jamais autant consommé que depuis qu'on a Amazon
00:56:16 parce que c'est tellement bien fait,
00:56:18 c'est tellement pratique,
00:56:20 c'est tellement bien fait,
00:56:22 qu'on a besoin de plus,
00:56:24 à consommer plus, donc à produire plus
00:56:26 et donc forcément c'est pas bon pour la planète.
00:56:28 Mais en parallèle,
00:56:30 rappelons-le, Amazon a optimisé
00:56:32 les chaînes logistiques de bout en bout.
00:56:34 Aujourd'hui,
00:56:36 on transporte
00:56:38 de meilleure façon,
00:56:40 plus rapidement
00:56:42 et avec une empreinte carbone
00:56:44 meilleure.
00:56:46 Donc est-ce que l'un a compensé l'autre ?
00:56:48 L'un a été bien plus rapide que l'optimisation
00:56:50 de ces chaînes logistiques.
00:56:52 Et les dernières années n'ont pas été formidables de ce point de vue-là ?
00:56:54 Tout à fait. Maintenant, ils en ont pris conscience,
00:56:56 ils donnent de l'argent.
00:56:58 Est-ce qu'on va
00:57:00 savoir bien utiliser cet argent ?
00:57:02 C'est la bonne question.
00:57:04 Maintenant, je conclue juste par dire que l'école
00:57:06 en question que j'ai vue
00:57:08 est en train de former
00:57:10 les futures élites
00:57:12 à la prise de conscience de ce genre de choses
00:57:14 et c'est ce que je disais tout à l'heure,
00:57:16 c'est la latence, c'est bien conforme
00:57:18 et je pense que les gens qui passeront par cette école
00:57:20 et qui viendront au pouvoir dans 5, 10, 15 ans
00:57:22 prendront les bonnes mesures.
00:57:24 On a beaucoup parlé
00:57:26 de relations internationales
00:57:28 durant l'émission et on ne peut pas
00:57:30 ne pas évoquer les tensions
00:57:32 entre le Maroc et la France,
00:57:34 deux pays auxquels vous êtes très attachés.
00:57:36 Elles sont notamment liées à la gestion
00:57:38 du nombre de visas.
00:57:40 Quelle est votre position par rapport à ça ?
00:57:42 Je vais vous dire,
00:57:44 tout à l'heure, on parlait
00:57:46 d'un cycle économique. On est au plus bas,
00:57:48 on est au plus haut.
00:57:50 La France et le Maroc,
00:57:52 ce sont des amis de toujours
00:57:54 et la définition
00:57:56 de l'amitié, c'est de passer
00:57:58 par des moments d'idil et des
00:58:00 moments où on se dispute un peu plus.
00:58:02 Même chose avec vos
00:58:04 épouses, j'en suis convaincu.
00:58:06 Le Maroc et la France, c'est exactement ça.
00:58:08 On est juste, en ce moment,
00:58:10 dans une petite dispute qui finira par passer.
00:58:12 Qu'on le veuille ou non.
00:58:14 Donc il ne peut pas y avoir de divorce ?
00:58:16 Non. Il peut y avoir une petite dispute,
00:58:18 chacun se met de son côté.
00:58:20 En ce moment, on ne se parle pas beaucoup.
00:58:22 Mais je vais vous dire, les relations historiques sont tellement fortes.
00:58:24 Regardez, la preuve, c'est que je suis marocain,
00:58:26 je parle français, je suis ici à l'antenne de RFI
00:58:28 avec un journal qui s'appelle "Jeune Afrique".
00:58:30 L'influence française,
00:58:34 les relations,
00:58:36 je suis passé par l'école française.
00:58:38 Qu'on le veuille ou non, aujourd'hui,
00:58:40 je m'oriente vers la France. Je suis allé à Station F,
00:58:42 j'ai ramené Orange dans mon tour de table.
00:58:44 Je me fais beaucoup aider par la
00:58:46 Chambre Commerce d'Industrie
00:58:48 au Maroc.
00:58:50 Je me fais aider par BPI France.
00:58:52 Je me fais aider par Business France.
00:58:54 Toutes ces institutions, par la French Tech.
