Interview confession de personnalités politiques et médiatiques sur des sujets environnementaux
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TVTranscription
00:00 [Musique]
00:26 [Sonnerie de porte]
00:27 Bonjour ! Bonjour !
00:32 Sophie ! Bonjour !
00:33 Bonjour Edouard !
00:34 Cristiano ! Enchanté !
00:35 Bienvenue ! Merci !
00:36 Allez-y, je vous en prie !
00:38 Sophie Tuilier et Cristiano Benzoni, architectes de renom et fondateurs de l'agence RÈVE,
00:43 ont parcouru un chemin exceptionnel dans le domaine de l'architecture.
00:46 Une belle collaboration avec Jean Nouvel sera le fruit d'opportunités et de projets uniques à travers le monde.
00:51 Ils ont été salués et récompensés pour leur travail remarquable,
00:55 notamment la maison Louis Vuitton à Paris.
00:57 Une approche novatrice et un sens aiguisé du design
01:00 n'est place parmi les figures majeures de l'architecture contemporaine.
01:03 Bienvenue dans le Déclic !
01:05 Et justement Sophie, quel a été votre Déclic en matière d'écologie ?
01:09 Alors le Déclic, c'est les premières transformations que j'ai pu voir sur le paysage.
01:13 J'ai deux images comme ça qui m'ont marquée.
01:16 Une, c'était un voyage, je crois que c'était au Maroc, de voir les arbres remplis de sacs plastiques.
01:22 Ça a été un premier élément marquant et de réflexion.
01:27 Et la deuxième chose, je pense comme nous tous, les souvenirs d'enfants, de plages,
01:30 notamment sur la Côte d'Azur dans laquelle on avait des micros,
01:33 petites pastilles de plastique, on les ramassait, mais c'était rare.
01:37 Et aujourd'hui, je l'ai encore remarqué cet été, dans une poignée de salles,
01:41 il y en a 20 ou 25, et c'est vrai que la pollution, notamment de la mer,
01:44 elle est assez visible quand on la fréquente.
01:46 On a envie d'en connaître un petit peu plus sur vous deux.
01:50 Donc j'ai un petit quiz avec quelques questions.
01:53 Cristiano, qu'est-ce que vous rêviez de devenir quand vous étiez enfant ?
01:57 Sincèrement, ce n'est pas très original, mais j'ai toujours rêvé de faire de l'architecture.
02:03 Donc ce n'était jamais vraiment été une question pour moi.
02:07 C'était plutôt quelque chose d'éclair,
02:10 que je poursuivais pendant ma toute petite jeunesse.
02:15 Mon père était déjà un peu dans un métier dans lequel le design
02:20 était quand même un objet fondamental de son activité.
02:24 Donc j'étais un peu intéressé à ça depuis mon enfance.
02:29 C'est quelque chose que j'ai vraiment cultivé avec beaucoup de passion
02:32 et qui m'a convaincu vraiment à prendre cette direction très vite dans ma vie.
02:36 Donc quelque part, aujourd'hui, vous réalisez votre rêve.
02:38 Absolument.
02:39 Est-ce que vous vous souvenez, Sophie, Cristiano, de votre tout premier geste écolo ?
02:45 Je pense que le premier réflexe a été un peu de manger sainement et de manger bio.
02:50 Et je pense que c'est à la naissance de mes enfants.
02:54 Et à contrario, est-ce que vous avez un petit péché en écologie ?
02:58 Quelque chose que vous faites ? Un péché en commun, peut-être ?
03:02 Quelques voyages de trop.
03:04 Quelques voyages de trop.
03:06 Mais souvent pour le travail.
03:10 Mais c'est sûr que c'est vraiment la chose sur laquelle il faudrait avoir une stratégie générale
03:15 plus engagée, justement, pour éviter une pollution trop massive.
03:20 Si on peut choisir un lieu, un monument, une loi, une invention,
03:25 est-ce qu'il y a quelque chose dont vous aimeriez vraiment être père, être mère,
03:30 quelque chose qui vous représente ?
03:32 Chez moi, il y a un livre.
03:34 Et en fait, notre positionnement par rapport à l'architecture, notre approche, est très globale.
03:39 Donc ce n'est pas qu'aider l'architecture pour l'architecture.
03:42 Mais souvent on s'inspire des disciplines culturelles qui sont beaucoup plus sensibles
03:46 au changement de la température du désir de l'époque dans laquelle on vit.
