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Anne Fulda reçoit Yann Moix pour son livre «Hors de moi» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Yann Moix.
00:02 Merci de m'inviter.
00:03 Alors, on connaît évidemment l'écrivain qui est désormais aussi diariste,
00:09 qui est une palette de plus, une facette de plus.
00:12 Alors, vous venez de publier "Hors de moi", "Moi",
00:16 une coédition bouquin-grasset, une somme qui, d'une certaine façon,
00:20 relate une partie de votre vie avec ce que vous êtes.
00:23 2016-2017.
00:25 Avec vos excès, vos obsessions, vos attirances,
00:30 vous écrivez à propos de vos obsessions.
00:32 Mes thèmes sont souvent les mêmes.
00:34 L'intranquillité, l'enfance, la persécution, l'idolâtrie
00:37 et surtout, comment être soi dans une société qui ne le permet pas.
00:41 Vous n'avez pas l'impression d'être vous ?
00:44 Vous y arrivez ?
00:45 Ah oui, je suis un des rares à être moi dans cette société.
00:47 D'ailleurs, vous avez vu à quel point, à chaque fois que je suis moi,
00:49 ça déclenche des choses pas possibles.
00:50 Aujourd'hui, on appelle polémiste quelqu'un qui dit ce qu'il pense.
00:53 Et si la majorité des gens ne pensent pas la même chose,
00:56 alors il y a une polémique.
00:57 Et les polémiques ne me dérangent pas parce que ce qui reste,
00:59 c'est les livres.
01:00 La polémique d'il y a 10 ans, 15 ans, 3 heures, 6 minutes.
01:04 Je m'en fiche, mais à un point.
01:05 Et même, ça me sert de tremplin.
01:07 Alors, vous venez de le dire, c'est un journal qui se déroule
01:11 entre juin 2016 et juin 2017.
01:14 C'est une année remplie.
01:15 Et d'ailleurs, c'est quelque chose que vous évoquez en quatrième.
01:17 On se demande si vous ne cherchez pas à remplir votre vie
01:20 pour remplir votre journal, alimenter votre journal.
01:25 - Il est clair que de toute façon, dès que vous tenez un journal intime,
01:28 vous avez intérêt à ce qu'il se passe quelque chose,
01:30 soit dans votre cerveau, soit dans votre vie, dans votre corps.
01:33 Parce que s'il ne se passe rien, c'est absolument terrible.
01:35 Donc, soit on exagère ce qu'on a à penser,
01:39 parce qu'on n'a rien vécu de la journée,
01:41 soit on exagère sa journée pour pouvoir la décrire.
01:43 - Alors, pour un écrivain que l'on dit très souvent "graphoman",
01:46 d'ailleurs, je ne sais pas si c'est un terme qui vous énerve.
01:48 - Non, ça, c'est un terme inventé par les impuissants et les aigris
01:51 pour conspuer ceux qui ont des choses à dire
01:53 et qui ont une capacité d'écriture qui leur est supérieure.
01:56 - Et qui ont une plume.
01:57 - Moi, je ne vénère pas les gens qui s'offrottent pendant 15 jours
02:01 pour écrire trois lignes.
02:02 Non, mais un écrivain, c'est quelqu'un, on lui donne une feuille,
02:04 il a une idée, il l'écrit.
02:05 Enfin, ou à l'inverse, il l'écrit, donc il a l'idée.
02:07 Parce que je ne sais ce que je pense que par écrit.
02:09 - Alors, lorsque, pendant cette période, vous êtes à l'époque chroniqueur...
02:13 - Non, Anne, parce qu'on ne reprochera pas quelqu'un...
02:16 - Non, non, pas vous, mais qui fait 10 films par an d'être un filmomane,
02:19 par exemple.
02:20 Il n'y a que les écrivains, quoi.
02:21 Ou un journaliste, on ne lui reprochera pas d'être journalistomane.
02:24 - Ou un ministre qui écrit.
02:25 - Non, mais vous voyez ce que je veux dire.
02:27 - Oui, oui, bien sûr.
02:28 - Donc, fuck, au bout d'un moment, un écrivain, ça écrit, quoi.
02:31 Et la rétention d'écriture pour pas que les journalistes soient ensevelis
02:35 par le nombre de feuillets à lire, tant pis.
02:37 - Oui, ça, ce n'est pas votre sujet.
02:39 Alors, à l'époque de ce journal, vous êtes chroniqueur à la télévision.
02:44 On n'est pas couché.
02:45 Vous venez de publier Terreur.
02:46 Est-ce que le moix d'alors a beaucoup changé ?
02:51 Aujourd'hui, il est différent.
02:53 - Non, pas fondamentalement.