00:58:56 Mais à l'instant T, est-ce qu'il n'y a pas une contradiction
00:58:58 entre le fait
00:59:00 d'imposer cette politique très restrictive
00:59:02 et l'organisation
00:59:04 de sommets visant
00:59:06 à développer les échanges
00:59:08 entre la France et le continent ?
00:59:10 Qu'est-ce que vous diriez, vous,
00:59:12 aux responsables politiques français ?
00:59:14 Écoutez, moi, je dirais
00:59:16 aux responsables politiques français
00:59:18 qu'il faut apaiser la situation.
00:59:20 Qu'il faut faire table rase
00:59:22 des problèmes actuels
00:59:24 et prendre de la hauteur
00:59:26 pour voir tout ce qui a été fait
00:59:28 depuis maintenant 100 ans
00:59:30 que nous travaillons
00:59:32 main dans la main ensemble.
00:59:34 Bon, maintenant,
00:59:36 on a la chance d'avoir,
00:59:38 en tout cas au Maroc,
00:59:40 une continuité du pouvoir.
00:59:42 En France,
00:59:44 encore une fois, c'est des cycles.
00:59:46 Donc, c'est une période
00:59:48 qui va passer.
00:59:50 Et puis,
00:59:52 les choses ne pourront que s'arranger.
00:59:54 Vous pourriez avoir envie de faire de la politique
00:59:56 pour aider justement à la réconciliation
00:59:58 entre ces deux pays ?
01:00:00 Plus que vous n'en avez fait,
01:00:02 puisque vous étiez quand même engagé
01:00:04 avec, aux côtés d'Emmanuel Macron,
01:00:06 en tout cas dans le sillage de ses idées.
01:00:08 Écoutez,
01:00:10 je me concentre pour l'instant
01:00:12 sur le business.
01:00:14 Faisons en sorte qu'il réussisse
01:00:16 et ensuite, on verra bien.
01:00:18 France-Maroc, ça fait penser aussi au football ?
01:00:20 Assez récemment, n'est-ce pas ?
01:00:22 Le Maroc, oui,
01:00:24 qui a validé sa candidature
01:00:26 pour l'organisation de la Coupe du Monde
01:00:28 2030, pas toute seule,
01:00:30 annonce faite au nom du roi du Maroc
01:00:32 récemment par le ministre de l'Education
01:00:34 et des Sports, Shakib Ben Moussa.
01:00:36 Ben Moussa.
01:00:38 (Propos en arabe)
01:01:06 (Applaudissements)
01:01:08 (...)
01:01:10 (...)
01:01:12 (...)
01:01:14 qui se déroule depuis le début de la première ligne de football,
01:01:17 "Le lien entre Afrique et l'Europe,
01:01:21 le nord de la mer Midi-Blanc et le sud de la mer,
01:01:24 la terre africaine, l'univers arabe,
01:01:28 et la spacefare Midi-Orient".
01:01:30 Il est également un exemple d'un désir d'un accord
01:01:35 pour la meilleure des caractéristiques de ce côté ou de l'autre,
01:01:39 et un témoin d'une attente d'efforts d'ingénieurs
01:01:43 et d'innovation, de compréhension et de capacité.
01:01:48 - Le ministre des Sports marocain, Shakib Ben Moussa.
01:01:51 Maroc, Espagne, Portugal, vous y croyez ?
01:01:54 Ismaël Belhayat ?
01:01:56 - Avant de répondre à la question, j'aimerais déjà noter
01:01:59 qu'on a fait un match amical avec le Brésil.
01:02:01 Match incroyable à Tanger.
01:02:04 Euphorie dans le stade.
01:02:05 Et on a gagné 2-1.
01:02:07 Et c'est historique pour le Maroc.
01:02:09 Je me souviens... - Après une Coupe du Monde.
01:02:11 - Après une Coupe du Monde. - Formidable.
01:02:13 Ça a donné, vous avez senti dans la jeunesse marocaine,
01:02:16 quelque chose de nouveau ?
01:02:19 - Moi, plus jeune, j'ai assisté au match Brésil-Maroc en France, d'ailleurs,
01:02:26 en 1998, où on s'était fait laminer 3-0.
01:02:30 Ensuite, cette Coupe du Monde a ravivé dans la jeunesse
01:02:34 un patriotisme juste extraordinaire.