03:52 Donc on regarde beaucoup la musique, la littérature, évidemment, les théâtres, les cinémas.
03:57 Et tout ça, ça a des influences bénéfiques, en fait, sur notre manière de voir les choses
04:02 et dans l'essence que nous donnons à nos propositions architecturales.
04:07 Il y a un livre en particulier qui a marqué énormément ma démarche
04:10 et notre démarche commune au sein de l'agence.
04:13 C'est un livre d'Italo Calvino qui s'appelle "Les 100 américaines".
04:16 Un livre qu'il avait écrit justement pour anticiper des thématiques importantes
04:20 pour cette millénaire dans laquelle on vient de commencer tous d'habiter.
04:26 Et qui vous a inspiré ?
04:27 Et qui nous a inspiré énormément, qui nous inspire toujours dans des thématiques
04:30 et dans des axes essentiels de notre travail en architecture.
04:34 Et est-ce que vous avez un sentiment d'inachevé ?
04:37 Alors, dans la vie de l'architecte, malheureusement,
04:41 il y a beaucoup de choses qui s'accomplissent et beaucoup de choses qui ne s'accomplissent pas.
04:46 Dans lequel on a mis beaucoup d'énergie et qui génère une certaine frustration,
04:50 c'est notamment les concours.
04:51 Les architectes font des concours et il y a beaucoup de concours perdus.
04:54 Donc dans cette notion d'inachevé, c'est vrai que ça, c'est un des sujets
04:59 qui sont le plus marquant, je pense, pour un architecte.
05:01 Exactement. Après, ce n'est pas de l'énergie perdue.
05:04 On est dans le recyclage des bonnes énergies, même avec ça.
05:07 Et la chose qui est très intéressante, qui est souvent, en fait, la réflexion
05:11 et les démarches, en fait, qu'on concentre sur un concours
05:16 ou sur un projet qui ne verra pas les jours,
05:18 injectent une énergie extrêmement positive sur la réflexion des projets à venir.
05:22 Donc, rien n'est perdu.
05:23 Et est-ce qu'à contrario, vous avez un projet, une réussite
05:26 dont vous êtes particulièrement fier ?
05:28 Je pense que c'est d'une actualité récente.
05:31 On est très heureux du projet de la Maison de Beauté Carita.
05:34 Ça fait partie, c'est vrai, des projets.
05:35 On a eu la chance de créer une architecture en même temps qu'une marque se réinventait.
05:40 Donc, c'est vraiment, je pense, une écriture assez complète
05:42 qui va du repackaging des produits en cohérence avec tout ce qu'on a imaginé.
05:48 En parlant d'architecture et de projet, d'où est venue Studio Rêve ?
05:52 Est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus ?
05:55 Je raconte souvent l'anecdote, mais c'était l'été, sur une plage, discussion,
06:01 comme on aurait pu appeler cette agence d'architecture,
06:05 qui était un peu un point d'arrivée pour nous très important,
06:07 un point de démarrage très important, en tout cas,
06:10 après avoir travaillé pour d'autres architectes jusqu'à ce moment-là,
06:14 notamment pour Jean Nouvel, avec qui nous avons passé 10 ans
06:17 en tant que directeur de projet sur des projets incroyables.
06:21 Et l'idée, c'était de créer pas un nom d'agence, mais juste une amorce.
06:25 Donc, l'idée d'avoir trois lettres, en fait, qui puissent être un peu l'anticipation
06:29 des pas mal de mots positifs à venir, une pensée positive pour le futur.
06:33 Votre agence, elle est connue pour sa créativité.
06:36 Comment vous évoluez aujourd'hui dans l'air du temps
06:39 et comment vous intégrez cette notion, justement, de développement durable ?
06:43 C'est quelque chose qu'on a volontairement, depuis le démarrage de ces questions,
06:49 pas forcément voulu mettre en avant, parce que pour nous, c'était un must-have.
06:53 C'était une question de bon sens.
06:55 Donc, c'est vrai que ça nous semblait de toute façon des réflexions qu'il fallait avoir.
06:58 Et donc, on n'a pas forcément beaucoup communiqué là-dessus,
07:01 mais ça a toujours fait partie intégrante de nos réflexions et de nos projets.
07:04 Après, nous avons une réflexion sur l'architecture,
07:07 qui est une architecture à la fois sentimentale et à la fois située.