02:55 Je ne suis pas quelqu'un qui change, je suis quelqu'un qui se précise.
02:58 Donc, d'une certaine façon, mes dates sont quasiment interchangeables.
03:02 - Alors, on croise énormément de gens que vous voyez vous-même.
03:07 Alors, il y a justement...
03:08 Vous commencez par Léa Salamé, on voit aussi Sarko.
03:11 - Gentil portrait de Léa Salamé.
03:13 - Très gentil portrait.
03:14 Je l'aime beaucoup.
03:14 - Oui, c'est vrai.
03:15 - Beaucoup de tendresse pour elle, intelligente, bosseuse.
03:18 Et puis, une chipie dans le bon sens du terme,
03:20 c'est-à-dire qu'elle ne se laisse pas marcher sur les pieds.
03:22 - Il y a aussi Nicolas Sarkozy, Philippe Labraud, Lambron.
03:25 Et puis, vous flinguez aussi un petit peu, vous flinguez assez bien.
03:29 Luc Ferry, par exemple, page 965.
03:32 Luc Ferry balance tellement de clichés qu'il aurait dû être photographe.
03:34 - Je n'ai jamais vu...
03:35 Sa personne ne m'intéresse pas, je ne le connais pas à 2 000 âmes.
03:37 Je n'ai jamais vu quelqu'un proférer autant de platitudes
03:41 avec autant de professeurs ralissimes dans la voix, dans l'intonation.
03:46 Autant d'esprit de sérieux, si vous voulez, pour accoucher de souris mortes.
03:50 - Souris mortes, c'est joli.
03:51 - C'est une montagne de carton-pâte qui accouche de souris mortes.
03:55 Je n'ai jamais compris ça.
03:57 Je n'ai jamais compris.
03:58 C'est une imposture, mais rigolote, parce qu'on s'amuse bien quand on l'entend.
04:03 - Alors, il y a aussi une vacherie générale qui nous intéresse particulièrement ici.
04:06 Page 963, vous écrivez.
04:08 J'ai remarqué que la plupart des gens qui ne lisent pas écrivent.
04:11 C'est une manière de dire que le niveau des livres qui paraissent chaque année...
04:18 - Il y a toujours de très bons livres.
04:20 Par exemple, dans la rentrée littéraire, il y a un livre extraordinaire
04:22 d'un jeune de 27 ans qui s'appelle Victor Dumiau, qui a écrit un livre qui s'appelle "Acide".
04:26 Donc, il y a toujours des jeunes qui prennent la relève,
04:27 mais il y a aussi des livres d'une platitude totale
04:30 où on sent bien que la personne attend plus quelque chose de la rentrée littéraire
04:34 que finalement de l'écriture comme un moyen de se sauver soi-même.
04:38 - Alors, est-ce que ça implique une discipline particulière,
04:41 ce genre d'exercice littéraire ?
04:42 C'est plus astreignant qu'écrire un roman ?
04:44 - D'abord, écrire des romans m'intéresse de moins en moins.
04:47 Sans doute avec l'âge, j'aime de moins en moins en lire aussi.
04:50 Je ne lis que des classiques, mais le journal intime,
04:54 c'est jouissif à écrire parce qu'on peut tout mettre à l'intérieur,
04:59 mais c'est extrêmement exigeant.
05:02 C'est-à-dire que si, par exemple, pendant cinq jours, vous ne le tenez pas,
05:07 pour rattraper les cinq jours en question, c'est terrible.
05:08 Il faut vous souvenir des choses et surtout, le lendemain,
05:11 l'émotion n'est plus la même que la veille.
05:13 Vous avez peur un jour, mais la peur que vous avez eue trois jours plus tard,
05:17 elle s'est dissoute, etc.
05:19 Vous avez envie d'être méchant avec quelqu'un et deux jours plus tard,
05:21 vous vous dites "pourquoi ? Ce n'est pas si grave ce qu'il m'a fait" ou inversement.
05:24 - En tout cas, c'est un bonheur de lecture.
05:26 - Merci Anne.
05:27 - Je termine par une petite citation, vite.
05:29 Je pense aussi parfois au lecteur éventuel qui voudra se rincer l'œil
05:32 et qui forcément sera bien déçu.
05:34 Pas assez de sueur, de sexe, de sang.
05:36 Je ne danse pas suffisamment la samba.
05:38 Enfin, vous avez le sens du rythme en tout cas.
05:40 Merci Anne Moix.
05:41 - Merci de m'avoir reçu.
05:42 A bientôt.
05:44 - Paru chez Bouquin Grasset.
05:45 - Merci.
05:46 - Merci.
05:48 [Musique]
05:51 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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