01:02:37 Et puis aussi, une image du Maroc qui, aujourd'hui,
01:02:42 en un mot, le Maroc est devenu connu.
01:02:45 Moi, je me souviens, avant, lorsque je pitchais, lorsque je vendais
01:02:49 aux investisseurs le concept de Chary,
01:02:51 je passais les 5 premières minutes à expliquer ce que c'était que le Maroc,
01:02:54 où est-ce qu'il se trouvait et pourquoi est-ce qu'il devait investir.
01:02:57 Aujourd'hui, j'en ai plus besoin.
01:03:00 Et donc, l'équipe de foot a été pour moi, en tout cas, le meilleur ambassadeur.
01:03:05 Et je pense pour l'ensemble des Marocains, le meilleur ambassadeur possible.
01:03:08 - Au-delà du tourisme, le football, c'est aussi une formidable publicité
01:03:13 pour les entreprises marocaines.
01:03:14 - Je vais vous dire, c'est la meilleure campagne comme,
01:03:16 dont on aurait pu tous rêver.
01:03:19 On voit souvent, dans les stades, Visite Azerbaijan,
01:03:22 floquer sur les maillots de foot.
01:03:24 Je peux vous dire que l'équipe de foot a fait, en une Coupe du Monde,
01:03:28 ce que des budgets marketing incommensurables
01:03:31 n'auraient pas pu faire en un siècle d'investissement en marketing.
01:03:35 - Alors là, on a parlé de 2022, parlons de 2030,
01:03:37 donc de cette candidature.
01:03:39 Vous y croyez à la...
01:03:41 - À la victoire, le Maroc en est capable ?
01:03:44 - La prochaine Coupe du Monde aura lieu aux Etats-Unis, au Mexique et au Canada.
01:03:51 Trois pays limitrophes, avec une distance qui est bien plus importante
01:03:56 que celle dont on parle.
01:03:58 Là, le Maroc, comme vous le savez, a candidaté à plusieurs reprises
01:04:02 à cette Coupe du Monde.
01:04:03 On n'était pas si loin de l'obtenir, ce qui veut dire
01:04:05 qu'une partie des infrastructures est déjà en place.
01:04:08 Je vous invite à aller voir les magnifiques stades qu'on a aujourd'hui
01:04:10 à Tangier, à Casablanca ou encore à Marrakech.
01:04:12 Euh, pardon, à Gadir.
01:04:14 Donc, par conséquent, j'y crois fortement,
01:04:17 parce que c'est tout simplement juste que ce soit notre tour.
01:04:21 Peut-être que seul, on n'y serait pas arrivé.
01:04:24 Je pense qu'avec le Portugal et l'Espagne,
01:04:27 qui, en plus, montrent un pont entre les deux rives de la Méditerranée,
01:04:33 on a toutes nos chances d'y arriver, on croise les doigts,
01:04:36 et le meilleur est à venir.
01:04:37 - Un pont entre l'Europe et l'Afrique ?
01:04:40 C'est vous, Ismaël Belhayat ? Merci beaucoup.
01:04:42 - Merci à vous, c'était un plaisir de passer ce moment avec vous.
01:04:45 - Merci d'être passé par les studios de RFI pour cet entretien
01:04:49 que vous pourrez tous partager, commenter sur la chaîne YouTube de RFI,
01:04:54 rubrique "Grandes invités de l'économie, les meilleurs passages"
01:04:57 dans les colonnes de Jeune Afrique sur jeuneafrique.com.
01:05:00 Merci également à notre réalisateur, Guillaume Meunier.
01:05:04 Merci aussi à Laurent Philippot, à Yann Bourdelas, à Adrien Toureau.
01:05:09 Merci Julien Clémenceau. - Merci Bruno.
01:05:10 - A très bientôt des photos du tournage de cette émission
01:05:13 sur notre page Facebook RFI Éco, instant capté par notre photographe Yves Forestier.
01:05:19 Bonne journée à tous, ou bonne soirée, portez-vous bien.
01:05:24 Éco d'ici, éco d'ailleurs sur RFI.
01:05:29 Éco d'ailleurs sur RFI.
01:05:33 [Musique]

Recommandations