07:12 L'idée de poétique des situations liées à nos projets
07:15 est quelque chose d'être très fort, d'être très récurrent.
07:18 Donc, l'idée, c'est qu'on part d'une demande d'un client,
07:22 d'un contexte économique, d'un contexte culturel,
07:25 dans lequel on aime bien, en fait, s'énoyer.
07:28 On n'est pas des architectes des styles.
07:30 Donc, notre idée, ce n'est pas de proposer tout le temps la même formule,
07:33 la même esthétique, les mêmes objets architecturals.
07:35 Mais l'idée, c'est à chaque fois d'avoir un peu une surprise
07:38 sur l'esthétique finale, en fait, de chaque projet.
07:41 Une découverte qui a beaucoup de fusion
07:45 avec tout ce qui participe à la mise en place du projet
07:49 et à la définition de ces projets-là.
07:51 Justement, pour revenir sur vos clients,
07:53 est-ce qu'aujourd'hui, vous sentez une réelle évolution
07:56 dans les cahiers des charges, dans les appels d'offres ?
07:58 Absolument.
07:59 On a des clients publics et privés dans les deux domaines,
08:02 même les grands groupes privés.
08:04 On a maintenant une politique RSE environnementale
08:06 qui est très, très importante.
08:08 Et aujourd'hui, on a des réglementations.
08:10 Quand on construit un bâtiment,
08:11 aujourd'hui, on a la réglementation thermique 2020
08:13 et on se projette déjà sur un 2025,
08:15 qui sont très contraignantes,
08:17 avec beaucoup de critères de basse émission de carbone,
08:22 de matériaux biosourcés.
08:24 On est déjà, en respectant juste ces données réglementaires,
08:27 sur un critère assez haut.
08:28 Oui, sur un critère assez élevé.
08:29 Quand on rénove la maison Carita,
08:32 des immeubles entiers dans Paris,
08:34 comment on s'adapte en permanence
08:36 à la singularité des bâtiments, des projets
08:39 et des demandes de vos clients ?
08:41 Il y a cette transmission de l'esprit de l'époque
08:45 à l'intérieur des bâtiments.
08:46 Chez nous, née vraiment de cette question des bons sens,
08:48 de comment être responsable, a priori,
08:51 tout en proposant une esthétique
08:53 qui correspond vraiment à une vision
08:55 sur la personnalité du futur bâtiment,
08:58 du futur projet.
08:59 Donc, il y a une démarche chez Carita
09:04 qui est assez particulière,
09:05 c'est celle d'un luxe sobre.
09:07 On ne voulait pas avoir ces notions de luxe opulent,
09:09 qui pour nous appartiennent vraiment au passé.
09:11 L'idée, c'était de distiller un langage
09:13 qui soit contemporain, qui soit intemporel,
09:16 qui puisse durer.
09:17 Donc, on a sélectionné des matières
09:20 qui soient vraiment dans cet esprit-là,
09:22 qui soient à la fois élégantes, esthétiques
09:24 et à la fois responsables et biosourcées.
09:26 Donc, nous avons travaillé à 80 %
09:28 dans les finitions de l'intérieur de la maison Carita
09:31 avec du plâtre.
09:32 Le plâtre, c'est une matière exceptionnelle.
09:35 C'est à 80 % recyclable.
09:37 C'est hyper souple en termes d'usage.
09:40 Il y a à la fois l'héritage
09:43 de cette nature responsable et écologique
09:46 et à la fois, il y a l'héritage
09:48 des grands plasticiens du passé
09:50 qui ont utilisé les plâtres
09:51 comme matière d'expression
09:52 en utilisant vraiment ce potentiel d'expression
09:54 que les plâtres ont en soi,
09:55 comme Canove dans le XVIIe,
09:58 dans tous les moulages d'œuvres anciennes.
10:01 Et donc, nous avons expérimenté
10:04 cette capacité du plâtre à s'adapter
10:06 dans la maison Carita.
10:07 On a essayé vraiment d'exploiter
10:09 toutes ces possibilités d'expression
10:11 dans des finitions différentes,
10:13 dans des géométries différentes.
10:14 On a utilisé un canelet,
10:16 un acoustique sur 16 m de hauteur
10:18 à l'intérieur de la trame centrale,
10:20 un projeté pour les escaliers.
10:22 On a créé de l'hustre intégrée
10:25 à l'intérieur du plafond en plâtre.
10:27 On a vraiment essayé de montrer
10:30 comment avec une matière aussi simple,
10:31 aussi innocente et aussi artisanale,
10:33 dans laquelle la main de l'homme
10:35 a quand même un rôle fondamental,
10:37 ça puisse être une matière contemporaine
10:39 et luxueuse.
10:40 - Mais justement, quand on parle de luxe,
10:42 d'architecture, de design,
10:44 est-ce que les différents plans de sobriété,
10:47 justement pour arriver à ces bâtiments
10:49 bas carbone,
10:50 est-ce que ce n'est pas un frein, aujourd'hui ?
10:53 - C'est un moteur, plutôt.
10:54 C'est un moteur de recherche.
10:56 Parce qu'en fait, aujourd'hui,
10:58 il y a un peu une thématique
10:59 des réglementations,
11:00 par rapport à tous les matériaux écologiques.
11:02 Nous, on fait beaucoup d'expérimentations.
11:04 On essaie de chercher à inventer
11:06 de nouvelles matières,
11:08 avec des conditions que l'architecture
11:10 nous impose.
11:11 Par exemple, sur des complexes résidentiels
11:14 ou sur des grosses opérations,
11:16 on essaie de convaincre nos clients,
11:18 nos maîtresses d'ouvrage,
11:20 à travailler sur les déchets,
11:22 par exemple, qui sortent,
11:23 qui sont issus, en fait,
11:25 de la démolition des bâtiments existants.
11:27 Donc, l'idée, c'est de faire un tri sélectif
11:29 de ces matières-là
11:30 et de pouvoir les reemployer
11:31 à l'intérieur du futur bâtiment
11:33 comme des éléments nécessaires
11:35 à l'amélioration des conditions architecturales
11:37 à l'intérieur des espaces.
11:39 Je pense que l'esthétique est vraiment
11:40 les points d'arrivée.
11:42 En fait, la beauté, pour nous,
11:43 c'est un moteur d'amélioration,
11:45 d'évolution,
11:46 d'évolution de notre histoire,
11:48 de nos conditions,
11:49 de notre intelligence.
11:50 Et ce moteur-là doit transformer, en fait,
11:53 chaque nécessité que nous avons aujourd'hui,
11:55 en termes de bas carbone,
11:57 en termes de responsabilité,
11:59 dans une forme qui soit
12:01 dans un savoir-vivre.
12:03 Qui soit pas juste, en fait, un gadget
12:05 qu'on colle à l'intérieur d'un projet
12:07 pour dire qu'on a respecté la norme.
12:09 Mais l'idée, c'est des distillés d'une esthétique
12:12 qui soit jolie,
12:14 qui soit ambitieuse,
12:16 qui soit dans la beauté
12:17 et pas uniquement dans la nécessité.
12:19 Les villes intelligentes,
12:20 la mutation urbaine,
12:21 ce sont des défis auxquels vous êtes confrontés.
12:24 Comment vous imaginez les grands enjeux de demain
12:27 et comment vous les appréhendez au quotidien ?
12:29 C'est une question difficile.
12:31 Je pense que le débat public est très important là-dessus en ce moment.
12:34 On parle, il y a un enjeu important
12:36 d'une artificialisation nette
12:40 à zéro dans quelques années.
12:42 Ça veut dire qu'il faut savoir densifier la ville,
12:45 mais la densifier en créant une architecture de qualité.
12:48 En créant des habitats
12:52 qui donnent du confort aux usagers.
12:53 Il faut favoriser la biodiversité dans la ville.
12:56 Donc effectivement, c'est un défi important.
12:57 Ce n'est pas évident.
12:59 Je pense que tous les acteurs publics et privés,
13:01 architectes et tous les politiques
13:03 doivent se mettre sur le sujet
13:04 pour trouver les bonnes solutions.
13:05 Et nous, on est ravis en tant qu'architecte.
13:07 Je pense qu'on a un rôle important à jouer.
13:08 C'est un moment clé.
13:09 C'est un moment clé.
13:10 Est-ce que vous avez justement une idée
13:12 sur les matières,
13:13 sur la façon de se déplacer,
13:14 la verdure, l'agencement ?
13:16 Est-ce que vous sentez des tendances aujourd'hui
13:19 ou c'est encore un peu tôt pour avoir un avis ?
13:23 Les concepts essentiels sur la densification
13:25 et sur la transformation de la ville,
13:26 justement, c'est la copunture.
13:28 Donc aujourd'hui, on a un patrimoine construit
13:30 qui est immense.
13:32 Des conditions de vie
13:33 qui ne sont pas toujours à la hauteur.
13:35 Donc il faut savoir piquer là où ça fait du sens
13:39 pour pouvoir modifier un habitat
13:42 en intégrant des fonctions
13:44 et en travaillant sur l'échelle
13:46 pour pouvoir créer des conditions
13:47 qui améliorent la vie des personnes
13:49 et qui améliorent les conditions d'urbanité.
13:51 Donc nous travaillons beaucoup sur des programmations
13:53 avec beaucoup de promoteurs
13:54 avec lesquels nous collaborons
13:56 de manière récurrente
13:59 sur la thématique d'établir une sorte de manifesto social
14:05 qui soit à la base du projet d'architecture
14:08 et en amont du projet d'architecture
14:10 pour essayer de sédimenter les conditions
14:13 avant de définir une esthétique.
14:14 C'est un livre, pour que chacun nous comprenne,
14:16 qui permettrait justement
14:19 de tracer les règles de bonne conduite
14:21 sur la ville de demain.
14:22 Absolument, et surtout pour établir vraiment
14:25 les niveaux, la température du désir des futurs habitants
14:28 à l'intérieur d'un contexte spécifique
14:30 en sachant travailler sur la spécificité
14:32 de chaque contexte.
14:33 On parle énormément d'intelligence artificielle
14:38 ces derniers temps.
14:39 Ça devient de plus en plus grand public.
14:41 Est-ce que vous, dans votre quotidien
14:43 ou en tant qu'architecte,
14:44 vous utilisez ChatGPT,
14:45 vous utilisez ces nouvelles sources de travail
14:49 ou à contrario non,
14:51 et vous faites libre esprit à votre créativité ?
14:54 Ça ferait plaisir à notre responsable informatique,
14:59 qui en adore,
15:00 et avec qui nous avons de longues discussions
15:01 à ce moment, justement, à propos de ChatGPT.
15:04 Nous, on ne l'utilise pas au quotidien.
15:06 Parce que pour nous, l'architecture,
15:08 ce n'est pas trop dans le réflexe,
15:10 c'est plutôt dans la réflexion.
15:11 Donc on aime bien avoir une démarche
15:13 qui soit issue d'une relation humaine,
15:17 tout simplement, quelconque.
15:19 Mais on parle beaucoup, en fait, avec Patrick,
15:22 notamment, de cette question
15:25 pour pouvoir améliorer les instruments
15:27 qui nous permettent de mieux produire l'architecture.
15:29 Donc tout ce qui est à suivre des chantiers,
15:31 tout ce qui est opérationnel,
15:33 tout ce qui peut être en aide à la rédaction,
15:35 des comptes rendus et des synthèses,
15:37 ça, ça peut être une piste d'application,
15:39 effectivement, qui peut améliorer
15:41 la manière de faire notre travail.
15:43 Les logiciels qu'on utilise,
15:44 utilisent l'intelligence artificielle,
15:46 donc de manière, on peut dire,
15:48 indirecte, on l'utilise pour les logiciels 3D.
15:51 Aujourd'hui, on a des logiciels de modélisation
15:54 et d'information du bâtiment
15:56 qui s'appelle BIM,
15:57 qui utilise ces intelligences, évidemment.
15:59 - Et est-ce que vous pensez qu'à terme,
16:01 les logiciels d'intelligence artificielle
16:03 peuvent tout simplement remplacer les architectes ?
16:06 - Bien sûr que non.
16:08 On l'espère pas.
16:10 - Je sais pas.
16:11 Ça dépend de là où ça va se situer le désir des gens.
16:17 Peut-être, on a envie tous de faire des expériences
16:20 et de pouvoir expérimenter la nouveauté.
16:22 Donc ça, c'est un désir très fort quand même
16:24 dans les sociétés,
16:25 dans les sociétés qu'on a connues dans le passé.
16:27 Donc c'est possible que ça donne envie
16:30 de faire cette expérience-là.
16:32 Après, moi, je pense que quand on veut habiter
16:34 dans un endroit où on a une relation
16:36 tellement humaine et tellement intime,
16:38 c'est difficile de pouvoir confier ça
16:41 tout simplement à un logiciel
16:43 ou à quelque chose avec qui on rénonce
16:46 d'avoir un vrai...
16:47 - Qui n'existe pas concrètement.
16:48 - Ça tendrait forcément vers une forme d'uniformisation.
16:51 Et ce à quoi on est absolument opposés,
16:53 puisque notre démarche est plutôt sur une démarche
16:55 d'un projet singulier à chaque fois.
16:57 - En fait, on croit pas du tout à ce système
16:58 qui fait que l'architecture devient une autre architecture.
17:02 L'architecture, c'est les fruits d'un dialogue,
17:04 c'est le fruit d'une relation humaine,
17:08 d'une relation sentimentale, d'un sentiment.
17:12 Ce sont toutes des relations qui sont compliquées
17:15 à transférer sur l'idée d'une relation un peu mécanique.
17:20 - Et le projet se fait pas seul,
17:21 on le fait vraiment avec notre client,
17:23 avec toutes les équipes et les bureaux d'études
17:25 qui nous entourent.
17:26 Donc il y a vraiment une notion de collaboration
17:27 et d'échange qui, à mon avis, et je l'espère,
17:30 ne peut pas être remplacée
17:31 par une intelligence artificielle.
17:33 - Au-delà de l'architecture,
17:34 vous parliez de collaboration,
17:36 je crois que vous en avez certaines
17:38 avec la gastronomie.
17:39 Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu plus ?
17:43 - On a eu, dans le cadre d'une collaboration
17:46 qu'on a eue avec la marque Mauviel,
17:49 qui fait de l'ustensile de cuisine haut de gamme.
17:54 - C'est une petite usine fantastique
17:56 basée à Ville-Dieu-les-Poils, en Normandie.
18:00 C'est une marque mythique qui fabrique
18:04 des casseroles et des batteries de cuisine
18:08 en cuivre martelée.
18:10 C'est l'objet du désir
18:12 de tout l'univers gastronomique dans le monde entier.
18:15 C'est un des musts, en fait,
18:16 que chaque chef, une fois qu'ils arrivent à un certain niveau,
18:19 il veut avoir dans leur cuisine.
18:21 Donc nous avons beaucoup travaillé avec eux
18:23 sur pas mal de sujets, à des échelles différentes.
18:26 Leur usine, donc l'amélioration de leur habitat,
18:29 des travaux dans leur siège historique,
18:32 à Ville-Dieu-les-Poils, donc,
18:33 avec l'idée toujours, qui pour nous était très forte,
18:37 de ne pas uniquement montrer des produits,
18:39 mais l'idée, c'était d'écroiser
18:41 la culture des produits d'une entreprise
18:44 avec une culture gastronomique liée à un terroir,
18:47 avec la culture gastronomique d'un chef
18:50 qui vient interpréter tout ça
18:51 et donner un lien, en fait,
18:53 et une modernité à tout ça.
18:55 - Et à titre personnel,
18:57 moi, je suis un chef d'entreprise de 32 ans.
18:59 Quel conseil vous donneriez
19:01 à un jeune architecte qui, aujourd'hui, veut se lancer ?
19:06 - De rester, je dirais, de rester curieux,
19:10 de visiter, de se balader,
19:13 de regarder, pas les exemples forcément d'architecture,
19:17 mais de s'inspirer de toutes les disciplines transversales,
19:20 l'art, le cinéma, la mode,
19:22 et de continuer... - De se nourrir, quelque part.
19:24 - De se nourrir, pas que d'images,
19:27 effectivement, d'architecture réalisée,
19:28 et de continuer à dessiner,
19:30 parce qu'on l'a évoqué tout à l'heure,
19:31 les logiciels 3D ont tendance à amener les jeunes
19:35 à ne concevoir que par cet outil-là.
19:38 Le dessin est très important dans la manière de concevoir.
19:41 En tout cas, c'est comme ça qu'on...
19:42 - Vous ressentez que la jeune génération
19:44 utilise beaucoup plus les logiciels, peut-être ?
19:46 - Oui, alors, ça leur donne des qualités, bien sûr,
19:48 qui sont supérieures ou non dans certains aspects,
19:51 mais je pense qu'il faut pas perdre de vue
19:54 la nécessité et l'importance de dessiner
19:56 et de ressentir les choses en les dessinant.
19:59 Je vais ajouter peut-être un conseil.
20:02 - Oui, juste un conseil pour la profession de l'architecte
20:05 et de manière plus vaste sur l'ensemble des marches
20:08 de cet âge-là, c'est que la vie est urgente.
20:11 Donc, il faut s'intéresser à tout, il faut tout vivre,
20:13 il faut tout expérimenter, il faut être frais,
20:15 il faut savoir les choses, il faut parler avec les gens.
20:18 - Il faut pas hésiter à prendre des risques.
20:20 - Et vous qui faites beaucoup de projets à l'international,
20:23 comment vous conciliez toutes les différentes réglementations,
20:27 les différentes normes dans les différents pays
20:29 par rapport aux cultures, par rapport aux pays, aux habitudes ?
20:33 Vous arrivez à vous adapter à tous vos projets ?
20:37 - Nous, en général, on travaille en gang.
20:39 C'est vrai qu'on aime que chacun ait ses compétences
20:41 et on prétend pas avoir toutes les compétences.
20:43 Donc, de la même manière que pour toutes les compétences,
20:45 je sais pas, qui sont l'acoustique, l'éclairage, etc.
20:48 - L'environnement.
20:49 - L'environnement, on fait appel à des partenaires
20:51 avec qui on aime travailler.
20:53 De la même manière, pour tout ce qui est réglementation
20:55 dans les pays étrangers, on s'appuie sur des équipes locales,
20:57 sur des architectes qui sont implantés,
20:59 qui connaissent les réglementations, les usages et les normes.
21:04 - C'est très important pour nous et nous avons,
21:06 dans chaque coin du globe, un intérêt spécifique
21:11 sur des gens qui peuvent nous aider à rentrer
21:13 dans une réglementation écologique
21:15 qui soit adaptée à une labellisation locale.
21:18 - Petite question personnelle.
21:20 Vous êtes en couple.
21:22 Comment vous arrivez à concilier les idées, vos projets ?
21:26 Est-ce que vous êtes toujours d'accord ?
21:28 Comment vous vivez au quotidien le fait de partager
21:31 votre vie privée et votre vie professionnelle ?
21:34 - On n'est pas toujours d'accord, mais c'est ça qui...
21:36 - C'est la lucha libre.
21:38 - C'est ça qui est enrichissant.
21:40 En fait, on est, je pense, très complémentaires.
21:43 Voilà, Cristiano, il est très poète, je peux le dire.
21:46 Il va beaucoup rêver, il est très créatif
21:48 et je pense que j'ai un peu plus les pieds sur terre.
21:50 - Il se fit dans une consistance.
21:52 - Donc, voilà, ce choc des visions...
21:55 - C'est comme effectivement les cuisines.
21:57 C'est ça.
21:59 Souvent, j'amène les ingrédients et il se fit en fait créer la recette.
22:03 - Ou je crée les limites de la casserole.
22:06 - Est-ce que vous préconisez l'utilisation des énergies
22:09 renouvelables dans vos chantiers, des panneaux solaires,
22:12 de la géothermie ?
22:14 Est-ce que c'est quelque chose que vous intégrez ou pas encore ?
22:17 - En fait, on l'intègre parfois ou cas par cas.
22:19 Et dans certains cas, effectivement,
22:21 on positionne des panneaux solaires quand c'est autorisé
22:24 parce qu'on a aussi souvent le cas que c'est pas forcément accepté
22:27 par les architectes des bâtiments de France.
22:29 Donc, on trouve des manières de compenser.
22:31 - Ce qui est assez étonnant, effectivement.
22:33 - Mais aussi de décaler un peu l'apparence
22:35 de tous ces systèmes à des productions d'énergie,
22:37 que ce soit du solaire, que ce soit de l'éolien, par exemple,
22:40 en essayant de leur donner en fait un visage
22:43 qui soit plus compatible avec des environnements
22:45 dans lesquels on n'a pas l'habitude de les voir,
22:47 comme l'environnement urbain parisien,
22:49 comme des endroits dans lesquels il devient une sorte
22:52 des monuments, des monuments aux oeuvres d'art, en fait,
22:56 qui est là pour nous raconter, rappeler l'urgence, justement,
23:01 de cette... - Dans un sens un peu pédagogique.
23:03 - Dans ce contexte d'urgence climatique,
23:06 on voit émerger de nouveaux métiers.
23:08 Est-ce que vous travaillez avec des ingénieurs climat,
23:11 des énergéticiens ?
23:13 Est-ce que ces métiers-là font partie de votre quotidien aujourd'hui ?
23:17 - Bien sûr, oui. Maintenant, c'est obligatoire
23:19 quand on travaille sur un projet
23:21 d'avoir des bureaux d'études qui nous accompagnent
23:23 sur l'aspect environnemental.
23:25 Donc, effectivement, ils sont spécialistes,
23:27 ils connaissent toutes les...
23:29 les propriétés de tous les matériaux
23:31 et sont en capacité de nous aider,
23:33 de nous dire si on a ce matériau-là ou celui-là,
23:35 ou nous conseillent des matériaux bursourcés
23:37 qui sont adaptés au projet.
23:38 - Et la cohabitation, est-ce qu'elle se fait facilement
23:40 ou est-ce qu'ils s'adaptent à vous,
23:42 c'est vous qui vous adaptez à eux ?
23:43 Comment ça se passe aujourd'hui techniquement ?
23:45 - En fait, techniquement, nous, on travaille avec tout le monde
23:48 et depuis des années, toujours dans le même sens.
23:50 Donc, nous avons des savoirs architecturaux à l'agence
23:53 qu'on aime bien amplifier, en fait,
23:55 avec des disciplines amies et voisines de l'architecture
23:57 et avec des gens qui peuvent participer avec nous
23:59 dans la même direction, dans la même valeur,
24:01 dans la même militance,
24:03 nous apporter, en fait, des savoirs complémentaires
24:06 et on travaille toujours en gang.
24:08 C'est un terme qu'on aime beaucoup
24:11 et qui représente bien notre manière de travailler.
24:14 Donc, on est tous synchros, en fait,
24:16 sur une certaine vision des choses.
24:19 Donc, c'est très facile de trouver une entente
24:21 dans ces conditions. - Avec eux pour collaborer.
24:23 Dernière petite question.
24:25 Je crois que vous démarrez un nouveau projet à Paris.
24:28 Est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus ?
24:30 - Pour l'Institut français ? - Absolument.
24:33 - Donc, l'Institut français,
24:35 qui est l'un des organes du ministère de la Culture
24:38 qui finance tous les projets culturels en France
24:40 et à l'étranger,
24:42 nous travaillons, en fait, sur leur futur siège parisien.
24:45 - Et qu'il faut complètement réhabiliter ?
24:47 - Qu'il faut complètement...
24:49 - Dans ce cas précis, en fait,
24:51 nous, on fait des constructions de bâtiments neufs
24:53 et dans ce cas précis, on vient...
24:55 On fait aussi de l'architecture d'intérieur.
24:57 Donc, dans ce cas précis, en fait,
24:59 on a conçu tous les aménagements intérieurs
25:01 dans un bâtiment qui a été conçu par un autre architecte.
25:03 Donc, c'est un exercice intéressant de...
25:05 - Dialogue. - ...de cohabitation et de dialogue.
25:07 - Évidemment, avec beaucoup de réflexions
25:09 autour des... d'identité culturelle
25:11 et beaucoup sur les concepts des transitions,
25:13 justement, qui, pour nous, est une clé intéressante
25:15 de cultures qui veulent garder leur identité
25:17 tout en étant contaminées par des cultures autres,
25:21 avec un effet bénéfique, en fait,
25:23 pour l'évolution de la pincée.
25:25 Et nous avons travaillé, justement,
25:27 sur un univers intérieur basé sur des matériaux responsables,
25:30 écologiques, ergonomiques,
25:33 qui puissent vraiment avoir une vraie modernité
25:37 en termes d'usage et en termes des conditions de travail
25:39 dans ces espaces-là.
25:41 Et avec l'idée aussi de pouvoir travailler
25:43 sur des éléments qui soient pas répétitifs,
25:45 mais qui soient à chaque fois spécifiques
25:47 pour chaque département de l'Institut français.
25:49 En fait, on a créé une sorte de paysage intérieur
25:51 basé sur l'assemblage
25:53 de certains éléments standards
25:55 dans des formes et dans des usages différents,
25:57 justement, pour créer une singularité
25:59 et une personnalité à chacun de ces espaces
26:03 destinés à des secteurs différents de l'Institut.
26:06 - Qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter pour la suite?
26:08 - Bon vent. (rires)
26:11 - Merci beaucoup d'avoir participé à l'émission du Déclic.
26:15 - Merci. - C'était un plaisir.
26:17 Merci beaucoup. - Merci, Sophie.
26:19 - C'était un plaisir.
26:21 (indicatif musical)
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26:48 (indicatif musical)
26:51 [Musique]